Séance du 3 mars 1999
CONVENTION SUR L'ÉVALUATION
DE L'IMPACT SUR L'ENVIRONNEMENT
DANS UN CONTEXTE TRANSFRONTIÈRE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 134, 1998-1999)
autorisant l'approbation de la convention sur l'évaluation de l'impact sur
l'environnement dans un contexte transfrontière (ensemble sept appendices).
[Rapport n° 189 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin,
ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, la convention sur l'évaluation de
l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière, qui fait l'objet
du présent projet de loi, trouve son origine dans la conférence tenue à Sofia
en novembre 1989 à l'occasion de la Conférence sur la sécurité et la
coopération en Europe, la CSCE.
Au titre de la troisième corbeille des travaux de la conférence étaient
lancées trois conventions en matière d'environnement destinées à apporter une
contribution à la paix en Europe en favorisant la prévention et la résolution
pacifique des litiges internationaux nés de problèmes environnementaux.
Ces conventions, consacrées respectivement à l'évaluation de l'impact sur
l'environnement d'activités en projet, aux accidents industriels, ainsi qu'aux
cours d'eau et lacs internationaux, sont pour cette raison centrées sur les
aspects transfrontières de ces questions.
En vertu de la présente convention, que la France a signée le 26 février 1991,
les parties sont tenues d'évaluer l'impact sur l'environnement d'activités en
projet susceptibles d'avoir un effet préjudiciable important sur une autre
partie, avant leur autorisation ou leur mise en service.
Ces activités sont définies par la convention et comportent les industries les
plus génératrices de nuisances ou de danger : l'énergie, en particulier les
centrales thermiques à combustible fossile ou nucléaire, la production et le
traitement de combustibles et déchets nucléaires, les grands travaux publics,
enfin, les déboisements de grandes superficies.
Pour ces activités, et chaque fois qu'un impact transfontière important est
prévisible, soit à l'appréciation de la partie d'origine, soit sur demande de
la partie susceptible d'être touchée, une consultation s'engagera entre les
parties concernées, selon des règles précisées par la convention.
Ces règles s'inspirent du principe selon lequel la partie d'origine doit
prendre au moins autant en compte les effets transfrontières des activités
conduites sur son territoire que les effets sur son propre territoire, principe
consacré dès la déclaration de Stockholm en 1972.
Parallèlement, la modification de la directive européenne concernant
l'évaluation de l'incidence de certains projets publics et privés sur
l'environnement a été menée à son terme.
Cette directive contient, sur les projets ayant une incidence
transfrontalière, des dispositions qui se rapprochent de celles de la
convention d'Espoo, avec un champ d'application semblable. Avec nos voisins de
la Communauté, la convention sera mise en oeuvre selon les modalités prévues
par cette directive modifiée, dès qu'elle sera entrée en vigueur.
Enfin, notre voisin suisse a reconsidéré sa position initialement réservée et
a ratifié la convention en septembre 1996. Des arrangements bilatéraux pourront
être passés avec la Suisse, comme le prévoit la convention, pour définir les
modalités pratiques de ces procédures.
Les consultations transfrontalières seront dans toute la mesure possible
menées en parallèle à l'enquête publique française et à la phase finale
d'instruction qui lui succède, pour éviter un allongement des délais
d'instruction. Elles seront au demeurant circonscrites à une faible proportion
des dossiers soumis annuellement en France à étude d'impact.
Dans l'esprit de la convention, la France pratique déjà des consultations
transfrontalières, sur la base du décret du 25 février 1993 relatif aux études
d'impact et sa circulaire d'application, avec les Etats membres de la
Communauté. Les affaires les plus nombreuses concernent les frontières
franco-allemande et franco-suisse, où les dossiers relatifs aux établissements
classés soumis à la directive Seveso sont examinés avec les autorités
voisines.
Dans ce contexte géographique essentiel s'agissant d'un accord fonctionnant
sur le principe de la réciprocité, l'approbation française confirmera nos
engagements européens, conformément à la déclaration ministérielle adoptée à
Sofia lors de la conférence des ministres de l'environnement d'Europe, le 25
octobre 1995.
Cette convention va également donner une impulsion à une participation plus
étendue des pays d'Europe centrale et orientale. Dans ces pays, dont le droit
environnemental est récent, l'application de la convention aux dossiers
transfrontaliers devrait aussi contribuer à améliorer la pratique interne de
l'étude d'impact.
