M. le président. Par amendement n° 6, M. Blaizot, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Peuvent également être ouverts des concours réservés aux agents non titulaires des collectivités territoriales et de leurs établissements publics qui étaient en fonctions à la date de publication du statut particulier du cadre d'emplois correspondant à l'emploi qu'ils occupent ou bénéficiaient à cette date d'un congé en application du décret pris sur le fondement de l'article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, et qui justifient, à la date de clôture des inscriptions au concours, d'une durée de services effectifs au sein de la fonction publique territoriale au moins équivalente à quatre ans au cours des huit dernières années, cette durée étant appréciée dans les mêmes conditions qu'à l'article 4. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Blaizot, rapporteur. Cet amendement permettrait de prendre en compte la situation de vieux serviteurs des collectivités territoriales qui ont été recrutés comme non titulaires, bien entendu, à une époque où il n'existait pas encore de statut, et qui méritent une attention particulière.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je crains fort, monsieur le rapporteur, que nous ne parvenions pas à nous entendre sur ce point, et j'en suis tout à fait désolé.
Je rappelle que, dans la définition du champ des critères permettant à des agents de se présenter à ces concours particuliers, nous n'avons pas retenu de date ; nous avons considéré que, dès lors qu'un ou plusieurs concours avaient déjà été organisés pour ces filières, les personnels en question avaient eu la possibilité de s'y présenter le cas échéant, d'y être reçus et de figurer ensuite éventuellement sur des listes d'aptitude pour être effectivement recrutés.
C'est ainsi qu'ont été organisés quatre concours d'administrateur, sept concours d'attaché, trois concours d'ingénieur, trois concours de technicien. Cela donne un ordre de grandeur des possibilités de concourir qui ont été offertes à ces personnels.
Rouvrir le champ à ces personnes-là, ce serait, à mon avis, provoquer une rupture d'égalité des Français devant le recrutement par concours dans la fonction publique. Cela me paraît aller tout à fait à l'encontre de l'idée que nous nous faisons du statut de la fonction publique et de l'importance du concours pour l'accès à cette fonction.
De plus, vous ne posez, dans cet article additionnel, aucune condition de titre ou de diplôme. Il ne peut s'agir que d'un oubli, car il me paraîtrait inconcevable de mettre cette condition de côté, et il faudrait, à tout le moins, la faire figurer.
Quoi qu'il en soit, sur le fond, je suis tout à fait défavorable à cette formule qui, à mon avis, va créer des difficultés au sein de la fonction publique territoriale, car on introduirait là une inégalité entre des gens qui se sont donné la peine de passer un concours, et qui l'ont éventuellement réussi, et d'autres, qui étaient exactement dans la même situation que les précédents mais qui n'ont pas fait l'effort de se présenter aux concours. Il y a là quelque chose qui me paraît choquant.
M. François Blaizot, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Blaizot, rapporteur. Je comprends très bien les objections que vous soulevez, monsieur le ministre, à l'égard de cet amendement. Il reste que ceux qui sont sur le terrain, notamment les maires, souhaitent beaucoup que cet amendement soit adopté.
Il s'agit de ne pas abandonner à leur sort, qui ne serait guère brillant, des personnes qui ont été recrutées au moment où les collectivités territoriales ont renforcé les effectifs de leurs personnels. Ce sont maintenant des agents relativement âgés et leurs chances de réussir un concours se trouvent limitées. Or la plupart de ceux qui les ont employés ont un sentiment de dette morale et de reconnaissance à leur endroit.
Il avait été question de prononcer des intégrations d'office, mais nous nous y sommes opposés. Le système du concours est donc maintenu. Simplement, il s'agirait de concours spéciaux, réservés aux agents dont le recrutement remonte à une époque où, en l'absence de statut, il ne pouvait y avoir d'examen ni, par conséquent, de titularisation.
Le caractère très particulier de ces cas ne peut être véritablement ressenti que par ceux qui ont vécu tout le déroulement des événements, et ceux-là demandent avec insistance qu'il soit tenu compte de la situation de ces personnels.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole pour explication du vote.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Dans un premier temps, j'avais été séduit par l'argumentation de notre rapporteur. Mais il faut tout de même rappeler que, avant l'institution des statuts particuliers, il existait un statut pour le personnel communal. Dès lors, il est un peu exagéré de dire que, dans le passé, il était impossible de titulariser certains de ces personnels.
En ce qui concerne les départements aussi, vous le savez bien, mon cher collègue, il était possible d'organiser des concours et de titulariser des personnels. Sinon, on n'aurait pas pu créer les cadres d'emploi d'origine.
Autrement dit, il y a eu de nombreuses occasions de procéder à des titularisations, et les collectivités qui ont bien voulu se préoccuper de ces statuts particuliers ont pu le faire jusqu'à une époque récente.
En fait, l'article additionnel que vous proposez d'introduire, monsieur le rapporteur, revient à suppprimer le 3° de l'article 4 puisque on n'impose plus d'organiser des concours.
L'absence d'exigence de diplôme me paraît également tout à fait fâcheuse.
Je considère que la résorption d'un grand nombre d'emplois précaires que permet l'article 4 est une bonne mesure. Là, on va au-delà, et les cas qui sont visés ne correspondent pas, à mon avis, à ceux qui ont fait les efforts suffisants pour être intégrés dans la fonction publique territoriale.
