TROISIÈME PARTIE : LE SECTEUR PUBLIC ET LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE

La télévision est à l'image de la société. Elle est cette " lucarne ", " étrange " a-t-on pu dire, par laquelle nous percevons, au-delà de notre expérience directe, la réalité du monde. La télévision est à la fois un miroir et un filtre, car le reflet qu'elle nous renvoie est à l'évidence déformé et en tout cas sélectif, du fait de la logique propre au fonctionnement de ce média.

Plus encore, comme le montre le cas de la violence, il existe une interaction entre médias et réalité, qui peut faire douter de la neutralité de la vision du monde que propose la télévision.

Le secteur public a un rôle à jouer pour permettre de maîtriser ces évolutions. Il constitue par sa vitalité l'une des conditions essentielles pour que la télévision continue à être un facteur de notre identité nationale.

I. VIOLENCE : LA DIALECTIQUE DU RÉEL ET DU VIRTUEL

L'actualité, les faits divers, qu'ils soient bruts ou élevés au statut de " faits de société ", posent toujours avec acuité le problème de la violence dans une société hypermédiatisée.

Le meurtre, au printemps 1998, dans la banlieue de Rouen, d'une épicière par deux adolescents a donné l'occasion au ministre de l'Intérieur de mettre en cause la télévision, pour dénoncer au-delà de la crise de l'éducation et de la famille ces petits " sauvageons qui vivent entre le réel et le virtuel ".

La formule, largement reprise par la presse, a fait mouche. Selon le ministre, beaucoup de jeunes " passent plus de temps à regarder la télévision que devant leur maître d'école " et vivent pour ainsi dire " dans un sentiment de virtualité : ils ne savent pas que, quand on tire avec un pistolet, à la télévision, cela ne fait pas mal. Dans la réalité, vous pouvez tuer " . D'où la tendance du ministre à mettre en cause la responsabilité " des médias de masse " et en particulier de la télévision qui programme des films " d'une violence extrême ".

La responsabilité des médias est, au-delà de telle ou telle affaire, à l'évidence engagée, même si celle de la société, qu'on disait autrefois de consommation avec son cortège d'abondance exhibée et donc de frustrations pour ceux que l'on nomme aujourd'hui les exclus, est difficilement contestable, dès lors que l'on examine, sur le terrain, la façon dont la réalité rejoint la fiction.

Le débat reste, certes, ouvert entre les tenants d'une violence des images qui défoule, et ceux qui pensent, au contraire, qu'elle tend à répandre un mode de comportement de plus en plus dangereux pour la société.

Aujourd'hui, il est clair que la violence réelle, que ce soit celle des pays lointains en guerre ou celle plus proche, omniprésente de la rue, a tendance à devenir virtuelle et que la violence virtuelle qui envahit nos écrans, paraît de plus en plus à l'origine d'actes de violence.

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