Séance du 8 juin 1999
M. le président. La parole est à M. Gaillard, auteur de la question n° 494, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. Yann Gaillard. Madame le secrétaire d'Etat, j'attire votre attention sur le nombre croissant d'enfants handicapés en attente d'accueil dans un établissement d'enseignement spécialisé.
Dans l'Aube, le département que j'ai l'honneur de représenter ici, soixante-quinze enfants et adolescents étaient en attente d'une place en institut médico-éducatif à la rentrée 1998. On en prévoit quatre-vingt-six pour la rentrée prochaine, dont vingt-trois demandes de réorientation.
Deux problèmes se posent, vous le savez bien : celui du placement - les places étant en nombre tout à fait insuffisant - et celui de la réorientation : quant on s'aperçoit que la première orientation a été mauvaise, les parents eux-mêmes perdent tout espoir d'obtenir un changement, car ils savent que les listes d'attente sont d'ores et déjà longues !
Ce double problème d'accès et de réorientation est véritablement angoissant. Je connais des familles qui sont désespérées de ne pouvoir placer un mineur handicapé dans un établissement spécialisé. C'est un problème humain véritablement douleureux, madame le secrétaire d'Etat.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Vous soulignez à juste titre, monsieur le sénateur, à partir de la situation de votre département, l'Aube, les difficultés rencontrées par de trop nombreuses familles dont l'enfant handicapé reste en attente d'une place dans un établissement d'enseignement spécialisé.
Avec 407 places en institut médico-éducatif et 60 places en institut de rééducation, réparties sur sept établissements, le taux d'équipement s'établit, dans l'Aube, à sept places pour 1 000 jeunes de moins de vingt ans, soit un taux comparable à la moyenne régionale.
J'ai bien noté votre préoccupation. Le Gouvernement est pleinement conscient des problèmes parfois dramatiques rencontrés par ces parents qui craignent que ne soient pas offertes à leur enfant les possibilités de s'épanouir et d'augmenter ses chances d'une bonne intégration dans le monde des adultes.
Mme Martine Aubry a lancé, voilà un an, devant le Conseil national consultatif des personnes handicapées, une politique rénovée et ambitieuse en faveur des personnes handicapées. La socialisation et l'intégration des jeunes handicapés en constituait le premier axe.
Cette volonté a été relayée avec force par Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire, et par M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, lors d'une réunion de ce Conseil national consacrée, le 20 avril dernier, à la scolarisation des jeunes handicapés. Tous deux ont réaffirmé que l'intégration scolaire à l'école ordinaire doit être désormais le premier mode et le mode normal de scolarisation des enfants handicapés.
Le droit à l'éducation, principe constitutif de notre République solennellement réaffirmé par la loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées et par la loi du 10 juillet 1989 d'orientation sur l'éducation, doit s'exercer à l'école ordinaire et, à défaut, quand il ne peut en être autrement en raison du handicap de l'enfant, dans l'un des 1 800 établissements médico-sociaux.
Les services d'éducation spécialisée et de soins à domicile jouent un rôle essentiel dans la démarche d'amélioration de la scolarisation, déclinée en vingt mesures lors de la réunion du Conseil national que j'évoquais à l'instant. Il n'y a en effet d'intégration scolaire réussie et durable qu'accompagnée de moyens d'appui adaptés.
A cet égard, je vous rappelle qu'une partie des crédits inscrits en mesures nouvelles dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 est réservée, à hauteur de 20 millions de francs, aux projets de création de services d'éducation spécialisée et de soins à domicile.
Par ailleurs, Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité a réaffirmé sa détermination à faire en sorte que les besoins auxquels répondent ces structures soient pris en compte au mieux des possibilités qu'autorisera la prochaine loi de financement de la sécurité sociale.
Rappelons aussi le rôle essentiel des centres d'action médico-sociale précoce, pour lesquels nous poursuivrons l'effort d'équipement nécessaire, en soulignant, monsieur le sénateur, que les mesures nouvelles au titre de l'exercice 1998 ont rendu possible la création d'un tel centre polyvalent dans votre département, à La Chapelle-Saint-Luc.
D'ores et déjà, je peux également vous assurer que les projets de votre département feront l'objet d'une attention particulière à l'occasion de la répartition des mesures nouvelles pour 1999.
Enfin, l'amélioration des capacités d'accueil des établissements pour adultes handicapés - qui sont aujourd'hui de 16 500 places - que rendra possible le programme pluriannuel arrêté par le Gouvernement pour la période 1999-2003, devrait permettre de libérer les places occupées par ces derniers, au titre de l'amendement Creton, dans les établissements médico-sociaux pour enfants. C'est d'ailleurs l'objectif prioritaire de ce programme.
La mobilisation de l'ensemble de ces moyens témoigne de la ferme volonté du Gouvernement d'apporter des réponses concrètes, durables et de qualité aux problèmes posés par la prise en charge des jeunes handicapés, dans votre département, monsieur le sénateur, comme dans tous les départements où les besoins sont avérés.
M. Yann Gaillard. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Madame le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse.
Le Gouvernement souhaite, comme nous tous, je le sais bien, que ce problème soit résolu dans l'avenir.
Je m'attendais à ce que vous orientiez votre réponse sur l'intégration scolaire, qui est effectivement l'idéal, quand elle est possible, et à ce que vous insistiez sur l'importance des services d'éducation spécialisée et de soins à domicile, que je ne sous-estime nullement. J'apprécie également beaucoup l'ouverture d'un centre médico-social précoce polyvalent à La Chapelle-Saint-Luc.
Mais des cas ne pourront être réglés de ces façons-là. De plus, l'école ordinaire elle-même a ses problèmes. Il n'est pas toujours facile, en effet, pour un maître d'accueillir dans sa classe un enfant handicapé. Mon cri d'alarme est donc tout à fait justifié, même si je suis bien conscient du fait que je ne vous apprends rien et que nous devons travailler encore tous ensemble pour résoudre ce douloureux problème.
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