Séance du 12 juin 1998
M. le président. Je suis saisi de deux amendements présentés par Mme Terrade, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 370 a pour objet d'insérer, avant l'article 60, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le premier alinéa de l'article L. 351-3-1 du code de la construction et de l'habitation, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'aide personnelle au logement est versée aux ayants droit dès le premier franc, lorsque son montant mensuel est inférieur à un seuil défini par décret, elle est versée pour l'année et en une seule fois à l'allocataire.
« II. - Les deux dernières tranches du barème de l'IRPP sont relevées à due concurrence. »
L'amendement n° 371 vise à insérer, avant l'article 60, un article additionnel ainsi rédigé :
« Compléter le premier alinéa de l'article L. 351-3-1 du code de la construction et de l'habitation par deux phrases ainsi rédigées :
« Son versement ne peut être suspendu pour cause d'impayés de loyers ou de charges lorsque le locataire est de bonne foi. La bonne foi s'apprécie en tenant compte des difficultés économiques et sociales du locataire. »
La parole est à Mme Terrade, pour défendre ces deux amendements.
Mme Odette Terrade. Ces deux amendements portent sur le versement de l'APL.
Actuellement, lorsque le montant de cette allocation est inférieur à 100 francs, cette dernière n'est pas versée au bénéficiaire. Or le seuil de 1 188 francs pour une année pleine porte un préjudice considérable aux familles qui sont concernées. En effet, cette somme, qui peut sembler dérisoire, représente en fait un manque à gagner que ces ménages vivent durement au quotidien.
Aussi, notre amendement n° 370 a pour objet de verser l'aide personnalisée au logement dès le premier franc. Pour davantage de commodités administratives, nous proposons qu'elle soit versée en une seule fois lorsque son montant n'est pas très important.
Notre amendement n° 371 vise à ne pas suspendre le versement de l'APL en cas d'impayés de loyers ou de charges lorsque le locataire est de bonne foi. La notion de bonne foi s'appréciera en fonction des difficultés économiques et sociales des locataires. Cet amendement constitue une mesure préventive de l'exclusion des familles en difficulté de leur logement.
Les nombreuses associations de locataires que j'ai rencontrées ont toutes dénoncé le dispositif qui est actuellement en vigueur, car il prive de l'APL des ménages qui, justement, en ont le plus besoin. De plus, il fragilise les organismes qui accueillent nombre de personnes en grandes difficultés financières, puisque l'APL leur est directement versé.
Il s'agit de deux amendements de bon sens, pour lutter contre les exclusions. C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de les adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Sans méconnaître l'intérêt de ces amendements, la commission s'est interrogée au nom de l'équilibre général des finances et n'a pas été convaincue du bien-fondé de ces propositions. Elle souhaiterait entendre le Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Pour être légitime, le souci de Mme Terrade et de ses collègues ne saurait faire oublier les efforts faits pour les aides au logement : à l'actualisation s'est ajoutée, l'été dernier, une revalorisation ; ce matin, l'actualisation du 1er juillet a été confirmée. Il faut également souligner la décision qui a été prise afin d'harmoniser les plafonds pour le parc privé et le parc social pour les locataires modestes, nouvel effort significatif qui s'étalera sur trois ans.
Nous progressons, sans toutefois aller jusqu'à prévoir le financement de la mesure que vous nous proposez.
Si cet objectif n'a pas été prioritaire, c'est pour deux raisons, en précisant que ce seuil de non-versement est commun à l'APL et aux allocations de logement, familiale et sociale, puisque le code de la sécurité sociale contient la même disposition.
L'objectif, c'est d'éviter les coûts de gestion des aides quand elles sont trop modiques. Comme vous le savez, ce même principe est appliqué par l'Etat pour renoncer à des recettes. Ainsi, il ne perçoit pas l'impôt sur le revenu en deçà d'un certain montant.
Par ailleurs, le seuil de 100 francs a été fixé en 1988 et n'a jamais été réactualisé. C'est mieux, puisqu'il s'agit d'un seuil de non-versement. Il est donc moins élevé, relativement, en 1998 que dix ans auparavant. Ensuite, nous sommes bien en train de discuter le projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions. Or, si des personnes sont concernées par ce non-versement au motif que les droits ouverts sont modiques, c'est qu'elles disposent de revenus plus élévés que les personnes qui bénéficient d'un montant d'aides plus important.
Pour toutes ces raisons, cette disposition n'a pas fait l'objet d'une priorité. Comme le représentant du Gouvernement que je suis n'est pas en mesure de vous dire qu'il pourra la financer, il ne peut adhérer à son adoption.
M. le président. Madame Terrade, les amendements n°s 370 et 371 sont-ils maintenus ?
Mme Odette Terrade. J'ai entendu l'appel du Gouvernement. Nous retirons donc nos deux amendements.
S'agissant de la suspension du versement de l'APL en cas d'impayés de loyer alors que le locataire est de bonne foi mais connaît des difficultés économiques et sociales, nous souhaitons que notre proposition demeure une piste de réflexion et qu'elle soit prise en compte à un autre moment, afin d'avancer dans le sens souhaité.
M. le président. Les amendements n°s 370 et 371 sont retirés.
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