M. le président. M. Henri Weber interroge M. le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme sur l'arrêt des travaux de mise à deux fois deux voies de la RN 27 entre Rouen et Dieppe.
Décidée en 1993 pour désenclaver le littoral haut-normand, la mise à deux fois deux voies de la route nationale 27 devait être inaugurée au printemps 1996, « quels que soient les aléas ».
Or, les travaux viennent d'être suspendus pour deux ans, au titre des économies budgétaires décidées par le Gouvernement, alors que les ouvrages d'art ont déjà été édifiés et qu'il ne reste plus qu'à poser le revêtement définitif et à procéder à quelques travaux de finition, ce qui pourrait être fait en quelques semaines.
Il lui demande quelles initiatives il compte prendre pour lever cette décision scandaleuse qui porte un préjudice considérable à une région déjà très éprouvée par le chômage et le marasme économique. (N° 404.)
La parole est à M. Weber.
M. Henri Weber. La mise à deux fois deux voies de la RN 27 entre Tôtes et Manéhouville, qui va de Rouen à Dieppe, devait être effective au plus tard en décembre 1996. Une petite plaquette éditée en 1993 par la direction départementale de l'équipement précisait même que cette ouverture aurait lieu en tout état de cause, « quels que soient les aléas », notamment climatiques.
Nous apprenons aujourd'hui que les coûts supplémentaires dus précisément aux intempéries de l'hiver 1995-1996 ne seront pas compensés par une rallonge budgétaire, contrairement à ce qu'il est advenu pour d'autres chantiers de la région, notamment celui de la RN 154 situé dans le département de l'Eure - je m'en réjouis bien sûr pour les habitants de ce département dont le ministre de l'intérieur, M. Jean-Louis Debré, est conseiller général... - et que l'ouverture de la RN 27 élargie est donc repoussée d'au moins un an, et probablement de deux ans.
Cette décision est à la fois très dommageable pour la région et absurde.
Elle est dommageable, car ce retard non seulement perpétue l'enclavement du pays dieppois et de l'ensemble du littoral haut-normand, mais aussi l'aggrave.
La RN 29, en effet, est pratiquement terminée. En l'état actuel de la RN 27, les usagers seront tentés d'emprunter la RN 29, contournant ainsi le pays cauchois et le bord de mer. Ces régions pâtiront donc lourdement de ce détournement de voyageurs.
La décision est plus dommageable encore pour le trafic transmanche, car la RN 27 à seulement deux voies est dangereuse et très fréquentée : on ne compte plus les accidents graves et mortels. Aujourd'hui, cette route est rendue encore plus périlleuse que précédemment par les rétrécissements et les chicanes dus aux travaux. Le gel de ces derniers pose donc un problème à cet égard.
Je rappelle que la mise à deux fois deux voies de la RN 27 devait compenser, dans une perspective d'aménagement du territoire, l'ouverture du tunnel transmanche, qui détourne, lui aussi, une part du trafic de la ligne Newhaven-Dieppe-Paris.
Le gel des travaux de la RN 27 est une décision non seulement dommageable, mais encore absurde, car les fonds nécessaires à cette mise à deux fois deux voies sont désormais relativement modestes : entre 80 et 120 millions de francs. Tous les ouvrages d'art devant être effectués sont aujourd'hui terminés. Il ne reste qu'à installer le tapis, les glissières de sécurité et la signalisation, ce qui pourrait être fait en quelques semaines pour une somme dérisoire eu égard à d'autres investissements routiers et autoroutiers qui ont eu lieu dans le pays et dans la région.
J'ajoute que, laissé en l'état pendant deux ans, le chantier va subir de graves détériorations qui alourdiront finalement le coût de l'ensemble.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour remédier à cette situation à la fois dommageable et absurde, comme je viens de le démontrer ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre-André Périssol, ministre délégué au logement. Monsieur le sénateur, vous me permettrez de vous transmettre la réponse que M. le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme aurait souhaité vous faire.
Les orientations budgétaires décidées par le Gouvernement dans le cadre du redressement des finances publiques l'ont conduit à réserver une part des crédits prévus par la loi de finances de 1996. C'est dans cette optique que M. le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme a demandé aux préfets de région de proposer, en concertation avec les collectivités locales intéressées, une liste d'opérations susceptibles d'être concernées par ce gel.
Parmi ces opérations, figure en partie l'aménagement de la RN 27. Depuis longtemps, votre collègue Mme Annick Bocandé et M. Edouard Leveau, député de Seine-Maritime, nous en ont saisi.
Je dois vous indiquer, monsieur le sénateur, que le détail du dispositif n'est pas encore complètement arrêté. Il est vrai que les crédits routiers ont des particularités auxquelles le Gouvernement ne peut pas ne pas être attentif.
Par ailleurs, comme vous le savez, après la mise en service récente de l'autoroute A 29 entre Le Havre et Yvetot, l'achèvement de l'autoroute A 28 entre Rouen et Abbeville, avec l'ouverture de la section entre Blangy et Neufchâtel d'ici à la fin de cette année, contribuera de manière significative au désenclavement du littoral haut-normand.
Enfin, il apparaît qu'avec le solde, dès cette année, du programme complémentaire transmanche, le taux d'avancement des engagements de l'Etat sur la durée du XIe Plan en Haute-Normandie sera de très loin, à la fin de 1996, le taux le plus élevé de toutes les régions françaises.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments de réponse que je souhaitais vous apporter au nom de M. Bernard Pons.
M. Henri Weber. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Weber.
M. Henri Weber. Je me réjouis fort des travaux entrepris et achevés que vous avez signalés, monsieur le ministre, et auxquels j'ai également fait allusion. Mais ce contraste ne rend que plus douloureux pour nous le gel de la mise à deux fois deux voies de la RN 27 !
En effet, des rallonges financières peuvent être obtenues, comme cela a été le cas pour d'autres chantiers. Le gel des travaux de la RN 27 constitue donc de fausses économies caractérisées, car les coûts supplémentaires seront considérables et bien supérieurs aux budgets en question : dégradation de la route laissée en l'état, qui va connaître deux nouveaux hivers normands, accidents, notamment mortels - je tiens à votre disposition des données chiffrées à cet égard - manque à gagner lié à l'enclavement du pays dieppois et du littoral - la chambre de commerce et d'industrie de Dieppe ainsi que les associations de commerçants vous ont envoyé les pétitions, les demandes et les argumentations nécessaires, monsieur le ministre.
Je considère pour ma part que la rallonge de 80 millions à 100 millions de francs aurait pu être accordée pour permettre l'achèvement du travail de désenclavement qui a commencé et qui a été brutalement stoppé au détriment du pays dieppois.
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