Voilà pourquoi je ne voterai pas cet amendement.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je voudrais simplement dissiper un doute : y a-t-il ou non maintien des exigences de diplômes ?
M. François Blaizot, rapporteur. Il n'y a aucune hésitation sur ce point : c'est une exigence de caractère fondamental.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 88, M. Pagès et Mme Borvo, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 est ainsi rédigé :
« Art. 3. - Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de titulaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé de maladie, d'un congé maternité ou d'un congé parental, ou de l'accomplissement du service national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi.
« Ces collectivités et établissements peuvent, en outre, recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois et conclure pour une durée maximale de trois mois, renouvelables une seule fois à titre exceptionnel, des contrats pour faire face à un besoin occasionnel.
« Des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels pour exercer des fonctions nécessitant des connaissances techniques hautement spécialisées. Ces agents sont recrutés dans ces emplois par des contrats d'une durée maximale de trois ans, renouvelables une fois pour une même période.
« Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, fixe les catégories d'emplois qui peuvent être créés en application des deuxième et troisième alinéas.
« L'application du présent article fait l'objet d'un rapport annuel de l'autorité territoriale ou du président du centre départemental de gestion au comité technique paritaire compétent pour l'ensemble des services de la collectivité ou l'ensemble des collectivités affiliées, précisant notamment le nombre des emplois ainsi pourvus.
« Le décret visé au quatrième alinéa fait l'objet d'une révision tous les trois ans, notamment pour tenir compte des corps et emplois de titulaires qui peuvent être créés pour assumer les fonctions visées au troisième alinéa. »
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Cet amendement a pour objet de rétablir la rédaction de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 afin de limiter à certains cas particuliers et d'encadrer les possibilités de recrutement d'agents sur contrat.
Un tel article trouve entièrement sa place dans un projet de loi portant résorption de la précarité dans la fonction publique.
Nous avions déjà déposé cet amendement en juillet 1994, lors de l'examen de la loi Hoeffel, car nous considérions que ce texte ne remettait pas en cause l'élargissement des possibilités de recours à la contractualisation ni ne corrigeait les effets de la loi de 1987, qui fut la première à ouvrir largement la porte aux recrutements de non-titulaires.
Alors que la titularisation est une spécificité de la fonction publique française, il y aura bientôt en son sein plus de non-titulaires que de titulaires. C'est contraire à notre conception d'une fonction publique digne de ce nom et offrant des garanties statutaires.
C'est pourquoi, avec cet amendement, nous proposons, comme je le disais déjà en 1994, que le recours à des agents contractuels ne puisse avoir lieu que dans des cas bien déterminés et de façon exceptionnelle, pour remplacer momentanément des titulaires qui ont été autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel, qui bénéficient d'un congé de maladie, d'un congé maternité ou d'un congé parental ou qui accomplissent leur service national, ou afin de faire face temporairement, pour une durée maximale d'un an, à la vacance d'un emploi, ou encore pour que puissent être remplies des fonctions correspondant à un besoin saisonnier, pour une durée maximale de six mois, ou des fonctions nécessitant des connaissances techniques hautement spécialisées.
Il s'agit, vous l'aurez compris, d'encadrer et non d'interdire tout recrutement sur contrat, car nous sommes parfaitement conscients de la situation des élus : nous en sommes nous-mêmes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Blaizot, rapporteur. Cet avis est défavorable en raison de la nécessité tout à fait évidente de conserver des éléments de souplesse. Ces éléments ont été apportés, dans des conditions qui ont donné satisfaction, par l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984. Modifier cet article, même avec les restrictions qu'a citées M. Pagès, réduirait cette souplesse dont chacun reconnaît la nécessité.
Bien entendu, il n'est plus question de recruter des agents sous contrat à durée déterminée pour remplir des emplois permanents ; cela est tout à fait exclu. En revanche, il faut pouvoir recruter des agents non titulaires pour des remplacements, pour des besoins occasionnels, pour des situations particulières et momentanées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 88, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 148,MM. Peyronnet, Régnault, Allouche, Authié, Badinter, Courrière, Dreyfus-Schmidt, Lèguevaques, Mahéas et Piras, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa (1°) de l'article 126 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée est ainsi rédigé :
« 1° D'être en fonctions à la date de la publication de la présente loi, ou à la date de publication du statut particulier du cadre d'emplois correspondant à l'emploi qu'ils occupent, ou de bénéficier à l'une de ces deux dates d'un congé en application des dispositions relatives à la protection sociale des agents non titulaires des collectivités territoriales. »
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. J'aurais retiré cet amendement si l'amendement n° 6, qui avait en fait le même objet que celui-ci, avait été retenu. Je le maintiens donc, sans me faire cependant d'illusion sur le résultat du vote qui va intervenir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Blaizot, rapporteur. Ayant été battu tout à l'heure sur un amendement qui répondait à la même préoccupation, je ne peux plus soutenir l'amendement de M. Peyronnet, que la commission avait cependant accepté.
M. le président. C'est un avis de reddition ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 148, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La suite de la discussion du projet de loi est renvoyée à la prochaine séance.
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