Séance du 18 mars 1999
M. le président. « Art. 1er. _ Le livre Ier du code civil est complété par un titre XII ainsi rédigé :
« TITRE XII
« DU PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ
«
Art. 515-1
. _ Un pacte civil de solidarité peut être conclu par deux
personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser
leur vie commune.
«
Art. 515-2
. _ A peine de nullité, il ne peut y avoir de pacte civil
de solidarité :
« 1° Entre ascendant et descendant en ligne directe, entre alliés en ligne
directe et entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus ;
« 2° Entre deux personnes dont l'une au moins est engagée dans les liens du
mariage ;
« 3° Entre deux personnes dont l'une au moins est déjà liée par un pacte civil
de solidarité.
«
Art. 515-3
. _ Deux personnes qui décident de conclure un pacte civil
de solidarité doivent établir une déclaration écrite conjointe organisant leur
vie commune.
« A peine de nullité, elles doivent la remettre au greffe du tribunal
d'instance dans le ressort duquel elles fixent leur résidence, en y annexant
une copie de leur acte de naissance et un certificat du greffe du tribunal
d'instance de leur lieu de naissance ou, en cas de naissance à l'étranger, du
greffe du tribunal de grande instance de Paris attestant qu'elles ne sont pas
déjà liées par un pacte.
« Le greffier inscrit cette déclaration sur un registre et en assure la
conservation.
« Il fait porter mention de la déclaration sur un registre tenu au greffe du
tribunal d'instance du lieu de naissance de chaque partenaire ou, en cas de
naissance à l'étranger, au greffe du tribunal de grande instance de Paris.
« L'inscription sur le registre du lieu de résidence confère date certaine au
pacte.
« Les modifications du pacte font l'objet d'un dépôt, d'une inscription et
d'une conservation au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte
initial.
« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation du pacte, liant
deux partenaires dont l'un au moins est de nationalité française, sont assurées
par les agents diplomatiques et consulaires français. Le dépôt, l'inscription
et la conservation des modifications du pacte sont également assurés par ces
agents.
«
Art. 515-4
. _ Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité
s'apportent une aide mutuelle et matérielle. Les modalités de cette aide sont
fixées par le pacte.
« Les partenaires sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes
contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante.
«
Art. 515-5
. _ A défaut de stipulations contraires de l'acte
d'acquisition, les biens des partenaires acquis à titre onéreux postérieurement
à la conclusion du pacte sont soumis au régime de l'indivision. Les biens dont
la date d'acquisition ne peut être établie sont également soumis au régime de
l'indivision.
«
Art. 515-6
. _ Les dispositions des articles 832 à 832-4 sont
applicables en cas de dissolution du pacte civil de solidarité.
«
Art. 515-7
. _
Supprimé
.
«
Art. 515-8
. _ Lorsque les partenaires décident d'un commun accord de
mettre fin au pacte civil de solidarité, ils remettent une déclaration
conjointe écrite au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel l'un
d'entre eux au moins a sa résidence. Le greffier inscrit cette déclaration sur
un registre et en assure la conservation.
« Lorsque l'un des partenaires décide de mettre fin au pacte civil de
solidarité, il signifie à l'autre sa décision et adresse copie de cette
signification au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« Lorsque l'un des partenaires met fin au pacte civil de solidarité en se
mariant, il en informe l'autre par voie de signification et adresse copies de
celle-ci et de son acte de naissance, sur lequel est portée mention du mariage,
au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« Lorsque le pacte civil de solidarité prend fin par le décès de l'un au moins
des partenaires, le survivant ou tout intéressé adresse copie de l'acte de
décès au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« Le greffier qui reçoit la déclaration ou les actes prévus aux alinéas
précédents porte ou fait porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte
initial. Il fait également procéder à l'inscription de cette mention en marge
du registre prévu au troisième alinéa de l'article 515-3.
« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation de la
déclaration ou des actes prévus aux quatre premiers alinéas sont assurées par
les agents diplomatiques et consulaires français qui procèdent ou font procéder
également aux mentions prévues à l'alinéa précédent.
« Le pacte civil de solidarité prend fin, selon le cas :
« 1° Dès la mention en marge de l'acte initial de la déclaration conjointe
prévue au premier alinéa ;
« 2° Trois mois après la signification délivrée en application du deuxième
alinéa, sous réserve qu'une copie en ait été portée à la connaissance du
greffier du tribunal désigné à cet alinéa ;
« 3° A la date du mariage ou du décès de l'un des partenaires.
« Les partenaires déterminent eux-mêmes les conséquences que la rupture du
pacte entraîne à leur égard. A défaut d'accord, celles-ci sont réglées par le
juge. »
Sur l'article 1er, je suis saisi de vingt-trois amendements qui peuvent faire
l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 4 est présenté par M. Gélard, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 32 est déposé par MM. Lorrain, Badré, Machet et Lambert.
Tous deux tendent à supprimer l'article 1er.
Par amendement n° 57 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent, dans le texte présenté par l'article
1er pour l'article 515-1 du code civil, après le mot : « majeures », d'insérer
les mots : « non placées sous tutelle ».
Par amendement n° 34, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le deuxième alinéa du texte
présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les
mots : « au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel » par les mots
: « à la mairie de la commune dans laquelle ».
Par amendement n° 35, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, au début du troisième alinéa du texte
présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les
mots : « Le greffier inscrit » par les mots : « Les services de l'état civil
inscrivent ».
Par amendement n° 58 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le quatrième
alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil
:
« Il transmet à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires à fin
d'inscription en marge du registre d'état civil. »
Par amendement n° 36, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le quatrième alinéa du texte
présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les
mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 37, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le quatrième alinéa du texte
présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les
mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie de
leur résidence ».
Par amendement n° 38, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le sixième alinéa du texte
présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les
mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 59 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent, à la fin de la première phrase du
premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-4 du code
civil, de remplacer les mots : « une aide mutuelle et matérielle » par les mots
: « une aide morale et matérielle ».
Par amendement n° 60 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent de compléter
in fine
le second
alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-4 du code civil
:
« Les partenaires contribuent aux charges de la vie commune en proportion de
leurs facultés. Toute dette contractée par l'un des partenaires pour les
besoins de la vie commune oblige solidairement l'autre partenaire. Toutefois,
celui-ci n'est pas tenu des dettes excessives eu égard aux ressources des
partenaires. »
Par amendement n° 45 rectifié, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M.
Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de
rédiger comme suit le texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-5 du
code civil :
«
Art. 515-5.
- Les partenaires peuvent déclarer de manière générale,
qu'ils entendent contracter un pacte civil de solidarité sous l'un des régimes
prévus au titre V du livre III du code civil.
