SEANCE DU 26 JUIN 2001
MODERNISATION SOCIALE
Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi (n°
384, 2000-2001), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture, de modernisation sociale. [Rapport n° 404 (2000-2001).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Paulette Guinchard-Kunstler,
secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme
Elisabeth Guigou, retenue à l'Assemblée nationale pour le vote définitif du
texte relatif à l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA.
Depuis la première lecture de ce projet de loi de modernisation sociale devant
votre assemblée, il est indéniable que ce texte a gagné en considération.
Souvent traité de « fourre-tout » sans contenu politique majeur, le voilà à
présent sous les feux de l'actualité, en particulier pour les dispositions
relatives à la prévention des licenciements économiques.
Ce sujet important avait déjà fait l'objet, dès la première lecture, de débats
très riches et de propositions essentielles sur lesquelles je reviendrai dans
quelques instants. Mais les graves questions soulevées depuis lors par
l'annonce concomitante de nombreux plans de restructuration entraînant des
projets de licenciements massifs ont mis en avant le souhait du Parlement et du
Gouvernement de compléter encore notre législation.
C'est précisément ce que ma collègue Elisabeth Guigou avait entrepris lors de
la première lecture au Sénat à partir du 25 avril, après avoir été auditionnée
par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de
l'Assemblée nationale.
C'est également la raison pour laquelle le Gouvernement a levé l'urgence qui
avait été déclarée sur ce texte lors de la première lecture, afin de permettre
un débat approfondi et constructif.
C'est, enfin, la motivation du délai de deux semaines accordé à l'Assemblée
nationale pour adopter, après une seconde délibération constructive, ce texte
en deuxième lecture.
Le Gouvernement n'a donc pas ménagé ses efforts pour que ce texte soit débattu
dans les meilleures conditions possibles, même si le volume constitué par les
articles restant encore en discussion est impressionnant. Il a également
démontré sa détermination pour que ce texte réponde le plus fidèlement possible
aux objectifs qui lui étaient assignés en voulant faire oeuvre de «
modernisation sociale ».
C'est ainsi que ce projet de loi comporte de nombreuses réponses aux attentes
des Français dans les domaines de la protection de la santé, du renforcement de
la solidarité à l'égard des plus fragiles d'entre eux, de l'amélioration des
relations et des conditions de travail.
Je pense, bien entendu, aux acquis considérables déjà débattus et votés lors
des précédentes lectures : l'abrogation de la loi Thomas sur les fonds de
pension, pour préserver la place de notre régime de retraites par répartition ;
la reconnaissance et la définition de moyens de prévention du harcèlement moral
au travail ; la lutte contre le recours abusif au travail précaire ; la
validation des acquis de l'expérience professionnelle pour permettre à un grand
nombre de salariés d'enrichir leur parcours professionnel ; la création d'un
statut des accueillants familiaux pour mieux contrôler l'accueil des personnes
âgées ou handicapées et pour améliorer les droits sociaux des familles
accueillantes ; la réforme des études médicales pour renforcer la place de la
médecine générale, qui deviendra une spécialité à part entière soumise au même
régime de formation que les autres spécialités ; le renforcement de la
protection sociale des Français de l'étranger, pour permettre à nos concitoyens
expatriés qui ont des revenus modestes de bénéficier d'une meilleure couverture
maladie ; la mise en oeuvre du protocole du 14 mars 2000 pour l'amélioration du
fonctionnement de l'hôpital public, notamment grâce à l'instauration d'un
projet social au sein de chaque établissement et à la possibilité offerte au
personnel de la fonction publique hospitalière de bénéficier d'un bilan de
compétences.
Je suis persuadée que chacun mesure ici la portée de ces avancées sociales,
qui se déclinent autour des services publics rendus à l'usager, de la dignité
de la personne et du salarié, de la promotion sociale et de la défense de notre
modèle social.
Certains de ces progrès incontestables, bien souvent conformes à des
engagements de la majorité plurielle qui soutient le Gouvernement, seront
certainement modifiés, voire supprimés par votre assemblée.
Le Gouvernement sera naturellement vigilant, dans la discussion des articles,
au respect de l'esprit et de la lettre des dispositions qui ont été votées par
la majorité de l'Assemblée nationale.
J'ai été informée du souhait de votre commission de ne pas avoir à débattre
dès cette semaine des dispositions relatives aux licenciements économiques.
Vous avez préféré, monsieur le président de la commission, organiser jeudi des
auditions avec les partenaires sociaux, avant de vous prononcer sur le fond des
dispositions proposées par le Gouvernement et adoptées par la majorité qui le
soutient à l'Assemblée nationale.
Le Gouvernement n'a pas souhaité faire entrave à votre démarche en imposant à
votre assemblée de siéger jusqu'au terme de la session afin de clore l'examen
de ce texte en deuxième lecture. En cela, il reste fidèle à la méthode qu'il a
employée avec votre assemblée sur ce sujet avec la levée de l'urgence ou
l'audition exceptionnelle d'Elisabeth Guigou le 25 avril dernier.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Nous y sommes très
sensibles !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler,
secrétaire d'Etat.
Je doute cependant que les éléments que vous
recueillerez, notamment auprès des organisations syndicales - à supposer
d'ailleurs qu'il s'agisse de critiques quant au bien-fondé des mesures
contenues dans ce texte - viennent conforter votre position de fond sur le
sujet, telle que vous l'aviez exprimée lors de la première lecture.
M. Charles Descours.
Elles s'étaient plaintes de ne pas avoir été consultées par le Gouvernement,
madame la secrétaire d'Etat !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler,
secrétaire d'Etat.
Vous avez donc souhaité un report de la discussion de
ces articles, ce qui renvoie le débat à l'ouverture de la session prochaine, en
octobre. Je comprends l'émotion exprimée par les groupes de la gauche
sénatoriale, mais je tiens à les rassurer quant au fait que ces dispositions
seront adoptées comme prévu au mois de novembre prochain, ce report ne
modifiant rien au calendrier d'adoption définitive du texte. Vous me permettrez
néanmoins, au nom du Gouvernement, de m'exprimer dès à présent sur le contenu
de ces mesures.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Au contraire, faites
donc !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler,
secrétaire d'Etat.
Cette question touche à la fois, d'une part, aux
fondements de notre système économique et social et, d'autre part, à la
résolution des contradictions qui peuvent apparaître entre l'intérêt des
détenteurs des entreprises et l'intérêt des salariés.
Il n'est pas contestable que les logiques de marché, de concurrence,
d'évolution de la demande doivent être prises en compte. Mais la cohésion de
notre société impose que les stratégies d'entreprise visent effectivement à la
préservation et au développement de la compétitivité, profitable à l'emploi et
aux salariés, et non à une pure logique de rentabilité au seul profit des
actionnaires.
L'Etat a donc un rôle à jouer pour arbitrer cette contradiction. Il doit le
faire dans l'intérêt de la préservation de l'emploi, sans créer pour autant des
conditions défavorables à l'adaptation des entreprises et à leur développement.
C'est à ce titre que, depuis quelques mois, le Gouvernement est fortement
interpellé par les plans sociaux spectaculaires annoncés par quelques grandes
entreprises.
