Séance du 18 novembre 1999







M. le président. « Art. 31. - Les besoins de trésorerie des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres et des organismes ayant pour mission de concourir à leur financement peuvent être couverts par des ressources non permanentes dans les limites suivantes :
(En milliards de francs) «
Régime général

29,0

«
Régime des exploitants agricoles

12,5

«
Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales

2,5

«
Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines

2,3

«
Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat

0,5

« Les autres régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres, lorsqu'ils disposent d'une trésorerie autonome, ne sont pas autorisés à recourir à des ressources non permanentes. »
Par amendement n° 60, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
A. - A la première ligne (Régime général) du tableau figurant à cet article, de remplacer la somme : « 29,0 » par la somme : « 24,0 ».
B. - A la deuxième ligne (Régime des exploitants agricoles) du même tableau, de remplacer la somme : « 12,5 » par la somme : « 10,5 ».
C. - De supprimer la troisième ligne (Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales) du même tableau.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. L'article 31 concerne le plafonnement des ressources non permanentes.
Le Gouvernement propose une liste de cinq « régimes » de sécurité sociale - en fait, il s'agit de deux régimes, de deux caisses et d'un fonds - en fixant un plafond d'avances qui correspond au point le plus bas de la trésorerie de ces régimes.
La notion de plafond d'avances recouvre des situations très différentes.
Personne ne sera étonné dans cette assemblée, et le président Domeizel moins que quiconque, que nous évoquions le problème de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, la CNRACL.
M. Claude Domeizel. Pourquoi pas ? Je suis toujours président de cette caisse !
M. Charles Descours, rapporteur. Monsieur Domeizel, j'ai fait quelques vérifications depuis hier à propos du petit conflit qu'il y a eu avec M. Fourcade, et je pourrai vous confirmer les dates, si vous le souhaitez.
M. Claude Domeizel. Il s'agit du 16 août 1994 !
M. Charles Descours, rapporteur. Non, non !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. La première surcompensation date de 1995.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Pour la CNRACL, le plafond proposé de 2,5 milliards de francs correspond à la dégradation du solde comptable de ce régime qui a été mis à mal par la « surcompensation ».
Pour le régime des exploitants agricoles, le plafond proposé de 12,5 milliards de francs correspond à un besoin de trésorerie résultant du décalage entre le versement des prestations et le recouvrement des recettes. La caisse centrale de mutualité sociale agricole, la CCMSA, est donc autorisée à recourir à l'emprunt pour régler les prestations, auprès du Crédit agricole-Indosuez, alors que le régime des exploitants agricoles est en général équilibré ou tout au moins proche de l'équilibre. La caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines est dans une situation analogue : son solde comptable varie depuis 1996 entre un déficit de 325 millions de francs et un excédent de 7 millions de francs.
Pour le régime général, la dégradation du plafond proposé depuis 1998 est inversement proportionnelle à l'amélioration du solde comptable. L'annexe c précise que la trésorerie du régime général pour 2000 risque de connaître des mutations importantes, en raison des versements du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, qui se substitueraient aux versements réguliers de l'Etat, et du « fonds de financement de la CMU, qui ne rembourse pas instantanément les prestations versées par les caisses primaires d'assurance maladie ».
La commission des affaires sociales propose, comme en 1997 et en 1998 - il me semble que c'est une disposition qui avait été votée à l'unanimité - de supprimer l'autorisation d'emprunt accordée à la CNRACL, afin de s'élever solennellement contre le mécanisme de la « surcompensation ».
Elle vous propose également de réduire le plafond d'avances de trésorerie accordé au régime agricole de 12,5 milliards de francs à 10,5 milliards de francs. Son relèvement d'année en année ne paraît pas se justifier, au regard de l'évolution du solde comptable du régime.