« A défaut de stipulations spéciales dérogeant au régime de communauté ou le
modifiant, les règles établies dans la première partie du chapitre II du titre
V du livre III formeront le droit commun des partenaires liés par un pacte
civil de solidarité.
« Les règles prévues au titre V du livre III du présent code s'appliquent aux
partenaires ayant contracté un pacte civil de solidarité. »
Par amendement n° 61 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le texte
présenté par l'article 1er pour l'article 515-5 du code civil :
«
Art. 515-5.
- Chaque partenaire peut prouver par tout moyen, tant à
l'égard de l'autre partenaire que des tiers, qu'il a la propriété exclusive
d'un bien.
« Les biens sur lesquels aucun des partenaires ne peut justifier d'une
propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément. »
Par amendement n° 62 rectifié, Mme Derycke, M. Bel et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de compléter
in fine
le texte
présenté par l'article 1er pour l'article 515-6 du code civil par les mots
suivants : « pour l'attribution du domicile principal ».
Par amendement n° 39, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans la première phrase du premier
alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil,
de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance dans le ressort
duquel » par les mots : « à la mairie de la commune dans laquelle ».
Par amendement n° 63 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent, à la fin de la première phrase du
premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code
civil, de remplacer les mots : « dans le ressort duquel l'un d'entre eux au
moins a sa résidence » par les mots : « dans lequel ils avaient déposé leur
demande initiale ».
Par amendement n° 40, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, au début de la seconde phrase du
premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code
civil, de remplacer les mots : « Le greffier inscrit » par les mots : « Les
services de l'état civil inscrivent ».
Par amendement n° 41, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le deuxième alinéa du texte
présenté par l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe
du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 42, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le quatrième alinéa du texte
présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les
mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 43, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent de rédiger comme suit le cinquième
alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil
:
« Les services qui reçoivent la déclaration ou les actes prévus aux alinéas
précédents portent ou font porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte
initial. Ils font également procéder à l'inscription de cette mention en marge
du registre prévu au troisième alinéa de l'article 515-3. »
Par amendement n° 64 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le cinquième
alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil
:
« Le greffier qui reçoit la déclaration ou les actes prévus aux alinéas
précédents porte ou fait porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte
initial. Il transmet également un extrait de la déclaration à la mairie du lieu
de naissance de chacun des partenaires à fin d'inscription en marge du registre
d'état civil. »
Par amendement n° 44, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM.
Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, à la fin du neuvième alinéa (2°) du
texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de
remplacer les mots : « du greffier du tribunal désigné à cet alinéa » par les
mots : « des services de la mairie ».
Par amendement n° 65 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent, au début du dernier alinéa du texte
présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, avant les mots :
« les partenaires », d'ajouter les mots : « lors de la rupture, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
L'amendement n° 4 n'a d'autre objet que de supprimer le
PACS.
M. Dominique Braye.
C'est clair !
M. Philippe Marini,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
Soyons logiques. Depuis ce matin, nous avons adopté trois
dispositions. En premier lieu, nous avons affirmé que chacun était libre de sa
vie personnelle et, du même coup, nous avons reconnu tous les comportements ;
il n'est donc point besoin de les préciser. En deuxième lieu, nous avons
reconnu que le mariage était l'union d'un homme et d'une femme. Enfin, en
troisième lieu, nous avons inséré dans le code civil la notion de concubinage,
qui est l'union de deux personnes qui vivent en couple, quelles qu'elles
soient, quelles que soient les interprétations que les uns ou les autres
veulent donner à ce terme de couple.
Comment peut-on conserver le PACS après le dispositif que nous avons adopté
?
Je suis obligé de reprendre ici les différentes dispositions que l'Assemblée
nationale a adoptées et qui sont, je l'ai déjà dit dans mon rapport
introductif, complètement dérogatoires au droit commun des contrats. En
réalité, elles instituent un sous-mariage, nous le verrons bien avec tous les
amendements qui ont été déposés par nos collègues du groupe socialiste et du
groupe communiste républicain et citoyen et qui visent, en fait, à rapprocher
le PACS du mariage.
Prenons quelques exemples, que je ne détaillerai pas : cela prendrait trop de
temps.
Tout d'abord, pourquoi réserver, dans l'article 515-1, la signature du contrat
aux seules personnes majeures, alors que le droit général des contrats
s'applique également aux mineurs émancipés, sans oublier que l'on ne parle pas
ici des majeurs incapables qui, normalement, avec leur organe de tutelle,
peuvent également signer des contrats ?
L'article 515-2 transpose ni plus ni moins les dispositions applicables au
mariage en ce qui concerne les empêchements de signer un PACS. Pourquoi exclure
les alliés ? Pourquoi exclure les collatéraux ? Ces dispositions découlent
directement du mariage et elles démontrent bien que le PACS est une
transposition du mariage.
L'article 515-3 dispose qu'est déposée une « déclaration écrite conjointe » -
mais on ne sait pas qui dépose, si on dépose en personne ou si on fait déposer
par quelqu'un d'autre - « organisant leur vie commune ». Cette déclaration
vise-t-elle le contrat de PACS ou peut-il y avoir, à côté de la déclaration, un
contrat pour la compléter ? Nous ne savons rien ! Quel document sera opposable
aux tiers ? La déclaration ou le contrat ? Nous n'en savons pas.
M. Alain Lambert.
Très bonne question !
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
Continuons : on nous dit que, « à peine de nullité... » Mais
de quelle nullité s'agit-il ? Une nullité relative ou une nullité absolue ? Là
encore, nous n'en savons rien, il faudra que la jurisprudence décide.
Ensuite, on nous dit qu'il y a une date certaine. Mais non, il n'y a pas de
date certaine ! Le dépôt de la déclaration peut ne pas correspondre du tout
avec la transposition sur le registre tenu par le greffier ! On peut très bien
remettre la déclaration à un agent du greffe, qui décidera de l'enregistrer le
lendemain, le surlendemain ou un mois plus tard, lorsque le greffier sera
revenu de vacances ! Il n'y a donc pas de date certaine et les « pacsés »
croiront que c'est la date à laquelle ils ont remis la déclaration - ou que
l'un des deux l'aura remise, parfois, d'ailleurs, sans que l'autre le sache -
alors qu'il peut s'agir de la date que le greffier aura retenue pour
enregistrer ladite déclaration sur le registre. Là encore, que d'incertitudes
!
Venons-en à l'article 515-4, sur lequel je ne m'étendrai pas non plus : je
vous renvoie à mon rapport écrit pour ce qui est des détails.
Cet article dispose que le PACS comporte des obligations et des devoirs. Non !
Il ne comprend aucune obligation ni aucun devoir !
M. Dominique Braye.
Absolument !
