c) L'obsession du scoop
Le
principe de sélection, c'est la recherche du sensationnel, du
spectaculaire. La télévision appelle à la dramatisation,
au double sens : elle met en scène, en images, un
événement et elle en exagère l'importance, la
gravité et le caractère dramatique, tragique.
Ils s'intéressent à l'extraordinaire, à ce qui rompt avec
l'ordinaire, à ce qui n'est pas quotidien - les quotidiens doivent
offrir quotidiennement de l'extra-quotidien - ce n'est pas facile...
D'où la place qu'ils accordent à l'extraordinaire ordinaire,
c'est-à-dire prévu par les attentes ordinaires, incendies,
inondations, assassinats, faits divers. Mais, l'extra-ordinaire, c'est aussi et
surtout ce qui n'est pas ordinaire par rapport aux autres journaux (...) C'est
une contrainte terrible : celle qu'impose la poursuite du scoop. Pour
être le premier à voir et à faire voir quelque chose, on
est prêt à peu près à n'importe quoi, et comme on se
copie mutuellement en vue de devancer les autres, de faire avant les autres, ou
de faire autrement que les autres, on finit par faire tous la même chose,
la recherche de l'exclusivité, qui, ailleurs, dans d'autres champs,
produit l'originalité, la singularité, aboutit ici à
l'uniformisation et à la banalisation."
Cette vision, sans doute quelque peu excessive - mais pour bien décrire
une logique il faut parfois forcer le trait - , a le mérite de montrer
que l'introduction de la concurrence, qui comporte beaucoup de
conséquences bénéfiques, a aussi des effets pervers ;
en France, paradoxalement, la libération des initiatives
consécutive à la privatisation de TF1, a entraîné
une forme de mimétisme, le règne implicite d'une sorte de
pensée unique de la programmation, tant dans le style que dans le
contenu des émissions.
Nul doute que la logique commerciale, désormais dominante même
dans l'essentiel de la programmation du secteur public, accentue cette tendance
à l'uniformité.