Je voudrais rappeler, tout d'abord, que les licenciements économiques sont
quotidiens, qu'ils touchent très majoritairement les salariés de petites et
moyennes entreprises et que, malgré cela, le chômage n'a cessé de baisser
depuis 1997, dans une large mesure grâce à l'action du Gouvernement.
Dès l'annonce des plans sociaux qui ont fait la une de l'actualité, le
Gouvernement a tout d'abord marqué sa compréhension et sa solidarité avec les
salariés. La situation dans laquelle ils sont placés est d'autant plus
difficile à admettre que la croissance économique est là, que les bénéfices des
entreprises atteignent parfois des niveaux exceptionnels, et que la
capitalisation boursière, il y a peu encore, battait jour après jour ses
propres records.
M. Charles Descours.
C'est fini depuis six mois !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler,
secrétaire d'Etat.
Ces salariés ont contribué de façon déterminante au
redressement économique par leurs efforts et leur engagement au service de la
restauration de la performance de leur entreprise. Ils comprennent d'autant
moins que la sécurité de l'emploi ne leur soit pas enfin garantie, surtout
quand leur entreprise fait des profits.
C'est un drame de perdre son emploi. Tout doit être fait pour éviter de telles
situation, et, lorsqu'elles se présentent, tout doit être tenté pour assurer
des reclassements, afin que le plan social entraîne finalement le moins de
chômeurs possible.
C'est le sens des propositions du Gouvernement pour améliorer la protection
des salariés, telles qu'elles ont été adoptées et améliorées par l'Assemblée
nationale. Le texte tel qu'il vous est proposé aujourd'hui n'évacue pas pour
autant le langage de responsabilité que tient le Gouvernement sur ce sujet. Il
ne propose pas des évolutions du droit qui soit feraient illusion, soit
handicaperaient les entreprises françaises sur le plan du droit social par
rapport à leurs homologues dans l'espace économique européen. Lors des débats à
l'Assemblée nationale, il a tenu à cet équilibre et l'a fait respecter.
La philosophie du Gouvernement en la matière, c'est que ni la loi ni l'Etat ne
doivent décider de la gestion des entreprises à la place de leurs responsables.
C'est à ces derniers qu'appartient la responsabilité d'assurer le développement
des entreprises et la compétitivité de celles-ci dans l'intérêt tout à la fois
des actionnaires et des salariés. C'est pourquoi il n'est pas question de
revenir à l'autorisation administrative de licenciement, directement ou
indirectement. D'ailleurs, j'observe que plus personne ne la réclame parce que
l'expérience a montré qu'elle n'empêchait pas de licencier dans la
quasi-totalité des cas, et parce qu'elle dédouanait le chef d'entreprise de sa
responsabilité.
Le Gouvernement a rejeté les propositions de ceux qui estimaient, par voie de
conséquence, qu'il devrait appartenir au juge de statuer sur la légitimité des
projets de licenciements, en appréciant leur justification économique
lorsqu'une divergence de vue s'exprime entre la direction de l'entreprise et
les représentants du personnel. J'observe d'abord que le juge dispose déjà de
compétences très larges et qu'il contrôle efficacement la réalité du motif
économique - plusieurs arrêts rendus par la Cour de cassation dans la
jurisprudence la plus récente confirment cette vigilance. Mais le Gouvernement
ne souhaite pas que l'on confie au juge le soin de prendre les décisions de
gestion à la place des chefs d'entreprise. Notre Constitution protège la
liberté de commerce et d'industrie. La liberté d'entreprendre doit se concilier
avec d'autres principes à valeur constitutionnelle comme le droit à
l'emploi.
C'est pourquoi le Gouvernement est convaincu que la limitation du pouvoir de
gestion de l'employeur ne peut résulter que du principe de démocratisation de
cette gestion à l'intérieur même de l'entreprise. C'est ainsi que le
constituant de 1946 l'a voulu, et c'est ainsi que l'évolution du droit des
relations de travail l'a institué depuis lors, de façon d'ailleurs cohérente
dans l'ensemble des pays de l'Union européenne. Il convient de soumettre les
choix économiques du chef d'entreprise au débat contradictoire avec les
salariés et leurs représentants. Ce sont eux qui, si on leur en donne les
moyens, sont les mieux à même de contrôler la gestion de l'entreprise, de faire
des propositions alternatives et de peser pour orienter les décisions dans le
respect du droit de l'emploi.
C'est l'option retenue depuis cinquante ans, et elle reste celle du
Gouvernement. C'est le choix de la responsabilité ; c'est le choix de
l'efficacité. De façon continue, en effet, le droit du travail n'a cessé
d'étendre le droit des représentants du personnel et, à travers eux, des
salariés, d'être informés et consultés sur tout ce qui concerne la gestion,
l'organisation et la marche de l'entreprise.
Cette évolution s'est faite par apport conjoint de la négociation
interprofessionnelle et de la loi, avec des étapes marquantes en 1986 et 1989.
Les syndicats eux-mêmes ont acquis le droit de s'organiser dans l'entreprise et
d'y négocier. Pour tenir leur rôle de force de proposition critique, ils
bénéficient de l'appui de l'administration du travail et du juge.
La même évolution est en cours au sein de l'Union européenne et l'apport de la
directive sur l'information et la consultation des travailleurs, qui fait suite
à la directive sur les comités de groupes européens, sera déterminant.
Une étape déterminante pourrait être franchie en organisant la participation
directe des représentants des salariés aux instances de direction des
entreprises. C'est un chantier que le Gouvernement entend ouvrir dans les
prochains jours, en complément des dispositions de ce projet de loi. Ce
chantier appelle une redéfinition de notre conception de la démocratie sociale,
à laquelle le Parlement sera bien évidemment associé. Sur ce sujet, Mme
Elisabeth Guigou fera des propositions dans quelques jours.
Dans l'immédiat, le projet de loi qui vous est soumis comporte déjà des
avancées considérables pour la protection des salariés. Il étend la
responsabilité sociale des chefs d'entreprise en matière de licenciements
économiques dans une proportion bien supérieure à ce qui avait cours jusqu'à
présent et il renforce de façon importante les droits et les pouvoirs des
salariés et de leurs représentants, pour faire valoir une logique plus
respectueuse de l'emploi, avant même toute décision de restructurer.
Permettez-moi quelques rappels des avancées déjà acquises après la deuxième
lecture de ce texte par l'Assemblée nationale.
Avant toute annonce publique ayant des incidences sur l'emploi, le chef
d'entreprise doit informer préalablement les représentants du personnel. Avant
même de leur présenter un projet de licenciement, il doit les informer et les
consulter sur le plan de restructuration lui-même et mettre ce plan en
discussion dans le cadre d'une procédure renforcée. Cette discussion est menée
à partir d'une confrontation critique des positions en cause qui s'appuie sur
l'expert-comptable du comité d'entreprise.
Avant même d'envisager des licenciements, l'entreprise doit négocier un accord
sur les 35 heures. Elle doit tout faire pour former, adapter les compétences
des salariés, les reclasser à des postes équivalents dans l'entreprise ou le
groupe. Elle doit chercher toute alternative possible à l'ajustement des
effectifs, notamment en réduisant les heures supplémentaires récurrentes.
