SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2000
M. le président.
La parole est à Mme Bardou, auteur de la question n° 892, adressée à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Mme Janine Bardou.
Ma question, qui s'adresse effectivement à M. le ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie, concerne le problème soulevé par l'aménagement du
régime des micro-entreprises, opéré par l'instruction fiscale du 20 juillet
1999, supprimant le régime de forfait et relevant les seuils d'application du
régime micro-entreprises et de la franchise de la TVA.
S'il semblait, en effet, nécessaire de circonscrire l'application du régime de
la franchise en base de TVA dans le secteur du bâtiment à un nombre restreint
d'entreprises, il convenait de ne pas alourdir pour autant les charges
financières et administratives des autres entreprises du bâtiment.
Or l'instruction fiscale précitée énonce que la notion d'activité mixte
s'applique notamment aux entrepreneurs du bâtiment qui fournissent non
seulement la main-d'oeuvre, mais aussi les matériaux ou matières premières
entrant à titre principal dans l'ouvrage. Ce texte précise, ensuite que, pour
cette activité, le régime micro-entreprises n'est applicable que si le chiffre
d'affaires global de l'entreprise n'excède pas 500 000 francs hors taxes et si
le chiffre d'affaires annuel relatif aux opérations autres que les ventes ou la
fourniture de logement ne dépasse pas 175 000 francs hors taxes.
Il est évident qu'une telle mesure entraînera de graves conséquences
financières pour certaines catégories d'entreprises, car la notion d'activité
mixte influe sur la détermination des seuils de régime d'imposition,
d'exonération et de déduction de certains impôts et taxes, dissuadant ainsi
l'embauche.
De plus, l'alourdissement administratif résultant de l'obligation de
différencier la part afférente aux matériaux et celle relative à la
main-d'oeuvre qui en découle paraît incompatible avec la volonté du
Gouvernement de favoriser les démarches de simplifications administratives de
la petite entreprise. En effet, la pratique des entreprises du bâtiment
consiste le plus souvent en un établissement de leurs factures au mètre carré,
au mètre linéaire ou encore au forfait, fourniture et pose.
En conséquence, je demande à M. le ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie de bien vouloir clarifier cette question qui ne manque pas
d'inquiéter les entreprises artisanales du bâtiment favorables, quant à elles,
au maintien de la doctrine administrative précédente, relative à la notion
d'activité mixte et associée à l'ancien régime de forfait, et je souhaiterais
savoir s'il a l'intention de donner à ses services des instructions allant dans
ce sens afin que cette disposition soit appliquée avec toute la souplesse
nécessaire.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
Madame la sénatrice, l'article 7
de la loi de finances pour 1999 a supprimé l'ancien régime du forfait, qui
voyait l'administration fixer elle-même le bénéfice imposable et la taxe sur la
valeur ajoutée des petites entreprises, pour une durée de deux ans, au terme
d'une procédure que tous s'accordaient à qualifier de complexe, longue,
coûteuse et désuète.
Un régime dit des « micro-entreprises » ou « régime micro » a été substitué au
forfait.
Comme le forfait, il concerne : d'une part, les entreprises dont le chiffre
d'affaires annuel n'excède pas 500 000 francs si l'activité exercée consiste en
la revente de biens et denrées ou la fourniture de logement ; d'autre part, les
entreprises dont le chiffre d'affaires n'excède pas 175 000 francs si
l'activité exercée consiste en la fourniture de services.
Lorsque l'activité est mixte, c'est-à-dire quand elle associe à la fois la
vente de biens et la fourniture de services, le régime micro est ouvert aux
seules entreprises dont le chiffre d'affaires global n'excède pas 500 000
francs, la part relative aux seules prestations de service n'y dépassant pas
175 000 francs.
L'analogie avec l'ancien système du forfait s'arrête là.
Le régime micro se caractérise en effet par son extrême simplicité pour les
entreprises.
Celles-ci doivent seulement tenir un livre de recettes et d'achats et délivrer
des factures à leurs clients.
Sur un plan fiscal, elles sont dispensées de souscrire une déclaration
spécifique de bénéfice et se bornent à reporter sur la déclaration de revenu
global du foyer le chiffre d'affaires réalisé au cours de l'année écoulée.
Le bénéfice est alors calculé par application d'un abattement uniforme pour
charges professionnelles, fixé à 70 % pour les activités d'achat-revente et
fourniture de logement et à 50 % pour les prestations de services.
