SEANCE DU 30 OCTOBRE 2001
M. le président.
L'article 9
quinquies
a été supprimé par l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 30, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Rétablir l'article 9
quinquies
dans la rédaction suivante :
« I. - Le dernier alinéa de l'article L. 50 du code des pensions civiles et
militaires de retraite est supprimé.
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I sont compensées, à
due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
Le sous-amendement n° 45, présenté par Mme Michaux-Chevry, M. Courtois et les
membres du groupe du Rassemblement pour la République et apparentés, est ainsi
libellé :
« I. - Avant le paragraphe I du texte proposé par l'amendement 30, ajouter un
paragraphe ainsi rédigé :
« IA. - Dans le premier alinéa de l'article L. 50 du code des pensions civiles
et militaires de retraite, les mots : "peut, sous les réserves et dans les
conditions fixées par le présent article, prétendre" sont remplacés par les
mots : "a droit à une pension égale".
« II. - Dans le paragraphe I de l'amendement 30, remplacer les mots : "Le
dernier alinéa" par les mots : "Les deux derniers alinéas" et les mots : "est
supprimé" par les mots : "sont supprimés".
« III. - Rédiger ainsi le début du paragraphe II de l'amendement n° 30 :
« Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des IA et I sont compensées...
»
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 30.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Il s'agit, comme en première lecture, et en vertu du principe
d'égalité entre les hommes et les femmes, de supprimer le plafonnement de
pension de réversion qui touche les veufs de femmes fonctionnaires ou
militaires alors qu'il ne concerne pas les veuves.
M. le président.
La parole est à M. Gournac, pour présenter le sous-amendement n° 45.
M. Alain Gournac.
L'article 9
quinquies,
adopté au Sénat à l'unanimité sur l'initiative
de Mme Michaux-Chevry, avait pour but d'abroger le dernier alinéa de l'article
L. 50 du code des pensions civiles et militaires afin de rétablir l'égalité
entre hommes et femmes.
En effet, l'article L. 38 de ce code ouvre droit pour la veuve d'un
fonctionnaire à une pension de réversion égale à 50 % de la pension obtenue par
le mari.
L'article L. 50 pose le même principe pour le mari survivant, mais fixe un
montant maximal pour cette pension de réversion à hauteur de 37,5 % du
traitement brut afférent à l'indice brut 550, soit environ 4 800 francs.
Les auteurs de cet amendement se félicitent de la reprise de l'article 9
quinquies
par le rapporteur, mais ils souhaitent à présent le compléter
pour parachever la logique d'égalité entre les deux sexes de la loi qui a animé
cette démarche.
En effet, un veuf ne peut percevoir la pension de réversion de son épouse qu'à
l'âge de soixante ans, alors qu'une veuve peut la recevoir immédiatement, quel
que soit son âge. Un arrêt en date du 17 mai 1990 de la Cour de justice des
Communautés européennes avait pourtant condamné les caisses de retraite pour
discrimination sexuelle. Depuis lors, seules les caisses de retraite de l'Etat
ne respectent pas cette décision.
La récente réponse du ministre de la fonction publique à une question écrite
posée par M. Jean-Marie Geveaux à ce sujet n'a pas été satisfaisante au regard
de l'urgence de cette disposition.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 45 ?
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Je comprends bien la proposition de nos collègues : puisque,
en première lecture, il s'agissait de supprimer une discrimination, ils
souhaitent maintenant en supprimer une seconde, touchant aux veufs des
fonctionnaires par rapport aux veuves quant à la date d'entrée en jouissance de
la pension de réversion.
La perception de la pension est immédiate pour les veuves, mais elle est
suspendue jusqu'à l'âge de soixante ans pour les veufs. Le sous-amendement
prévoit donc une perception immédiate pour les veufs comme pour les veuves.
On aurait pu imaginer d'harmoniser dans l'autre sens !
(Sourires.)