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
Qu'entendez-vous par les mots « aide mutuelle matérielle » ?
Ils ne veulent rien dire ! Faut-il comprendre que l'un va bricoler et que
l'autre va faire la vaisselle ? Ces mots n'ont aucune signification !
(Vives
protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste,
républicain et citoyen.)
Mme Nicole Borvo.
Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !
M. Robert Bret.
Est-ce que vous faites la vaisselle, monsieur Gélard ?
(Sourires.)
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
Disons-le nettement, le PACS ne comporte pas de devoir. Au
demeurant, comment un contrat qu'il est possible de dénoncer à n'importe quel
moment pourrait-il comporter un devoir ?
M. Jacques Machet.
Très bien !
M. Dominique Braye.
Naturellement !
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
Quant à la solidarité pour dettes à l'égard des tiers,
comment voulez-vous qu'elle puisse être organisée puisqu'il n'y a pas de
publicité ? En effet, les pacsés pourront très bien faire état de leur
situation ou la cacher ! Les tiers pourront donc l'ignorer. Cette solidarité
est alors vaine, du moins dans l'état actuel de ce texte.
Et ne parlons pas d'indivision ! J'ai déjà abordé cette question : avez-vous
bien lu les dispositions relatives à l'indivision qui figurent dans le code
civil ? Savez-vous que tous les actes de gestion doivent être réalisés en
commun ? Imaginez un commerçant qui « pacserait » avec une personne qui
n'exerce pas cette activité, un artisan avec une personne qui n'est pas
artisan, un exploitant agricole avec une personne qui ne le serait pas ?
Comment voulez-vous que tous les actes de gestion soient contresignés par le «
pacsé » ? Ce n'est pas sérieux ! C'est oublier, au moment de la rupture, toutes
les difficultés que soulève l'indivision, sans même parler de l'enrichissement
sans cause qui pourra en découler, et l'on pourrait multiplier les exemples à
l'infini. Quant à l'article 515-6, relatif à l'attribution préférentielle, il
est également totalement délirant. Je sais bien qu'un amendement vise à limiter
simplement sa portée à l'habitation principale, mais, en ce qui concerne le
fonds de commerce, l'exploitation agricole, son application n'est pas
envisageable, sauf à se lancer dans des difficultés juridiques absolument
insurmontables.
Enfin, la cerise sur le gâteau est constituée par la fin du PACS, qui est
totalement dérogatoire au droit des contrats, y compris des contrats à durée
indéterminée : on peut y mettre fin quand on veut. Ah ! bien sûr, on nous a dit
qu'on avait ménagé une notification par exploit d'huissier trois mois
auparavant. Mais à partir du moment où l'un des deux « pacsés » a disparu,
comment va-t-on le retrouver ? L'exploit d'huissier va se perdre dans la nature
!
Mme Dinah Derycke.
Cela arrive dans bien des couples mariés !
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
L'un ou l'autre sera alors « dépacsé » sans le savoir, parce
que l'on déroge aux règles contractuelles. En réalité, la partie la plus
faible, la victime, ne sera absolument pas protégée dans ce système de
dénonciation unilatérale.
De plus, il ne pourra pas être attribué de dommages et intérêts, car, pour
cela, il faudrait qu'existe une faute. Le PACS ne génère donc pas d'obligation
réelle ni de possibilité de dédommagement de la partie la plus faible en cas de
rupture unilatérale.
J'aurais pu continuer comme cela très longtemps, en décortiquant en détail
chacun des éléments d'un PACS qu'il n'est pas possible de conserver : il
comporte tant de nids à contentieux, de difficultés, de dérogations au droit
général que l'on peut même se poser la question de sa constitutionnalité !
Dès lors, on ne peut que demander la suppression du PACS. Au demeurant, si par
malheur le texte était adopté en l'état par l'Assemblée nationale en deuxième
lecture, je suis sûr que celui qui, par mésaventure, aurait signé un premier
PACS ne le referait plus jamais compte tenu des difficultés qu'il rencontrerait
dans sa mise en oeuvre.
Disons-le franchement, en réalité le PACS est uniquement conçu pour que les «
pacsés » bénéficient des avantages fiscaux qui y sont attachés. Nous nous
trouvons là devant des inégalités, des discriminations totalement
inacceptables.
M. Dominique Braye.
Absolument !
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
Oui, mes chers collègues, le PACS n'a été fait que pour des
raisons fiscales!
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains
et Indépendants et de l'Union centriste).
M. le président.
La parole est à M. Machet, pour défendre l'amendement n° 32.
M. Jacques Machet.
Comme l'amendement n° 4, l'amendement n° 32 vise à supprimer cet article.
Pourquoi faut-il supprimer le PACS ?
D'abord, parce qu'il est ambigu, cela a été dit et redit : sa nature juridique
est indéterminée, on ne sait pas s'il s'agit d'un contrat ou d'un simple
constat.
Ensuite, parce que le PACS, contrairement au mariage, ne prévoit aucune
engagement sur l'avenir.
Mme Nicole Borvo.
Ce n'est pas un mariage !
M. Jacques Machet.
Il est une source d'instabilité et d'insécurité juridique pour tous ceux qui
le signent : la protection du plus faible n'est pas assurée alors que la
possibilité de rupture unilatérale ouverte à tout moment peut être considérée
comme un retour à la répudiation. C'est une véritable régression.
Par ailleurs, il n'est nulle part question des enfants, beaucoup l'ont dit au
cours de ces débats.
De plus, le PACS est fortement inégalitaire parce qu'il va créer une forte
inégalité entre les concubins signataires et celles et ceux qui ne le désirent
pas.
Mme Nicole Borvo.
Et alors ?
M. Jacques Machet.
L'union libre est pourtant un choix positif, revendiqué comme tel, d'un lien
strictement privé.
Enfin, le PACS menace non seulement le mariage, ce qui est fort critiquable en
soi, mais aussi le concubinage, ce qui est fort injuste. Le PACS n'est pas un
cadre juridique pour le concubinage, il est une alternative au mariage pour
sortir, précisément, du concubinage, alors que le concubinage n'a jamais été un
danger pour le mariage.
Le PACS met donc fin à la reconnaissance progressive de l'union libre, alors
que l'attachement au concubinage est réel.
Le PACS touche également à la famille, car il touche au couple. Pourtant,
c'est dans la famille que s'exprime la solidarité, que s'apprend le respect de
l'autre et que se transmettent les vraies valeurs.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
Mme Nicole Borvo.
Pas toujours !
M. Jacques Machet.
La famille, pour moi, cellule de base de la société, est un refuge pour les
jeunes et les moins jeunes. La famille, c'est aussi et surtout le lieu de
procréation privilégié, où l'enfant doit trouver le respect de sa personne, car
il est bon de le souligner : on n'élève pas un enfant, on l'aide à s'élever.
