5. Activités de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) pour 1997 - Intervention de M. Claude BIRRAUX, député (UDF) (Mardi 23 juin)
La
Banque européenne pour la reconstruction et le développement
(BERD), qui compte 60 membres, créée en 1991 pour faciliter la
transition des pays d'Europe centrale et orientale vers l'économie de
marché, continue d'étendre ses activités dans les 26 pays
où elle opère. Après le doublement de sa base
capitalistique, passée de 10 à 20 milliards d'ECU en 1997, la
Banque a consenti pour un total de 2,3 milliards d'ECU de prêts
cette année, et ce chiffre devrait se maintenir à ce niveau,
voire augmenter en 1998.
Le rapport se penche sur trois importantes branches d'activité de la
BERD : la privatisation et la restructuration des entreprises d'Europe
centrale et orientale, les institutions financières dans les pays en
transition, et l'agro-industrie. L'auteur relève que 80 % des
prêts accordés en 1997 concernaient le secteur privé, ce
qui a amené la part de celui-ci à 67 % des engagements
cumulés de la Banque, tandis que la part des moyennes entreprises est
passée de 15 % à 19 % du total des engagements. En 1997
aussi, 52 opérations financières ont été
entreprises, pour une valeur de quelques 480 millions d'ECU,
représentant environ 28 % du total des opérations. La Banque
a financé des projets d'une valeur de 250 millions de dollars dans
l'agro-industrie, surtout en Bulgarie, en Pologne, en Russie et en
Ukraine ; cependant, les investissements dans ce secteur ne se sont pas
traduits pour l'instant par une augmentation notable de leur part actuelle de
2 % du portefeuille total de la BERD.
Parmi les principaux problèmes soulignés par le rapporteur, on
peut citer le fort endettement de nombreuses entreprises, la lenteur des
réformes structurelles dans certains pays, accentuée par des
interférences bureaucratiques, l'augmentation considérable de la
pauvreté, ainsi que la corruption et la criminalité
économique. En même temps, les forces du marché ont fait
apparaître d'importantes transformations structurelles dans les
entreprises d'Europe centrale et orientale, ouvrant la voie à davantage
d'investissements étrangers. Le rapport est favorable au " principe
de complémentarité " de la BERD, en vertu duquel les
prêts accordés par la Banque sont destinés à
compléter les autres investissements au lieu de les remplacer. L'auteur
invite aussi à un ajustement de la politique commerciale de l'Union
européenne afin d'étendre plus d'accords
préférentiels aux pays d'Europe centrale et orientale, soulignant
que le commerce est la clef du succès de la transition. Le rapport
conclut en disant que la BERD a encore une mission importante à remplir
en facilitant l'achèvement du processus de transition, tant par ses
prêts que par son rôle de conseil.
M. Claude BIRRAUX, député (UDF)
,
intervient dans le
débat en ces termes :
" La commission de la science et de la technologie accorde une attention
particulière au compte de sûreté nucléaire
géré par la Banque, ainsi qu'au Fonds pour le sarcophage de
Tchernobyl. En effet, notre assemblée a adopté en 1992
et 1997 des rapports relatifs à la sûreté
nucléaire dans les pays d'Europe centrale et orientale et a
formulé des recommandations, dont une tendant à " augmenter
d'une manière sensible les contributions financières volontaires
au compte pour la société nucléaire de la BERD, afin qu'un
nombre plus grand de projets spécifiques puissent être
subventionnés par l'intermédiaire de la Banque.
Je voudrais d'emblée rappeler ici que le compte pour la
sûreté nucléaire géré par la Banque est
alimenté par des contributions volontaires des pays donateurs. Au 31
décembre 1997, quatorze pays, plus l'Union européenne, avaient
annoncé pour 260,6 millions d'ECU de contribution.
Cela signifie qu'en aucun cas, l'aide à l'amélioration de la
sûreté nucléaire ne se fait au détriment d'une
quelconque action de la Banque. Je tenais à le rappeler car j'ai entendu
par le passé, y compris dans cette enceinte, des propos totalement faux
à ce sujet.
