III. LA RÉGULATION FACE AUX NOUVELLES TECHNOLOGIES
En
France, l'audiovisuel s'est développé dans le cadre d'un monopole
d'État.
Ce mode d'organisation et le paysage audiovisuel qui lui correspondait ont
brutalement évolué au début des années 80 sous la
pression de facteurs politique, économique et technologique, le premier
ayant été déterminant.
Rappelons-nous, en 1976, la première radio MF indépendante
émettait. Elle était qualifiée de pirate par les uns et de
libre par les autres. Une guérilla politique et juridique
commençait, qui, cinq ans plus tard, allait aboutir à
l'éclatement du monopole.
C'est de cet éclatement que date l'apparition, si ce n'est du mot, au
moins de l'idée de régulation
10(
*
)
.
La France, pays de tradition de service public et de
réglementation
, a mis des années pour adapter le mode selon
lequel allait intervenir la puissance publique. En réalité, elle
a importé un mode de gestion originaire des pays de culture politique
et économique anglo-saxonne.
En fait, la régulation est nécessaire à la fois pour des
raisons politiques et technologiques, mais elle reste difficile à mettre
en oeuvre dans un pays de tradition colbertiste qui veut, coûte que
coûte, entrer dans l'univers de la communication désormais
mondiale.
A. UN MODE D'INTERVENTION NÉCESSAIRE
Le
dictionnaire Robert donne au mot régulation les sens suivants :
" 1/ (vieilli) action de régler, de mettre au point ; 2
/ le
fait de maintenir en équilibre, d'assurer le fonctionnement correct
.
Il donne trois exemples : régulation et trafic autoroutier,
régulation des naissances et régulation thermique ".
Quelques lignes plus loin, au verbe " réguler ", le
dictionnaire apporte une précision intéressante dans un
encadré : "
ce verbe
apporte une nuance spéciale
(idée d'équilibre)
par rapport à régler et
régulariser
". On aurait pu ajouter :
par rapport à
réglementer
.
Car, et c'est ce qui importe
, régulation s'oppose essentiellement
à réglementation
. Dans l'espace audiovisuel de l'ère
du monopole, l'État réglementait et gérait directement.
Bref, il s'efforçait de contrôler un mode de communication
jugé, à l'époque, partie intégrante de son pouvoir
et de ses prérogatives : la télévision, c'était
" la voix de la France ", ainsi qu'aimait à le rappeler le
Président Georges Pompidou.
L'essentiel était et demeure de maintenir l'équilibre du
système audiovisuel, de façon à sauvegarder la
liberté d'expression et le pluralisme politique, mais aussi culturel.
Comme le souligne M. Hervé Bourges, Président du Conseil
supérieur de l'audiovisuel
: " Sur des marchés en
évolution, les règles à appliquer ne peuvent pas
être entièrement définies par des lois et des
décrets. Il faut qu'elles soient adaptées au plus juste, en
tenant compte de la réalité des marchés, des
possibilités des différents opérateurs et de
l'intérêt des utilisateurs, auditeurs et
téléspectateurs. Cette adaptation au cas par cas des principes
fixés par la loi, c'est la régulation ".
Pour bien comprendre le sens de la notion de régulation, il convient de
présenter les facteurs qui ont rendu inévitable
l'évolution du mode d'intervention de la puissance publique dans le
domaine audiovisuel, et de rappeler les raisons pour lesquelles cette
intervention reste indispensable.