Enfin, si les licenciements ne peuvent être évités, le plan de sauvegarde de
l'emploi est renforcé, notamment par un congé de reclassement de neuf mois et
par un doublement du montant de l'indemnité légale de licenciement.
En dernier lieu, la qualité de ce plan est contrôlée par l'inspecteur du
travail et par le juge ; s'il est invalidé pour insuffisance, les licenciements
prononcés sont déclarés nuls.
Telles étaient les dispositions adoptées à la fin de la deuxième lecture par
l'Assemblée nationale. Mais, en dépit de ces apports très importants, il
subsistait un débat sur deux points essentiels : la définition légale du
licenciement économique et de son étendue ; le mode de résolution des
divergences d'appréciation entre l'employeur et les représentants du personnel
quant à la nécessité de supprimer ou non des emplois.
C'est au regard de ce débat persistant - qui, je le reconnais, animait
exclusivement la majorité puisque l'opposition demeurait silencieuse sur ce
sujet - que le Gouvernement a décidé de demander une seconde délibération sur
la base de nouvelles propositions. Celles-ci ont été acceptées après avoir été
amendées de façon substantielle, mais sans remettre en cause la logique qui est
celle du Gouvernement et que je vous ai exposée tout à l'heure.
Ces nouvelles propositions reposent sur une modification de l'article L. 321-1
du code du travail qui définit le licenciement économique, et sur la nature du
contre-pouvoir dont dispose le comité d'entreprise face au projet de
l'employeur, avec notamment l'intervention d'un médiateur, lorsqu'un compromis
n'a pu être trouvé entre les parties.
J'en viens à la définition du licenciement économique.
Lors de l'examen du projet de loi, tant en première lecture qu'en deuxième
lecture, le Gouvernement avait milité pour la préservation d'une définition
suffisamment large du licenciement économique, non pas bien évidemment pour
favoriser les licenciements, mais parce que l'article L. 321-1 est un article
conçu dès l'origine pour « qualifier » le licenciement économique, dans le but
de soumettre les cas de rupture du contrat de travail qui le nécessitent aux
procédures protectrices : contrôle des représentants du personnel et plan de
sauvegarde de l'emploi.
Le juge s'est déjà solidement appuyé sur cette définition pour fonder sa
jurisprudence, plutôt favorable aux salariés. Le Gouvernement ne peut cependant
ignorer que, en dépit de cette définition prévue par le code du travail, les
licenciements économiques sont encore trop souvent utilisés comme une facilité
par certaines entreprises, qu'ils constituent, pour certains employeurs et
actionnaires peu scrupuleux de la protection de l'emploi, une simple « variable
d'ajustement ».
C'est pourquoi le Gouvernement a proposé, à l'Assemblée nationale, une
modification de la définition, proposition elle-même amendée par le groupe
communiste, avec le soutien du Gouvernement.
Cette nouvelle définition inscrite à l'article L. 321-1 du code du travail
supprime l'adverbe « notamment » qui, par son imprécision, laisse entendre aux
employeurs que toute circonstance économique rend les licenciements possibles.
Si ce n'est évidemment pas le cas, encore faut-il le signifier par la
substitution à cet adverbe d'une formulation plus précise. C'est à cette
volonté que répondent les termes adoptés sur proposition du groupe
communiste.
Avec cette nouvelle définition, l'employeur devra démontrer encore plus
fortement qu'auparavant la cause économique réelle et sérieuse qui le conduit à
proposer des licenciements. Elle aura une portée juridique d'autant plus
importante que, comme il faut le rappeler, la jurisprudence de la chambre
sociale de la Cour de cassation fait depuis longtemps une interprétation
limitative des circonstances économiques justificatrices des licenciements en
les mettant en balance avec un autre principe général, celui de la stabilité de
l'emploi, qui est la déclinaison du droit à l'emploi figurant dans le préambule
de la Constitution de 1946.
Le Gouvernement se félicite de l'accord qui a ainsi été trouvé avec la
majorité de l'Assemblée nationale.
S'agissant des pouvoirs des représentants du personnel pour faire valoir leurs
alternatives au projet de l'employeur, j'ai rappelé tout à l'heure tout ce qui
a d'ores et déjà été fait. Faut-il faire davantage pour rééquilibrer un rapport
de forces, il est vrai, trop souvent inégal ?
Le Gouvernement est décidé à aller encore plus loin, en donnant au comité
d'entreprise le droit de contester le projet de restructuration du chef
d'entreprise et de proposer des alternatives. C'est également dans cette
logique qu'il propose la saisine d'un médiateur lorsque la ou les
contre-propositions du comité d'entreprise ne sont pas prises en compte.
L'intervention d'un expert, neutre, choisi sur une liste arrêtée par le
ministre chargé du travail, sera, j'en suis sûre, déterminante. Elle permettra
d'élever le débat sur l'opportunité de la restructuration et ses effets sur
l'emploi. Elle permettra de sortir de situations de blocage lorsque les deux
parties ne seront pas parvenues à s'entendre ou même et surtout peut-être quand
l'employeur n'aura pas vraiment pris le soin d'expertiser les
contre-propositions des représentants du personnel.
La recommandation de l'expert, sans retirer au chef d'entreprise sa
responsabilité, sera un acte public à portée véritable, entourée de
l'officialisation qui se justifie dans ces circonstances : en direction des
organes dirigeants de l'entreprise et vis-à-vis de l'administration du
travail.
Gardons-nous de porter un jugement hâtif sur cette réforme. Bien des exemples
chez nos partenaires européens - je pense à la Belgique ou à l'Allemagne -
montrent que cette tierce intervention est efficace. Pourquoi le serait-elle
moins chez nous ?
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les importants compléments au
droit du travail que nous sommes en train d'élaborer pour mieux prévenir les
licenciements économiques et lutter contre leurs conséquences humaines et
sociales toujours dramatiques.
Je pense que le Gouvernement propose ainsi une première issue positive au
débat, qui s'est à juste titre poursuivi ces dernières semaines, et qu'il
répond aux attentes des salariés dont l'emploi est menacé par des projets de
restructuration.
Les mesures que nous vous proposons d'adopter sont fortes, protectrices du
droit à l'emploi, mais aussi respectueuses de la responsabilité des partenaires
sociaux dans les entreprises, à qui il revient de trouver les solutions de
conciliation entre les nécessités de restructuration et le respect des droits
sociaux. Cette recherche de l'équilibre des pouvoirs et des obligations a animé
le Gouvernement ; cet objectif est à présent pleinement satisfait au regard du
résultat obtenu.
D'autres mesures fortes viendront compléter ce dispositif de prévention des
licenciements, notamment en matière de lutte contre la précarité des emplois.
Le débat en première lecture avait déjà permis de procéder à un nombre
important d'avancées : augmentation de la prime de précarité versée au salarié
en fin de contrat à durée déterminée, CDD - ce montant, qui est de 6 %
aujourd'hui, sera aligné sur celui qui est versé en fin d'intérim, soit 10 % ;
modification du mode de calcul du délai de carence entre deux contrats pour
exclure le week-end de ce calcul ; renforcement des sanctions pénales en cas de
non-respect du principe d'égalité de rémunération entre salariés sous contrat
temporaire et salarié sous contrat à durée indéterminée , CDI, sur le même
poste de travail ; possibilité pour le salarié sous CDD ou en mission d'intérim
de rompre le contrat s'il justifie d'une embauche en CDI ; enfin, information
des travailleurs en CDD ou en intérim, par le chef d'entreprise, de la liste
des postes sous CDI de l'entreprise lorsqu'un tel dispositif existe dans
l'entreprise pour les salariés sous CDD.
