M. le président. « Art. 20. - A l'article 302 bis K du code général des impôts, les mots : "21 francs par passager embarqué à destination d'un territoire étranger" et "14 francs par passager embarqué vers d'autres destinations" sont remplacés respectivement par les mots : "20 francs par passager embarqué à destination de la France ou d'un autre Etat membre de la Communauté européenne" et "35 francs par passager embarqué vers d'autres destinations". »
Par amendement n° I-206, MM. Lambert et Collin, au nom de la commission des finances, proposent de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je voudrais retenir un instant votre attention parce que l'amendement de suppression que je vous propose conjointement avec M. Yvon Collin pourrait vous surprendre.
Il faut que vous sachiez que cet article 20 vise, dans son énoncé, à harmoniser les tarifs de la taxe de sécurité et de sûreté en Europe et, de plus, à augmenter ces tarifs.
Mais l'accroissement du produit de la taxe n'a pas correspondu du tout à un accroissement de même niveau des dépenses de sûreté aéroportuaires, car l'accroissement du produit est, en fait, utilisé à d'autres fins.
C'est pourquoi, compte tenu des besoins réels d'amélioration de la sûreté aéroportuaire, le rapporteur spécial des crédits de l'aviation civile, notre collègue M. Yvon Collin, a suggéré au Gouvernement la création d'un compte d'affectation spéciale, qui est la seule structure susceptible de garantir l'exécution du nécessaire programme d'investissement en matière de sûreté.
L'accroissement du produit de la taxe est, en fait, rendu nécessaire par les difficultés de financement auxquelles est confronté le budget annexe de l'aviation civile.
Enfin, l'affectation de la taxe au budget annexe pourrait être inconstitutionnelle. La commission des finances a donc estimé qu'il convenait de mettre fin à cette situation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Vous comprendrez, monsieur le président, que l'avis du Gouvernement soit défavorable à cet amendement présenté par M. le rapporteur général avec l'appui de M. Collin.
L'article 20 vise à majorer de six francs la taxe dite « de sûreté et de sécurité ». Celle-ci atteindrait ainsi le montant de vingt francs par passager pour les destinations intracommunautaires et de trente-cinq francs pour les autres. Ce prélèvement, comparé à ceux qui sont opérés à l'étranger - ils existent dans tous les pays - demeure faible, malgré cette augmentation de six francs. L'argument de compétitivité que l'on pourrait avancer me semble donc difficilement acceptable.
Monsieur le rapporteur général, vous avez dit que l'objet de cette majoration n'était pas clair. Je voudrais expliquer pourquoi le Gouvernement la propose.
Premièrement, il s'agit de mettre notre taxation en conformité avec le droit communautaire. Antérieurement, était opérée une distinction entre les voyages en France et les voyages vers l'étranger. Désormais, existeront un taux intracommunautaire et un taux extracommunautaire. Ce n'est pas ce qui soulève votre objection, je pense, monsieur le rapporteur général.
Deuxièmement, cette majoration permet de bien clarifier les modes de fonctionnement du budget annexe de l'aviation civile, en assurant désormais la couverture intégrale de toutes les activités régaliennes, sans que celles-ci soient financées par l'emprunt ; c'est de bonne gestion.
Enfin, il y a un lien direct entre cette majoration et les dépenses de sûreté et de sécurité car cette majoration rendra possible une progression des crédits d'investissement.
Ainsi, les fonds destinés aux bases aériennes augmenteront de 15 %.
Il s'agit, en particulier, de mettre en sécurité l'accès aux zones réservées sur les trente-quatre plus grands aéroports commerciaux français, ainsi que de moderniser le contrôle des bagages de soute pour les vols internationaux. Nous y serons tous sensibles.
