Séance du 3 mars 1999






CONVENTION DOUANIÈRE
AVEC L'AFRIQUE DU SUD

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 149, 1998-1999) autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République d'Afrique du Sud pour la prévention, la recherche, la constatation et la répression des infractions douanières. [Rapport n° 191 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, à l'heure de l'internationalisation des échanges et de la mondialisation de l'économie, la grande fraude commerciale à l'échelle mondiale prend une ampleur sans précédent. Son corollaire est un accroissement et une sophistication des infractions douanières.
La complexité des circuits économiques, dans laquelle la criminalité organisée trouve de nouveaux terrains d'action, la favorise.
Dans ce contexte, le but des Etats a toujours été de se doter de moyens pour mieux appréhender les nouveaux types de délinquance, dans un cadre multilatéral ou bilatéral.
Les conventions des Nations unies sur les stupéfiants de 1961, sur les substances psychotropes de 1971 et contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes de 1988 y répondent sur cet aspect particulier.
Au sein de l'Union européenne, pour parer aux effets néfastes de la mise en place de l'union douanière et de politiques communes, les nouvelles formes de fraude ayant de graves conséquences financières et éconoiques, un mécanisme de coopération administrative a accompagné le mouvement de libéralisation des échanges et la suppression des formalités douanières.
Au niveau bilatéral enfin, la France s'est engagée très tôt sur la voie de la coopération. Les dispositions pertinentes du paragraphe 6 de l'article 65 du code des douanes dans le domaine de la coopération internationale n'offrent en effet qu'une faible base juridique pour organiser ce type de coopération, notamment en ce qui concerne la protection de la confidentialité des renseignements et informations échangés entre administrations.
Dès 1936, la France signait avec les Etats-Unis un premier accord d'assistance administrative mutuelle en matière douanière. Depuis lors, vingt-trois conventions bilatérales sont entrées en vigueur et une dizaine sont en négociation ou en cours d'approbation.
Les conventions d'assistance administrative mutuelle en matière douanière prévoient spécifiquement la communication spontanée de renseignements concernant les opérations illicites, la transmission, sur demande, de documents qui les corroborent, le recours à des enquêtes permettant l'audition de personnes suspectes ou de témoins, la possibilité d'utiliser à titre de preuves les documents et informations recueillis dans leur cadre, ainsi que la possibilité, pour les agents des douanes, de comparaître en tant que témoins ou experts devant les tribunaux de l'Etat contractant requérant. L'assistance organisée ne peut cependant porter atteinte à l'ordre public ni à un secret industriel, commercial ou professionnel.
L'assistance administrative est déterminante dans la lutte contre la fraude. Elle a été une source importante de renseignements en 1997. Les demandes d'assistance se sont accrues de 15 % au cours de cette année par rapport à 1996. Pour la zone des pays de l'Est, la progression des échanges a été de 43 %.
S'agissant de l'Afrique du Sud, la France et ce pays sont des partenaires économiques majeurs en Afrique subsaharienne. Avec plus de 8,3 milliards de francs d'échanges commerciaux en 1996, l'Afrique du Sud représente le premier partenaire économique de la France dans cette région. Or le développement des flux commerciaux s'est accompagné de fraudes, dont l'une est liée à l'importation en France de tee-shirts. Il est à craindre que le développement des échanges n'entraîne la multiplication de celles-ci.
Pour ce qui concerne les stupéfiants, l'Afrique du Sud est à la fois un pays producteur et un pays de transit.
Elle est l'un des principaux producteurs mondiaux de cannabis, en grande partie pour la consommation locale, mais sans qu'il soit exclu qu'elle se tourne davantage vers l'exportation.
Elle sert de plus en plus de plaque tournante pour la cocaïne en provenance d'Amérique latine et, dans une moindre mesure, pour l'héroïne. Le développement spectaculaire du trafic depuis le début des années quatre-vingt-dix est facilité par le nombre élevé de liaisons aériennes avec ce pays, ainsi que par le niveau élevé de développement de celui-ci.
