SEANCE DU 17 AVRIL 2001


M. Henri de Raincourt. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Monsieur le président, je souhaite faire un rappel au règlement après l'intervention en tous points remarquable, comme d'habitude, de notre rapporteur et ami Christian Bonnet.
M. René-Georges Laurin. Très bien !
M. Henri de Raincourt. Comme la plupart des sénateurs présents dans cette enceinte cet après-midi, j'ai écouté ce qu'il nous a dit, en particulier les propos tenus par le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale qu'ils nous a rapportés.
Nous ne pouvons pas ne pas réagir une nouvelle fois à ce que le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale s'est permis de dire s'agissant de la dignité, de la légitimité et de l'honorabilité du Sénat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Je rappelle que le Sénat tire sa légitimité de la Constitution ratifiée par le peuple français et qu'à deux reprises, certes sous des régimes constitutionnels différents, en 1946 et en 1969, si ma mémoire ne me fait pas défaut, nos compatriotes, interrogés sur l'opinion qu'ils avaient du Sénat, ont manifesté leur attachement à cette assemblée. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants.) C'est sans doute qu'elle revêt à leurs yeux une certaine utilité pour la République !
Le fait que les propos du président de la commission des lois de l'Assemblée nationale aient été écrits ajoute, selon moi, à la gravité de ce dérapage verbal. On aurait pu imaginer que, dans le feu d'une discussion, il s'était quelque peu emporté et que ses propos avaient dépassé sa pensée. En l'occurrence, tel n'a pas été le cas, puisque ses propos ont été rédigés et prononcés délibérément. Je considère par conséquent que le Sénat est offensé ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Ce n'est pas la première fois que le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale se livre à ce genre d'exercice. Je rappelle simplement pour mémoire, à l'attention de mes collègues sénateurs qu'il avait aussi tenu à l'égard de notre assemblée des propos qui n'étaients pas très amènes lorsque nous avions discuté de la réforme du cumul des mandats. Il se trouve d'ailleurs que, dans ce domaine, le Sénat n'avait pas si mal vu non plus puisque, à ma connaissance, le Conseil d'Etat vient de relever un certain nombre de faiblesses dans le dispositif qui a été voté par la majorité et qui a fait l'objet d'une circulaire d'ailleurs condamnée par cette juridiction. Mais je referme cette parenthèse.
Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, je ne souhaite pas prolonger les débats, mais il faut que les choses soient claires entre nous : soit le Gouvernement considère que les propos de M. Roman sont des propos personnels et qu'ils doivent, à ce titre, être condamnés ; soit le Gouvernement, au fond, n'a pas de commentaire particulier à faire, ce qui serait une marque de défiance tout à fait inacceptable à notre égard.
Je me permets par conséquent de vous demander, monsieur le ministre, quelle est l'interprétation que vous donnez de cette déclaration du président de la commission des lois de l'Assemblée nationale. En fonction de la réponse que vous aurez l'obligeance, compte tenu de votre courtoisie habituelle, de bien vouloir nous faire, je demanderai ou non une suspension de séance pour marquer d'une manière quelque peu solennelle le fait que nous n'avons aucune leçon de légitimité démocratique à recevoir d'un ancien candidat à la mairie de Lille ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, c'est bien volontiers que je vais répondre à l'invitation de M. de Raincourt.
Le Parlement, en l'occurrence chaque assemblée, est libre de ses propos comme de ses écrits, puisque c'est en effet à un rapport écrit que vous avez fait allusion, monsieur le sénateur. Chaque assemblée est libre de porter des jugements sur le Gouvernement et sur le fonctionnement des institutions. Cela fait partie de l'indépendance de jugement des parlementaires.
Par conséquent, le Gouvernement n'a pas, ici, à porter d'appréciation sur le document en cause. Il est présent et participe à la discussion. Il a notamment participé à la longue discussion qui a été organisée au sein du Sénat au cours des mois de janvier et de février. Il le fait dans le respect absolu des institutions. Voilà ce que je tenais à dire à M. de Raincourt. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Jean-Pierre Raffarin. On peut recommencer !
M. Henri de Richemont. Nous sommes prêts !
M. Henri de Raincourt. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Monsieur le ministre, je suis franchement très déçu de la réponse que vous venez de nous apporter. Elle justifie totalement la demande de suspension de séance que j'ai évoquée.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance de dix minutes pour manifester notre hostilité à ces dérives verbales. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Nous allons donc interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dix-sept heures dix.)