M. Jean-Luc Mélenchon.
Qu'est-ce que cela a à voir ?
M. Jacques Machet.
La famille est un maillon central de la cohésion sociale, et c'est pourquoi
elle doit être protégée et confortée.
Bref, il n'y a pas de place dans le code civil pour une nouvelle institution
entre le mariage et l'union libre, et c'est pour ces raisons que les membres du
groupe de l'Union centriste rejetteront le PACS.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 57 rectifié.
Mme Dinah Derycke.
En préambule, je tiens à rappeler que nous avons toujours dit qu'il y avait
place entre le concubinage et le mariage pour un nouveau cadre juridique, pour
encourager la stabilité des couples homosexuels ou hétérosexuels qui, prenant
l'engagement d'une vie commune, se soumettent volontairement et librement à des
devoirs, à des obligations, et qui, en retour, reçoivent effectivement des
droits. Cette forme de contact participe, en effet, de la cohésion sociale.
Contrairement à ce que propose M. le rapporteur, à savoir ni plus ni moins la
suppression du PACS, nous nous sommes donc, pour notre part, attachés à porter
sur ce texte un regard différent afin de rechercher s'il pouvait effectivement
être amélioré et enrichi, et si les conditions - très particulières, il faut le
rappeler - de sa discussion à l'Assemblée nationale n'avaient pas écarté tel ou
tel point précis.
Nous nous sommes ainsi livrés à une étude juridique de ce texte sur le fond
et nous présenterons toute une série d'amendements, dont le premier,
l'amendement n° 57 rectifié, vise à préciser que le PACS ne sera pas ouvert aux
personnes incapables placées sous tutelle.
Cet exemple montre bien que le texte adopté par l'Assemblée nationale est
parfaitement amendable et peut tout à fait être enrichi.
M. le président.
La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 34.
M. Robert Bret.
Monsieur le président, en présentant l'amendement n° 34, je défendrai
également les amendements n°s 35 à 44, qui en découlent directement.
Tous ces amendements ont trait au lieu d'enregistrement de la déclaration
organisant la vie commune de deux personnes signataires d'un PACS. C'est une
question importante.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement transférant de la préfecture vers
les tribunaux d'instance le lieu de signature du PACS. Preuve est donc apportée
que la solution de la préfecture, initialement retenue, n'était pas la
bonne.
Pour notre part, nous estimons depuis le début que le PACS devrait être signé
au service d'état civil de la mairie, plus connue, plus accessible et plus
proche du citoyen.
De plus, c'est le lieu où sont déjà déclarés tous les actes importants de la
vie : naissance, mariage, décès, y compris les certificats de vie commune et de
concubinage. Il serait donc plus pratique et plus logique de regrouper tous les
événements qui jalonnent la vie d'une personne dans un même lieu.
La solution retenue par l'Assemblée nationale, à savoir l'enregistrement au
greffe du tribunal d'instance, pose davantage de problèmes qu'elle ne semble en
résoudre.
En effet - la commission des lois l'a bien relevé - des problèmes vont
rapidement se poser, dans la pratique, du fait que les greffiers sont d'ores et
déjà en nombre insuffisant et donc surchargés. En outre, tous les tribunaux
d'instance ne disposent pas d'un greffier à plein temps.
M. le président.
L'amendement n° 35 a donc été défendu.
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 58 rectifié.
Mme Dinah Derycke.
Cet amendement vise, parmi d'autres, la publicité à l'égard des tiers, la
rapidité de la transmission et la date d'effet du PACS.
Le PACS est déclaré au greffe d'instance, mais le greffier transmet
l'information à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires aux
fins d'inscription en marge du registre d'état civil. C'est à la fois plus
simple et plus rapide et cela permet aux tiers, dans certains cas, la tenue
d'un commerce ; par exemple, d'être informés que les personnes ont été
pacsées.
M. le président.
Les amendements n°s 36, 37 et 38 ont été défendus.
La parole est à Mme Derycke, pour soutenir les amendements n°s 59 rectifié et
60 rectifié.
Mme Dinah Derycke.
L'amendement n° 59 rectifié vise à une meilleure rédaction de la formule «
aide mutuelle et matérielle », qui a été très critiquée et qui, c'est vrai,
laisse à désirer sur le plan de la langue.
Entre les personnes qui contracteront un PACS, il n'y a pas uniquement un lien
d'ordre financier, d'ordre pécuniaire ; il y a aussi, bien sûr, un soutien
moral, dans la maladie, dans les peines, mais également un partage des joies,
qui sont le lot de tous ceux qui vivent en commun.
Voilà pourquoi nous proposons la formule : « aide morale et matérielle ».
Quant à l'amendement n° 60 rectifié, il a pour objet de limiter la solidarité
à l'égard des tiers pour les dettes contractées par l'un des partenaires pour
les besoins de la vie courante.
Dans un couple marié, il y a solidarité des dettes à l'égard des tiers. La
jurisprudence a toutefois veillé à ce que cela ne se retourne pas contre le
conjoint le plus faible. En l'espèce, nous adaptons quelque peu cette réalité
aux couples qui contractent un PACS, en prévoyant que les dettes ne doivent pas
être excessives eu égard aux ressources des partenaires. C'est un élément de
justice et d'équité.
M. le président.
La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 45 rectifié.
M. Robert Bret.
L'article 515-5 du code civil, tel que rédigé par l'article 1er de la
proposition de loi, soumet les personnes liées par un PACS au régime de
l'indivision.
Ce régime présente plusieurs inconvénients.
Premièrement, l'indivision est instable. En effet, un indivisaire peut, à tout
moment, en demander le partage. Dans les faits, c'est la loi du plus fort qui
joue.
Deuxièmement, l'indivision est injuste. Par définition, dans ce régime, il n'y
a pas de communauté, et chaque partenaire accroît son patrimoine de ses propres
revenus.
Pour les biens immeubles, la preuve de la propriété est, somme toute, aisée à
apporter. En revanche, les biens meubles, dont on n'aura pas forcément gardé la
facture, seront considérés comme indivis.
En pratique donc, à supposer que l'un des partenaires soit aisé et l'autre
RMIste, le premier le sera encore plus, alors que le second n'aura droit à rien
de ce qu'ils auront acquis pendant leur vie commune.
Ce système se rapproche du régime de la séparation de biens des gens mariés
(Voilà ! sur les travées du RPR),
à la seule différence que les gens
mariés ont aussi la possibilité d'être soumis, à défaut de contrat, au régime
de la communauté.
M. Dominique Braye.
Voilà ! Ce sont les régimes matrimoniaux !