A ces mesures, qui constituent déjà des progrès importants au bénéfice des
salariés précaires, le Gouvernement a proposé en deuxième lecture à l'Assemblée
nationale d'ajouter la mise en place d'un droit d'alerte du comité d'entreprise
ou, à défaut, des délégués du personnel en cas de recours abusif au travail
précaire. Ce droit d'alerte pourra déboucher sur l'obligation faite par
l'employeur, sur notification de l'inspecteur du travail, d'élaborer un plan de
résorption de la précarité.
Un autre sujet important a été intégré puis enrichi par la voie d'amendements
parlementaires au cours de la navette : je veux bien entendu parler du
harcèlement moral au travail. Il s'agit d'un thème douloureux et complexe. Je
me félicite, d'ailleurs, de la qualité des débats que nous avons eus, ici même
comme à l'Assemblée nationale. Nous avons travaillé progressivement, en
introduisant d'abord une définition, puis, notamment en nous appuyant sur les
travaux du Conseil économique et social, en nous dotant de moyens de prévention
et de sanctions. Ce travail mérite encore certainement d'être approfondi. Je
crois que nous aurons au final franchi une étape importante et déterminante
pour l'amélioration des conditions de travail d'un nombre important de nos
concitoyens.
S'agissant de la formation professionnelle et plus particulièrement de la
validation des acquis de l'expérience, les travaux des deux assemblées
permettent de disposer aujourd'hui d'un texte quasi stabilisé sur les points
les plus importants. Le Gouvernement, pour sa part, ne vous propose qu'un seul
amendement de cohérence rédactionnelle entre les dispositions générales de
l'article 41 et celles de l'article 42, qui sont spécifiques aux enseignements
supérieurs.
En ce qui concerne l'apprentissage, votre assemblée a adopté en première
lecture plusieurs amendements visant à renforcer le système de péréquation pour
assurer un minimum de ressources à chaque centre de formation d'apprentis, le
CFA ; je ne les rappellerai pas. Ma collègue Nicole Péry a pris l'engagement,
devant l'assemblée générale des chambres de métiers, de publier prochainement
un arrêté fixant un montant minimum provisoire de ressources pour les CFA.
Je reprends devant vous et en son nom cet engagement : l'arrêté sera publié
dès la promulgation de la loi, après consultation du comité de coordination des
programmes régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue.
Ce montant provisoire minimum de ressources devrait être nettement supérieur à
2 000 euros. Il permettra aux CFA les moins bien dotés de préparer leur budget
2002 sur des bases revalorisées. Si nécessaire, le taux du fonds national de
péréquation sera relevé afin d'en assurer le financement.
J'en viens à présent aux dispositions du titre Ier. Je veux souligner une
nouvelle fois les avancées importantes que comporte ce texte et les points sur
lesquels, j'en suis certaine, le texte s'enrichit et s'enrichira de nos
débats.
Pour l'hôpital, tout d'abord, le Gouvernement tient les engagements qu'il a
pris à l'égard des personnels de la fonction publique hospitalière en créant
par la loi l'obligation, pour chaque établissement public de santé, de disposer
d'un projet social inscrit dans le projet d'établissement. Sur votre
proposition en première lecture, cette obligation s'appliquera également aux
établissements de santé privés participant à l'exécution du service public
hospitalier, puisque l'Assemblée nationale en est d'accord.
L'Assemblée nationale a souhaité améliorer et compléter les propositions du
Sénat pour faciliter la coopération hospitalière. Les dispositions proposées
répondent effectivement sur le terrain à la nécessité de mieux organiser la
réponse aux besoins de la population.
S'assurer que les praticiens et les personnels hospitaliers exercent leur
métier dans un environnement favorable, pour ce qui est de leurs conditions de
travail, de leur formation ou de leurs qualifications, est un volet essentiel
de la modernisation de l'hôpital et, partant, de la qualité des soins prodigués
aux malades.
La réforme des études médicales fait de la médecine générale une spécialité
médicale à part entière. Tous les étudiants ayant validé leur deuxième cycle
accéderont à l'internat au travers d'un nouveau concours. Je me félicite de
l'accord des deux assemblées sur cette réforme, qui est très attendue de la
communauté médicale, donnant ainsi à l'ensemble des praticiens, y compris les
médecins généralistes, un niveau de formation élevé.
Ainsi, comme prévu, après avoir réformé les deuxième et troisième cycles, le
Gouvernement s'attellera à la réforme du premier cycle, qui, cette fois,
concernera l'ensemble des professionnels de santé.
Ce sont également nos dispositifs de solidarité nationale qu'il faut adapter
et compléter pour répondre aux enjeux sociaux d'aujourd'hui.
Quelques dispositions concernent des personnes dont l'accès aux soins est
difficile.
Je pense, tout d'abord, à l'article relatif à nos compatriotes résidant à
l'étranger. Cet article 8 comporte, parmi ses dispositions principales, la
création d'un tarif préférentiel grâce auquel nos compatriotes expatriés dont
les revenus sont modestes pourront adhérer à la Caisse des Français de
l'étranger, et ainsi bénéficier d'une couverture maladie de qualité. Sur
l'initiative de sénateurs de l'ensemble des travées de la Haute Assemblée, le
dispositif avait déjà été enrichi ; l'Assemblée nationale a donné son accord au
texte issu de la première lecture du Sénat, sous réserve d'une modificaion de
pure forme.
En ce qui concerne la réforme du contentieux technique de la sécurité sociale,
le Sénat avait souhaité que le contentieux de l'incapacité de première instance
soit traité par des tribunaux du contentieux de l'incapacité, et non par des
commissions régionales, comme l'avait initialement proposé le Gouvernement. Le
Parlement ayant exprimé une position unanime sur ce point, le Gouvernement se
range à cet avis.
L'article relatif à l'accueil familial des personnes âgées et handicapées est
encore en discussion. Cet accueil est une alternative précieuse au maintien à
domicile, qui n'est pas toujours possible, et à l'hébergement en établissement,
qui n'est pas toujours désiré par les personnes concernées. L'article 14 du
projet de loi renforce considérablement les droits sociaux des familles
accueillantes, notamment en garantissant le bénéfice des congés payés et en
fixant au niveau du SMIC la rémunération minimale. Il assure également aux
personnes âgées ou handicapées les conditions d'un accueil de qualité, en
précisant les modalités de l'agrément des familles et de son renouvellement.
Lors de la première lecture, le Gouvernement avait donné son accord au Sénat
pour compléter les dispositions du présent article en ouvrant la possibilité
aux personnes morales de droit public ou de droit privé gérant des institutions
sociales et médico-sociales de passer, avec l'accord du conseil général, des
contrats de travail, distincts du contrat d'accueil, avec des personnes
accueillant des personnes âgées ou handicapées. Cela ayant été accepté par
l'Assemblée nationale, cet article important pourra, j'en suis sûre, être voté
conforme par votre assemblée, sous réserve d'une modification formelle proposée
par vos collègues députés.
