II. DES INITIATIVES MALHEUREUSES
Non contents de se montrer incapables de conduire une alliance équilibrée et de surmonter les difficultés suscitées par leur regroupement, les industriels, certains d'entre eux ou moins, se sont lancés dans des aventures contrariant directement les instructions des gouvernements.
A. DES PARTENAIRES À LA FIDÉLITÉ DOUTEUSE
1. Le « flirt » BAe-DASA
Alors
même que les discussions sur l'instauration d'une entreprise
aéronautique unique en Europe se déroulaient entre les
partenaires d'origine, BAe, DASA, CASA et Aérospatiale et étaient
élargies à des industriels extérieurs, suédois et
italiens, BAe et DASA entamèrent des négociations
séparées dans le but d'une fusion des deux entreprises.
Cette initiative motivée par l'absence de perspectives d'un changement
du statut d'Aérospatiale, condition posée par les deux
entreprises à une fusion plus large, fut pourtant prolongée alors
même que la privatisation d'Aérospatiale avait été
annoncée par le gouvernement.
Il ne fait guère de doute que l'identité publique de l'entreprise
française accompagnée
ipso facto
par la
prédominance d'un actionnaire étatique dans son capital a pu
constituer un obstacle important pour l'approfondissement des
négociations.
Mais, le déroulement des discussions parallèles entre BAe et DASA
montre que cet argument a également été un prétexte
or poursuivre, en marge du projet soutenu par les gouvernements, des objectifs
propres à chacune des entreprises : pour le constructeur allemand,
le renforcement de sa position au sein d'Airbus ; pour BAe, probablement,
une plus grande maîtrise du programme Eurofighter en échange de
quelques sacrifices dans le domaine des programmes Airbus.
L'échec final de négociations qui étaient, selon les
témoignages recueillis, proches du succès serait dû
à des divergences portant sur l'animation de la gestion de l'entreprise.
Cet échec et évidemment heureux au regard des exigences d'une
unification harmonieuse des industries aéronautiques européennes.
Mais, il ne doit pas être regardé comme sonnant le glas
d'initiatives déstabilisantes des industriels.
Les contraintes subies par chacun laissent intacts leurs objectifs que, si les
perspectives d'une intégration européenne complète
n'étaient pas relancées, chacun chercherait à atteindre de
son côté.
Une telle situation déboucherait sur l'accumulation de
difficultés et de retards dans la constitution d'une entreprise unique
en Europe, finalement préjudiciables à tous.