M. Robert Bret.
Les contractants à un PACS souhaitant, dans la plupart des cas, avoir un
minimum de biens communs, pourquoi ne pas leur permettre, dès lors, d'être
soumis au régime de la communauté réduite aux acquêts ?
Le texte, en l'état, ne leur permet pas ce choix.
C'est pourquoi nous proposons, par amendement, de laisser la liberté de choix
en la matière, parce que toutes les situations ne sont pas égales.
Afin d'assurer une meilleure sécurité au couple et de protéger le plus faible,
les pacsés devraient pouvoir choisir le régime qui leur est le plus adapté.
M. Dominique Braye.
C'est le mariage sans le dire !
M. le président.
La parole est à Mme Dinah Derycke, pour défendre les amendements n°s 61
rectifié et 62 rectifié.
Mme Dinah Derycke.
L'amendement n° 61 rectifié concerne l'indivision. M. le rapporteur l'a dit,
ce n'est pas un régime toujours très simple. De plus, ce régime n'est pas bien
connu de nos concitoyens.
Comme l'on peut penser, et espérer, que nombreux seront ceux qui voudront
contracter un PACS, il convient d'éviter quelques pièges.
Aux termes de notre amendement, l'indivision serait l'exception, la règle
étant la séparation de biens, ou un régime qui s'en approche.
Nous espérons lever ainsi les réticences dont nous avaient fait part certains
notaires et avocats concernant le régime qui doit régler la vie commune
matérielle, cette fois, des personnes qui auront pacsé.
M. Philippe Marini,
rapporteur pour avis.
Ce sont des régimes matrimoniaux !
Mme Dinah Derycke.
Quant à l'amendement n° 62 rectifié, il a pour objet de limiter l'application
des articles 832 à 832-4 du code civil relatifs à l'attribution préférentielle
en cas de dissolution du pacte civil de solidarité pour l'attribution du
domicile principal.
M. le président.
L'amendement n° 39 a été défendu.
La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 63 rectifié.
Mme Dinah Derycke.
En cas de rupture du PACS, dans un souci de simplification et de rapidité des
délais, nous prévoyons que la déclaration de rupture est remise au greffe où le
PACS a été originellement conclu.
M. le président.
Les amendements n°s 40 à 43 ont été présentés.
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 64 rectifié.
Mme Dinah Derycke.
Cet amendement prévoit que, à la fin du pacte civil de solidarité, le greffier
du tribunal d'instance transmettra un extrait de la déclaration à la mairie du
lieu de naissance de chacun des partenaires aux fins d'inscription en marge de
l'état civil.
M. le président.
L'amendement n° 44 a été défendu.
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 65 rectifié.
Mme Dinah Derycke.
Les partenaires ne peuvent, bien sûr, envisager les conséquences de la rupture
du PACS au moment où ils le contractent. C'est lors de la rupture qu'ils
pourront éventuellement se mettre d'accord sur les conséquences que celle-ci
entraîne pour eux.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements, à
l'exception, bien sûr, de l'amendement n° 32, qui est identique au sien ?
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
L'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements est
naturellement défavorable.
Je tiens tout de même à souligner une chose, madame le garde des sceaux.
Je salue le travail accompli par nos collègues du groupe socialiste et par
ceux du groupe communiste républicain et citoyen pour tenter d'améliorer le
PACS. Mais que dois-je constater, sinon qu'en voulant l'améliorer ils ne font
rien d'autre que du mariage ?
Cela démontre bien ce que je disais au départ, à savoir que le PACS n'est pas
amendable, sauf à en faire un sous-mariage.
M. Alain Lambert.
Exactement !
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
Que nous proposent nos collègues du groupe communiste
républicain et citoyen dans les amendements n°s 34 à 44 ? De tout transférer à
l'état civil,...
M. Jean-Jacques Hyest.
Voilà !
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
... avec l'officier d'état civil, avec une cérémonie...
exactement comme pour le mariage.
M. Robert Bret.
Avec les grandes orgues aussi !
(Sourires.)
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
Et pourquoi pas, pendant qu'on y est ?
De même, que nous propose-t-on, sinon tout simplement de réinventer les
contrats de mariage, parce que l'on s'aperçoit que le régime prévu dans le PACS
est inapplicable ?
En réalité, cela conforte ce que nous avons dit depuis le début,...
M. Dominique Braye.
Absolument !
M. Patrice Gélard,
rapporteur.
... à savoir que le PACS est un sous-mariage qui ne veut pas
dire son nom. La position de la commission des lois du Sénat en sort
renforcée.
M. Lucien Lanier.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Les amendements n°s 4 et 32, s'ils étaient adoptés,
auraient pour effet de supprimer l'article 1er de la proposition de loi adoptée
en première lecture à l'Assemblée nationale. Je ne peux donc évidemment pas les
accepter puisque, ce faisant, ils remettent en cause le principe même du pacte
civil de solidarité.
Je m'élève avec force contre l'argument qui veut que le pacte civil de
solidarité soit de nature à porter atteinte au mariage.
Je le redis ici, le mariage est une institution qui est plébiscitée par 24
millions de nos concitoyens, qui décident de s'engager solennellement devant un
officier de l'état civil, et toute l'originalité, tout l'intérêt du PACS est,
précisément, d'offrir aux couples qui ne veulent pas ou qui ne peuvent pas se
marier des droits nouveaux en contrepartie - je dis bien « en contrepartie » -
d'un engagement à une stabilité de vie commune dès lors qu'ils le souhaitent et
l'affirment socialement.
Par ailleurs, vingt et un amendements ont été déposés sur les six articles du
code civil visés à l'article 1er de la proposition de loi adoptée par
l'Assemblée nationale. Cela démontre qu'il est possible d'améliorer le texte,
et je remercie leurs auteurs de participer à ce perfectionnement.
Parmi ces amendements, je ne peux pas accepter ceux qui concernent le lieu
d'enregistrement, la mairie en l'occurrence, l'état civil ou les régimes
matrimoniaux. Il importe en effet d'éviter, comme je l'ai déjà dit, toute
confusion avec le mariage. En revanche, je peux en accepter d'autres, et je
vais donner des indications sur ce point.
Certains amendements présentés notamment par Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et
Mélenchon et portant sur la capacité, les obligations des partenaires,
l'attribution préférentielle, permettent, sous réserve d'améliorations de
rédaction, soit de lever des difficultés qui ont été soulevées lors du débat à
l'Assemblée nationale ou, postérieurement, par des universitaires, des
notaires, soit de préciser des points particuliers.
Ainsi, le Gouvernement n'est pas opposé à l'interdiction faite aux majeurs
placés sous le régime de protection de la tutelle de contracter un pacte, à la
limitation à certains biens des possibilités d'attribution personnelle ou
encore à des précisions sur les obligations des partenaires du pacte civil de
solidarité.
