Séance du 9 février 1999







M. le président. La parole est à M. Peyrat, auteur de la question n° 413, adressée à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Jacques Peyrat. Madame le ministre, ma question est de portée générale et tient au fait que nous prîmes connaissance assez récemment des conclusions du comité interministériel de l'aménagement du territoire du 15 décembre dernier, ainsi que du communiqué de presse conjoint de M. Michel Vauzelle, président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, et de Mme Elisabeth Guigou, en sa qualité non pas de ministre mais de présidente de la commission de l'aménagement du territoire de la région, qui se réjouissaient des nombreuses et importantes mesures prises pour l'agglomération marseillaise.
Les élus des Alpes-Maritimes, unanimes, souhaiteraient savoir s'il existe de la part du Gouvernement une volonté identique pour aider au développement de leur département.
Ils aimeraient connaître de façon précise du ministre de l'environnement que vous êtes les objectifs concernant les grands dossiers d'aménagement et de développement que les Alpes-Maritimes attendent, il est vrai, depuis de nombreuses années.
Il s'agit, en premier lieu, du développement économique, et surtout de la restructuration et de la modernisation du port de Nice ainsi que de l'endiguement du Var, de façon à permettre l'indispensable développement économique non seulement de la ville mais du moyen et du haut pays des Alpes-Maritimes.
Il s'agit, en deuxième lieu, du désenclavement de la région grâce au grand projet ouvrant l'accès vers l'Italie du Nord et améliorant les relations directes vers la région Rhône-Alpes via Digne et Grenoble. Ce projet permettrait à la région PACA et à la région Rhône-Alpes, comme l'expliquait tout à l'heure notre collègue des Hautes-Alpes, de se rapprocher d'un bassin d'activités et d'emplois prospère de onze millions d'habitants sur l'axe Milan-Turin.
Il s'agit, en troisième lieu, enfin, de l'amélioration des dessertes autour de l'agglomération niçoise, à savoir la route nationale 202 bis, l'A 58, le transport en commun en site propre, le TCSP, la fin du développement de l'autoroute urbaine sud et la construction d'un centre multimodal d'échanges, nécessaire complément du TCSP, aux entrées est et ouest de la ville.
Les élus des Alpes-Maritimes, par ma voix, vous demandent donc s'il est possible d'envisager l'inscription de ces projets vitaux pour le désenclavement et le développement du département azuréen dans le prochain contrat de plan Etat-région, comme le seront toutes les mesures prises en faveur de Marseille lors du dernier CIADT.
Madame le ministre, je dois à la vérité de dire que ces demandes, je les ai présentées en préfecture des Alpes-Maritimes, voilà quelques jours, à Mme Guigou, en sa qualité de présidente de la commission d'aménagement du territoire de la région PACA.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, le Gouvernement a bien la volonté de poursuivre l'amélioration de l'accessibilité des diverses parties du territoire, en particulier lorsqu'il s'agit d'espaces frontaliers.
Je vous rappelle que le CIADT du 15 décembre 1998, en traitant des perspectives d'avenir de l'aire métropolitaine marseillaise, n'a pas ignoré le département des Alpes-Maritimes. En effet, il s'est penché sur la nécessaire amélioration des relations interrégionales et internationales, en insistant sur la liaison ferroviaire Marseille-Toulon-Nice-Gênes.
Considérant qu'un prolongement de la ligne à grande vitesse Méditerranée vers Fréjus permettrait une amélioration des services ferroviaires vers Nice et Gênes, le Gouvernement a décidé d'approfondir les études relatives à la desserte de Toulon et de la Côte d'Azur.
En attendant, il a décidé d'examiner les modalités d'une amélioration progressive et séquentielle des services ferroviaires de Marseille et Toulon vers Nice et Gênes ; une priorité sera accordée, conformément au souhait du conseil régional, à la réalisation d'une troisième voie entre Cannes et Nice, dès que l'étude intermodale de prédéfinition actuellement en cours en aura confirmé l'opportunité.
En outre, dans le domaine des transports, deux schémas multimodaux des services de transport de personnes, d'une part, et de marchandises, d'autre part, seront élaborés à l'issue d'une très large concertation. Cette concertation, conduite par le préfet de la région, est actuellement en cours en Provence - Alpes-Côte d'Azur. Déconcentrée, cette concertation assurera, à travers le pilotage unique du préfet de région, un meilleur ancrage territorial des propositions et permettra une large association des partenaires territoriaux aux propositions faites et aux choix retenus. Parmi les projets ainsi proposés pour l'horizon 2020, des aménagements prioritaires devront être retenus afin d'être inscrits dans le prochain contrat de plan.
