CONTRIBUTION DU GROUPE SOCIALISTE
Les
sénateurs socialistes ont pris connaissance avec le plus grand
intérêt, dans un délai trop bref, des conclusions et des 44
propositions présentées par les auteurs du présent rapport.
Il est pour le moins étonnant de constater que le rapport effectue de
nombreux constats déjà connus de tous et dont le gouvernement
actuel a déjà commencé à tirer les conclusions en
élaborant de nombreuses réformes nécessaires et
ambitieuses.
Une lecture rapide du rapport permet de constater que celui-ci prend la forme
d'une compilation des auditions effectuées et des entretiens
réalisés lors des missions par la commission. Force est de
constater que les conclusions tirées de ces rencontres rejoignent
fréquemment les préoccupations des ministres en charge de
l'enseignement et que les données fournies par ceux-ci ont nourri le
rapport.
La politique menée par le gouvernement actuel , depuis deux ans, a pris
en compte l'ensemble des paramètres relevés par les rapporteurs.
Ainsi de nombreuses réformes ont vu le jour ou sont en cours
d'élaboration :
• La déconcentration du mouvement des enseignants du second
degré et l'amélioration de la gestion déjà
déconcentrée du mouvement des enseignants du premier
degré : cette réforme comportant une phase
inter-académique puis une phase intra-académique permettra une
accélération du traitement des demandes et une meilleure
adéquation de la gestion des emplois au sein de chaque académie.
Cette réforme sera opérationnelle dès la rentrée
1999 et pourra, au vu des éventuelles difficultés
constatées, bénéficier d'améliorations
ultérieures.
• Le contrôle financier déconcentré de
l'éducation nationale, mis en place dès 1997 et qui, fin 1999,
concernera les emplois ; ce système permettra aux
trésoriers-payeurs généraux de suivre, localement,
l'évolution des effectifs.
• La réforme du taux de rémunération des heures
supplémentaires des enseignants qui reposait sur des bases aujourd'hui
caduques a permis de dégager 740 millions de francs.
• La solution apportée au problème des maîtres
auxiliaires avec la titularisation, chaque année, depuis trois exercices
budgétaires, de 5.000 à 6.000 d'entre eux, ce qui permettra de
résorber d'ici peu le flux des 21.000 maîtres auxiliaires
laissés pour compte par les gouvernements précédents. Leur
affectation est effectuée selon les besoins pédagogiques.
• Les 65.000 aides éducateurs recrutés dans le cadre
du plan emploi-jeunes décidé par le gouvernement Jospin :
ces embauches ont été financées, aux deux tiers,
grâce aux crédits dégagés par la réforme du
taux de rémunération des heures supplémentaires. Ces
créations d'emplois répondent au souci unanimement exprimé
du renforcement de la présence d'adultes dans les établissements
scolaires et s'inscrivent dans le souci de la commission d'enquête
sénatoriale de réformer l'éducation à moyens
constants.
• Le renforcement des emplois ATOS voulu par le gouvernement actuel
(3.916 emplois créés aux termes de la loi de finances pour 1999)
s'est aussi effectué à moyens constants par transferts de
crédits et permet d'améliorer substantiellement l'encadrement des
élèves et la carence constatée en personnel
médico-social , carence due aux coupes sombres opérées
dans ces emplois entre 1993 et 1997 (393 emplois supprimés).
On constate donc que, si les conclusions présentées sont
partagées par tous les acteurs du système éducatif et si
le rapport a le mérite d'effectuer un tour d'horizon des
problèmes actuels de gestion des personnels d'enseignement, il n'apporte
aucun élément nouveau au débat puisque la plupart des
préoccupations dont il se fait l'écho a déjà
trouvé une réponse par le biais de l'action gouvernementale.
On peut, en revanche, s'interroger sur la valeur effective des nombreuses
propositions de la majorité sénatoriale (dont celle de
réformer l'éducation à moyens constants) quand on se
souvient du contexte d'élaboration et d'application du " Nouveau
contrat pour l'école ", voulu par le précédent
gouvernement et porté par cette même majorité. Les quelques
155 propositions contenues dans le nouveau contrat et dont le financement
était prévu par la loi de programmation n° 95-836 du 13
juillet 1995 nécessitaient plus de 14 milliards de francs. Les mesures
effectivement financées se sont réduites à une peau de
chagrin et nombre d'entre elles n'ont jamais pu être appliquées,
faute de crédits ; il en va ainsi, du passage à
25 élèves par classe de maternelle en ZEP, de la
scolarisation renforcée des enfants à 2 ans, de
l'augmentation du nombre de conseillers principaux d'éducation, de la
poursuite des études dirigées au collège, de l'extension
progressive des centres de documentation et d'information dans tous les
collèges, de la formation continue des enseignants : toutes ces
propositions n'ont été que poudre aux yeux !
On peut donc être sceptique quant au sort que subiraient les propositions
de la commission d'enquête si les auteurs du rapport avaient la charge de
les appliquer et, a fortiori, à moyens constants. Il est
préférable de laisser le gouvernement actuel travailler dans la
direction qu'il a prise et qui semble répondre aux attentes de nombreux
partenaires du système éducatif.
Il est flagrant que l'intention sous-jacente de la commission d'enquête,
lors de sa constitution, de prendre en défaut le gouvernement actuel sur
sa politique de gestion des personnels participant à la mission de
service public de l'enseignement ne trouve aucune justification aux termes du
rapport. L'intitulé même de la commission d'enquête
sénatoriale démontre bien à quel point la majorité
de la Haute assemblée nourrissait, a priori, une vision
réductrice du service public de l'éducation nationale ;
alors que le système scolaire est confronté à de multiples
problèmes, seul un souci de bonne gestion du personnel semble avoir
animé les auteurs de la proposition de résolution visant à
créer la commission d'enquête.
Souhaitant dépasser le cadre (certes important) de la bonne gestion du
personnel, les sénateurs socialistes affirment leur attachement à
un service public de l'éducation favorisant l'égalité des
chances de tous et permettant de former les jeunes à la
citoyenneté en combattant les inégalités sociales. Ils se
félicitent, à la lecture des conclusions
présentées, que les auteurs du rapport aient pris conscience de
l'ampleur du débat et en aient élargi les termes.