Séance du 23 février 2000
M. le président. Par amendement n° 26 rectifié, M. Gaillard, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, avant l'article 44, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le huitième alinéa ( d du 3°) de l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« d . Les reproductions intégrales ou partielles d'oeuvres d'art graphiques ou plastiques offertes à la vente, mises à la disposition du public sur les lieux ou à l'occasion de la vente. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. Cet amendement vise le droit de reproduction.
Comme j'ai été amené à le dire tout à l'heure, nous essayons de déminer peu à peu un certain nombre de poids fiscaux ou parafiscaux qui pèsent lourdement sur notre marché de l'art : après la TVA, après le droit de suite, on nous propose maintenant le droit de reproduction ! Or, ce droit dès lors qu'il s'agit de documents, catalogues, affiches ou autres supports édités pour permettre ou promouvoir la vente de l'oeuvre, est évidemment superfétatoire, et même contraire à l'intérêt des artistes.
On ne peut pas comprendre qu'une société de vente volontaire - ou une galerie : nous étendons dans notre amendement à l'ensemble du marché de l'art les dispositions relatives au droit de reproduction - ait à payer un droit alors qu'elle reproduit une oeuvre pour mieux la vendre et pour en valoriser le prix.
Telle est l'idée de bon sens qui a justifié le dépôt de cet amendement.
Je précise que, par rapport à certaines des rédactions qui nous ont été proposées, nous nous limitons strictement aux reproductions d'oeuvres mises à la disposition du public sur les lieux où à l'occasion de la vente.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Les principes généraux de la propriété intellectuelle, tant en droit interne qu'en droit international ou communautaire, prévoient en faveur de l'auteur d'une oeuvre le droit d'interdire ou d'accepter la reproduction de celle-ci et d'en obtenir une rémunération. Seules quelques exceptions sont prévues en matière de reproduction, à des fins privées, ou de courtes citations.
La proposition de directive sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information applique les mêmes règles. Elle ne prévoit qu'un nombre limité d'exceptions : il s'agit de la reprographie, de l'usage privé et à des fins non commerciales ou d'actes accomplis par les établissements accessibles au public qui ne visent aucun avantage économique ou commercial, direct ou indirect, ou encore à des fins d'illustration, d'enseignement ou de recherche.
Aucune des exceptions prévues par la directive ne permet une exemption en cas de reproduction d'oeuvres dans des catalogues de ventes.
Il en résulte qu'une exception large autorisant la reproduction par tout intermédiaire effectuant des ventes serait contraire aux principes défendus par la France dans les enceintes internationales et, surtout, aux textes internationaux qu'elle est tenue de respecter.
A cet égard je crois nécessaire d'attirer votre attention sur le fait qu'admettre dans notre législation une dérogation aussi large risquerait d'entraîner la France dans un contentieux communautaire.
Enfin, j'ajoute que le respect du droit de reproduction pour les catalogues, dont le tarif est librement fixé entre le titulaire des droits et les commissaires-priseurs, n'est pas un facteur économique ou psychologique décisif dans la décision du vendeur de délocaliser la vente à l'étranger.
Voilà pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 44.
Article 47