Séance du 16 décembre 1999
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Au cours de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous avons souligné le décalage qui existait avec les attentes exprimées lors des états généraux de la santé.
Madame la ministre, l'hôpital public souffre, et, vous le savez, cette souffrance est ancienne. Les hôpitaux sont pourtant un maillon essentiel de notre système de soins. Confrontés à l'accumulation de difficultés de tout ordre, les personnels, aujourd'hui, se mobilisent. Ils dénoncent en bloc l'insuffisance du montant des enveloppes budgétaires, qui est à l'origine d'une réduction drastique des effectifs et de fermetures de lits et de services,...
M. Alain Gournac. Pourquoi l'avoir voté ?
M. Josselin de Rohan. Vous êtes dans la majorité !
M. Thierry Foucaud. ... alors que la demande de soins s'accroît. Il faut entendre, madame la ministre, l'appel lancé par l'hôpital public en Ile-de-France,...
M. Jean Chérioux. C'est vrai !
M. Josselin de Rohan. Ah, il est dans l'opposition !
M. Thierry Foucaud. ... où la progression du budget est limitée à 1,25 %, où 14 000 lits ont été supprimés ces cinq dernières années,...
M. Josselin de Rohan. C'est abominable !
M. Alain Gournac. Il fallait voter contre !
M. Thierry Foucaud. ... et où 11 000 suppressions supplémentaires de lits sont prévues.
La commission médicale d'établissement de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris vient de voter contre le budget proposé, ce qui constitue une première.
MM. Jean Chérioux et Jean-Patrick Courtois. C'est vrai !
M. Thierry Foucaud. Confrontés qu'ils sont à une situation particulièrement préoccupante, en Ile-de-France et dans de très nombreuses régions, y compris la mienne, tous les personnels, je le répète, se mobilisent. Les propositions que nous avançons pour augmenter les ressources de notre hôpital public, à savoir la taxation des revenus financiers (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants) ,...
M. Guy Fischer. Alors, vous n'êtes plus d'accord ?
M. Thierry Foucaud. ... la réduction du taux de la TVA pour les hôpitaux ou l'attribution de prêts à taux zéro pour les investissements hospitaliers, sont au coeur des revendications des personnels, qui seront peut-être bientôt rejoints par les usagers de l'hôpital.
Un débat sur notre système hospitalier est aujourd'hui incontournable. Actuellement, les personnels nous rappellent que la santé, notamment la santé publique, a un coût.
Madame la ministre, face à la détresse des hôpitaux et de leurs agents, face aux besoins qui s'expriment partout dans le pays, nous souhaiterions savoir quelles seront les réponses apportées par le Gouvernement en vue de conforter l'hôpital public dans l'accomplissement de ses missions essentielles. (Applaudissements et exclamations ironiques sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
La santé concerne le vivant et la condition des femmes et des hommes de notre pays, et c'est pourquoi nous pensons que la croissance retrouvée doit servir prioritairement à améliorer la situation dans ce domaine, ce qui passe avant la réduction des déficits. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur celles du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le sénateur, je voudrais d'abord vous dire que, tout comme vous, le Gouvernement considère que l'hôpital public est au coeur de notre système de santé.
Cela étant, je dois avouer que je suis un peu étonnée d'entendre des applaudissements venant de la droite de l'hémicycle. (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Je rappelle en effet que, la première année de l'application du plan Juppé, le budget de l'hôpital public avait régressé de 1 %, alors que la hausse atteint cette année 2,5 %. (Protestations sur les mêmes travées.)
M. Josselin de Rohan. Nos collègues communistes ne sont pas contents !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je suis étonnée, mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, que vous applaudissiez le refus de la commission médicale d'établissement de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris de voter le budget, alors que vous avez diminué celui-ci de 0,34 % en 1997 (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen), tandis que nous n'avons cessé de l'augmenter.
Il faut être un tant soit peu cohérent !
Plusieurs sénateurs du RPR. Nous le sommes !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. On ne peut pas, lors de l'examen des projets de loi de financement de la sécurité sociale, soutenir la médecine libérale et expliquer qu'il faut favoriser les cliniques privées et défendre ensuite, avec démagogie - quand ce n'est pas avec des visées politiciennes - l'hôpital public. (Exclamations sur les travées du RPR. - Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Pour notre part, à gauche, nous avons toujours considéré que l'hôpital public jouait un rôle irremplaçable. C'est aujourd'hui un vecteur d'excellence, reconnu aussi bien en France qu'à l'étranger.
Mme Hélène Luc. Il faut qu'il le reste !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je sais que la situation est difficile, même si nous avons pris des mesures importantes en faveur des praticiens hospitaliers, des aides-soignantes et, très récemment, des urgentistes. A cet égard, je regrette que l'Assistance publique des hôpitaux de Paris n'ait pas appliqué aussi rapidement que les hôpitaux de province les décisions qui avaient été prises. Mais c'est maintenant chose faite. Je déplore que ceux qui appuient aujourd'hui la position adoptée par l'Assistance publique des hôpitaux de Paris n'aient pas incité sa direction générale à mettre en oeuvre les dispositions concernant les urgentistes. Il est vrai que ces médecins sont peut-être mal considérés, alors que ce sont pourtant eux qui prennent en charge toute la souffrance du public.
Je voudrais ajouter très simplement, monsieur Foucaud, que le Gouvernement est très attentif à tous les mouvements et à tous les conflits...
M. Nicolas About. Ah ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. ... ou plutôt, car il ne s'agit pas de conflits, à toutes les revendications et à tous les problèmes qui peuvent se poser.
Je sais par exemple que les « points ISA » qui permettent de répartir les budgets ne prennent pas suffisamment en compte les activités de pointe coûteuses et que nous devons, qu'il s'agisse de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris ou des centres hospitaliers et universitaires, évaluer la situation.
J'avais rendez-vous ce matin avec les représentants des hôpitaux d'Ile-de-France, car je sais qu'il existe aujourd'hui, au sein de cette région, des inégalités flagrantes. J'ai entendu vos propositions, monsieur Foucaud, et je peux vous indiquer que nous les étudions actuellement. Le Gouvernement est très attentif à prendre, au moment où cela est nécessaire et pour chaque hôpital, lorsqu'un vrai problème est soulevé, les mesures nécessaires pour qu'il continue à remplir son rôle. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
ATTITUDE DU MEDEF À L'ÉGARD DU MINISTRE
DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