Monsieur le sénateur, vous avez cité un certain nombre de projets dont l'intérêt est, certes, communal, mais aussi, au-delà, intercommunal et régional ; je pense notamment au transport collectif en site propre. Vous me permettrez de penser que le renforcement de l'intercommunalité et l'émergence des agglomérations devraient permettre de consolider cette politique et de faire en sorte que ces projets puissent être pris en compte dans le volet territorial des contrats de plan.
Quant au port de Nice et à l'endiguement du Var, ce sont des sujets traités dans le cadre de la préparation de la directive territoriale d'aménagement. Le préfet travaille sur ces questions, vous le savez. Il fera, dans quelques mois, des propositions d'action qui devraient, elles aussi, être prises en compte dans la négociation du futur contrat de plan Etat-région.
J'insiste, enfin, sur le fait qu'il ne m'apparaît pas opportun de traiter de la question de l'aménagement du territoire en région PACA en opposant les métropoles marseillaise et niçoise. En lui consacrant un volet spécial, le 15 décembre dernier, le CIADT n'a pas souhaité faire de la question marseillaise un cas particulier.
Il s'agissait essentiellement de compléter le programme Euro-Méditerranée, lancé il y a déjà plusieurs années, pour lequel mon ministère s'est depuis lors mobilisé et auquel il ne « mégote » pas son soutien.
Il s'agit, plus généralement, d'accorder une priorité à la région PACA et à ses métropoles, qui connaissent des problèmes de nature sociale, économique ou géopolitique à traiter en urgence.
M. Jacques Peyrat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Peyrat.
M. Jacques Peyrat. Madame le ministre, je m'attendais, bien sûr, à ce genre de réponse, et si je vous dis, corrélativement, qu'elle ne me satisfait pas, je suis persuadé que vous n'en serez point étonnée.
Je tiens tout de même à vous faire observer - mais cela, vous le savez déjà ! - que le département des Alpes-Maritimes, que je représente aujourd'hui, est enclavé. Enclavé, il l'est au bout du territoire national entre la mer et la cordillère des Alpes, aussi bien à l'est qu'au sud, ne nous laissant qu'une échappée, amplement remplie d'ailleurs, comme toujours, vers l'ouest.
Alors, pour reprendre un terme de tour-opérateur, vous faites du tout-ferroviaire un package.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. C'est un terme que je ne me permettrais pas d'employer !
M. Jacques Peyrat. Le tout-ferroviaire, le Gouvernement, dites-vous, s'est penché dessus. Il s'est d'ailleurs tellement penché qu'il est tombé par la portière.
En tout cas, le Gouvernement ne m'apporte pas les apaisements que je pourrais souhaiter.
En effet, les projets qui sont ainsi les vôtres - vous ne le savez certainement pas - sont en totale contradiction avec ce que la totalité - moins un ! - des députés, sénateurs, conseillers régionaux, conseillers généraux, président du conseil général, membres des organismes consulaires souhaitent et attendent depuis des années.
En réalité, le fait est que l'autoroute A 8 est en voie de saturation, qu'elle est déjà quasi saturée ; selon les prévisions de votre organisme gouvernemental, la direction départementale de l'équipement, elle le sera complètement dans deux ou trois ans. Or, il faut à peu près sept à huit ans pour concevoir, imaginer, réaliser une autoroute. Ce qui veut dire que - nous le savons déjà - nous serons très vite au bord de l'asphyxie.
Madame le ministre, j'en terminerai en vous demandant de ne pas nous rappeler sans cesse qu'il ne faut pas opposer Nice à Marseille. Cela date !
Nous ne sommes pas opposés à Marseille ! Marseille est une grande ville, c'est notre capitale régionale. Nous aimons beaucoup Marseille... sauf en matière de football où, évidemment, nous avons des adversités qui se cumulent - à notre détriment, monsieur le président, je dois, hélas ! le dire.
Pour le reste, nous nous entendons bien avec Marseille. La seule chose, c'est que le Gouvernement, au regard des projets que je viens d'évoquer semble lui donner une part trop grande, trop importante, alors qu'il ne peut pas suivre sur le plan financier.
En clair, madame le ministre, la cinquième ville de France, qui est dans la même région que la deuxième, vient timidement vous dire - c'est, en réalité, le but de ma question orale - qu'il faut aussi penser à elle.

DÉSAMIANTAGE DE JUSSIEU