Enfin, je voudrais regretter que le Sénat se refuse à suivre le Gouvernement
sur l'abrogation de la loi Thomas, relative aux fonds de pension. Une fois
encore, le Gouvernement entend réaffirmer son attachement à notre système de
retraite par répartition, qui est fondé sur les principes de solidarité entre
tous les Français et entre les générations. C'est pourquoi il s'opposera une
nouvelle fois à la suppression de l'article abrogeant la loi Thomas, souhaitant
que cette position soit définitivement validée par le Parlement.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
C'est le canard de
Robert Lamoureux !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler,
secrétaire d'Etat.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je
souhaitais dire en ouverture de cette deuxième lecture du projet de loi de
modernisation sociale.
J'avais beaucoup insisté, dès la première lecture, sur le contenu très
politique de ce texte, et contesté les accusations de « fourre-tout » qui
étaient adressées au Gouvernement.
M. Claude Huriet,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
C'est de l'humour !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler,
secrétaire d'Etat.
Au contraire, et plus que jamais, je veux dire que ce
projet de loi est un « tout », dont les dispositions sont attendues par de
nombreux acteurs sociaux, parce qu'elles créent de nouveaux droits, améliorent
la qualité de certains services ou protègent les droits des salariés.
L'actualité démontre à présent le niveau d'exigence qui pèse sur notre débat.
Je crois que le Gouvernement a fait preuve de responsabilité en vous présentant
des propositions très fortes pour répondre aux attentes qui se sont exprimées
ces dernières semaines. Je ne désespère pas que votre assemblée pourra suivre
le Gouvernement pour faire aboutir un certain nombre de ces réformes attendues
de modernisation sociale, car ce sont des progrès qui sont à partager.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Huriet, rapporteur.
M. Claude Huriet,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, étant, dans l'ordre des
articles, le premier des rapporteurs à intervenir, il me revient d'évoquer le
contexte dans lequel s'inscrit la deuxième lecture du présent projet de loi.
Je me permets de me faire ainsi l'interprète de mes excellents collègues
Bernard Seillier, Alain Gournac et Annick Bocandé, ainsi que du président Jean
Delaneau, qui n'a pas souhaité, avec la courtoisie qui est la sienne, prendre
la parole dans la discussion générale avant les rapporteurs de la commission
qu'il préside.
Hérodote disait du crocodile : « C'est, de tous les êtres vivants qui nous
sont connus, celui qui passe de la plus petite taille à la plus grande ».
Le projet de loi de « modernisation sociale » présente une caractéristique
similaire : de 48 articles dans la version soumise initialement à l'Assemblée
nationale, il atteindra probablement, dans son texte définitif, près de 220
articles.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture comportait en
effet 106 articles, 58 articles additionnels ayant été insérés, dont 23 sur
l'initiative du Gouvernement.
Le Sénat, en première lecture, a adopté conformes 42 articles ; il a enrichi
le projet de loi de 77 articles additionnels, dont 16 sur l'initiative du
Gouvernement.
N'ayant pu obtenir du Sénat le vote de 9 autres articles additionnels et
ayant, en outre, quelques projets non encore aboutis, le Gouvernement décidait
de lever l'urgence sur le projet de loi et d'engager une deuxième lecture à
l'Assemblée nationale.
Saisie de 141 articles, l'Assemblée nationale en a adopté 39 conformes, mais,
parallèlement, elle a tenu à ajouter 56 articles additionnels, dont 22 sur
l'initiative du Gouvernement, portant le nombre d'article en navette à 158.
Le rapporteur du texte à l'Assemblée nationale a pu considérer que le Sénat
avait « vidé ses greniers » en insérant dans le projet de loi un certain nombre
de dispositions déjà votées par lui dans le cadre de son ordre du jour
réservé.
Pourtant, cette démarche est aisée à comprendre : l'Assemblée nationale ne
daigne pas examiner les propositions de loi adoptées par le Sénat alors même
qu'elles portent sur des questions aussi importantes et urgentes que la
continuité du service public et l'indemnisation de l'aléa médical.
Le Sénat est ainsi contraint d'insérer ses propositions dans des textes en
navette afin que l'Assemblée nationale puisse au moins en prendre connaissance
en séance publique...
M. Alain Gournac,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Eh oui !
M. Claude Huriet,
rapporteur.
... et prendre ne serait-ce que la peine et la responsabilité
de les supprimer, ce qu'elle fait d'ailleurs, dans les temps actuels, avec une
constance remarquable - je dis « dans les temps actuels », car il n'en a pas
toujours été ainsi.
Mais, à dire vrai, les greniers du Palais-Bourbon - qui, bien souvent, ne sont
que l'exutoire des tiroirs des ministères ! - se comparent avantageusement à
ceux du Palais du Luxembourg, puisque 114 articles additionnels sont au total
imputables sinon à l'imagination, du moins aux votes de l'Assemblée
nationale.
S'il est bien naturel que le Parlement entende enrichir les textes qui sont
soumis à son examen, il est en revanche surprenant que le Gouvernement soit
l'auteur direct de 61 articles additionnels, soit davantage que le nombre
d'articles que comportait son propre projet de loi tel qu'il a été soumis en
première lecture à l'Assemblée nationale. C'est donc l'équivalent d'un nouveau
projet de loi qui est venu se greffer sur le premier, sans délibération du
conseil des ministres et sans avis du Conseil d'Etat.
Le Gouvernement ayant jugé utile d'ouvrir, parallèlement et simultanément, un
débat sur un autre projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social,
éducatif et culturel, qui, lui-même, se nourrit de projets de loi à part
entière que le Gouvernement entend y introduire par amendements de séance,
l'hypertrophie législative est à son comble, doublée de l'insécurité juridique
qui tient à l'improvisation des textes déposés et à la précipitation dans
laquelle le Parlement doit les examiner.
A ce titre, la levée de l'urgence sur le présent projet de loi de
modernisation sociale a permis, certes, une lecture supplémentaire dans chaque
assemblée, mais au prix d'acrobaties dans le calendrier des travaux
supplémentaires consistant, en définitive, à faire plus de lectures dans un
même laps de temps, jusqu'à ce que la machine se grippe. C'est ce qui est
arrivé, le mardi 29 mai, à l'Assemblée nationale.
De fait, l'Assemblée nationale a dû prendre quinze jours de réflexion avant
d'adopter en séance publique, le 12 juin, au cours d'une seconde délibération,
neuf nouveaux amendements et sous-amendements.
Notre collègue Alain Gournac reviendra sans doute dans un instant sur le
contenu de ces amendements et sur leurs conséquences pour les entreprises.
M. Alain Gournac,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Tout à fait !
M. Claude Huriet,
rapporteur.
Pour ma part, avant d'examiner les modifications apportées
par les députés au volet sanitaire du projet de loi, je tiens à dénoncer les
conditions déplorables dans lesquelles s'est effectué l'examen du titre Ier du
projet de loi par l'Assemblée nationale en deuxième lecture.
Faute de temps, la commission de l'Assemblée nationale n'a pu examiner, sur
cette partie, la plupart des amendements extérieurs, sur lesquels le rapporteur
s'est donc contenté de donner un avis personnel.
