SEANCE DU 31 MAI 2001
M. le président.
La parole est à M. Fournier.
M. Bernard Fournier.
Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues,
en matière de sécurité, l'Etat a une dette envers nos concitoyens. Une dette,
dis-je, car il s'agit d'un droit-créance des Français envers le Gouvernement.
Cette dette, c'est l'Etat qui en est le débiteur, c'est l'Etat et non les
maires.
Mais, puisque l'Etat ne tient pas son rôle, il faudrait investir les élus
locaux des prérogatives de l'Etat. Je remarque à ce propos, monsieur le
ministre, que même vos collègues de l'Assemblée nationale se sont
progressivement rangés aux conceptions de l'opposition nationale.
Tandis que nous discutons de votre projet de loi sur la sécurité quotidienne,
les détenus prennent la poudre d'escampette à Fresnes, un repris de justice en
cavale assassine un couple,...
M. René-Pierre Signé.
Caricature !
M. Bernard Fournier.
... un motard de la police nationale est écrasé ce matin à Paris, les
policiers, les gendarmes sont blessés, voire tués pendant leur service.
La réalité, c'est que votre politique de sécurité n'existe pas.
(Murmures
sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé.
Et la vôtre !
M. Bernard Fournier.
Il faut que la police et la gendarmerie disposent enfin de véritables
moyens.
Mais voyons les chiffres de votre échec, que vous avez dû rendre publics.
M. René-Pierre Signé.
Les parlementaires disent n'importe quoi !
M. le président.
Monsieur Signé, je vous en prie !
M. Bernard Fournier.
On note une augmentation de 5,72 % de la délinquance en 2000, soit la plus
forte hausse de la décennie, et de 9,45 % de la délinquance en zone rurale ou
périurbaine.
Force est de constater que la délinquance s'infiltre partout, y compris dans
les zones qui devraient être protégées, et je pense plus particulièrement à
l'école, comme l'a d'ailleurs souligné et dénoncé le Président de la République
dans le discours qu'il a fait au congrès de la PEEP, à Saint-Etienne, jeudi
dernier.
Alors, monsieur le ministre, je vous le dis, nos concitoyens sont en attente,
et cette attente est légitime ! Quand donc le Gouvernement osera-t-il
réellement donner des moyens financiers et humains aux forces de sécurité à la
hauteur de leur tâche ? Quand donc le Gouvernement osera-t-il envisager
d'étudier des mesures telles que la « tolérance zéro » pour décourager les
délinquants en herbe de sévir dès l'âge de douze ou treize ans ?
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur Fournier.
M. Bernard Fournier.
L'échec du Gouvernement en matière de sécurité est patent, incontestable et
implacable. Votre texte ne suffira pas à colmater les brèches, qui sont
béantes, de l'insécurité quotidienne. Quand donc nous proposerez-vous, monsieur
le ministre, les états généraux de la sécurité que les Français attendent en
vain ?
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé.
La question était bien molle !
M. le président.
M. Signé se tait !
La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, M. Fournier a cru devoir faire allusion au drame vécu par la police
nationale. M'éloignant de la façon dont il l'a fait, je veux rendre hommage aux
policiers qui, au nom de la nation, font leur travail au service de la sécurité
de nos concitoyens et je veux, comme ce matin lorsque je me suis recueilli sur
le lieu de ce drame de la circulation - je ne dispose en effet d'aucun autre
élément concernant l'enquête -, avoir une pensée pour ce motard de la police
nationale tué à quarante-cinq ans, plutôt que de faire de ce drame une
exploitation politique.
M. Henri Weber.
Très bien !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le sénateur, le Sénat a achevé hier
l'examen du projet de loi relatif à la sécurité quotidienne. Le Gouvernement ne
peut s'associer au texte tel qu'il est issu des travaux de la
Haute-Assemblée.
Permettez-moi d'ailleurs de vous dire que vous posez aujourd'hui une question
sur la sécurité, thème sur lequel un certain nombre de vos collègues ont
débattu, eux, durant trois jours !
Le texte du Gouvernement a pour objet de répondre concrètement aux
préoccupations des Français, nous n'avions pas la prétention - je l'ai
d'ailleurs dit dès le début d'en faire une loi d'orientation, ce genre de loi
restant souvent lettre morte. On l'a vu avec celle de 1995 ! Je préfère des
lois d'application rapide, et au service de la sécurité, de la tranquillité et
de la liberté de nos concitoyens.
S'agissant de la question de l'insécurité, la délinquance est ce qu'elle est,
mais je ne me satisfais pas de la situation dans laquelle nous nous trouvons.
Permettez-moi toutefois de rappeler que, globalement, le niveau de la
délinquance est inférieur à celui de l'année 1994, qui a constitué un pic
depuis dix ans.
Sur des sites choisis en fonction des actes de violence qui y sont perpétrés -
je pense notamment à Chambon-Feugerolles - j'ai mis en place des actions
ciblées de lutte contre la délinquance et les phénomènes de bande, actions qui
associent étroitement l'ensemble des services de police à la justice.
Les premiers résultats sont très encourageants, puisque sont démantelés des
noyaux durs de la délinquance qui déstabilisaient des quartiers entiers. En
outre, la mise en place de la police de proximité se poursuit dans tout le pays
et produit les effets attendus, avec plus de policiers présents sur le
terrain...
M. Roland Courteau.
C'est exact !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
... dans la pluridisciplinarité de leurs
fonctions.
Tout cela se traduit par plus de sécurité pour les Français. Tout à l'heure,
certains de vos collègues reconnaissaient, par exemple, que la police de
proximité et les contrats locaux de sécurité donnaient des résultats. C'est un
travail de patience, mais il doit être fait et je continuerai à généraliser la
police de proximité.
M. Roland Courteau.
Très bien !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
On sait très bien que la sécurité ne dépend pas
de la seule police. C'est l'ensemble de la société qui doit se mobiliser au
service de ce droit pour tous et partout.
S'agissant des statistiques - je l'ai dit à l'occasion du débat sur le projet
de loi relatif à la sécurité quotidienne - je suis favorable à la création d'un
observatoire de la délinquance, reconnu par tous, pour mettre fin à des
polémiques inutiles, voire stériles, telles qu'elles sont parfois entretenues
sur certaines travées ici ou à l'Assemblée nationale.
(Applaudissements sur
les travées du groupe socialiste et sur celles du groupe communiste républicain
et citoyen.)
SITUATION EN AFGHANISTAN