M. le président. « Art. 23. - L'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont en outre constituées par une fraction du produit du droit de consommation prévu à l'article 575 du code général des impôts, dans les conditions fixées par la loi de finances pour 1997. »
Par amendement n° 80, Mmes Fraysse-Cazalis et Demessine, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Loridant, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer cet article.
La parole est à Mme Fraysse-Cazalis.
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Chacun a bien compris que, désormais, pour financer la sécurité sociale, le Gouvernement entend frapper les trois vices que sont le jeu, l'usage du tabac et la consommation d'alcool. Ce n'est pas très glorieux ! Nous avons vu le cas des jeux à l'article 12. Avec l'article 23 vient le tour du tabac.
Il me paraît préoccupant de voir notre protection sociale soumise à ce genre de ressources aléatoires.
La taxation toujours plus importante des tabacs conduit certains à dire qu'ils fument plus des taxes que du tabac !
M. Charles Descours, rapporteur. Tant mieux !
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Au demeurant, cela ne réduit guère la consommation du tabac, donc les risques pour la santé.
M. Jean Chérioux. C'est moins mauvais pour la santé !
M. Ivan Renar. Non, c'est encore plus toxique ! Ce sont des paradis illusoires ! (Sourires.)
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Par conséquent, cela ne nous paraît pas être un moyen sérieux de financement de la sécurité sociale et de la protection de nos concitoyens.
C'est pourquoi nous proposons de supprimer l'article 23. Nous le faisons d'autant plus volontiers que, je le répète, une augmentation de moins d'un demi-point du taux des cotisations patronales d'assurance sociale dégagerait une recette équivalente.
M. Ivan Renar. Eh oui !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Ma chère consoeur, comment une cardiologue peut-elle dire des choses pareilles ?
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Comment un médecin peut-il concevoir qu'on finance la sécurité sociale avec de tels expédients ?
M. Charles Descours, rapporteur. Vous le savez comme moi, madame Fraysse-Cazalis, et peut-être mieux que moi, il y a, en France, 50 000 morts par an à cause du tabas et 50 000 morts par an à cause de l'alcoolisme. Par conséquent, il faut freiner la consommation et, pour cela, il existe trois moyens : la prévention, l'augmentation des prix et la limitation de la publicité.
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. La prévention, oui !
M. Charles Descours, rapporteur. La prévention, mais aussi les prix !
En fait, vous savez très bien qu'il y aura toujours des taxes sur le tabac et vous voudriez que leur produit aille alimenter le budget général. Eh bien, moi, je préfère que ce produit aille à la sécurité sociale. Nous nous sommes insurgés contre le hold-up accompli par le ministère des finances quand, voilà quelques années, a été instaurée une taxe de un centime sur chaque cigarette qui ne retombait pas dans le budget de la sécurité sociale.
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Ce n'est pas sérieux !
M. Charles Descours, rapporteur. Il y aura toujours des taxes sur le tabac et il y en a dans tous les pays du monde. Moi, je préfère que le produit de ces taxes soit affecté au budget de la sécurité sociale. Pourquoi devrait-elle payer pour les cancers du poumon et toute la morbidité due au tabac sans avoir le droit de prélever quoi que ce soit sur la vente dudit tabac ? Qu'elle soit au moins à chaque bout de la chaîne !
M. Jean Chérioux. Il faut une certaine logique, tout de même !
M. René Régnault. C'est un encouragement à fumer ! Ils veulent des recettes, donc il faut fumer ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Je voudrais rassurer Mme Fraysse-Cazalis, qui disait tout à l'heure que nous taxions les vices. Valery Larbaud parlait de « ce vice impuni, la lecture ». Eh bien, la lecture est au moins un vice que nous ne taxerons pas !
M. Ivan Renar. C'est le plaisir textuel ! (Sourires.)
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Cela dit, comme le soulignait M. le rapporteur, la lutte contre le tabagisme et contre l'alcoolisme comprend plusieurs volets : l'action sur les prix, l'interdiction de la publicité et la prévention.
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Développez donc la prévention !
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Mais nous pourrons reparler de la prévention, madame le sénateur.
M. François Autain. Cela coûte plus cher !
M. Ivan Renar. Mais c'est plus efficace.
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Il s'agit simplement ici d'affecter à la sécurité sociale des ressources fiscales, chacun en convient, je crois.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 23.
(L'article 23 est adopté.)
Article additionnel après l'article 23