Séance du 6 avril 1999
M. le président. « Art. 1er. - Le chapitre VI du titre 1er du livre II de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Chapitre VI
« Communauté d'agglomération
« Section 1
« Création
«
Art. L. 5216-1
. - La communauté d'agglomération est un établissement
public de coopération intercommunale regroupant plusieurs communes formant un
ensemble de plus de 50 000 habitants d'un seul tenant et sans enclave, autour
d'une ou plusieurs communes centre de plus de 15 000 habitants. Ces communes
s'associent au sein d'un espace de solidarité, en vue d'élaborer et conduire
ensemble un projet commun de développement urbain et d'aménagement de leur
territoire.
« Sur un territoire présentant une continuité urbaine et hors Ile-de-France,
il ne pourra être créé qu'une seule communauté d'agglomération.
«
Art. L. 5216-2
. - La communauté d'agglomération est créée sans
limitation de durée.
« Section 2
« Le conseil de la communauté d'agglomération
«
Art. L. 5216-3
. - Dans un délai de trois mois à compter de la
notification de l'arrêté fixant le périmètre de la communauté, le nombre et la
répartition des sièges au sein du conseil de la communauté d'agglomération sont
fixés :
« - soit par accord unanime des conseils municipaux des communes intéressées
;
« - soit en fonction de la population, par décision des conseils municipaux
des communes intéressées dans les conditions de majorité qualifiée requises
pour la création de la communauté.
« Dans les deux cas, chaque commune dispose au minimum d'un siège et aucune
commune ne peut disposer de plus de la moitié des sièges.
« La décision institutive ou une décision modificative peut prévoir la
désignation d'un ou plusieurs délégués suppléants, appelés à siéger au conseil
avec voix délibérative en cas d'empêchement du ou des titulaires.
« Section 3
« Conditions d'exercice des mandats des membres du conseil de la communauté d'agglomération
«
Art. L. 5216-4
. - Les dispositions des articles L. 5215-16 à L.
5215-18 relatives aux conditions d'exercice du mandat de membre du conseil de
la communauté urbaine sont applicables aux membres du conseil de la communauté
d'agglomération sous réserve des dispositions de l'article L. 5211-12.
« Section 4
« Compétences
«
Art. L. 5216-5
. - I. - La communauté d'agglomération exerce de plein
droit au lieu et place des communes membres les compétences suivantes :
« 1° En matière de développement économique : aménagement, entretien et
gestion de zones d'activité industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale,
touristique, portuaire ou aéroportuaire qui sont d'intérêt communautaire ;
actions de développement économique d'intérêt communautaire ;
« 2° En matière d'aménagement de l'espace communautaire : schéma directeur et
schéma de secteur ; création et réalisation de zones d'aménagement concerté
d'intérêt communautaire ; organisation des transports urbains au sens du
chapitre II du titre II de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation
des transports intérieurs, sous réserve des dispositions de l'article 46 de
cette loi ;
« 3° En matière d'équilibre social de l'habitat sur le territoire
communautaire : programme local de l'habitat ; politique du logement, notamment
du logement social, d'intérêt communautaire et action, par des opérations
d'intérêt communautaire, en faveur du logement des personnes défavorisées ;
amélioration du parc immobilier bâti d'intérêt communautaire ;
« 4° En matière de politique de la ville dans la communauté : dispositifs
contractuels de développement urbain, de développement local et d'insertion
économique et sociale d'intérêt communautaire ; dispositifs locaux, d'intérêt
communautaire, de prévention de la délinquance.
« L'exercice de la compétence d'organisation des transports visée au 2°
ci-dessus peut être délégué à toute autorité compétente en matière de
transports urbains au sens de l'article 27 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre
1982 précitée dont le périmètre inclut le périmètre de la communauté
d'agglomération.
« II. - La communauté d'agglomération doit en outre exercer au lieu et place
des communes au moins trois compétences parmi les cinq suivantes :
« 1° Création ou aménagement et entretien de voirie d'intérêt communautaire
;
« 2° Assainissement et eau ;
« 3° Protection et mise en valeur de l'environnement, politique du cadre de
vie, lutte contre la pollution de l'air, lutte contre le bruit, collecte et
traitement des déchets des ménages et déchets assimilés ;
« 4° Construction, aménagement, entretien et gestion d'équipements culturels
et sportifs d'intérêt communautaire et équipements scolaires publics,
élémentaires et préélémentaires ;
« 5° En matière de développement durable : efficacité énergétique et maîtrise
des consommations d'énergie.
