Séance du 19 mai 1998







M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux animaux dangereux et errants et à la protection des animaux.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 2, à l'examen de l'amendement n° 9 portant sur l'article 211-3 du code rural.
Par amendement n° 9, M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du paragraphe II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 211-3 du code rural :
« La demande d'autorisation de détention est enregistrée par le maire lorsqu'y sont jointes les pièces justifiant : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. La commission souhaite que le maire reste au centre du dispositif.
Certains auraient préféré que la demande d'autorisation soit effectuée auprès des commissariats ou des brigades de gendarmerie. La commission des affaires économiques considère qu'il appartient au maire - qui est le plus proche du terrain - de gérer l'ensemble de cette organisation. Il le fera, bien entendu, en coordination avec les services de police et de gendarmerie.
De plus, la création, auprès du préfet, d'un comité départemental relatif à la protection des animaux et à la lutte contre les animaux dangereux et errants permettra au maire de coordonner son action avec celle de l'Etat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Au nom des mêmes arguments que ceux que j'ai développés à l'encontre de l'amendement n° 7 rectifié, je ne suis pas favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 10, M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit le deuxième alinéa du II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 211-3 du code rural :
« - de l'identification du chien conforme à l'article 276-2 et pratiquée exclusivement par un vétérinaire titulaire d'un mandat sanitaire ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. L'article 276-2 est issu de la loi n° 89-412 du 22 juin 1989, qui oblige l'identification des chiens et chats qui font l'objet soit d'un transfert de propriété, soit d'une cession. Cette obligation vaut, depuis le 1er janvier 1992, pour tous les chiens et chats faisant l'objet d'un transfert de propriété, à quelque titre que ce soit.
Parallèlement à l'évolution du statut de l'animal se déroule un débat sur son identification systématique. L'identification obligatoire pose en effet la question de la « personnalité » de l'animal.
Aujourd'hui, le système d'identification le plus répandu en France est le tatouage, mais cette technique est remplacée dans certains pays d'Asie par l'inclusion d'une puce électronique sous la peau, procédé qui pourrait bientôt voir le jour dans notre pays.
L'immatriculation des animaux familiers par tatouage n'est pas obligatoire. Elle est cependant imposée pour tous les animaux vendus ou transitant par des établissements spécialisés, ainsi que pour les animaux inscrits au livre généalogique.
Les modalités du tatouage des chiens et des chats sont prévues par l'arrêté du 30 juin 1992. L'identification doit comporter l'attribution et le tatouage d'un numéro exclusif et non réutilisable, l'établissement d'une carte d'identification sur un fichier national.
Le fichier national canin est tenu par la société centrale canine, et celui des félins est placé sous la responsabilité du syndicat national des vétérinaires, tous deux agréés par les pouvoirs publics pour cette mission.
La commission souhaite que cette identification soit effectuée uniquement par un vétérinaire qui, dès lors, engage sa responsabilité vis-à-vis des pouvoirs publics. Bien entendu, cette disposition concernera uniquement les animaux qui ne sont pas encore tatoués. Le recours à un spécialiste permettra, de plus, d'éviter un certain nombre de fraudes commises par les tatoueurs agréés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Actuellement, seule l'identification des chats est exclusivement réservée aux vétérinaires. En effet, on considère qu'il s'agit d'un acte vétérinaire, l'identification de ces animaux nécessitant une anesthésie.
Pour ce qui est des chiens, un agrément peut être délivré aux éleveurs qui le désirent, après le passage d'un examen pratique et théorique auprès des services du préfet. Cet agrément ne concerne que le tatouage effectué à la pince, qui reste une méthode simple et rapide, mais dont le résultat peut parfois manquer de pérennité, le tatouage étant plus superficiel que lorsqu'il est réalisé au dermographe par un vétérinaire et avec « tranquillisation » de l'animal. Il semble préférable de laisser aux éleveurs de chiens la possibilité de pratiquer l'identification de leurs animaux dès que possible.
S'agissant de l'obligation faite au vétérinaire d'être titulaire du mandat sanitaire pour procéder à l'identification des chiens susceptibles d'être dangereux, il faut préciser que ce mandat sanitaire a été instauré dans le cadre de la lutte contre les maladies contagieuses, dont la rage, pour les carnivores domestiques. Cette condition n'apparaît donc pas comme une nécessité.
Au nom de ces arguments, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 11, M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, propose de supprimer le quatrième alinéa du II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 211-3 du code rural.
Par amendement n° 63, M. Lanier, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le quatrième alinéa du II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 211-3 du code rural :
« - de la stérilisation du chien lorsqu'il appartient à la première catégorie mentionnée à l'article 211-1. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Dominique Braye, rapporteur. Cet amendement est un amendement de coordination, les deux catégories de chiens ayant été fondues en une seule : la catégorie des chiens potentiellement dangereux.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 63.
M. Lucien Lanier, rapporteur pour avis. Cet amendement n'a plus d'objet, puisque la première catégorie qu'il mentionne a été supprimée.
M. le président. L'amendement n° 63 n'a plus d'objet.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 11 ?
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Le Gouvernement aurait été favorable à l'amendement n° 63. En revanche, il est défavorable à l'amendement n° 11.
En effet, le quatrième alinéa du paragraphe II du texte proposé pour l'article 211-3 du code rural posait une condition qui permettait au maire de s'assurer que le propriétaire pouvait garantir les dommages qui pourraient être occasionnés par son animal.