Je crois que cette majoration de taxe est supportable par les aéroports. Elle permettra de renforcer - et, par les temps qui courent ce n'est pas une priorité secondaire - les conditions de sécurité pour nos compatriotes ou pour les personnes qui viennent en France soit pour tourisme, soit pour affaires.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Très bien !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, malheureusement, la réponse du Gouvernement n'a pas apaisé les craintes de la commission des finances.
Déjà, il ne s'agit pas d'une majoration négligeable, puisqu'elle est de 40 % d'un an sur l'autre ! Mais, ce qui m'inquiète surtout dans la réponse que vient de me donner M. le secrétaire d'Etat, c'est qu'il ne dit pas à quoi le produit de cette taxe va servir.
En réalité, mes chers collègues, il ne servira pas du tout à la sûreté, qui est notre préoccupation ; il servira à équilibrer le budget annexe de l'aviation civile. Un tel mode de fonctionnement n'est pas satisfaisant.
Ce n'est pas la première année que la remarque est faite ; chaque année, le rapporteur spécial veille, et pourtant, nous ne constatons aucun progrès.
Evidemment, personne ne peut être indifférent à la sûreté aéroportuaire. Le seul problème, c'est que le produit de la taxe ne sera pas utilisé à cette fin ; il sera destiné à alimenter le budget annexe de l'aviation civile, qui devrait trouver son équilibre autrement. Il n'est pas sain de réclamer des contributions au titre de la sûreté pour, en fait, les affecter à l'équilibre d'un budget.
En outre, mes chers collègues, lorsque les investissements nécessaires à la sûreté seront mis en oeuvre, on fera de nouveau appel à nous !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je suis contre l'amendement n° I-206.
Elue du département du Val-d'Oise, dont les habitants vivent pratiquement sur les pistes de l'aéroport Charles-de-Gaulle à Roissy, je suis particulièrement sensible aux problèmes de la sécurité.
C'est d'ailleurs cet aspect du problème qui justifie notre opposition à l'extension de l'aéroport.
Nous avons un avion au-dessus de la tête toutes les minutes, qu'il soit à l'atterrissage ou au décollage. Vous comprenez bien que, au-delà de la nuisance sonore, se pose le problème de la sécurité !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Oui.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ainsi, nous nous faisons beaucoup de souci à l'idée que circulent encore, dans le ciel francilien notamment, des Boeing semblables à celui qui a explosé en plein vol aux Etats-Unis, en juillet 1996.
En fait, le problème me paraît mal posé et l'argumentation de M. le rapporteur général mal fondée. Il importe que cette taxe soit majorée pour renforcer la sécurité. Au lieu de rejeter cette majoration, il serait préférable d'examiner d'un peu plus près le budget de l'aviation civile de façon à obtenir des assurances sur l'utilisation du produit de la taxe.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
Telles sont les raisons qui me conduisent - et je ne pense pas aller à l'encontre de la volonté de M. le rapporteur spécial, M. Yvon Collin - à maintenir cet amendement et à vous recommander de le voter.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-206.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Madame Beaudeau, sur la somme de 1,185 milliard de francs que produit cette taxe, 216 millions de francs seulement sont consacrés aux dépenses de sûreté. Si vous voulez atteindre l'objectif que vous avez indiqué tout à l'heure, et auquel je souscris, votez notre amendement !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je voudrais rassurer à la fois M. le rapporteur général et Mme Beaudeau.
Le montant de la taxe majorée doit correspondre parfaitement aux dépenses régaliennes inscrites au budget annexe de l'aviation civile.
Par ailleurs, les investissements de sécurité au sein de l'aéroport de Roissy connaîtront une augmentation de 15 %.
Ce que propose le Gouvernement va donc dans le sens souhaité par Mme Beaudeau.
M. André Boyer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. André Boyer.
M. André Boyer. Je soutiens personnellement cet amendement, présenté conjointement par M. le rapporteur général et par mon collègue Yvon Collin, rapporteur spécial du budget annexe de l'aviation civile.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-206, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 20 est supprimé.
Article 21