L'examen du titre Ier n'a débuté qu'à quatre heures trente du matin, le jeudi
de l'Ascension, pour s'achever deux heures plus tard, après l'examen de 122
amendements !
Dans ces conditions, on conçoit que l'Assemblée nationale ait été amenée, dans
la confusion extrême qui régnait alors, à émettre des votes parfois
surprenants, s'amusant, si l'on peut dire, à faire battre tantôt le rapporteur,
tantôt le Gouvernement, parfois les deux !
Chacun s'accordera à reconnaître que ce ne sont pas là des conditions de
travail dignes du Parlement, et je pense que vous serez tous d'accord avec moi,
mes chers collègues, pour dire : vive le bicaméralisme !
A l'issue de l'examen en première lecture par notre assemblée du volet
sanitaire du projet de loi, vingt articles restaient en discussion.
L'Assemblée nationale en a adopté conforme six, dont l'article 17 relatif à la
réforme du troisième cycle des études médicales. Elle a également maintenu la
suppression de l'article 6
quater
relatif aux aides opératoires.
Elle a, en revanche, supprimé sept articles que le Sénat avait introduits en
première lecture : l'article 17
bis
A, qui instituait un dispositif de
formation médicale continue, et les six articles additionnels relatifs à l'aléa
médical.
L'Assemblée nationale a, en outre, apporté des modifications à six
articles.
Elle a ainsi modifié, contre l'avis du Gouvernement et du rapporteur, le I de
l'article 2
quater
introduit par le Sénat, qui offrait la faculté, pour
les groupements de coopération sanitaire, de gérer une pharmacie à usage
intérieur pour le compte de leurs membres. On se demande vraiment pourquoi ! La
commission vous proposera, par conséquent, de rétablir la rédaction que nous
avions adoptée en première lecture.
L'Assemblée nationale a aussi complété cet article par un III donnant une
véritable base juridique aux procédures de transformation d'établissements
publics de santé et de création d'un établissement public de santé
interhospitalier.
L'Assemblée nationale est revenue sur l'article 6
ter,
qui prévoyait
que, lors de l'appel de préparation à la défense, les jeunes Français sont
soumis à un examen médical et à des tests psychologiques, M. Philippe Nauche,
rapporteur, ayant reconnu que le dispositif adopté par l'Assemblée nationale en
première lecture « était très difficile à mettre en oeuvre ».
La nouvelle rédaction adoptée par l'Assemblée nationale prévoit que les jeunes
Français devront, lors de l'appel de préparation à la défense, présenter au
service de santé des armées un certificat délivré par un médecin de leur choix
- médecin généraliste ou médecin scolaire - attestant qu'ils ont subi un examen
médical dans les six mois précédents. Ceux n'ayant pas présenté ce certificat
seront convoqués par leur caisse primaire d'assurance maladie afin de
bénéficier d'un examen de santé gratuit. Votre commission vous proposera de
vous rallier à cette rédaction.
A l'article 17
quinquies,
relatif aux modalités d'accès des
chirurgiens-dentistes à diplôme étranger au statut de praticien adjoint
contractuel, l'Assemblée nationale a préféré introduire dans la loi un
dispositif en tous points comparable à celui qui avait été voté en 1999 dans la
loi « CMU » pour les médecins.
Elle a accepté le dispositif adopté par le Sénat à l'article 28
sexies
relatif aux poursuites disciplinaires contre des médecins ayant dénoncé des
sévices sur des enfants. Elle a souhaité, toutefois, disjoindre les deux
alinéas adoptés par le Sénat en plaçant le premier dans le code pénal et le
second dans le code de la santé publique. Cette modification ne change rien
quant au fond, mais rend le dispositif moins intelligible. Je vous proposerai
cependant de l'adopter telle quelle puisque nos deux assemblées semblent être
parvenues à un accord sur le fond.
Si elle a rejeté en bloc les articles additionnels adoptés par le Sénat, parmi
lesquels les articles relatifs à l'aléa médical et à la formation médicale
continue, notamment parce que ce projet de loi n'avait pas vocation à devenir
le « vide-greniers » du Sénat, l'Assemblée nationale ne s'est pas privée
d'insérer, en deuxième lecture, treize articles additionnels !
Je dois d'ailleurs à la vérité de dire que les dispositions concernant la
formation médicale continue étaient rangées non pas dans les « greniers du
Sénat » mais bien plutôt dans les tiroirs du Gouvernement, puisqu'un accord
était intervenu sur ces dispositions voilà près de deux ans et que l'on
attendait depuis qu'elles puissent être introduites dans un projet de loi. Le
Sénat avait pensé ainsi rendre service au Gouvernement. Acte devrait lui en
être donné !
Sept des articles additionnels introduits par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture, les articles 2
quater
A à 2
quater
G, auraient
sans doute gagné à n'en faire qu'un puisqu'ils modifient tous l'article L.
5126-5 du code de la santé publique relatif aux pharmacies à usage intérieur et
qu'ils sont généralement de portée mineure.
Deux articles, les articles 6
quater
A et 6
quater
B, visent à
introduire davantage de souplesse dans les modalités de transfert d'officines
de pharmacie.
Enfin, l'Assemblée nationale a adopté deux articles 17
bis
AA et 17
bis
AB relatifs au statut des praticiens hospitaliers à temps partiel.
Si le premier ne soulève pas de difficulté particulière puisqu'il permet
d'instituer un régime de protection sociale unique pour tous les praticiens, le
second résulte d'un compromis à vrai dire assez boiteux entre le Gouvernement
et l'Assemblée nationale.
Faute d'avoir pu convaincre sa majorité de supprimer toute réévaluation
quinquennale pour les praticiens à temps partiel, le Gouvernement a dû accepter
un amendement du rapporteur, M. Nauche, limitant cette possibilité à la
situation des praticiens recrutés avant la mise en place d'un concours unique
pour le recrutement des praticiens hospitaliers à temps plein et à temps
partiel ou qui exercent à la fois dans un établissement public de santé et dans
une clinique privée à but lucratif.
Ce dispositif introduit, de fait, une discrimination liée au mode de
recrutement ou à l'activité exercée en dehors de l'activité hospitalière. Rien,
à nos yeux, ne justifie une telle discrimination.
Pour sa part, la commission vous proposera de maintenir la position adoptée en
première lecture et de supprimer cet article. Nous avions estimé, en première
lecture, qu'il n'était pas convenable d'examiner à la va-vite des dispositions
qui constituent l'amorce d'une modification de grande ampleur du statut des
praticiens hospitaliers sans disposer d'une présentation d'ensemble de la
réforme envisagée par le Gouvernement et du temps nécessaire à la
concertation.
Telles sont, mes chers collègues, les principales observations que je
souhaitais formuler sur le volet sanitaire de ce projet de loi.
Il me reste maintenant, à la demande amicale de mon collègue Bernard Seillier,
à présenter à sa place un certain nombre de considérations sur la partie du
titre Ier dont il est le rapporteur, à savoir diverses dispositions sur la
protection sociale.
S'agissant, d'abord, des personnes handicapées, le texte transmis en deuxième
lecture fait apparaître de réelles divergences entre le Sénat et l'Assemblée
nationale en ce qui concerne le contentieux technique de la sécurité sociale et
le régime de la récupération sur succession.
