N°
414
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 9 juin 1999
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur la restructuration de l'industrie aéronautique européenne,
Par M.
Yvon COLLIN,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.
Industrie aéronautique. |
AVANT-PROPOS
Le
présent rapport exhorte, comme l'indique assez son titre, à
l'union des forces aéronautiques en Europe.
Cet appel n'est certes pas une nouveauté. Un précédent
rapport
1(
*
)
en juin 1997, en
avait déjà fourni l'occasion. Quelques mois plus tard, en
décembre de la même année, les gouvernements
lancèrent une même initiative.
Depuis, si les acteurs du théâtre se sont rapprochés de
l'objectif assigné par les gouvernements, celui-ci est loin d'être
atteint.
On doit même déplorer certains atermoiements, certaines
initiatives aussi, au terme desquels la perspective d'une union de l'industrie
aéronautique de l'Europe se trouve compromise.
Et pourtant, cet objectif doit rester une vraie priorité. Sans union,
les positions acquises par les industriels européens ne pourront
être enrichies et risqueront d'être rognées. Sans union le
coût de l'industrie aéronautique pour les finances publiques
nationales continuera d'être excessivement et inutilement
élevé. Sans union, l'ambition d'une capacité
aéronautique européenne autonome sera définitivement
ruinée.
L'urgence d'une intégration poussée de l'industrie
aéronautique européenne a pu être masquée par des
événements exceptionnels. Une certaine désinvolture au
regard des exigences de bonne gestion des deniers publics a par exemple pu
contribuer à celer des enjeux financiers d'importance.
Une incapacité certaine à bâtir une Europe-puissance a
trouvé un alibi facile dans la considération toujours sensible et
donc toujours invoquée d'intérêts nationaux qui n'ont
souvent pas plus de prolongements ni de réalité que ceux,
purement matériels, des entreprises concernées.
Rien de tout cela ne peut ni ne doit aujourd'hui subsister qu'au risque
très grave de miner une industrie source de prospérité
économique et d'acquis technologiques mais aussi, il faut y insister,
condition de puissance politique.
Les gouvernements doivent, une fois pour toutes, mettre en accord leurs
décisions avec leurs intentions. Cela suppose d'abord de prendre
celles-ci au sérieux, ensuite d'arrêter et d'appliquer
celles-là avec la fermeté qui s'impose.
Alors, le défi de l'union pourra être relevé avec
succès.
PREMIERE PARTIE :
DES RAISONS D'AGIR POUR L'UNION
La
politique industrielle est passée de mode, prétend-on souvent.
Le marché imposerait naturellement, avec efficacité, les choix
nécessairement avisés à ses principaux acteurs que sont
les entreprises.
Ce rapport ne se veut certes pas une dissertation philosophique portant sur les
vertus associées à tel ou tel choix dans la gamme des
systèmes alternatifs d'organisation économique.
Il prétend se situer dans la dimension du réel et, se nourrissant
de considérations très pratiques, reposant sur des faits concrets
ou encore des témoignages d'acteurs, aboutir à des
recommandations et plus encore peut-être à des observations
fécondes.
A cet effet, cette première partie veut rendre compte, à partir
d'éléments nécessairement partiels de la richesse d'une
industrie qui est autant faite de ses perspectives, des enjeux qui s'attachent
à sa maîtrise que des contradictions qu'elle affronte et des
risques qui l'entourent (Chapitre 1
er
). L'industrie
aéronautique est impitoyable pour les faibles.
C'est ce constat qui conduit alors à s'interroger sur le rapport des
forces en présence (Chapitre II). Au terme d'un examen que l'on
veut nuancé, un déséquilibre apparaît au
détriment de l'industrie européenne, ou plutôt des
industriels européens, et au bénéfice de l'industrie
américaine.
En bref, nos moyens actuels ne sont pas à la hauteur des enjeux. C'est
là que se situent les raisons d'agir pour l'union.