A ce jour, vingt-sept Etats d'Europe et la Communauté européenne ainsi que les
Etats-Unis et le Canada ont signé la convention ; vingt-deux l'ont ratifiée.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention
sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte
transfrontière, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre
approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. André Rouvière,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Ainsi que vous venez de le préciser avec beaucoup de
clarté, monsieur le ministre, le texte qui nous intéresse se rapporte à la
convention signée le 25 février 1991 à Espoo, en Finlande.
M. Emmanuel Hamel.
Voilà huit ans !
M. André Rouvière,
rapporteur.
Cette convention est relative à l'évaluation de l'impact sur
l'environnement dans un contexte transfrontière.
Signée par une trentaine de pays européens - l'Autriche, le Danemark,
l'Espagne, la Finlande, la Suède, les Pays-Bas, entre autres - ainsi que par
les Etats-Unis et le Canada, cette convention tend à instaurer la pratique
d'une information et d'une consultation du pays, ou des pays voisins, dès lors
qu'un projet d'équipement, d'installation industrielle ou d'infrastructure
entraîne un impact tranfrontière probable sur l'environnement.
Le texte contient une liste des travaux et des installations concernés. Sans
prétendre être exhaustif, je rappelle qu'il s'agit de raffineries de pétrole,
de centrales thermiques, de centrales nucléaires, d'installations chimiques, de
constructions d'autoroutes, de lignes de chemin de fer, de constructions
d'oléoducs, de gazoducs de grande section, d'installations d'élimination de
déchets, de constructions de grands barrages, de réservoirs et de grandes
installations de stockage de produits pétroliers, pétrochimiques, chimiques et,
ainsi que vous l'avez indiqué, monsieur le ministre, du déboisement de grandes
superficies.
Si la France a tardé à ratifier cette convention, ce n'est pas parce qu'elle
s'en désintéresse, bien au contraire. C'est par souci de cohérence. Dès 1992,
la France appliquait une directive communautaire de 1985 en matière d'études
d'impact transfrontière.
La signature de la convention de 1991 a entraîné une révision du droit
communautaire et l'adoption, en 1997, d'une nouvelle directive qui devrait être
transposée en droit français avant la fin du mois de mars. L'approbation de la
convention interviendra donc après la mise à jour de notre réglementation, de
manière à ce qu'aucune contradiction n'apparaisse entre ses dispositions et nos
engagements européens.
La commission des affaires étrangères a approuvé le dispositif de la
convention de 1991 qui conduira à généraliser les procédures d'étude d'impact
et d'enquêtes publiques en les étendant au-delà des frontières lorsque le
projet peut avoir des incidences sur l'environnement ou sur les populations des
pays voisins. De même, les pouvoirs publics français et les populations
pourront être informés des projets envisagés par nos voisins à proximité de nos
frontières.
Nous avons bien relevé le caractère essentiellement incitatif de cette
convention, qui généralise les consultations bilatérales sans instaurer pour
autant de mécanisme juridique susceptible de remettre en cause ou de bloquer un
processus de décision strictement national. Il nous paraît également important
qu'une clause de sauvegarde autorise l'Etat d'origine du projet à ne pas
transmettre à l'Etat voisin tout renseignement couvert par le secret industriel
et commercial ou par les exigences de la sécurité nationale.
C'est dans ces limites que les autorités ou les populations d'un pays voisin
pourront prendre connaissance des dossiers et faire valoir leur point de vue,
avant que l'Etat à l'origine du projet ne prenne souverainement ses
décisions.
Etait également envisagée l'option zéro, c'est-à-dire les conséquences qu'il y
aurait à ne pas réaliser ce projet.
Par rapport au droit communautaire, ce texte n'entraînera pas pour la France
de contraintes supplémentaires. En effet, la France pratique déjà des
consultations analogues à celles qui sont prévues par la présente convention.
Mais cette convention permettra en pratique d'appliquer à nos relations avec la
Suisse les règles en vigueur dans l'Union européenne.
Cette convention va dans le sens d'une meilleure prise en compte des problèmes
d'environnement, qui ne peuvent pas toujours être traités dans un cadre
strictement national dès lors que les incidences prévisibles d'un projet
s'étendent ou peuvent s'étendre au-delà des frontières.
Dans ces conditions, la commission des affaires étrangères vous demande
d'adopter le présent projet de loi.
(Applaudissements.)
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique. -
Est autorisée l'approbation de la convention sur
l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière
(ensemble sept appendices), signée à Espoo, Finlande, le 25 février 1991, et
dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
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