A l'article 10
quater
, tout en reconnaissant la nécessité de réformer
les tribunaux de contentieux de l'incapacité, les TCI, l'Assemblée nationale a
pris une position qui diverge de celle du Sénat sur quatre points.
Elle a supprimé la présence de deux assesseurs médecins experts dans les TCI,
qu'elle a remplacés par deux assesseurs représentant respectivement les
travailleurs salariés et les employeurs. L'Assemblée nationale est ainsi
revenue au texte de l'amendement présenté par le Gouvernement en première
lecture au Sénat.
Concernant la Cour nationale de l'incapacité, l'Assemblée nationale a supprimé
la disposition, introduite sur l'initiative de votre commission, prévoyant que
toute contestation portée en appel devant la Cour devait donner lieu à une
expertise médicale du dossier par un médecin qualifié.
Elle a refusé d'appliquer le même régime de sanctions aux assesseurs et aux
magistrats honoraires appelés à présider les TCI, au motif que ces derniers
demeurent soumis aux sanctions prévues par le statut de la magistrature.
Elle a réintroduit le principe de peines intermédiaires avant le prononcé de
la déchéance du droit à siéger d'un assesseur ayant commis une faute dans
l'exercice de ses fonctions.
L'Assemblée nationale a toutefois rejoint le Sénat sur trois points : la
nécessité de réformer les tribunaux du contentieux de l'incapacité en même
temps que la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de
l'assurance des accidents du travail ; le maintien de l'intitulé actuel des
TCI, qui ne peuvent plus être transformés en « commissions régionales du
contentieux de l'incapacité » ; la référence au terme de « faute », plutôt qu'à
ceux de « faute disciplinaire », pour qualifier les actes des assesseurs
susceptibles de sanction.
Dans ces conditions, votre commission vous proposera de « centrer » le
dispositif d'amendements de deuxième lecture sur la question du rôle des
médecins experts dans le contentieux de l'incapacité. En effet, il nous
apparaît que le dispositif gouvernemental réduit de manière excessive la place
et le rôle de l'expertise médicale, comme si l'appréciation d'un taux
d'incapacité relevait du seul dialogue entre représentants des employeurs et
des salariés.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale est revenue sur l'article 14
quater
A relatif aux conditions d'exercice des recours en récupération au titre de
l'aide sociale.
L'amendement adopté par le Sénat avait quatre conséquences : supprimer la
récupération lorsque le retour à meilleure fortune résulte de la perception
d'un héritage par le bénéficiaire ; mettre en place un seuil pour la
récupération des frais d'hébergement des personnes handicapées ; prévoir que
les sommes versées au titre de l'allocation compensatrice pour tierce personne
ne peuvent faire l'objet d'aucun recours sur succession ni sur l'héritier, ni
sur le donataire, ni sur le légataire, par analogie avec ce qui a été voté par
l'Assemblée nationale en matière d'allocation personnalisée d'autonomie ;
enfin, prévoir que les donations effectuées par des personnes handicapées ne
donnent pas lieu à recours en récupération lorsque les donataires sont le
conjoint, les enfants ou encore la personne qui a assumé la charge du
handicapé.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement se limitant à prévoir que les
sommes versées au titre de l'ACTP ne font pas l'objet d'un recouvrement à
l'encontre du bénéficiaire lorsque celui-ci est revenu à meilleure fortune.
Sans revenir à notre texte de première lecture, nous vous proposerons un
amendement de compromis qui, s'il est retenu par l'Assemblée nationale,
permettra de faire un pas en avant en faveur des personnes handicapées.
Mis à part les deux points forts de divergence précités, l'Assemblée nationale
a adopté plusieurs articles qui avaient été modifiés par le Sénat, en ne leur
apportant que des rectifications mineures ; elle permet ainsi au processus de
la navette de s'enclencher véritablement.
L'Assemblée nationale, sous réserve de modifications formelles de
coordination, a adopté l'article 14 relatif à la réforme de l'accueil familial
des personnes âgées ou handicapées dans la rédaction modifiée par le Sénat ;
elle a confirmé le dispositif ouvrant la possibilité aux personnes morales de
droit public ou de droit privé gérant des institutions sociales ou
médico-sociales de passer, avec l'accord du conseil général, des contrats de
travail, distincts du contrat d'accueil, avec les accueillants familiaux.
De même, l'article 14
quater
relatif aux instances de consultation des
personnes handicapées ne fait l'objet que d'une rectification formelle et d'une
précision utile sur le rôle du Conseil national consultatif des personnes
handicapées, le CNCPH, à l'égard des conseils départementaux.
S'agissant de ce dernier article, l'Assemblée nationale a donc validé les
trois apports du Sénat : le regroupement, sous un même chapitre à valeur
législative du Conseil national consultatif des personnes handicapées et des
futurs conseils départementaux ; la mention de l'accès aux sports, aux loisirs,
au tourisme et à la culture dans les thèmes de réflexion des conseils
départementaux ; enfin, la nouvelle mission de recensement du nombre de
personnes handicapées, confiée aux conseils départementaux par un amendement de
notre collègue Guy Fischer et des membres du groupe communiste républicain et
citoyen.
L'article 14
quinquies
, relatif à l'agrément des loueurs ou revendeurs
de matériel de maintien à domicile, qui avait été significativement amélioré,
sur le plan technique, par un amendement de M. Gilbert Chabroux et des membres
du groupe socialiste et sous-amendé par votre commission, a été repris sous la
forme votée par le Sénat et complété par une extension de l'obligation de
formation aux distributeurs délivrant des articles d'orthopédie-orthèse.
L'Assemblée nationale n'est pas revenue sur la modification importante
introduite par le Sénat à l'article 28
ter
, relatif aux places de
stationnement réservées aux personnes handicapées. Il s'agissait de supprimer
la faculté ouverte aux maires d'autoriser l'accès à ces places de stationnement
au vu d'un simple certificat médical, ce qui aurait soulevé des problèmes
d'arbitrage et de gestion, selon nous, insurmontables.
Il est à relever que l'Assemblée nationale a adopté conforme l'article 14
ter
, relatif aux droits fondamentaux des personnes handicapées, malgré
l'avis défavorable de la commission et du Gouvernement, qui estimaient
prématuré de réécrire l'article 1er de la loi du 30 juin 1975 d'orientation en
faveur des handicapés.
Concernant le volet relatif aux rapatriés, l'Assemblée nationale a également
recherché l'accord avec le Sénat, ce qui est peut-être moins surprenant.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté sans modification, d'une part,
l'article 21
bis
, introduit sur l'initiative de M. Guy Fischer et des
membres du groupe communiste républicain et citoyen, avec l'avis favorable de
la commission, qui rouvre le délai de demande de reclassement pour les anciens
fonctionnaires d'Afrique du Nord, et, d'autre part, l'article 21
quater
,
issu d'un amendement du Gouvernement, concernant la prorogation du délai pour
l'accès au dispositif de désendettement des rapatriés réinstallés dans une
profession non salariée.
S'agissant du reclassement des rapatriés agents publics, on notera que
l'Assemblée nationale a supprimé l'article 21
ter
, résultant d'une
initiative de M. Guy Fischer, qui instituait une exonération, au titre de
l'impôt sur le revenu et de la CSG, des sommes perçues par les anciens
fonctionnaires d'Afrique du Nord au titre de leur reconstitution de carrière.