« Le choix de ces compétences est arrêté à la majorité qualifiée requise pour
la création.
« III. - Lorsque l'exercice des compétences mentionnées aux I et II du présent
article est subordonné à la reconnaissance de leur intérêt communautaire, cet
intérêt est déterminé à la majorité des deux tiers du conseil de la communauté
d'agglomération.
« IV. - La communauté d'agglomération peut, dans les conditions prévues par
convention à l'initiative de l'une ou l'autre des parties, exercer pour le
département tout ou partie des compétences d'aide sociale que celui-ci lui
confie.
«
Art. L. 5216-6
. - Lorsque des communes ont décidé de créer une
communauté d'agglomération, celle-ci est substituée de plein droit au syndicat
de communes préexistant dont le périmètre est identique au sien, pour la
totalité des compétences qu'il exerce.
« La communauté d'agglomération est également substituée de plein droit, pour
les compétences qu'elle exerce, au syndicat de communes préexistant inclus en
totalité dans son périmètre.
« La substitution de la communauté d'agglomération au syndicat de communes
s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L.
5211-41.
«
Art. L. 5216-7
. - I. - Lorsqu'une partie des communes d'un syndicat
de communes ou d'un syndicat mixte fait partie d'une communauté
d'agglomération, par création de cette communauté ou par transformation d'un
établissement public de coopération intercommunale en communauté
d'agglomération, et que cette communauté est incluse en totalité dans le
syndicat, cette création ou cette transformation vaut retrait du syndicat des
communes membres de la communauté pour les compétences visées aux I et II de
l'article L. 5216-5 que le syndicat exerce. Les conditions de ce retrait sont
fixées, à défaut d'accord entre les parties, par arrêté du ou des représentants
de l'Etat dans le ou les départements concernés après avis du comité syndical
et des conseils municipaux.
« Pour l'exercice des compétences qui ne sont pas visées par les I et II de
l'article L. 5216-5, la communauté d'agglomération est substituée au sein du
syndicat aux communes qui la composent. Cette disposition ne modifie pas les
attributions du syndicat de communes, qui devient syndicat mixte au sens de
l'article L. 5711-1, ou du syndicat mixte intéressé. Elle ne modifie pas non
plus le périmètre dans lequel ce syndicat exerce ses compétences.
« II. - Lorsqu'une partie des communes d'un syndicat de communes ou d'un
syndicat mixte est associée avec des communes extérieures à ce syndicat dans
une communauté d'agglomération, par création de cette communauté ou par
transformation d'un établissement public de coopération intercommunale en
communauté d'agglomération, cette création ou cette transformation vaut retrait
du syndicat des communes membres de la communauté d'agglomération pour les
compétences et dans les conditions prévues au premier alinéa du I ci-dessus.
Elle vaut substitution de la communauté d'agglomération aux communes pour les
compétences et dans les conditions prévues au second alinéa du même
paragraphe.
« III. - Lorsque le périmètre d'une communauté d'agglomération est étendu,
conformément à l'article L. 5211-18, par adjonction d'une ou de plusieurs
communes membres d'un ou de plusieurs syndicats de communes ou syndicats
mixtes, cette extension vaut retrait des communes des syndicats ou la
substitution de la communauté d'agglomération aux communes au sein des
syndicats dans les cas et conditions prévus aux I et II ci-dessus.
« Lorsque les compétences d'une communauté d'agglomération sont étendues,
conformément à l'article L. 5211-17, à des compétences antérieurement déléguées
par tout ou partie des communes qui la composent à un ou plusieurs syndicats de
communes ou syndicats mixtes, la communauté d'agglomération est substituée à
ces communes au sein du ou des syndicats dans les conditions visées au second
alinéa du I ci-dessus.
« Section 5
« Dispositions financières
«
Art. L. 5216-8
. - Les recettes du budget de la communauté
d'agglomération comprennent :
« 1° Les ressources fiscales mentionnées aux articles 1609
nonies
C et
1609
nonies
D du code général des impôts ;
« 2° Le revenu des biens, meubles ou immeubles, de la communauté
d'agglomération ;
« 3° Les sommes qu'elle reçoit des administrations publiques, des
associations, des particuliers, en échange d'un service rendu ;
« 4° Les subventions et dotations de l'Etat, de la région, du département et
des communes ;
« 5° Le produit des dons et legs ;
« 6° Le produit des taxes, redevances et contributions correspondant aux
services assurés ;
« 7° Le produit des emprunts ;
« 8° Le produit du versement destiné aux transports en commun prévu à
l'article L. 2333-64.
