B. MODERNISER LA NOTION DE JUSTICE DE PROXIMITÉ

Deux extraits des réponses des juridictions permettent de comprendre le débat en cours parmi les interlocuteurs de la mission.

Le président et le procureur d'un TGI à une chambre disent que " le législateur est désormais devant un choix. Soit faire disparaître les petits tribunaux, au prétexte que l'insuffisance de leurs moyens est irrémédiable. Ce serait une erreur, car ils remplissent par excellence la fonction de justice de proximité. Soit les redynamiser en les dotant des effectifs et des instruments de travail modernes. C'est à quoi nous concluons, persuadés que nous sommes que la qualité de la justice qui y est rendue n'a rien à envier à celle des grandes juridictions ".

Tandis que, dans le ressort de la même cour d'appel, le président et le procureur d'un TGI à deux chambres écrivent : " la vraie proximité, c'est la disponibilité du juge, l'écoute du justiciable, la qualité et la rapidité de la décision rendue (...) Bien souvent, cette vraie proximité impliquerait un éloignement géographique ".

1. L'assouplissement des implantations géographiques

a) Les chambres détachées et les greffes détachés

Ils ne font pas l'objet d'une priorité énoncée par le Garde des Sceaux bien que l'article 4 de la loi du 8 février 1995 ait inséré dans le code de l'organisation judiciaire une section permettant la création de chambres détachées dans les TGI dont le décret n° 96-157 du 27 février 1996 a fixé les modalités. Leur rôle est limité au jugement des affaires, les fonctions spécialisées (juge d'instruction, Parquet, application des peines) restant au TGI.

Elles représentent une possibilité fréquemment évoquée pour maintenir une proximité géographique tout en permettant de regrouper et de gérer moyens et hommes sous une même autorité.

De même les greffes détachés permettent de maintenir une présence judiciaire et, sous réserve de leur donner ce rôle, d'orienter le justiciable et de lui permettre de suivre son affaire.

b) Les maisons de la justice et du droit

Le rapport rendu en février 1995 par notre collègue député, Gérard Vignoble, parlementaire chargé par M. Pierre Méhaignerie, Garde des Sceaux, d'une mission sur les maisons de la justice et du droit, rappelle que ces maisons sont nées de l'initiative d'un procureur de la République en 1990.

Dépourvues de personnalité morale, elles s'inscrivent dans le cadre de la politique judiciaire de la ville et résultent d'initiatives locales cofinancées par le ministère de la justice, la délégation interministérielle à la ville et les municipalités.

Elles impliquent un partenariat étroit entre le Parquet, les juges dans certains cas (JE, JI, JAP), des éducateurs de la PJJ, la collectivité locale et les associations de médiation, d'aide aux victimes ou de contrôle judiciaire qui peuvent être amenés à y intervenir, selon les formules retenues.

Les visites effectuées par la mission dans celles de Bron et Tourcoing ont montré que l'on pouvait y pratiquer avec succès, hors du Palais de justice, mais sous le contrôle des magistrats, un traitement très personnalisé de la délinquance " de voisinage ".

Le rapport Vignoble estime que 80 % des affaires traitées par les maisons de la justice et du droit auraient été, à défaut, classées sans suite.

Il donne l'exemple d'un budget d'un million de francs par an pour 1.000 affaires traitées dans l'année dans les maisons les plus actives.

Leur nombre actuellement réduit s'explique par l'absence de statut jusqu'à l'élaboration de la circulaire de la direction des affaires criminelles et des grâces du 19 mars 1996.

Celle-ci pose un cadre contractuel avec intervention forte de la Chancellerie en amont (concertation préalable et décision de création) et précise que le secrétariat et l'accueil doivent être assurés par un fonctionnaire de justice. Les collectivités locales mettent à disposition un local adapté, assurent l'investissement initial et le fonctionnement quotidien.

Il en existerait actuellement 32, le Garde des Sceaux se propose, sur la base de ce dispositif, de doubler leur nombre d'ici à 1998 ; 10 nouvelles devraient être créées dès 1996 et 10 autres chacune des deux années suivantes.

La plupart des interlocuteurs de la mission qui les pratiquent souhaitent leur développement, en revanche le président et le procureur de la République d'un TGI parlent du fonctionnement problématique de celle située dans leur ressort tandis que ceux d'un autre TGI estiment que : " les circuits de dérivation (maisons de justice, médiation) ont un coût non négligeable et ne sont pas de nature à faire face au besoin de justice et à la lisibilité ".

M. Jean-Claude Bouvier, secrétaire général du Syndicat de la magistrature, a souhaité que soit affirmé dans ces maisons le contrôle par le judiciaire et le respect des droits de la défense.

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