Le Gouvernement était très défavorable à cette mesure.
Toutefois, sur l'initiative de M. Gremetz et du groupe communiste, l'Assemblée
nationale a introduit, malgré l'avis défavorable du Gouvernement, un article 21
ter
A visant à modifier la composition des commissions administratives
de reclassement de fonctionnaires rapatriés.
Concernant le volet relatif aux Français de l'étranger, l'Assemblée nationale
a adopté l'article 8, relatif à la caisse de sécurité sociale des Français de
l'étranger, dans la rédaction modifiée par le Sénat en première lecture, sous
réserve de quelques corrections rédactionnelles. M. Seillier vous propose donc
d'adopter cet article sans modification.
A l'article 8
bis
, qui concerne les droits à pension des fonctionnaires
français détachés à l'étranger, l'Assemblée nationale a rétabli sa rédaction
initiale. Elle a toutefois conservé la possibilité, ouverte aux fonctionnaires
en activité actuellement détachés à l'étranger par un amendement de notre
collègue Monique Cerisier-ben Guiga, de cumuler leur pension française, sans
abattement, avec leur pension étrangère, dès lors qu'ils ne demanderont pas le
remboursement des cotisations acquittées, pendant leur détachement à
l'étranger, auprès du régime français de retraite.
En revanche, l'Assemblée nationale a supprimé l'extension de cette
possibilité, également adoptée par le Sénat sur l'initiative de notre collègue
André Maman, aux fonctionnaires français qui seront détachés à l'étranger après
la date d'entrée en vigueur de la loi, c'est-à-dire à partir du 1er janvier
2002.
L'examen des amendements de notre collègue André Maman ayant toutefois révélé,
en première lecture, un profond désaccord des sénateurs représentant les
Français de l'étranger sur le principe même de cette extension, Bernard
Seillier vous proposera d'adopter l'article 8
bis
dans la rédaction
retenue, en deuxième lecture, par l'Assemblée nationale.
En effet, le mieux est souvent l'ennemi du bien, et le dispositif actuel de
l'article 8
bis
donne désormais satisfaction aux revendications des
fonctionnaires actuellement détachés à l'étranger, revendications dont nous
avions été saisis, les uns et les autres, lors de la première lecture au
Sénat.
Bernard Seillier vous proposera également d'adopter sans modification, sous
réserve, éventuellement, de quelques amendements rédactionnels, les articles 10
sexies
A, 10
septies
A, 10
terdecies
et 10
quaterdecies
.
L'article 10
sexies
A étend aux ressortissants du régime des salariés
agricoles le bénéfice des mesures de l'article 10
quinquies
, visant à
faciliter l'affiliation des retraités du régime général au régime obligatoire
complémentaire d'assurance-maladie d'Alsace-Moselle.
L'article 10
septies
A, résultant d'un amendement de notre commission,
et ayant été complété par le Gouvernement en deuxième lecture à l'Assemblée
nationale, actualise les missions et les moyens du centre de sécurité sociale
des travailleurs migrants, devenu, désormais, le centre des liaisons
européennes et internationales de sécurité sociale.
L'article 10
terdecies
, en autorisant la ratification de l'ordonnance
du 2 mai 2001, tire les conséquences juridiques d'une décision de la Cour de
justice des Communautés européennes, en vertu de laquelle les travailleurs
frontaliers français, dès lors qu'ils sont affiliés à un régime étranger
d'assurance-maladie, ne seront plus assujettis ni à la CSG ni à la CRDS sur
leurs revenus d'activité et de remplacement.
Enfin, l'article 10
quaterdecies
définit, sur le modèle de ce qui
existe déjà pour les conjoints de commerçants ou d'artisans, le statut social
du conjoint collaborateur d'un professionnel libéral. Selon les informations
communiquées par le Gouvernement, cette mesure vise à garantir une couverture
sociale à environ 15 000 personnes, essentiellement des femmes de plus de
cinquante ans qui ont assisté leur mari exerçant une profession libérale.
En revanche, il vous sera proposé de supprimer l'article 10
septies
tendant à l'engagement, par le Gouvernement, d'une concertation avec les
partenaires sociaux sur la question de l'élection des administrateurs des
organismes du régime général de sécurité sociale. En première lecture, le Sénat
avait supprimé cet article, estimant, notamment, que le Gouvernement pouvait, à
tout moment, engager cette concertation sans qu'une disposition législative
soit nécessaire pour l'y inciter.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a rétabli cet article, en associant
désormais à cette concertation les organisations patronales. Toutefois, les
raisons qui ont conduit le Sénat à supprimer cet article en première lecture
demeurent toujours valables. Il vous sera donc proposé d'adopter un amendement
de suppression.
S'agissant du volet relatif à la protection sociale agricole, le bilan est
globalement très positif pour le Sénat.
L'Assemblée nationale a confirmé, à l'article 10, le compromis de bon sens
proposé par la commission, relatif à la composition des conseils
d'administration des caisses de mutualité sociale agricole. Elle a, en
revanche, confirmé la suppression de l'échelon communal pour l'élection des
premier et troisième collèges, ainsi que le régime d'incompatibilités, qui
paraît inadapté pour le régime agricole.
Compte tenu de l'esprit de dialogue manifesté par l'Assemblée nationale, notre
collègue rapporteur Bernard Seillier vous propose de ne pas rétablir le scrutin
communal, même s'il continue à penser que le mécanisme souple proposé par la
commission en première lecture était le meilleur. En revanche, il pense que
l'Assemblée nationale doit faire encore un effort sur le mécanisme des
incompatibilités.
Quatre articles - les articles 10
quater
A, 10
quater
C, 10
quater
D et 10
quater
F - ont été adoptés conformes par
l'Assemblée nationale.
Des amendements rédactionnels ont été adoptés aux articles 10
bis
A, 10
bis
B, 10
bis
C et 10
quater
B. Il vous sera proposé une
adoption conforme de ces quatre articles, ainsi que de l'article 10
bis
B, relatif aux conventions de gestion signées par la caisse centrale de la
mutualité sociale agricole, sous réserve d'une expertise plus approfondie.
Enfin, l'Assemblée nationale a persisté dans la volonté d'abroger la loi
Thomas, par l'article 11, et dans la volonté de faire supporter par le fonds de
solidarité vieillesse la charge de la dette de l'Etat à l'égard des régimes
complémentaires de retraite AGIRC-ARRCO. On peut se demander si la présence de
l'article 11, dans le projet de loi de modernisation sociale, n'est pas à
l'origine du « mauvais oeil » qui frappe ce texte depuis deux ans...
Il vous sera proposé de supprimer à nouveau ces deux articles.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
vous demande de bien vouloir comprendre la durée inhabituelle de mon
intervention dans la discussion générale : je rapportais pour deux et vous ai
présenté, au nom de M. Seillier, les observations qu'appelaient les articles
dont il avait été saisi.
(Applaudissements sur le banc des
commissions.)
M. le président.
Monsieur le rapporteur, je vous signale qu'il nous reste encore à entendre
deux autres rapporteurs de la même commission, et sur le même sujet.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
C'est que le sujet est
vaste, monsieur le président !
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