« Section 6
« Dissolution
« La répartition des personnels concernés entre les communes membres est
soumise, pour avis, aux commissions administratives paritaires compétentes.
Elle ne peut donner lieu à un dégagement des cadres. Les personnels concernés
sont nommés dans un emploi de même niveau et en tenant compte de leurs droits
acquis. Les communes attributaires supportent les charges financières
correspondantes. »
Sur l'article, la parole est à M. Murat.
M. Bernard Murat.
Monsieur le ministre, votre projet de loi vise, notamment, à rééquilibrer le
développement de l'intercommunalité en donnant un coup d'accélérateur à la
coopération en milieu urbain. Dans cet objectif, vous proposez de créer une
nouvelle entité juridique : la communauté d'agglomération.
Sur le fond, je ne peux qu'approuver ce projet. La communauté d'agglomération,
dans la mesure où elle est librement consentie, présente de véritables atouts
pour permettre, sur le long terme, la mise en place d'une excellente
coopération urbaine ancrée sur un solide socle de compétences obligatoires en
matière de développement économique, d'aménagement de l'espace, d'habitat et de
politique de la ville.
En revanche, monsieur le ministre, je suis beaucoup plus réservé sur la part
faite à l'intercommunalité ruro-urbaine et sur un des critères de création
retenus par le projet de loi : la continuité territoriale.
Si ce critère semble parfaitement cohérent pour les zones fortement
urbanisées, il paraît en revanche ignorer les départements à dominante rurale,
la Corrèze par exemple.
Dans ce dernier cas, ne pourrait-on substituer à la notion de continuité
territoriale celle, plus souple, de proximité territoriale ? En effet, quel
intérêt y aurait-il à relier deux bassins de vie, voire des communes
limitrophes de départements voisins, par de nouvelles voies rapides au prix
d'efforts budgétaires et techniques considérables, si on ne leur permet pas
in fine
de mettre en place un système intercommunal ?
Ne serait-il pas possible de laisser au préfet, lors de la détermination du
périmètre de l'EPCI, le soin d'apprécier, au regard de ces critères
alternatifs, la viabilité de la communauté d'agglomération en fonction du
caractère plus urbain ou plus rural de chaque département ?
En outre, je crains que les seuils démographiques retenus ne privent certaines
zones de notre territoire d'un recours à ce type d'intercommunalité, ce qui
pourrait contribuer à les marginaliser davantage. Or - n'est-ce pas là
l'ambition de ce projet de loi ? - la communauté d'agglomération doit être un
outil de développement du territoire où, précisément, le tissu urbain est le
plus fragile.
Afin de permettre le développement harmonieux des départements ruraux, il me
semble également important de prévoir une exception pour les préfectures, voire
pour des sous-préfectures, villes centres, et de leur donner la possibilité de
choisir, avec les communes proches, de créer une communauté d'agglomération,
même si le seuil du critère démographique n'est pas atteint.
Sur un plan plus général, il me semble d'ailleurs qu'il conviendrait
d'abaisser ces seuils mal adaptés à la réalité des départements ruraux.
Toutes ces remarques ont un seul objectif : permettre à certaines zones
urbanisées des départements ruraux de profiter des avantages financiers liés à
la communauté d'agglomération. Nous touchons ici au principe même de la vraie
solidarité entre les territoires : les rapprocher afin de permettre un
développement harmonieux entre eux. Ainsi, cela leur donnerait la possibilité
de rattraper leur retard par rapport aux départements plus riches.
Ensuite, j'estime que ce projet doit préserver l'équilibre existant entre les
collectivités locales de plein exercice et les établissements publics de
coopération intercommunale. A terme, les communautés d'agglomération ne doivent
pas se substituer aux départements.
Bien au contraire, nos concitoyens attendent de nous la mise en place d'un
travail en complémentarité permettant de faire des économies d'échelle et de
moyens. L'objectif est de mieux promouvoir le travail en commun de chaque
collectivité et de favoriser une harmonisation fiscale au sein d'un même bassin
de vie pour mettre un terme aux effets pervers de la concurrence entre les
communes qui facilite le chantage aux aides et subventions, confrontant souvent
les collectivités d'accueil à de très grands risques économiques.
