B. DES SERVICES FINANCIERS ACCUEILLANT LES PLUS DÉMUNIS

La variabilité et la faiblesse des revenus des personnes en difficulté amènent habituellement les professionnels de la finance à les considérer comme présentant peu d'intérêt. C'est pourquoi ces personnes rencontrent aujourd'hui de plus en plus d'obstacles pour conserver des relations durables avec les établissements bancaires. Dans ce contexte, La Poste constitue pour eux une sorte de havre financier. La Confédération syndicale des familles estimait même en 1996 " qu'aujourd'hui les banques excluent des dizaines de milliers d'usagers à cause de la faiblesse de leurs revenus et que sans les services financiers de La Poste ces usagers seraient encore un peu plus marginalisés 68( * ) . "

Que les personnes les plus modestes et les populations précarisées soient d'importants clients de La Poste, l'origine des fonds versés sur les livrets A le prouve : une forte part des sommes versées sur ces livrets est issue de transferts sociaux.

Les livrets A reçoivent, par exemple, 50 % des remboursements de sécurité sociale , 36 % des allocations familiales, 29 % des salaires, 20 % des pensions de retraite et 12 % des indemnités de chômage.

L'allongement des files d'attente dans les bureaux de poste, spécialement le jour de versement du RMI, des allocations familiales ou des indemnités de chômage est également un révélateur de cette vocation sociale des services financiers postaux .

Conformément à cette tradition d'accueil, apanage toujours moderne du grand service public, La Poste a d'ores et déjà accepté d'ouvrir des livrets A aux personnes sans domicile fixe dès lors qu'elles présenteraient l'adresse d'une association. Elle envisage d'ailleurs d'étendre ce service aux comptes chèques postaux.

Une conséquence majeure de la large ouverture de ses guichets financiers aux personnes défavorisées est une sur-utilisation du Livret A : les 11,6 millions de livrets qui ont moins de 1.000 francs d'encours représentent 55,4 % du total des clients et totalisent 39 % des opérations, retraits et versements confondus. Sur chacun de ces livrets " sur-actifs " on effectue en moyenne, 42 opérations par an contre une moyenne annuelle de 8 opérations par livret, pour l'ensemble des livrets A.

Il est vrai que les caractéristiques de ce produit sont de nature à attirer les plus pauvres des Français. Les livrets A ne sont pas soumis à un solde plancher ni à un montant minimum de retrait ; aucune commission n'y grève les opérations, quel que soit leur montant. En outre, ouverts aux interdits bancaires, les livrets A sont gérés sur un petit carnet ; les clients peuvent ainsi connaître, au jour le jour, le solde de leur compte 69( * ) .

Tous ces facteurs expliquent que les livrets A soient souvent utilisés comme de véritables " porte-monnaie ", pour des montants minimes.

Soulignons au passage que ceux présentant un encours de moins de 1.000 francs sont présents dans les zones rurales -où, à eux seuls, ils totalisent la moitié des encours-, comme dans les zones urbaines sensibles où ils représentent les deux-tiers du total des encours. Le livret A est donc, par excellence, l'instrument financier des personnes en difficulté .

Dans certains cas, les postiers sont même amenés à jouer un rôle social qui dépasse leur seule activité financière. Votre rapporteur a ainsi recueilli le témoignage d'un responsable de bureau de Poste qui faisait parfois, sous sa propre responsabilité, des avances de 50 ou 100 francs à la veille d'un week-end ou d'un jour férié à des personnes attendant le versement du RMI ou des prestations sociales.

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