Pour les entreprises exerçant une activité mixte, s'applique le taux
d'abattement approprié à chacune de ces deux composantes de leur chiffre
d'affaires.
D'un strict point de vue juridique, les travaux immobiliers constituent des
prestations de services. A ce titre, ne devraient donc être éligibles au régime
micro, dans le secteur du bâtiment, que les seules entreprises dont le chiffre
d'affaires est inférieur ou égal à 175 000 francs.
J'observe à cet égard que, lors du débat parlementaire sur la mise en place du
régime micro, plusieurs membres de la réprésentation nationale avaient proposé
de s'en tenir à une stricte application des principes.
Ce faisant, on aurait méconnu, me semble-t-il, le fait que les entreprises du
bâtiment sont nécessairement tenues d'acheter puis de revendre les matérieux
indispensables à la réalisation des ouvrages ; la plus grande partie des
entreprises du bâtiment aurait été exclue de l'application du régime micro.
C'est d'ailleurs dans cet esprit que la doctrine administrative précédente
prévoyait que, bien que les travaux immobiliers constituent des prestations de
services, c'est le seuil applicable aux activités d'achat-revente qui devait
être retenu pour l'appréciation du seuil d'éligibilité au forfait et au régime
simplifié d'imposition, soit respectivement 500 000 francs et 5 000 000 de
francs.
Si cette doctrine a été confirmée au regard de l'éligibilité au régime
simplifié d'imposition, il n'a pu en être de même au regard du régime micro.
En effet, comme il a été indiqué précédemment, le régime micro se caractérise
par l'application d'abattements différenciés sur le chiffre d'affaires, selon
que ce dernier correspond à des ventes ou à des prestations.
Dès lors, le maintien de l'ancienne doctrine aurait nécessairement conduit à
appliquer le seul taux d'abattement de 50 % à l'ensemble du chiffre d'affaires,
solution qui aurait pénalisé les entreprises dont une part importante du
chiffre d'affaires est constituée par la revente de matériaux.
En sens inverse, l'application d'un abattement uniforme de 70 % aurait
suscité, de la part des autres prestataires de services, des critiques
justifiées tenant à la distorsion de concurrence ainsi créée.
C'est pourquoi le Gouvernement a retenu une solution équilibrée, en estimant
que, à l'instar d'un artisan classique qui, outre ses prestations, fournit des
pièces ou des matériaux, l'entrepreneur du bâtiment exerçait une activité mixte
lui permettant de bénéficier à la fois d'un abattement de 70 % sur son chiffre
d'affaires « ventes » et d'un abattement de 50 % sur son chiffre d'affaires «
services » à condition de bien distinguer ces deux activités dans sa
comptabilité.
Vous faites valoir que cette distinction entre prestations de services et
ventes n'est pas conforme aux habitudes de la profession, notamment en matière
de facturation, et qu'elle suscitera des complications administratives pour les
entreprises.
Je crois avoir montré que ces entreprises ont un intérêt fiscal à distinguer
les ventes des prestations si elles souhaitent bénéficier d'un abattement pour
frais plus favorable.
Les obligations comptables et de facturation qui sont le corollaire de ce
régime paraissent acceptables au regard des avantages que celui-ci peut
procurer.
En outre, le caractère plus détaillé des factures des entreprises qui en
bénéficient concourt à assurer, me semble-t-il, une meilleure information de
leurs clients.
Mme Janine Bardou.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Bardou.
Mme Janine Bardou.
La réponse de M. le secrétaire d'Etat ne me satisfait pas tout à fait. Les
micro-entreprises insistent non pas sur la suppression du forfait, qu'elle ont
souhaitée, mais sur la difficulté que représentent les seuils de 500 000 francs
et de 175 000 francs. En effet, 500 000 francs de chiffre d'affaires et 175 000
francs au titre des prestations de services, ce sont, vous le comprenez, de
toutes petites entreprises. Quand on réalise un chiffre d'affaires de 500 000
francs, on ne doit pas avoir à réaliser des constructions tous les jours. Ce
dispositif complique terriblement leur vie administrative.
Ce que ces entreprises souhaitaient, c'est simplement un peu de souplesse. Je
constate que cette souplesse ne leur est pas accordée. Vous me permettrez de le
regretter, monsieur le secrétaire d'Etat.
TVA APPLICABLE AU BOIS-ÉNERGIE