Au total, la convention franco-sud-africaine d'assistance administrative mutuelle en matière douanière devrait permettre, à la fois, d'assurer une meilleure perception des droits et taxes, de protéger la sécurité et la santé des consommateurs et d'assurer une protection plus efficace des entreprises contre les menaces d'irrégularités liées aux échanges internationaux, telles que la concurrence déloyale ou les contrefaçons.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention d'assistance administrative mutuelle pour la prévention, la recherche, la constatation et la répression des fraudes douanières entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République sud-africaine, objet du projet de loi soumis à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Goulet rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette convention, conclue avec l'Afrique du Sud, a le même objet que la précédente : instaurer un cadre juridique précis pour la coopération entre les deux administrations douanières afin de lutter contre les fraudes commerciales et les trafics illicites. Le dispositif de cette convention, précisé dans le rapport écrit, est très voisin de celui que nous venons d'examiner et dont M. le ministre vient de rappeler les grandes lignes.
Ce texte est d'autant plus opportun qu'il a pour objet d'accompagner un développement significatif des échanges commerciaux entre l'Afrique du Sud et la France. Cela étant, le partenariat économique et commercial qui nous lie à l'Afrique du Sud est encore très modeste : si notre part de marché a quelque peu augmenté, nous nous situons encore au cinquième rang des fournisseurs de ce pays, assez loin derrière nos partenaires allemands et britanniques, les Etats-Unis et le Japon. Nous sommes également le cinquième investisseur en flux, et cent vingt-cinq entreprises françaises sont aujourd'hui présentes en République sud-africaine. Deux conventions de coopération ont par ailleurs été signées en novembre dernier ; elles contribueront à développer notre partenariat économique.
La commission des affaires étrangères reste cependant très préoccupée par le revers récemment subi par notre pays sur le marché sud-africain de l'armement.
M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Très bien !
M. Emmanuel Hamel. Il faut s'en souvenir !
M. Daniel Goulet, rapporteur. L'enjeu était considérable sur le plan financier et devait refléter l'état de nos relations politiques bilatérales, dont la visite du Président de la République avait pourtant permis de vérifier la qualité. Par-delà cet échec, la commission s'est montrée très désireuse d'être informée précisément sur les actions engagées dans le domaine de notre organisation à l'export pour le secteur de l'armement, afin d'en améliorer l'efficacité.
M. Serge Vinçon. Très bien !
M. Daniel Goulet, rapporteur. Dernier point : la prochaine signature, malgré des difficultés de dernière minute, de l'accord conclu entre l'Union européenne et Pretoria donnera un coup de fouet aux échanges commerciaux. La France a dû défendre des intérêts importants au cours d'une difficile négociation qui aura duré quatre ans. Il ressort de cet accord que, dans un délai de dix ans, 95 % des exportations sud-africaines vers l'Union seront détaxées et que 86 % des exportations européennes vers l'Afrique du Sud le seront avant douze ans.
Sur le plan politique, l'Afrique du Sud a su ancrer des institutions démocratiques et libérales où la protection des droits de l'homme tient une place essentielle.
Dans quelques mois se tiendront des élections générales qui redéfiniront profondément le paysage politique sud-africain.
Si le travail exemplaire de la commission « vérité et réconciliation » a contribué à exorciser les rancoeurs accumulées pendant les sombres années de l'apartheid, le pays reste cependant confronté à des enjeux sociaux assez dramatiques qui suscitent une impatience croissante dans une société chroniquement violente.
Les années qui viennent seront donc cruciales pour la consolidation de l'état de droit et la modernisation du pays qui conditionnent, en définitive, la paix, la paix politique et la paix sociale.
Au bénéfice de ces observations, je ne peux que vous inviter, mes chers collègues, à adopter le présent projet de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique . - Est autorisée l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud pour la prévention, la recherche, la constatation et la répression des infractions douanières signée à Midrand le 26 juin 1998, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

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