Elle vous propose enfin de réduire le plafond d'avances de trésorerie du régime général de 29 milliards de francs à 24 milliards de francs. Cette réduction tient compte de deux éléments. D'abord, nous avons voté la suppression du « fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale ». Ensuite, il n'est pas souhaitable d'accepter que le régime général fasse des avances de trésorerie au fonds de financement de la couverture maladie universelle.
Tel est l'objet de cet amendement.
En ce qui concerne la CNRACL, la première compensation a été de 3,5 milliards de francs en 1985, de 3,9 milliards de francs en 1986 et de 3,9 milliards de francs encore en 1987. Elle est ensuite passée à 4,1 milliards de francs en 1989, 4,6 milliards de francs puis à 6,6 milliards de francs en 1992 pour atteindre aujourd'hui plus de 9 milliards de francs.
La surcompensation a donc été un mauvais exemple. Les gouvernements qui se sont succédé ne l'ont pas supprimée, mais le Sénat, s'y est toujours opposé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 60.
M. Claude Domeizel. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Domeizel.
M. Claude Domeizel. Si M. le rapporteur veut que l'on dresse un petit historique de l'épuisement des réserves de la CNRACL, je vais le faire.
Je me suis adressé hier à M. Fourcade, parce que c'est lui qui a mis en place la compensation entre tous les régimes. Cela a continué, et la CNRACL verse chaque année environ 9 milliards de francs à ce titre. Cela s'est poursuivi en 1980 sous le gouvernement de M. Raymond Barre, dont le ministre de l'intérieur, qui siège aujourd'hui sur nos travées, était M. Christian Bonnet ; cela a continué dans le budget de 1986 avec la surcompensation qui avait été créée pour un an en 1985 dans la loi de finances pour 1986.
M. Philippe Marini. Entre 1981 et 1986, il n'y avait rien ! Cela avait disparu !
M. Claude Domeizel. Le ministre de l'intérieur de l'époque, qui défendait les collectivités locales - il s'agissait de M. Pasqua - avait tout loisir d'annuler cette surcompensation, puisqu'il s'agissait d'une décision prise par décret. Il ne l'a pas fait, pas plus d'ailleurs que ses successeurs, je le reconnais humblement.
M. Philippe Marini. Ah !
M. Claude Domeizel. Mais j'ai cité hier le chiffre de 38 %. C'est la première fois que l'on va abaisser le taux qui régule le versement de la surcompensation, puisqu'il est aujourd'hui calculé sur un taux de 38 % qui résulte d'un décret du 16 août 1994 cosigné par M. Sarkozy, alors ministre du budget.
Je vous signale que j'ai toujours le même sentiment sur les avances de trésorerie !
Je voudrais tout de même souligner que cette baisse de la surcompensation et l'augmentation de cotisations de 0,5 % sont issues des travaux du comité des finances locales, présidé par notre collègue Jean-Pierre Fourcade, et composé d'élus. Le Gouvernement a répondu favorablement et positivement à cette sollicitation du comité des finances locales.
A cette réponse positive du Gouvernement, à notre tour, nous répondons par une attitude tout aussi positive. C'est la raison pour laquelle, étant satisfaits de l'amorce de la baisse de la surcompensation, nous voterons contre votre amendement, monsieur le rapporteur.
M. François Autain. Très bien ! C'est une mise au point qui s'imposait.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Pour arbitrer cette bataille de chiffres, je vous propose de vous reporter à l'excellent tableau qui figure dans le rapport de notre collègue Alain Vasselle. Vous verrez qui porte la responsabilité de la surcompensation ! En arrivant au pouvoir, nous ne pouvons pas compenser toutes les bêtises commises par les gouvernements socialistes qui nous ont précédés, et nous le regrettons !
M. Claude Domeizel. On en sait quelque chose !
M. Charles Descours, rapporteur. Cela étant, le gouvernement actuel a annoncé de nouvelles ponctions sur la CNRACL, même si elles sont plus atténuées qu'auparavant.
M. Claude Domeizel. Nettement, en effet !
M. Charles Descours, rapporteur. Le Gouvernement a annoncé une augmentation de 0,5 % du taux de cotisation de la CNRACL, ce qui signifie une augmentation des impôts pour les collectivités locales, et les citoyens de nos villes et de nos départements seront contents. Par ailleurs, la fédération hospitalière de France a dit, dans les prévisions budgétaires qu'elle a réalisées pour 2000, qu'elle était incapable d'intégrer avec l'argent prévu dans l'ONDAM hospitalier une augmentation des cotisations de la CNRACL.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 60, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 31, ainsi modifié.

(L'article 31 est adopté.)

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