Séance du 2 février 1999
M. le président. Par amendement n° 575 rectifié, M. Pastor, Mme Boyer, MM. Bony, Courteau, Lejeune, Piras, Plancade, Raoult, Trémel, Bellanger, Besson, Demerliat, Désiré, Dussaut, Fatous, Godard, Journet, Percheron, Rinchet, Signé, Teston, Vidal, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 47, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières qui sont incompatibles avec le voisinage des zones habitées peuvent être autorisées, en dehors des espaces proches du rivage, avec l'accord du préfet après avis de la commission départementale des sites. Cet accord peut être refusé, notamment si les constructions ou installations sont de nature à porter atteinte à l'environnement et aux paysages. »
La parole est à Mme Boyer.
Mme Yolande Boyer. Le paragraphe I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, qui est issu de la loi du 3 janvier 1986 sur l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, prévoit que, dans les communes littorales, « l'extension de l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les agglomérations et villages existants ». Cet article vise à organiser le développement urbain de ces communes de façon à préserver les secteurs naturels et agricoles.
La jurisprudence a récemment apporté à ce texte une interprétation qui pose problème dans la mesure où elle a estimé qu'une exploitation agricole, en l'occurrence un bâtiment d'environ 1 000 mètres carrés destiné à l'élevage de volailles, « doit être regardée, alors même qu'elle doit être affectée à une activité de production animale, comme une opération d'urbanisation au sens du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ».
Cette construction ne pourrait donc être implantée qu'en continuité des villes et villages existants, alors qu'il s'agit d'une installation devant être implantée à plus de 100 mètres des habitations.
Il y a donc là une incohérence que le présent amendement tend à supprimer en autorisant, en dehors des zones urbanisées, l'implantation de constructions ou d'installations liées aux activités agricoles et forestières, évidemment incompatibles avec le voisinage des zones habitées.
Il est néanmoins proposé que ces constructions ou installations ne soient autorisées qu'en dehors des « espaces proches du rivage », qui font l'objet d'une protection spéciale au titre de la loi sur le littoral, et que leur implantation soit subordonnée à l'accord du préfet, après avis de la commission départementale des sites, qui appréciera leur impact sur l'environnement et les paysages.
Permettez-moi de citer quelques chiffres pour souligner l'importance de cet amendement. Dans une région comme la mienne, la Bretagne, qui compte 261 communes littorales, la surface agricole utilisée en communes littorales représente, en moyenne, 54 % de la surface totale de ces communes. Pour le seul département du Finistère, le nombre d'exploitations situées en communes littorales représente 37 % du nombre total d'exploitations.
Or les jugements récents auxquels je faisais allusion à l'instant, qui tendent à assimiler les constructions à usage agricole à des opérations d'urbanisation, ont des conséquences graves dans l'immédiat pour un certain nombre d'exploitants et pour la pérennisation des activités agricoles sur le littoral breton.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Souplet, rapporteur. La commission ayant été saisie de ce problème par M. Alain Gérard, elle a, de ce fait, beaucoup travaillé sur l'aspect que vient de souligner Mme Boyer. La commission est donc tout à fait favorable à l'amendement n° 575 rectifié qui, d'ailleurs, a dû être élaboré en collaboration avec beaucoup de monde comme en témoigne sa présentation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 575 rectifié.
M. Alain Gérard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gérard.
M. Alain Gérard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite rapidement m'exprimer sur cet amendement relatif à l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme et présenté par Mme Boyer, puisque j'avais également été saisi - ainsi que l'a fait remarquer M. le rapporteur - de la décision prise en mai 1997, par le tribunal administratif de Rennes, qui avait annulé deux permis de construire dans notre département.
Cette décision avait mis en lumière l'existence d'un conflit de lois et le problème juridique soulevé méritait en effet d'être traité. C'est pourquoi, dès le début de l'été j'avais alerté les services de notre commission des affaires économiques.
Aujourd'hui, M. Pastor et le groupe socialiste nous proposent, en liaison avec le Gouvernement, un amendement qui apporte une réponse au problème technique qui nous était posé, en tendant à modifier la rédaction des articles litigieux.
Cette démarche correspond tout à fait à ma préoccupation, puisque la loi sur le littoral s'en trouve renforcée et est désormais à l'abri de jurisprudences hasardeuses.
Par conséquent, je tiens à dire que je m'associe entièrement à la rédaction de cet amendement et que c'est très volontiers que je le voterai sans réserve, pour une meilleure application des textes de loi, en particulier dans notre département du Finistère.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 575 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 47.
Article 47 bis