4. De nouvelles stratégies
4.1 La recherche permanente de compétitivité
A. La rationalisation des lignes
L'objectif d'amélioration de la rentabilité passe par une rationalisation des lignes et donc par la limitation des dessertes, comme le montre l'activité porte-conteneurs sur l'axe Est/Ouest. Les modalités de ce processus sont les suivantes :
- l'utilisation de navires de grande taille, qui procure une économie d'échelle, mais limite les possibilités d'accès portuaires. Entre 1985 et 1995, la taille moyenne des porte-conteneurs des vingt premiers armements de ligne régulière est passée de 1 140 EVP à 1 810 EVP. Les navires les plus grands atteignent des capacités de 8 000 EVP ;
- une réorganisation des dessertes portuaires. Les escales sont limitées à celles pour lesquelles le volume à transporter est le plus important. Les flux Est/Ouest sont alors consolidés par le transport maritime de courte distance, ainsi que par les lignes Nord/Sud,
- l'interchange ou le transbordement consiste à faire passer d'un navire transocéanique à un autre des conteneurs, en fonction des ports de destination. Cette technique permet à chaque navire de charger ainsi des conteneurs destinés à des ports qu'il ne dessert pas directement. Le partenariat entre grands armements autorise ce système tout en maintenant des fréquences élevées et des volumes importants.
B. La recherche d'alliances
Les armements de ligne multiplient les alliances (voir annexe 3). Ces accords portent sur la mise en commun de navires. Cependant, les armements conservent leur identité commerciale et leur indépendance quant aux moyens de financer leur investissement en équipement naval. Aujourd'hui, sur les 20 premiers opérateurs, 15 sont présents sur les trois marchés Est-Ouest, contre 12 en 1995, et 3 seulement en 1990. Les compagnies françaises sont absentes des principales alliances sur les trafics Est/Ouest.
La stratégie d'alliance vise trois objectifs :
- la mise en oeuvre d'économie d'envergure, à travers l'élargissement du réseau maritime sur les trois grandes routes Est-Ouest ;
- l'amélioration de la prestation avec des fréquences plus élevées sur les lignes ;
- la réduction des coûts. Elle peut être recherchée à travers le partage des investissements en navires (moins de navires à acquérir pour s'implanter sur un nouveau service), en équipements logistiques, en équipements de système d'information, ou sur la limitation du nombre de plates-formes d'éclatement que les grandes compagnies sont amenées à gérer ou, enfin, sur la négociation des contrats de manutention.
Les stratégies de rapprochement ne sont pas le seul fait des armements de lignes régulières. On les retrouve par exemple, pour certains acteurs du transport de pétrole. Le transport de brut et de produits pétroliers est exercé de plus en plus par des armateurs indépendants (71 % de la flotte mondiale) ou des compagnies des États producteurs (17 % de la flotte mondiale, principalement pour les petits pétroliers de brut et les VLCC 27 ( * ) ) en raison de la politique de sous-traitance des principales compagnies pétrolières (les « majors » : B.P., Shell, Texaco, Exxon, Chevron, Mobil contrôlent 9 % de la flotte mondiale, contre 21 % en 1971). Ces grandes compagnies se désengagent progressivement du transport maritime, pour préserver leur image de marque depuis le naufrage de l'Exxon Valdès. Les compagnies pétrolières indépendantes (Arco, Conoco Ashland pour les États-Unis, qui représentent 52 % des compagnies pétrolières indépendantes, et Elf, Total, Lasmo, Agip pour l'Europe) ne contrôlent que 2,8 % de la flotte mondiale. Les « majors » et les compagnies indépendantes recherchent des alliances avec des armateurs indépendants (exemple : Amoco et Bona), afin de couvrir une partie de leur risque de rupture d'approvisionnement et d'assurer un contrôle sur la fiabilité et la qualité de leur transporteur.
* 27 « Vervy Large Crude Carrier » type de pétrolier (cf. Glossaire).