II. ASSAINIR LES BASES DES REGIMES PAR REPARTITION
A. UN PROBLEME IMMINENT
Le régime du CGOS -dans une moindre mesure celui du
CREF, qui fonctionne en partie par capitalisation- présente les
inconvénients de la répartition, entièrement soumise aux
aléas démographiques : cet aléa est renforcé par le
fait que les adhésions restent facultatives.
Ainsi, le dernier rapport (juillet 1996) de la société
d'actuaires évaluant la pérennité du régime CGOS
relève que l'hypothèse d'un nombre d'affiliations nouvelles de
4.500 par an permet de maintenir le nombre de cotisants autour de 180.000
pendant 10 ans, mais qu'une décroissance sensible pourrait ensuite
être constatée : en 2020 le nombre de cotisants serait de
121.000. Le taux de couverture viager passerait alors de 48 % en 1994
à 25 % en 2020 : il passerait en dessous de 35 % en 2016
et le régime devrait alors être résilié.
B. DES SOLUTIONS DELICATES
L'Etat ne peut ignorer l'imminence du problème du CGOS.
Face à cette situation, le "renflouement" du régime par une
subvention, qui devrait être de l'ordre de 10 milliards de francs,
paraît peu vraisemblable dans le contexte budgétaire actuel.
Dès lors, deux solutions restent possibles :
- amener à extinction le régime actuel et le remplacer par
un régime par capitalisation, ce qui poserait un problème
délicat de garantie des droits des "anciens" affiliés, et
supposerait aussi, à ce titre, une intervention budgétaire.
- rendre obligatoire l'affiliation au CGOS pour les agents hospitaliers.
De manière générale, il ne paraît pas responsable,
pour l'Etat de continuer à prodiguer un encouragement fiscal à la
souscription de régimes de répartition facultatifs.
III. OUVRIR A LA CONCURRENCE L'EPARGNE RETRAITE COMPLEMENTAIRE DES FONCTIONNAIRES
A. L'EXEMPLE DE LA PREFON
La convention liant la Préfon et la Caisse nationale de
prévoyance, qui date de 1967, reflète les contours du paysage des
assurances des années 60, dominé par les trois grandes compagnies
publiques.
Ainsi les risques sont répartis entre la CNP et des grands assureurs,
sur des critères qui ne peuvent plus s'expliquer rationnellement.
63 % des risques sont cédés par la CNP aux 3 assureurs,
dont 32 % pour l'UAP, 21 % pour le GAN, 10 % pour les AGF.
Autant la Caisse nationale de prévoyance est attachée à la
gestion du régime Préfon, qu'elle considère comme une
sorte de "vitrine" pour les régimes de prévoyance (la
Préfon représente 6 milliards de francs sur un total de
18 milliards de francs d'actifs gérés par la CNP), autant
les AGF, par exemple, paraissent moins concernées par ce régime.
B. UNE OUVERTURE SOUHAITABLE
1. Un appel à la concurrence
De manière générale, une ouverture plus
large des régimes d'épargne retraite complémentaire des
fonctionnaires à la concurrence est aujourd'hui parfaitement
envisageable : elle permettrait de proposer aux adhérents
différentes politiques de gestion des actifs, et d'arrêter leur
choix par exemple entre rendement annuel ou à long terme.
Aucune disposition légale ou réglementaire n'interdit une telle
ouverture, qui pourrait s'accompagner d'une réflexion sur les
règles prudentielles actuellement applicables (notamment celles du
régime "L 441-1" du code des assurances) aujourd'hui dissuasives pour
les placements en actions.
Un début de concurrence : Le projet de l'APERF
L'Association nationale des adhérents des
régimes de retraite complémentaire de la fonction publique
("APERF") -constituée d'associations de hauts fonctionnaires- se
propose
aujourd'hui de créer un nouveau plan d'épargne des fonctionnaires
dont les caractéristiques seraient les suivantes :
Régime fiscal de l'article 83-1°bis du C.G.I. :
déductibilité des cotisations (mais imposition des prestations).
Régime fonctionnant en capitalisation individuelle pure.
Régime en francs (et non en points).
Capitalisation individuelle des droits de chaque adhérent ;
immunisation contre les effets des évolutions démographiques
futures.
Régime supervisé par les adhérents eux-mêmes
(l'affilié est membre de l'APERF).
Cantonnement des actifs, appels d'offre réguliers et
contrôle des performances des gestionnaires.
Gestion axée, pour la phase d'épargne, sur la performance
à long terme (d'où une part importante des fonds investie en
actions).
Possibilité de transférer les droits acquis vers un autre
plan (principe figurant dans la loi de 1994 pour les travailleurs
indépendants).
Restitution de l'épargne en cas de décès avant
l'âge de la retraite.
Information complète et transparente des adhérents (taux de
couverture des engagements, performance des investissements de chaque
gestionnaire, etc.).
Audit externe des comptes, communiqué aux adhérents.
L'Aperf a sollicité au début de l'année 1997 un
agrément fiscal dans le cadre de l'article 83-1° bis du code
général des impôts afin d'obtenir la déduction des
cotisations à son plan d'épargne retraite.
2. Une meilleure information
Le besoin de transparence et de participation aux
décisions, actuellement ressenti dans tous les milieux, l'est
également par les fonctionnaires : une meilleure association à la
gestion de leurs régimes d'épargne retraite complémentaire
irait dans le sens de la réforme de l'Etat entamée depuis 1995,
visant à accroître la motivation des agents publics et la
décentralisation de leur gestion.
Ainsi, le cadre actuel de la Préfon, organisant le dialogue sur la
gestion entre une association constituée de syndicats de fonctionnaires
et un consortium d'assurances, ne paraît pas satisfaire à cette
exigence de transparence : on voit s'opposer depuis plusieurs années une
critique soutenue de la gestion (opacité des comptes, rendement
insuffisant...) par une association d'adhérents (l'"Arcaf" citée
plus haut), et une appréciation favorable de l'autorité de
contrôle sur la prudence de cette même gestion.
La mise en place de comités de surveillance, telle que la prévoit
la loi du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite
pour les salariés du secteur privé, permettrait d'associer
utilement les adhérents aux orientations de gestion des régimes
d'épargne retraite complémentaire des fonctionnaires.
Il convient de rebattre les cartes en prévoyant un appel à la
concurrence, qui permettrait aux adhérents à la Préfon de
se voir proposer différentes possibilités de gestion des actifs
-même si les règles du code des assurances (art. L. 441-1 et
suivants) restent contraignantes de ce point de vue, en imposant une
rémunération annuelle minimale de 3,5 % des provisions
techniques et même si les adhérents de la Préfon souhaitent
un rendement annuel élevé (en se référant aux
performances de l'AFER). Ces exigences expliquent l'importance des obligations
dans les actifs générés par les assureurs.
Par ailleurs, un tel appel à la concurrence devrait s'accompagner d'une
meilleure association des adhérents aux prises de
décisions : le cadre actuel de dialogue entre une association
constituée de syndicats de fonctionnaires et un consortium d'assureurs
ne semble pas satisfaire à ces exigences de démocratie.