M. le président. « Art. 9. - I. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les décisions prises sur le fondement de l'arrêté du 27 décembre 1996 fixant les majorations visées à l'article D. 242-6-4 du code de la sécurité sociale pour l'année 1997 sont validées, en tant que leur légalité serait contestée par le motif tiré de l'incompétence des auteurs de cet arrêté.
« II. - Le 2° de l'article L. 221-1 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : "et dans le respect de la loi de financement de la sécurité sociale".
« III. - L'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, après les mots : "d'après les règles fixées par décret", sont insérés les mots : "dans le respect de la loi de financement de la sécurité sociale";
« 2° Au quatrième alinéa, après les mots : "charges de gestion", sont insérés les mots : "dans le respect des conditions générales de l'équilibre financier déterminé par la loi de financement de la sécurité sociale".
« IV. - Les cinquième et sixième alinéas de l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Dans des conditions fixées par décret, la Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles fixe les éléments de calcul des cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles conformément aux conditions de l'équilibre financier de la sécurité sociale telles qu'elles sont déterminées par la loi de financement de la sécurité sociale.
« La délibération de la commission est transmise au ministre chargé de la sécurité sociale avant le 31 janvier de chaque année.
« Si la commission n'a pas délibéré à cette date ou n'a pas retenu des éléments de calcul conformes aux dispositions du cinquième alinéa, l'autorité compétente de l'Etat les détermine par arrêté. »
« V. - Les dispositions du IV du présent article prennent effet pour la fixation des cotisations dues au titre de l'année 1998. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 11 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 36 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Cet article introduit subrepticement est une mauvaise action, si j'ose dire. En effet, la validation demandée au Parlement de l'arrêté du 27 décembre 1996 fixant les majorations de cotisations dues au titre des accidents du travail pour l'année 1997 est contestable pour plusieurs raisons de fond.
La loi du 25 juillet 1994 a instauré la séparation des branches au sein du régime général c'était là une demande que nous formulions depuis longtemps.
Cette loi a aussi créé une commission paritaire chargée de gérer la branche des accidents du travail, notamment en proposant des taux de cotisations applicables pour chaque exercice.
Ceux qui, comme moi, siègent à la Commission des comptes de la sécurité sociale se souviennent que cette branche des accidents du travail faisait l'objet d'empoignades à chaque réunion. Or la loi du 25 juillet 1994 et cette gestion paritaire ont permis de calmer le jeu.
La validation qui nous est proposée aujourd'hui va à l'encontre du paritarisme auquel, je l'espère, nous sommes tous attachés. Elle compromet également les réformes mises en place depuis 1994 pour clarifier les responsabilités de gestion entre l'Etat et les partenaires sociaux au sein des caisses.
Par ailleurs, il faut rappeler que l'article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a prévu la création d'une commission pour arbitrer les contestations entre la Caisse nationale d'assurance maladie et la branche des accidents du travail. Cette commission est chargée de fixer les modalités du versement de un milliard de francs à la branche maladie, d'évaluer à son juste niveau le reversement de la branche des accidents du travail à la branche maladie.
Enfin, les amendements de l'Assemblée nationale ne sont pas acceptables. En effet, les prévisions du projet de loi de financement de la sécurité sociale envisagent un excédent de la branche accidents du travail de 1,4 milliard de francs en 1998, y compris le versement de un milliard de francs. Or je rappelle que la vocation de cette branche des accidents du travail est d'être équilibrée, les excédents devant permettre de diminuer les taux des cotisations des employeurs. Cette branche n'a en aucun cas vocation à générer des excédents servant, par un biais que je n'ose qualifier de « subtil », à équilibrer la branche assurance maladie.
Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer cet article, qui n'aurait jamais dû voir le jour.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 36.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. La commission des finances considère, elle aussi, qu'il faut supprimer cet article qui lui paraît mauvais dans ses deux aspects.
La demande de validation des taux des cotisations dues au titre des accidents du travail et fixés autoritairement pour 1997 n'est pas justifiée, même si je dois à la vérité de reconnaître que ces taux avaient été déterminés par le Gouvernement précédent.
Par ailleurs, cette demande de validation constitue - M. Descours l'a parfaitement expliqué - une violation flagrante du principe de l'autonomie de gestion des quatre branches de la sécurité sociale. En outre, elle crée, aux dépens de la branche accidents du travail, une charge indue, en l'obligeant à dégager des excédents dans le seul but d'afficher une diminution optique du déficit de la sécurité sociale.