Pour ce qui est de l'indivision, le Gouvernement est prêt à apporter des
précisions afin d'éviter les difficultés qui pourraient surgir en l'état de la
rédaction du texte.
Si le Sénat suit la commission des lois et supprime l'article 1er de la
proposition de loi, il faudra que, sur les points que je viens de citer, le
débat se poursuive à l'Assemblée nationale.
Je tiens maintenant à répondre à la question qu'a posée M. Lambert concernant
le régime juridique prévu par le PACS, qui ne permet pas, s'agissant de la
gestion des biens, d'adopter n'importe quel mécanisme.
Pour les biens indivis - c'est volontaire de notre part - il ne peut y avoir
que gestion individuelle ou gestion commune. Dans ce cas, les titulaires du
PACS ont le choix entre ces deux régimes. Ils n'ont pas - c'est volontaire, je
le répète - toute liberté d'organiser la gestion de leurs biens. Cette
disposition était nécessaire, parce qu'il n'est pas question que le PACS puisse
concurrencer le mariage en empruntant aux dispositions des régimes
matrimoniaux.
Enfin, certains se sont inquiétés des difficultés pratiques qui pourraient
résulter de l'enregistrement du PACS au sein des tribunaux d'instance, qui
présentent l'avantage d'être très près de nos concitoyens et de nos
concitoyennes. Selon eux, ces tribunaux ne disposeraient pas toujours des
personnels nécessaires, notamment de greffiers.
Qu'il me soit permis de leur apporter les précisions suivantes : sur 473
tribunaux d'instance, 87 n'ont pas d'emploi localisé de greffier de catégorie
B, mais 86 ont un greffier en chef de catégorie A qui accomplit les missions de
greffier car la charge de travail de ces 86 tribunaux d'instance ne nécessite
pas la présence d'un encadrement intermédiaire. En conséquence, un seul
tribunal d'instance, celui de Saint-Flour, situé dans le ressort de la cour
d'appel de Riom et dans celui du tribunal de grande instance d'Aurillac, ne
dispose pas d'effectifs budgétaires de fonctionnaires, l'activité de cette
juridiction étant toutefois assurée par le tribunal d'instance de Murat, qui
est situé dans le même ressort.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 4 et 32.
M. Robert Bret.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Nous nous opposons vivement à l'adoption de ces deux amendements, qui, comme
vient de le souligner Mme le garde des sceaux, tendent à supprimer l'article
1er, remettant ainsi en cause le travail accompli pendant plusieurs semaines
par les députés.
Mais de quoi avez-vous peur, mes chers collègues de la majorité ?
Contrairement à ce que vous ne cessez de répéter, le PACS ne porte nullement
atteinte au mariage ou à la famille. Mais il n'y a pire sourd que celui qui ne
veut pas entendre !
Le pacte vise simplement, ce qui est primordial, à faciliter la vie des
couples non mariés en leur accordant des droits dont ils sont depuis trop
longtemps exclus. Le PACS est, au contraire, un élément de cohésion sociale qui
permet de faire avancer toute la société en faisant reculer les
discriminations.
Vous refusez de voir la réalité en face, vous qui vivez avec une image de la
société digne d'un autre siècle ! Pour que chacun prenne ses responsabilités
lors du vote de ces amendements de suppression de l'édifice même du PACS, nous
demandons un vote par scrutin public.
M. Jean-Luc Mélenchon.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon.
Après l'adoption de ces amendements - car nous avons de fortes raisons de
penser qu'ils pourraient bien l'être, compte tenu des votes précédents ! -
acta est fabula,
disait Auguste. La pièce est jouée, dirai-je, plutôt
que la messe est dite, pour ne pas choquer M. Chérioux !
M. Emmanuel Hamel.
La laïcité, c'est respecter la conviction des autres !
M. Jean-Luc Mélenchon.
En fait, avec le vote de ces amendements, on aura anéanti le travail de
l'Assemblée nationale.
A l'occasion de cette discussion, on a de nouveau entendu d'émouvants
plaidoyers pour la famille, dont je dirai seulement, par respect pour ceux qui
les ont prononcés - car je les respecte, eux et leurs plaidoyers - qu'ils sont
complètement hors sujet.
Personne ne peut en effet douter dans cet hémicycle que l'ensemble des «
pacsés » ont une famille et que les « pacsés » hétérosexuels ont ou auront des
enfants... à moins que l'on veuille laisser entendre qu'il s'agirait de «
sous-familles » et, pourquoi pas ? de « sous-parents » !
On a aussi entendu une nouvelle fois notre éminent rapporteur M. Gélard dire :
le PACS, c'est du « sous-mariage ». Et l'agitation de ce chiffon rouge aura
suffi pour que la majorité rappelle, à force cris, tout le dégoût que lui
inspire cette formule.
Mais, une fois de plus, cette remarque est hors sujet. En effet, cher
rapporteur, s'il y a dans le PACS des formules qui sont inspirées du mariage,
c'est parce que le mariage est la forme de communauté de vie de base que nous
connaissons jusqu'à présent et que des dispositions qui lui sont applicables
paraissent parfaitement judicieuses et méritent d'être étendues à d'autres
formes de vie commune.
M. Philippe Marini,
rapporteur pour avis.
Voilà qui est clair !
M. Jean-Luc Mélenchon.
Où est le scandale ?
Par ailleurs et dans le même temps, et c'est pourquoi nous ne pouvons accepter
ce qualificatif de « sous-mariage », le PACS, c'est autre chose que le mariage,
c'est un mode de vie commune pour d'autres situations que celles qui sont liées
par le mariage.
Il n'y a là ni offense, ni matière à s'indigner. C'est pourquoi cela
s'appelle, monsieur Patrice Gélard, non pas un « sous-mariage » mais un PACS
!
Chers collègues de la majorité sénatoriale, vous aurez passé cette journée et
la précédente à enfoncer des portes ouvertes, à vous faire peur et, ensuite, à
vous rassurer avec toutes sortes d'amendements créant d'effroyables confusions.
Nous espérons que l'Assemblée nationale saura y mettre bon ordre.
Dressons maintenant le bilan de la grande oeuvre législative à laquelle vous
aurez procédé. Ce sera trèsrapide compte tenu de la matière. A cette occasion
en effet, le Sénat de la République française aura établi - saluons cet
événement - que le mariage réunit un homme et une femme. Bravo !
(M. Braye s'exclame.)
Etait-il bien nécessaire de réunir le Sénat et de discuter pendant cinq
ou six heures pour établir ce point ? Nous pourrions aussi tenir un débat sur
l'eau chaude, ... sur le fil à couper le beurre... ou sur ce qui prête à
évidence ! Nous éblouirons ainsi ceux qui voudront bien contempler nos travaux
législatifs.
