EXAMEN EN COMMISSION

La commission a procédé à l'examen des conclusions du rapport d'information de M. Jean-François Le Grand au nom du groupe de travail sur " Natura 2000 " portant sur la mise en oeuvre de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages .

M. Jean-François Le Grand, rapporteur , a tout d'abord rappelé la composition du groupe de travail dont la création a été décidée par la commission en juin 1996, compte tenu des interrogations et des inquiétudes nombreuses que semblait susciter la mise en oeuvre de la directive 92/43/CEE " Habitats naturels ".

Il a ensuite brièvement exposé le contenu de la directive en rappelant qu'elle avait pour objectif la protection de la biodiversité au niveau européen en protégeant les habitats et les espèces faunistiques et floristiques significatifs au niveau européen à travers la constitution d'un réseau coordonnant des sites proposés par les Etats membres. Il a fait valoir que cette protection de la biodiversité tenait compte des exigences économiques, sociales et culturelles en prévoyant le maintien des activités existantes (agricoles, sylvicoles, cynégétiques ou halieutiques).

Le rapporteur a souligné l'importance du travail d'inventaire réalisé par les scientifiques tout en indiquant que, faute de moyens et de temps suffisants, les résultats étaient parfois critiquables, par excès ou par omission.

De plus, il a observé que ces investigations avaient été menées sur le modèle des inventaires ZNIEFF qui, quoique n'étant en principe pas opposables aux tiers, étaient source de multiples contentieux devant des tribunaux de plus en plus sourcilleux en matière de protection environnementale.

Il a également dénoncé l'absence quasi totale de concertation, notamment la non consultation des conseils municipaux, et la surenchère de certains écologistes qui auraient voulu, à l'occasion de ces inventaires, devenir les intervenants majeurs sur les 12,8 % du territoire, proposés pour le Réseau Natura 2000.

Il a estimé que ces réactions outrancières de défense ou de parti-pris sur des positions très " intégristes " étaient le résultat de l'absence de concertation et du manque d'indications sur les contraintes de gestion éventuelles à prévoir dans les futurs sites du réseau.

M. Jean-François Le Grand, rapporteur , a alors rappelé la décision du Premier ministre de geler la procédure de désignation, en juillet 1996, pour obtenir plus d'assurances de la part de la Commission européenne et, sur une intervention de M. Michel Souplet , il a précisé les nouveaux objectifs fixés depuis février 1997, à savoir l'élaboration d'une liste de sites représentant 2,5 à 3 % du territoire national.

Répondant à M. Jean François-Poncet, président , le rapporteur a précisé qu'au-delà d'un seuil équivalent à 5 % de leur territoire, les Etats membres pouvaient demander une certaine flexibilité dans l'application de la procédure.

M. Jean Peyrafitte s'est alors inquiété de la situation des départements du sud de la France qui, de par la richesse de leur biodiversité allaient être amenés à proposer des superficies beaucoup plus importantes, sans avoir suffisamment connaissance des contraintes de gestion éventuellement imposées dans les sites du Réseau Natura 2000.

M. Jean-François Le Grand a ensuite indiqué que le classement des sites en " feu vert ", " feu orange " et " feu rouge ", préconisé par une circulaire du ministère de l'environnement devait permettre d'envoyer relativement rapidement une liste de sites très consensuels et bénéficiant déjà d'une protection forte, correspondant à environ 1,8 % du territoire.

Le rapporteur a ensuite exposé le contenu du nouveau dispositif arrêté par le Gouvernement, sur la base d'un mémorandum interprétatif de la directive rédigée par les autorités françaises assorti d'un échanges de lettres entre le ministre de l'environnement et le commissaire chargé de l'environnement.

Il a relevé les éléments d'incertitude qui demeuraient malgré les apports très positifs du mémorandum, notamment l'absence d'engagements sur les mesures financières tant au niveau communautaire que national.

M. Michel Souplet est alors intervenu pour illustrer la nécessité de définir très rapidement le contenu de compensation financière des contraintes de gestion imposées dans les sites du réseau " Natura 2000 ".

