VII. LA FRANCE ET L'UNION EUROPÉENNE SERAIENT TOUTEFOIS LES PRINCIPAUX BÉNÉFICIAIRES DES ÉCHANGES DE PERMIS, ET NE POURRONT SANS DOUTE PAS RESPECTER LEURS ENGAGEMENTS DE KYOTO SANS ACHETER DES PERMIS
1. La France aura besoin d'acheter des permis pour respecter ses engagements de Kyoto
Il
n'existe que deux manières de réduire les émissions de
CO
2
:
- améliorer l'
efficacité énergétique
de
l'économie, c'est-à-dire le ratio PIB/consommation
d'énergie ;
- ou bien
substituer
des énergies pauvres en CO
2
à des énergies riches en CO
2
, c'est-à-dire
substituer des énergies renouvelables, de l'électricité
nucléaire et de l'électricité hydraulique, à des
énergies fossiles, ou bien substituer du gaz à du pétrole
et surtout à du charbon.
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TENEUR
EN CARBONE DE DIFFÉRENTS COMBUSTIBLES FOSSILES :
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Combustibles et carburants de synthèse |
39,0 |
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Charbon |
25,8 |
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Pétrole |
20,0 |
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Gaz naturel |
15,3 |
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Source : AIE (1991). |
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QUANTITÉS DE CARBONE ÉMISES EN FONCTION
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Centrale classique au charbon |
964.0 |
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Centrale au fuel |
726.2 |
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Centrale au gaz |
484.0 |
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Réacteurs à eau bouillante (énergie nucléaire) |
7.8 |
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Vapeur géothermique |
56.8 |
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Grosses centrales hydro-électriques |
3.1 |
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Énergie éolienne |
7.4 |
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Énergie photovoltaïque |
5.4 |
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Bois (exploitation écologiquement rationnelle) |
-159.92 |
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1. Sont comptabilité les émissions liées à l'extraction des combustibles, à la construction des installations et au fonctionnement des équipements. |
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2. L'exploitation viable de la biomasse peut se traduire par des émissions négatives de carbone du fait que les racines et diverses parties non récoltées demeurent sur place. Les émissions de carbone provenant des engrais, pesticides et combustibles fossiles employés au stade de la production sont pris en compte dans l'analyse (voir San Martin, 1989). |
|||||||||
Source : AIE (1991). |
Or les
marges de manoeuvre
de la France en terme de substitution sont
très
faibles
. En effet, l'essentiel de notre
électricité électrique est d'ores et déjà
d'origine nucléaire ou hydraulique, donc n'émet pas de
CO
2
, et la fermeture des dernières centrales
électriques au charbon pourrait soulever des problèmes
sociaux : ces centrales sont en effet souvent situées dans des
bassins d'emplois en difficulté
75(
*
)
.
En France, la maîtrise des émissions de gaz à effet de
serre reposera donc sur l'amélioration de l'efficacité
énergétique : les travaux de projection du Commissariat
général du Plan
76(
*
)
suggèrent ainsi qu'en l'absence
d'achats de permis, et sous l'hypothèse d'une croissance moyenne de
2,3 % par an d'ici 2010, la France devait
améliorer son
efficacité énergétique
de 2,1 % par an sur la
période 1997-2010 pour respecter ses engagements de Kyoto
77(
*
)
.
SCÉNARIO S3 : " ÉTAT PROTECTEUR DE
L'ENVIRONNEMENT " PERMETTANT À LA FRANCE DE RESPECTER
|
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Croissance du PIB |
+ 2,3 % / an |
||
Gains de substitution |
+ 0,2 % / an |
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Gains d'efficacité énergétique |
+ 2,1 % / an |
||
Croissance des émissions de CO 2 |
0 % |
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Source : Commissariat général du Plan, 1998. |
Or, selon les experts du ministère de l'Industrie auditionnés par votre rapporteur, il s'agit là d'un rythme de progrès de l'efficacité énergétique jamais atteint dans aucun pays sur longue période et une fois et demi plus rapide que celui réalisé après le premier choc pétrolier.
GAIN
ANNUEL D'EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE EN FRANCE DEPUIS 50 ANS
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1946-1959 |
+ 1,2 % |
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1960-1973 |
0 % |
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1974-1989 |
+ 1,4 % |
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1990-1996 |
- 0,5 % |
|
1974-1996 |
+ 0,74 % |
|
Source : Ministère de l'Industrie, 1999. |
Par
surcroît, le contexte économique actuel est peu favorable
aux
investissements en économie d'énergie :
- les
prix
des énergies fossiles sont
très bas
. En
terme réels, le prix du pétrole est ainsi revenu au niveau
atteint durant les années 1960 (avant le premier choc pétrolier),
c'est-à-dire une période où la France n'éprouvait
aucune incitation à économiser de l'énergie ;
- le niveau des
taux d'intérêt
réels est plus
élevé en France aujourd'hui que dans les années 1970.
Au total, la
rentabilité
financière des investissements en
économie d'énergie est actuellement
réduite
,
d'autant plus que les investissements les plus pertinents ont
déjà été effectués : avec la
Suède, la France est aujourd'hui l'un des pays au monde les plus
efficaces pour l'utilisation de l'énergie.
À l'instar de la plupart des autres pays industrialisés, la
France ne pourra donc, sauf ralentissement durable de la croissance, respecter
ses engagements de Kyoto sans importer des permis grâce aux
mécanismes de flexibilité.
Cela est encore plus vrai si la France choisit de " sortir du
nucléaire
" : le parc nucléaire français
représente en effet une " économie " de
25 millions de tonnes de carbone émis par rapport à des
centrales thermiques classiques, soit près de 25 % des
émissions françaises de 1990.
A moins d'un " miracle technologique " ou d'un accident pour la
croissance économique, l'ambition de certains écologistes de
refuser le développement des mécanismes d'échange de
permis et simultanément de " sortir du nucléaire ", ne
permettrait donc sans doute pas à la France de respecter et de prolonger
ses engagements de Kyoto, sauf à un
coût
économique
déraisonnable
.
Le respect du
principe de précaution
invite donc la France
à accepter le principe des échanges de permis, dont elle pourrait
avoir besoin d'ici 2008-2012.
Comme le souligne Olivier GODARD, dans le rapport du Conseil d'analyses
économiques sur " La fiscalité de l'environnement
78(
*
)
", "
refuser ou entraver
le commerce des permis d'émission empêcherait notre pays de
recouvrer la maîtrise démocratique de ses choix
énergétiques futurs [c'est-à-dire l'enfermement dans le
" tout nucléaire "] et pourrait lui imposer une gestion
difficile du manque de maîtrise de la croissance des transports
routiers
".