Après avoir précisé que le mariage est hétérosexuel et l'avoir tout entier
enfermé dans le caractère sexuel de ceux qui sont liés, pris soudain d'une
espèce de recul sur la question du sexe, pour ce qui est du concubinage, vous
avez estimé que, là, il n'y avait plus de sexe !
Le Sénat de la République française ne sait pas de quel sexe sont les
personnes qui vivront en concubinage ! Il n'a aucune idée sur la question et il
préfère s'en remettre aux bénéficiaires de l'opération.
M. Dominique Braye.
Non, les deux sexes sont concernés.
M. Jean-Luc Mélenchon.
Mais au passage, le concubinage, qui était une liberté dont les bénéficiaires
ne demandaient rien à personne, a été restreint par votre travail.
Voilà le bilan de notre discussion sur le PACS.
Le PACS, qui traduit une volonté d'ouverture, de liberté, d'aération de notre
société, de tolérance, de bienveillance, est réduit à ceci par le Sénat : le
mariage est le fait d'un homme et d'une femme, et personne ne sait de quel sexe
sont les concubins. Voilà le travail qui a été accompli !
Après quoi, bien sûr, dans la suite de la discussion, vous allez proposer
toutes sortes d'avantages fiscaux à tous le monde - après nous avoir reproché
d'en concéder aux pacsés - sans distinction ni de sexe ni de situation, ni de
liens de vie commune.
Voilà en quoi aura consisté votre grande opération visant à démontrer que la
majorité sénatoriale n'est pas « ringarde ». J'emploie ce mot non pas parce
qu'il me plaît, mais parce que vous avez semblé en être obsédés.
Je vous le dis en cet instant, vous êtes « reringardisés » et, après une
nouvelle lecture de ce texte à l'Assemblée nationale, vous serez non seulement
ringards mais tricards !
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Lambert.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lambert.
M. Alain Lambert.
La République est très souvent invoquée dans cette assemblée, comme dans
toutes les autres sans doute. Mais se référer à la République, c'est peut-être
d'abord s'engager à se respecter les uns les autres, à respecter les
convictions des autres.
Or, personnellement, je ne considère pas que d'avoir un point de vue formé,
établi, réfléchi sur un sujet aussi grave que celui dont nous débattons depuis
ce matin soit le fait de la ringardise... ou d'autres termes qui ont été
utilisés tout à l'heure. Je considère au contraire que c'est la traduction
d'une conception de la vie, d'une certaine idée des valeurs qui font qu'une
société vit en paix et dans le respect de ceux qui la composent.
M. Dominique Braye.
Bravo !
M. Alain Lambert.
Voilà qui m'amène à vous dire que je n'ai pas souhaité, depuis ce matin,
participer à ce débat trop philosophique pour moi. Je ne suis qu'un provincial,
monsieur Mélenchon, pardonnez-m'en !
(Sourires.)
M. Emmanuel Hamel.
Un grand provincial !
M. Alain Lambert.
Cela étant, je m'intéresse aux conséquences juridiques des textes que nous
adoptons, et je vous remercie, madame le garde des sceaux, des précisions que
vous avez apportées voilà un instant et qui nous permettent de comprendre que,
désormais, les personnes qui souscriront un PACS auront le choix entre deux
régimes - que je ne qualifierai pas de matrimoniaux - dont l'un est un peu
séparatiste et l'autre un peu communautaire.
Ces personnes n'auront aucune faculté de choisir d'autres dispositifs qui
répondraient pourtant plus précisément à leurs souhaits. Cette précision
méritait d'être donnée.
Mes chers collègues, je vais voter l'amendement de la commission avec la
conscience profonde d'être utile à mes concitoyens et à mes compatriotes. En
effet, juridiquement, le PACS est une construction dangereuse, dont on ne peut
mesurer les effets, quels que soient les efforts que vous avez faits, mes chers
collègues, pour déposer des amendements visant à le corriger.
Vous construisez un édifice dangereux et, ce faisant, vous détruisez l'agrégat
jurisprudentiel, réglementaire, doctrinal qui s'est constitué au fil des années
sur le concubinage. Cela veut dire que vous instaurez une insécurité juridique
complémentaire.
Vous avez, par la décison de construire le PACS, détruit tout ce qui existait
au plan juridique, ou vous l'avez menacé. Peut-être serai-je « ringard », mais,
en tout cas, je ne serai pas apprenti sorcier !
(Applaudissements sur les
travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Pierre Fourcade.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Je voterai l'amendement de la commission pour deux raisons.
Premièrement, comme vient de le dire excellemment mon collègue M. Lambert, je
considère que nous sommes en présence d'une construction
ex nihilo
qui
se rapproche plus ou moins du mariage sans en avoir les obligations ni les
caractéristiques, notamment la présomption
pater is est
, qui est l'une
des bases du mariage. A partir de là - et les amendements de Mme Derycke et M.
Delanoë nous le montrent bien - on peut sans doute modifier quelques éléments
du dispositif mais, structurellement, on ne peut pas le changer.
Deuxièmement, je ne comprends pas comment le Gouvernement soutient une telle
proposition alors que, de nos jours, le problème central de notre société,
c'est assurer la protection des enfants et leur adaptation aux formes nouvelles
de la société de demain.
Ce texte prévoit l'organisation de la vie en couple. Nous vivons dans une
société qui compte encore une majorité de couples hétérosexuels. Peut-être que,
dans vingt ans, la majorité d'entre eux sera homosexuelle ; on ne peut pas
savoir !
Que peut-il arriver lorsqu'un homme et une femme vivent ensemble ? La
naissance d'un enfant. Je suis stupéfait, madame le garde des sceaux, que le
Gouvernement privilégie la notion de couple au point de soutenir un texte qui
reste muet sur le problème des enfants !
Qu'arrivera-t-il aux enfants nés de personnes ayant conclu un PACS ? La
présomption de paternité existera-t-elle ? Quel sera le statut de cet enfant ?
Comment va-t-il évoluer ? Quel sera son droit sur les biens indivis ou
collectifs ? Quels seront les mécanismes de filiation ? Silence absolu !
Que nos collègues de l'Assemblée nationale déposent une proposition de loi
visant à organiser la vie du couple, c'est parfaitement naturel. Mais que le
Gouvernement s'engage dans ce processus comme le fait Mme le garde des sceaux,
je ne le comprends pas ! Moi qui, depuis vingt ans, m'occupe des problèmes
sociaux et des problèmes de famille, je suis, je l'avoue, totalement
désemparé.