La mise en place d'une taxe professionnelle unique au sein de la communauté
d'agglomération constitue selon moi la meilleure garantie de solidarité et de
projet d'union entre les nouveaux partenaires, et d'égalité fiscale entre des
communes libres. Toutefois, ces effets dépendront des orientations qui seront
prises dans la réforme de la taxe professionnelle en cours et, de ce point de
vue, nous attendons les choix du Gouvernement. Dans ce domaine, un manque de
vérité remettrait en cause toute l'architecture de cette loi et désespérerait
les maires et les élus qui sont prêts pour cet enjeu majeur ; il s'agit en
effet de l'avenir de nos enfants. Comme le souhaitait le général de Gaulle, ils
placent l'homme au centre de votre projet de loi.
(Applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, dans la mesure où j'ai participé à
la préparation et à l'examen de ce texte, je ne souhaitais pas intervenir dans
la discussion générale. Mais, monsieur le ministre, vous m'avez cité tout à
l'heure quand vous avez dit que les équilibres de la dotation globale de
fonctionnement étaient délicats et difficiles. C'est précisément sur ce point
que je voudrais intervenir.
L'article 1er, clé du projet de loi, crée une nouvelle structure
intercommunale : la communauté d'agglomération. Celle-ci s'intercale entre la
communauté urbaine et la communauté de communes.
Ces trois structures vont disposer d'incitations prélevées sur la DGF. Il faut
savoir que, sur la somme qui est répartie à ce titre chaque année, le poids des
structures existantes représente à l'heure actuelle un prélèvement de 4,5
milliards de francs.
Monsieur le ministre, vous venez d'annoncer deux choses en réponse aux
orateurs : la communauté d'agglomération bénéficiera d'une dotation de 250
francs par habitant et la dotation des communautés de communes sera revalorisée
lorsque ces dernières exerceront des compétences permettant une certaine
structuration, thème sur lequel nous sommes ici très nombreux à vous suivre.
En regard de ces nouvelles charges, le Gouvernement ne prévoit dans le projet
de loi qu'une majoration budgétaire de 500 millions de francs, qu'il faut
rapporter aux 4,5 milliards de francs qui, aujourd'hui, pèsent sur la DGF. Je
voudrais exprimer une crainte.
Comme tout le monde ici, je souhaite que votre texte ait du succès. En effet,
plus nous constituerons de communautés d'agglomération ou de communautés de
communes, meilleure sera notre gestion, et cela, comme l'a dit tout à l'heure
notre collègue M. Braye, non en raison d'une augmentation de la fiscalité qui
pèse sur nos contribuables, mais grâce à une rationalisation de nos dépenses et
parce que, à chaque fois, nous pourrons trouver la bonne dimension pour
l'espace, pour l'emploi, pour la politique de la ville, pour la collecte
sélective des déchets, etc.
Je crains toutefois que vos 500 millions de francs ne représentent guère
qu'une goutte d'eau par rapport au poids de l'intercommunalité. La question que
je vous pose est donc simple : ces 500 millions de francs ne sont-ils qu'un
début de participation budgétaire à l'effort de financement de
l'intercommunalité ? Si le besoin s'en faisait sentir, cette somme serait-elle
augmentée ?
Je vous donne acte, au demeurant, qu'il faut y ajouter les 500 millions de
francs que le Gouvernement, à l'occasion de la loi de finances pour cette
année, a affectés à la majoration de la dotation de solidarité urbaine, la DSU.
Bien que le Gouvernement ait accepté de consacrer hier 500 millions de francs à
la DSU et, demain, 500 millions de francs aux communautés d'agglomération, le
total reste toujours faible par rapport au poids de l'intercommunalité,
d'autant que, nous le savons tous, monsieur le ministre, la DGF de l'an 2000
sera difficile à établir en raison d'une rectification des bases. En effet,
nous nous sommes fondés, pour la DGF 1999, sur des prévisions quelque peu
surestimées qu'il nous faudra réviser. Il y a un indice qui est très bon, c'est
l'indice des prix : on est parti sur un taux de 1 % ; on aura 0,3 %. En matière
de croissance, en revanche, on a raisonné sur un taux de 2,8 % ou de 2,7 %, or,
nous le savons, elle sera moindre.
Le Gouvernement, désireux de faire aboutir son texte dans de bonnes
conditions, sera-t-il prêt à nous suivre et à majorer quelque peu cette
provision de 500 millions de francs si elle se révélait insuffisante pour
financer correctement de nouvelles formes d'intercommunalité ?
(Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées
de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Mes chers collèques, nous allons maintenant interrompre nos travaux ;
conformément à la décision de la conférence des présidents, nous les
reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à vingt et une
heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jacques Valade.)