Enfin, le rapporteur a soumis à la commission les propositions du groupe de travail qui s'articulent selon trois axes :

- premièrement, il s'agit de renforcer la concertation à tous les niveaux de décision en prévoyant au niveau local la consultation des conseils municipaux, et au niveau régional la modification et l'harmonisation de la composition des conseils scientifiques régionaux de protection de la nature (CSRPN).

Au niveau national, le rapporteur a recommandé d'élargir la composition du conseil national de protection de la nature aux ayants droit de l'espace rural, et de placer auprès du Premier ministre ou du ministre de l'environnement une cellule " Directive Habitats " pour intégrer au comité national de suivi existant des représentants des ministères concernés ainsi que des parlementaires et des élus locaux.

En ce qui concerne la Commission européenne, M. Jean-François Le Grand a souligné l'intérêt de créer auprès de la DG XI en charge de l'environnement des comités consultatifs du type de ceux fonctionnant auprès de la DG VI et spécialisés par productions agricoles ;

- deuxièmement, les propositions du groupe de travail visent à transposer en droit français les principes contenus dans le mémorandum interprétatif.

Ce cadre réglementaire reprendrait, en leur conférant une valeur normative, les éléments importants du mémorandum, à savoir : le principe d'exemplarité dans la désignation des sites, la sélection des sites assortis de leurs cahiers des charges, la définition de la nature juridique des Zones spéciales de conservation et des documents d'objectifs afin d'assurer une cohérence en droit interne et, enfin, la mise en oeuvre des règles de gestion en privilégiant la voie contractuelle ;

- troisièmement, le groupe de travail souhaite que le Gouvernement français obtienne des délais supplémentaires pour la phase de désignation des sites.

Le rapporteur a indiqué qu'il fallait, dans un premier temps, envoyer dans les délais requis, une liste des sites consensuels bénéficiant d'une protection nationale forte et faisant déjà l'objet de contraintes de gestion acceptées par tous, puis obtenir des délais pour les autres sites et mener en parallèle la délimitation des périmètres et la définition des objectifs, des règles de gestion et des éventuelles compensations financières.

Il a souligné, à ce sujet, que presque tous les Etats membres avaient pris du retard dans la phase de désignation des sites.

Ouvrant la discussion générale, M. Jean François-Poncet, président , a remercié le rapporteur pour la ligne de conduite du rapport qui devrait permettre de ramener la " sérénité " dans des débats parfois houleux et favoriser une lecture française de la directive 92/43/CEE Habitats naturels sur des base raisonnables.

Répondant à M. Michel Bécot qui citait les conservatoires des espaces naturels et leur mode de gestion contractuelle assorti de compensations financières et s'interrogeait sur une confusion éventuelle avec les compétences des CSPRN, le rapporteur a souligné que ces derniers adopteraient des recommandations et pourraient arbitrer des différends mais qu'ils n'auraient pas à assumer la gestion directe d'un territoire. Il a recommandé, pour favoriser la concertation, que les structures gérant des sites bénéficiant d'une protection nationale et intégrés dans le réseau Natura 2000, participent aux CSRPN.

M. Louis Moinard s'est félicité de ce que les propositions du groupe de travail favorisent effectivement une réelle concertation et il a souligné les conséquences désastreuses de l'absence de données pertinentes sur le contenu des documents d'objectifs. Il s'est également inquiété du sens très général qui pouvait être donné au mot " perturbation " et a déploré que les rapports des scientifiques transmis pour concertation soient parfois très difficilement compréhensibles.

M. Paul Raoult , tout en soulignant l'exactitude de l'analyse du rapporteur sur les causes de l'échec de la première mise en oeuvre de la directive, a rappelé néanmoins l'intérêt du dispositif qu'il s'agissait d'instituer.

Reconnaissant les aspects novateurs de la directive 92/43/CEE Habitats naturels, M. Jean François-Poncet, président , n'en a pas moins rappelé que les acteurs socio-économiques du monde rural acceptaient de plus en plus difficilement l'accumulation de normes communautaires, qu'ils étaient dans l'obligation de mettre en oeuvre.

La commission a ensuite adopté les conclusions du rapport.

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