Le détenteur de cet animal doit être conscient des risques qu'il peut faire courir au public, notamment pour ce qui est des préjudices qui résulteraient des mauvaises conditions de détention de celui-ci. Cette condition concourait à la responsabilisation du maître.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 12, M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, propose de compléter le II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 211-3 du code rural par deux alinéas ainsi rédigés :
« L'autorisation de détention est accordée par le maire dans un délai franc de soixante jours. Elle donne lieu à la délivrance d'une autorisation de détention notifiée au propriétaire.
« A l'issue de ce délai et en cas de silence du maire, l'autorisation de détention est réputée accordée. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Cet amendement a deux objets : premièrement, de faire en sorte que le maire dispose d'un délai pour réunir l'ensemble des informations nécessaires au demandeur ; deuxièmement, de donner au demandeur un délai supplémentaire pour réfléchir à son acquisition, en mesurer toutes les conséquences et prendre toutes les dispositions nécessaires.
J'ai longuement insisté sur ce dernier point lors de la discussion générale et au cours de la discussion des amendements précédents. Il s'agit d'un moyen supplémentaire de lutter contre les 170 000 abandons que nous constatons chaque année sur le territoire métropolitain.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. L'avis du Gouvernement est défavorable pour des raisons déjà invoquées.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement, n° 13, M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, propose de compléter in fine le II du texte présenté par l'article 2 pour l'article 211-3 du code rural par un alinéa ainsi rédigé :
« Le maire peut toutefois refuser d'accorder une autorisation de détention à toute personne qui s'est livrée à des menaces, des actes d'intimidation ou de violence. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Le maire doit pouvoir, en dehors des cas mentionnés au paragraphe I de l'article 211-2 du code rural, refuser l'autorisation de détention à des personnes qui ont utilisé leur chien afin d'intimider directement une autre personne. Le commissariat de police ou la brigade de gendarmerie seront les interlocuteurs privilégiés du maire lors de l'instruction de cette demande d'autorisation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Par cohérence, avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement, n° 14, M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, propose, dans le paragraphe III du texte présenté par l'article 2 pour l'article 211-3 du code rural, de remplacer les mots : « la déclaration déposée » par les mots : « l'autorisation obtenue ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Il s'agit une fois de plus d'un amendement de coordination, la déclaration ayant été supprimée et remplacée par l'autorisation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements présentés par M. le rapporteur, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 15 tend à compléter le texte présenté par l'article 2 pour l'article 211-3 du code rural par un paragraphe ainsi rédigé :
« IV. - Le détenteur de chiens mentionnés à l'article 211-1 doit être en mesure à tout moment de présenter son autorisation lorsque celle-ci lui est demandée par un agent ou un officier de police judiciaire.
« En cas de non-présentation de ce document, le chien peut faire l'objet d'une confiscation temporaire par les agents et officiers de police judiciaire. Il est alors placé dans un lieu de dépôt adapté à son accueil et à sa garde.
« Le détenteur dispose d'un délai franc de huit jours pour présenter son autorisation et récupérer son chien. Les frais de garde sont à la charge du propriétaire ou du gardien.
« Si à l'issue de ce délai, le propriétaire ou le gardien ne se présente pas, le maire autorise le gestionnaire du lieu de dépôt, après avis du vétérinaire, soit à faire procéder à l'euthanasie de l'animal, soit à en disposer dans les conditions prévues au II de l'article 213-4. »
L'amendement n° 16 vise à compléter le texte présenté par l'article 2 pour l'article 211-3 du code rural par un paragraphe ainsi rédigé :
« V. - Est puni de 3 mois d'emprisonnement et de 25 000 francs d'amende le défaut de l'autorisation prévue au I. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Le recensement des chiens potentiellement dangereux et la lutte contre les élevages clandestins ne doivent pas masquer l'objectif principal de ce projet de loi qui vise à dissuader certains individus d'utiliser des animaux aux fins d'intimidation et d'actes de violence.
Afin d'aboutir réellement à ce résultat et de donner les moyens nécessaires aux forces de l'ordre amenées à intervenir dans des conditions souvent difficiles, il est nécessaire de leur donner la possibilité de pouvoir soustraire temporairement l'animal potentiellement dangereux en cas de refus de présentation de l'autorisation, et ce quelle qu'en soit la cause.
A l'issue d'un délai franc de garde de huit jours, si le propriétaire ou le gardien ne se présente pas, le maire autorise le gestionnaire du lieu de dépôt, après avis du vétérinaire, conformément aux dispositions que nous avons adoptées, soit à faire procéder à l'euthanasie de l'animal, soit à en disposer dans les conditions prévues au paragraphe II de l'article 213-4 du code rural, c'est-à-dire, éventuellement, à pouvoir le faire adopter.
Certes, cette mesure nécessitera la mise en place d'un dispositif permettant d'accueillir temporairement l'animal en attendant que le détenteur puisse présenter son autorisation. Néanmoins, cette structure devant être instituée pour satisfaire aux dispositions du nouvel article 211 du code rural, elle ne constitue donc pas une contrainte supplémentaire pour les élus des collectivités territoriales.
J'en viens à l'amendement n° 16.
Au-delà de la sanction contraventionnelle que le détenteur doit se voir infliger pour non-présentation de l'autorisation de détention, le défaut d'autorisation doit constituer un délit à la mesure du danger potentiel que représente le chien visé à l'article 211-1 du code rural. C'est la raison pour laquelle je vous propose par cet amendement, mes chers collègues, de punir de trois mois d'emprisonnement et de 25 000 francs d'amende le défaut d'autorisation prévu au paragraphe I.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 15 et 16 ?
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. L'amendement n° 15 aurait recueilli l'approbation du Gouvernement si, au lieu du mot « autorisation », j'y avais trouvé le mot « déclaration ». En l'état, j'y suis défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 16, le Gouvernement est également défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 211-3 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE 211-2 DU CODE RURAL (suite)