M. le président. « Art. 23 ter . - L'objectif national de dépenses d'assurance maladie de l'ensemble des régimes obligatoires de base est fixé à 613,8 milliards de francs pour l'année 1998. »
Sur l'article, la parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi, dans mon intervention sur l'article 16, qui fixe l'objectif national de dépenses maladie, d'attirer votre attention sur la situation de l'Assistance publique de Paris.
Si la nouvelle rédaction de l'Assemblée nationale concernant la partie de l'article 1er qui traitait de l'Assistance publique ne pouvait que nous satisfaire, la manière dont la majorité sénatoriale traite le système hospitalier en proposant un plan Juppé bis nous inquiète.
Nous sommes favorables à la transparence et à la démocratie, qui permettent une meilleure répartition sanitaire entre les régions. Celle-ci ne doit pas pour autant justifier que soit tirée vers le bas la qualité des soins dispensés dans les hôpitaux parisiens.
Ce n'est pas avec la « supermaîtrise comptable » proposée par la droite que ces objectifs nécessaires pour le système hospitalier de Paris et des autres villes seront remplis.
Il est nécessaire, à Paris comme ailleurs, d'inverser la logique enclenchée précédemment et de considérer l'hôpital, non pas exclusivement à l'aune d'impératifs comptables, mais comme un investissement social et humain essentiel.
La diminution drastique des dotations l'an dernier a conduit de nombreux hôpitaux, en Ile-de-France comme ailleurs, au bord de l'asphyxie, avec les conséquences que l'on connaît : réduction de postes, suppression de lits et de services, aggravation sensible des conditions de travail du personnel.
Personnels et usagers attendent des signes forts du nouveau gouvernement en ce domaine.
Il est réjouissant de constater qu'après que la droite eut limité à 1,25 % les moyens financiers mis à la disposition de l'ensemble du système hospitalier, le Gouvernement décide de pratiquement doubler cette dotation, en la fixant à 2,3 %.
Toutefois, il est préoccupant que l'on en revienne à une logique selon laquelle certaines régions ou certains départements sont surdotés, alors que nombre d'établissements hospitaliers oeuvrent déjà dans des conditions limites et que ceux qui fonctionnent mieux font bénéficier les villes environnantes de cette situation, comme c'est le cas pour le système hospitalier de Paris.
Avant toute décision hâtive, il faut ouvrir le débat quant à l'avenir de la protection sociale en France et permettre aux états généraux de la santé qui débuteront en 1998 d'être l'intervention démocratique des citoyens, afin de pousser plus loin la réflexion sur une question aussi essentielle pour le pays.
Placer l'Assistance publique sous la tutelle de l'agence régionale de l'hospitalisation de l'Ile-de-France, qui constitue une structure que chacun s'accorde à reconnaître comme étant trop technocratique, n'est pas une solution et je remercie le Gouvernement d'avoir apporté à ce sujet les précisions nécessaires.
L'unicité de l'assistance publique doit être maintenue ; elle ne constitue nullement un obstacle au développement du partenariat avec d'autres établissements hospitaliers et avec la médecine libérale.
Le diagnostic accablant des généralistes qui exercent dans les arrondissements populaires du nord-est de la capitale sur la dégradation de l'état de santé de nombreux Parisiens montre combien il est nécessaire que les partenariats entre les établissements hospitaliers et la médecine libérale se développent.
Qu'il me soit permis, dans le cadre parisien, de soulever la question des hôpitaux de jour en psychiatrie infanto-juvénile. Nombre d'entre eux craignent que la réduction imposée depuis deux ans par la tutelle, en particulier à la dotation des établissements parisiens, ne conduise à court terme la plupart de ces institutions à cesser leurs activités.
Ce serait d'autant plus dommageable que ces établissements assurent des soins, la scolarisation et le maintien en milieu familial de plusieurs centaines d'enfants et d'adolescents qui souffrent de troubles mentaux graves. Il semble qu'il n'y ait aucune alternative à leur action qui puisse donner à ces enfants et adolescents la possibilité de se développer et de s'insérer dans la société.
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, au cours de ce débat, nous révéler les intentions du Gouvernement à ce sujet ?
Il semble que l'incidence budgétaire de mesures plus favorables envers ces établissements soit faible.