Les projets en cours concernent la Bulgarie, pour la centrale du Kozloduy et la
Lituanie, avec l'accord signé en février 1994, pour la centrale
d'Ignalina, projet en cours d'achèvement. J'ai pu personnellement me
rendre compte des efforts déployés par la Lituanie pour mettre en
oeuvre le programme d'amélioration.
Pour la Russie, les accords signés en 1995 concernent les centrales de
Leningrad (Sosnovy-Bor de type RBMK), Novovoronezh, Kola. Il me semble que
l'inertie de ce pays et de ses structures rend toute action bien difficile.
Pour l'Ukraine, le mémorandum signé le
20 décembre 1995 par ce pays, le G7 et l'Union
européenne prévoit la fermeture de Tchernobyl d'ici à
l'an 2000. Le projet signé avec la Banque en novembre 1996,
d'une valeur de 118 millions d'ECU, consistera à préparer la
fermeture des tranches 1, 2 et 3.
Le mémorandum prévoyait aussi l'achèvement des centrales
de Rivné et de Khmelnitsky -des VVER 1000- aux normes occidentales. L'an
dernier, la Banque avait brandi une étude dite
at least cost
pour
ne pas entrer en matière, prétextant que cette étude lui
était imposée par le G7. Plusieurs communiqués du G7,
ultérieurs à notre débat de juin 1997, me laissent
penser que le G7 pressait la Banque d'entrer en matière. Cette
année, cet aspect du mémorandum n'est pas abordé par la
Banque, me laissant dans l'incertitude sur cet aspect des procédures.
Par contre, un document du 31 mars de l'Union européenne laisse
entrevoir la possibilité de financer l'achèvement de ces deux
centrales par des prêts Euratom.
Pour la bonne information de notre Assemblée, j'ajoute que sur la
période 1991-1997, les programmes européens Phare et Tacis ont
engagé des opérations pour respectivement 150 millions d'ECU
et 573 millions d'ECU. Pour l'exécution du plan d'action du G7, il
est prévu, sur la période 1994-1996, 100 millions d'ECU.
Le plan d'action du G7 pour la fermeture de Tchernobyl a été
complété, lors du Sommet de Denver en 1997, par la mise en
place d'un mécanisme supplémentaire : le Fonds pour le
sarcophage de Tchernobyl. Il est doté de 300 millions de dollars.
Mais il faut savoir que la mise en oeuvre du plan d'exécution du
sarcophage nécessitera huit à neuf ans et coûtera
quelque 760 millions de dollars ce qui signifie que 60 % du
financement n'est pas encore réuni.
A la lecture du rapport 1997 de la Banque, il n'apparaît pas de
différend sur les procédures propres de l'institution. De deux
choses l'une, ou bien lassés de mes critiques les rédacteurs ont
préféré les passer sous silence ; ou bien les projets
engagés étaient suffisamment prêts et bouclés et les
différents intervenants ont trouvé chacun leur place, apportant
une contribution positive dans l'action concrète. J'espère que
c'est cette seconde version qui a prédominé, et si c'est le cas,
je m'en réjouis.
Permettez-moi enfin d'insister sur la cohérence des choix. La
sûreté nucléaire, le développement de la culture de
sûreté doivent être une ligne de conduite unique et ferme.
Cela vaut pour la Banque, qui n'a pas réussi à mener à
bout les opérations, très controversées ces derniers
temps, comme celle de Mochovce en Slovaquie, faute d'une cohérence bien
établie.
Cela vaut aussi pour les pays bénéficiaires, pour qui la mise en
oeuvre d'un programme d'amélioration de la sûreté ne
signifie pas que la sûreté est garantie à tout jamais,
à un niveau maximum et qu'il n'y a plus de problème pour
l'éternité. Il faudra arrêter les centrales qui sont
actuellement en fonctionnement, et cela le plus vite possible. Il faut que ces
pays l'aient bien en mémoire.
Il est utile de rappeler que la sûreté est un combat de tous les
instants et que le développement d'une culture de sûreté
à tous les niveaux de la hiérarchie est aussi une mesure du
changement d'échelle de valeurs pour les pays de l'ex-bloc communiste
qui ont rejoint le bloc démocratique. "
Au terme du débat,
la résolution 1162 figurant dans le rapport
8132 est adoptée à l'unanimité.