Madame la ministre, je remarque d'ailleurs, que, dans les documents présentés en annexe du projet de loi de financement, vous avez soigneusement veillé à confondre la branche maladie, qui est lourdement déficitaire, et la branche accidents du travail, qui est artificiellement excédentaire.
Le gouvernement actuel se propose de continuer dans cette voie, puisque, selon ses prévisions fondées sur l'hypothèse de taux de cotisations au titre des accidents du travail inchangés par rapport à l'an dernier, l'année 1998 se caractérisera par un nouvel excédent pour la branche, qui devrait s'élever 1,4 milliard de francs.
Cette politique, qui privilégie les excédents au lieu de diminuer les cotisations, risque de décourager les entreprises qui s'impliquent dans le renforcement de la prévention des risques des accidents du travail.
En outre, le montant des cotisations dues au titre des accidents du travail se répercute automatiquement sur le coût du travail et pénalise l'emploi. Il est temps de mettre un terme à cette politique de facilité.
Par ailleurs, et je crois que les deux commissions sont d'accord pour estimer que les modifications apportées par l'Assemblée nationale quant au rôle de la Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles sont à la fois superfétatoires et inefficaces.
Ces précisions sont superfétatoires parce que le principe de la hiérarchie des normes impose déjà à la Commission de respecter la loi de financement de la sécurité sociale, comme toute autre loi, lorsqu'elle fixe les taux de majoration des cotisations.
Elles sont en outre inefficaces parce qu'elles n'apportent pas de solution de fond à ce problème. La question est, en effet, de savoir ce que la commission est censée faire lorsqu'elle est partagée entre l'application de l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale, qui lui impose de viser le strict équilibre de la branche, et la loi de financement de l'année, qui lui impose de dégager un excédent annuel.
La réponse de la commission des finances est simple : il suffit que la loi de financement ne prévoie pas d'excédent pour la branche accidents du travail. Je défendrai d'ailleurs tout à l'heure, en son nom, un amendement tendant à cette fin.
Dans l'immédiat, comme la commission des affaires sociales, nous vous demandons, mes chers collègues, de supprimer cet article de validation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 11 et 36 ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. L'avis du Gouvernement est défavorable.
Monsieur le rapporteur, le Gouvernement n'essaie pas de mêler deux branches, celle des accidents du travail et celle de la maladie.
Je suis en effet la première à reconnaître - je l'ai d'ailleurs déjà dit devant l'Assemblée nationale - qu'il est malsain, lorsque les dépenses au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles diminuent, que les cotisations ne diminuent pas.
Mais, aujourd'hui, la situation est difficile : nous sommes confrontés au déficit de la sécurité sociale. Par ailleurs, si les décisions individuelles qui ont été prises par le précédent gouvernement et qui sont aujourd'hui attaquées devant les tribunaux devaient être annulées, l'incidence serait de 1,7 milliard de francs de déficit supplémentaire.
Dans ces conditions, ou bien nous validions ces décisions individuelles prises, je le répète, par l'ancien gouvernement, ou bien nous mettions en place d'autres dispositions.
Nous aurions pu augmenter les cotisations vieillesse des entreprises, qui n'ont pas été revalorisées depuis 1982 et dont on pense qu'elles devraient l'être. Nous en avons discuté avec les organisations patronales, et nous avons adopté la solution que nous vous présentons aujourd'hui. Il est vrai que, structurellement et à moyen terme, il ne s'agit pas d'une bonne solution, mais nous sommes dans une période de crise.
J'ajoute - c'est un sujet que nous avons également abordé avec les chefs d'entreprise et les représentants des branches - qu'aujourd'hui beaucoup d'accidents du travail ne sont pas déclarés, que leur nombre est sous-estimé, tant par les entreprises que par les branches, afin d'éviter l'augmentation du taux des cotisations et les reversements vers l'assurance maladie.
Par conséquent, aujourd'hui, le système des cotisations des accidents du travail comporte des effets pervers. Tant que ne régnera pas une très grande diversité au sein des branches et dans les entreprises pour que soient effectivement déclarés les maladies professionnelles et les accidents du travail, j'éprouverai moins de scrupules pour demander, comme je l'ai fait cette année, à la branche accidents du travail de contribuer pour 1,7 milliard de francs au financement de la branche maladie.
Cependant, sur le moyen terme, ce n'est pas là une bonne politique, je le reconnais avec vous, messieurs les rapporteurs.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Cela fait dix ans que cela dure !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Non, cela fait deux ans !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 11 et 36, repoussés par le Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 9 est supprimé.
Article 10