Je répète ma question au Gouvernement : dans le cadre d'un PACS conclu entre
deux hommes ou entre deux femmes, sera-t-il possible d'accéder à l'adoption ou
de recourir à la procréation médicalement assistée ? Voilà deux questions
précises auxquelles je souhaite avoir une réponse. En tout état de cause, je
voterai l'amendement n° 4 de la commission. Car que l'on ne me dise pas que
l'adoption ou la procréation médicalement assistée sont impossibles en raison
d'autres lois ! A partir du moment où l'on crée un nouveau système juridique
dans lequel on fait figurer un certain nombre de dispositions alors qu'on
oublie d'en insérer d'autres, il est clair que cela deviendra possible un jour
!
Encore une fois, la vraie question qui nous est posée sur le terrain est la
suivante : quel sera le statut des enfants de deux personnes ayant conclu un
PACS ?
M. Jacques Pelletier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier.
Contrairement à mes amis MM. Lambert et Fourcade, je suis contre les
amendements de suppression n°s 4 et 32, car je suis favorable au principe du
PACS - qui, à mes yeux, n'est ni un mariage ni un sous-mariage - et cela pour
deux raisons.
Premièrement, près de 40 % des naissances ont lieu aujourd'hui hors mariage.
C'est un phénomène de société dont nous devons tenir compte, et il est inutile
de se voiler la face. D'ailleurs, qui parmi nous ne connaît pas chez ses
enfants, dans sa famille ou dans son entourage proche des personnes vivant en
concubinage et donc confrontées à la fragilité que suppose une telle situation
?
Le PACS apporte des garanties juridiques, administratives, fiscales, ce qui
est une bonne chose.
Deuxièmement, en tant qu'élu, mais surtout en tant que médiateur de la
République, j'ai connu des drames - je dis bien des drames - au sein de couples
vivant, souvent de longue date, en concubinage homosexuel ou hétérosexuel, tout
spécialement au moment du décès de l'un des concubins. Là encore, le PACS
constitue une réponse, imparfaite, j'en suis sûr, mais une réponse tout de même
à de telles situations de détresse.
En revanche, madame la ministre, je souhaite beaucoup qu'à l'occasion de la
navette vous usiez de votre influence pour améliorer sérieusement ce texte, qui
en a bien besoin !
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que
sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Emmanuel Hamel.
Oh que oui !
M. Philippe Marini.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini.
Les données du débat sont à présent parfaitement explicites et, par touches
successives, les positions défendues et préconisées par la majorité du Sénat
s'établissent clairement.
En premier lieu, pour nous, l'essentiel, la pierre angulaire de la famille et
de la société, c'est bien le mariage. Nous l'avons conforté par une rédaction
écartant les dérives ou les tentations qui se font jour dans des pays voisins
et qui, un jour ou l'autre, pourraient naître dans certains esprits dans notre
pays.
En deuxième lieu, notre approche est réaliste et factuelle. Sans porter de
jugement sur les comportements individuels, nous avons recherché et trouvé une
formulation concernant le concubinage, situation de fait à laquelle
correspondent certains droits et certains devoirs.
En troisième lieu - nous y viendrons dans la suite de cette discussion - nous
précisons cette approche réaliste par des dispositifs juridiques et fiscaux qui
tiennent compte de la réalité de la vie en commun de certains couples, quels
que soient leur choix de vie.
Cela étant fait et le tout formant un ensemble cohérent, il est clair que le
PACS n'a aucune place dans ce dispositif et qu'il tombe de lui-même. Par
évidence, nous voterons contre cette forme de contrat, qui ne répond
strictement à aucune nécessité ni à aucune opportunité.
Au demeurant, madame le ministre, dans les réponses que vous avez faites à nos
collègues du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen,
j'ai entendu un certain nombre d'arguments qui me renforcent dans le sentiment
que je viens d'exprimer.
Lorsque Mme Derycke vous disait que l'indivision ne lui semblait pas être une
situation acceptable, vous lui avez répondu que des précisions devront être
apportées pour éviter certaines difficultés. Puis vous avez souligné que la
gestion des biens des « pacsés » pourrait être individuelle ou commune. Cela
ressemble furieusement - plusieurs de nos collègues l'ont remarqué - à des
dispositions issues des régimes matrimoniaux existants. La confusion se trouve
recréée entre l'institution du mariage et la formule hybride qu'est votre pacte
civil de solidarité.
Vous avez conclu en indiquant que les partenaires n'auraient pas toute liberté
d'organiser la gestion de leur bien. Avec M. le rapporteur de la commission des
lois, nous avons fait valoir, que dans certaines circonstances, s'agissant
notamment de professionnels, de commerçants et d'artisans, il pourrait résulter
de cette formule des engagements extrêmement confus, pour les personnes
concernées et pour les tiers, et que rien de sérieux n'avait été proposé aux
assemblées parlementaires pour porter remède à de telles situations.
Madame le ministre, par rapport à ce « nid » à contentieux, à embrouilles,
qu'est finalement votre pacte, la stratégie défendue par la majorité
sénatoriale est parfaitement claire et limpide, parfaitement ouverte et
parfaitement adaptée aux réalités du temps. C'est en vertu de cette analyse
globale, que bien entendu, je voterai ces amendements de suppression.
M. Emmanuel Hamel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Robert Bret.
Ça va chauffer !
(Sourires.)
M. Emmanuel Hamel.
Comme l'explique si bien et si justement la présidente de l'Association pour
la promotion de la famille - je vous invite, mes chers collègues, à relire et à
méditer ses propos, qui figurent à la page 222 du rapport - le PACS « détruit
le mariage républicain, détruit la cellule familiale ». On peut ajouter qu'il
constitue une menace pour l'enfance.
C'est la raison pour laquelle, bien entendu, je voterai les amendements de
suppression de l'article 1er.
M. Claude Estier.
C'est un peu court !
Mme Nicole Borvo.
Le PACS n'est pas une obligation !
M. Robert Bret.
Il ne faut pas toujours croire tout ce qui est écrit dans les rapports !
(Sourires.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 4 et 32, repoussés par le
Gouvernement.
Je suis saisi de trois demandes de scrutin public émanant, la première, de la
commission des lois, la deuxième, du groupe communiste républicain et citoyen
et, la troisième, du RPR.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le
résultat du dépouillement du scrutin n°
86:
Nombre de votants | 314 |
Nombre de suffrages exprimés | 314 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 216 |
Contre | 98 |
M. Emmanuel Hamel. Et il s'est ainsi grandi en adoptant !
M. le président. En conséquence, l'article 1er est supprimé et les amendements n°s 57 rectifié, 34 et 35, 58 rectifié, 36 à 38, 59 rectifié, 60 rectifié, 45 rectifié, 61 rectifié, 62 rectifié, 39, 63 rectifié, 40 à 43, 64 rectifié, 44 et 65 rectifié n'ont plus d'objet.
Article additionnel après l'article 1er