Je vous remercie de m'avoir permis, dans le cadre de l'intervention sur l'article 23 ter, de soulever ces questions parisiennes qui me tiennent à coeur.
M. le président. Sur l'article 23 ter, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 46, M. Oudin, au nom de la commission des finances, propose, dans cet article, de remplacer la somme : « 613,8 milliards de francs » par la somme : « 608 milliards de francs ».
Par amendement n° 25, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose, dans ce même article, de remplacer la somme : « 613,8 milliards de francs » par la somme : « 610,3 milliards de francs ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 46.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. On a beaucoup débattu de l'ONDAM dans la présentation de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Les chiffres sont clairs : en 1996, l'ONDAM s'élevait à 590 milliards de francs ; l'augmentation que nous avions votée l'avait porté à 600,2 milliards de francs, soit une augmentation de 1,7 %.
La commission des comptes de la sécurité sociale a fait apparaître que, tendanciellement, les dépenses d'assurance maladie de l'ONDAM progresseraient de 2,1 %. Or le Gouvernement nous propose une augmentation de 2,2 %, laquelle se situe donc au-delà de la tendance prévue par la commission des comptes.
La commission des affaires sociales, estimant que ce taux est trop élevé, propose de le ramener à 1,8 %, soit 610,3 milliards de francs.
Tout à l'heure, nous avons souhaité la reconduction des frais de gestion en francs courants pour réaliser une réelle économie, alors même que, deux ans auparavant, nous demandions une diminution des masses de l'ONDAM.
En l'occurrence, nous essayons d'adopter une position de principe : l'évolution de l'ONDAM doit être « calée » sur le taux de l'inflation, ce qui représente une augmentation de 1,3 %, puisque tel est le taux d'inflation qui est prévu par le Gouvernement. Ce taux est rigoureux, c'est exact, mais la rigueur est nécessaire, même dans ce domaine.
Je vous rappelle que la commission des finances demande la stabilisation en francs courants de l'évolution des dépenses budgétaires, c'est-à-dire une augmentation inférieure au taux de l'inflation.
C'est la raison pour laquelle elle vous propose cette mesure de grande rigueur, qui lui paraît nécessaire pour l'avenir. Si nous ne sommes pas suivis, nous aurons au moins pris date pour les années futures.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 25 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 46.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Comme l'a indiqué M. le rapporteur pour avis, en proposant de fixer à 2,2 % le taux de progression de l'ONDAM, le Gouvernement va au-delà de l'évolution définie par la commission des comptes de la sécurité sociale.
Cela ne me paraît pas raisonnable. En effet, il faut adresser des signes forts à tous les acteurs du système de santé, de façon qu'ils comprennent la nécessité de procéder à des restructurations et de s'imposer une certaine rigueur.
Toutefois, parallèlement, nous avons toujours été défavorables à une maîtrise comptable des dépenses. Or se « caler » sur l'inflation est une maîtrise purement comptable.
Je rappelle que, dans l'année à venir, des nouveaux médicaments anticancéreux extrêmement chers vont apparaître. Même si la trithérapie, qui coûtera environ un milliard de francs, est exclue de l'ONDAM, d'autres médicaments de ce type y figureront.
D'ailleurs, comme nous l'a expliqué le président de la conférence nationale de santé, les progrès thérapeutiques ne nous permettent pas de tenir un raisonnement purement comptable. Nous proposons donc de fixer l'ONDAM à 610 milliards de francs.
Nous ne sommes pas aussi laxistes que le Gouvernement, mais nous tenons à inciter les acteurs de santé à poursuivre leurs efforts - ils ont été très importants cette année - notamment pour les hôpitaux.
Conscients des progrès techniques réalisés par la médecine, nous proposons que le taux de progression de l'ONDAM soit supérieur au taux de l'inflation, soit 1,7 %-1,8 %.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 46 et 25 ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
L'un propose une progression de 1,3 %, l'autre une augmentation de 1,7 %. Le taux de 1,7 % nous paraît préférable, mais il faut rattraper les erreurs qui ont été commises l'an dernier, en particulier dans les hôpitaux, erreurs qui ont été préjudiciables aussi bien au personnel qu'aux malades.
M. Emmanuel Hamel. Vous avez raison !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 46, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 23 ter, ainsi modifié.
(L'article 23 ter est adopté.)
Article 23 bis