Je
rappelle à cet égard que, dans le régime général, la pension ne peut être
perçue qu'à cinquante-cinq ans, qu'il s'agisse des veuves ou des veufs.
L'adoption de la mesure proposée aurait de nombreuses conséquences, et son
examen devrait donc être approfondi. Je me demande, dès lors, si c'est bien le
moment de régler ce problème extrêmement complexe, d'autant qu'il relève, en
outre, de la compétence de la commission des finances et de la commission des
affaires sociales.
La question est réelle, mais elle est quelque peu extérieure aux droits de
succession et, de plus, la solution avancée ne sera certainement pas retenue
par l'Assemblée nationale. En rester à la situation que nous avions votée en
première lecture et attendre pour préciser les choses serait plus raisonnable,
mes chers collègues.
En conséquence, j'en appelle à la sagesse des auteurs du sous-amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 30 et le sous-amendement
n° 45 ?
M. Jean-Jack Queyranne,
ministre des relations avec le Parlement.
L'amendement n° 30 a déjà été
introduit par la Haute Assemblée en première lecture, et il a été rejeté par
l'Assemblée nationale en deuxième lecture. Il vise à supprimer le dernier
alinéa de l'article L. 50 du code des pensions civiles et militaires de
retraite.
Il prévoit une compensation des pertes de recettes pour l'Etat - qui pourrait
relever de l'article 40 - en instituant une taxe additionnelle aux droits
prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts.
Il vise à réviser les conditions de taux et de ressources.
Quant au sous-amendement n° 45, défendu par M. Gournac, il vise les conditions
d'âge.
Le code des pensions civiles et militaires de retraite établit une distinction
entre les hommes et les femmes en ce qui concerne les droits de réversion,
puisque les veuves de fonctionnaires ou de militaires peuvent liquider leurs
droits sans condition d'âge et de ressources, alors que les veufs de femmes
fonctionnaires sont soumis à des conditions de ressources - de taux donc, - et
à des conditions d'âge.
Cette question est actuellement étudiée à l'échelon européen, afin que soit
déterminé dans quelle mesure le régime des fonctionnaires entre dans le champ
des régimes qualifiés de professionnels auxquels doit s'appliquer le principe
d'égalité entre les hommes et les femmes.
Si, au niveau européen, des modalités d'alignement étaient jugées nécessaires,
les mesures envisageables dans une perspective d'harmonisation des droits entre
les hommes et les femmes pourraient revêtir différentes formes et aller
peut-être plus loin que celles que propose la commission.
Cependant, je rappelle que cette inégalité révèle une inégalité de revenus en
défaveur des femmes, qui demeure bien réelle. Cette disparité existe non
seulement dans le secteur privé, mais également dans la fonction publique
d'Etat ou dans la fonction publique territoriale, comme l'a rappelé un récent
rapport sur les rémunérations.
En outre, à l'occasion de la réflexion sur les retraites, le conseil
d'orientation des retraites, mis en place par le Gouvernement - certains
d'entre vous y siègent avec les représentants du patronat et des syndicats - a
engagé d'importants travaux sur la comparaison des régimes de retraite. Les
préoccupations d'harmonisation des retraites entre hommes et femmes font partie
intégrante de ce chantier et elles donneront lieu à des propositions.
Il nous paraît prématuré de remplacer, sans vision d'ensemble, le régime
actuel par une mesure dont tous les effets ne seraient pas pris en
considération, qu'il s'agisse de ses aspects financiers ou de ses conséquences
en matière d'équité dans les relations entre les retraités et les conjoints de
retraité.
Enfin, la mesure proposée représente une dépense considérable qui est évaluée
à plus d'un milliard de francs par an.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement s'oppose à l'amendement n° 30 et au
sous-amendement n° 45.
M. le président.
Monsieur Gournac, accédez-vous à la demande de retrait de M. le rapporteur
?
M. Alain Gournac.
Tout d'abord, je remercie M. le ministre de sa réponse très précise.
Monsieur le ministre, l'Etat se doit de montrer l'exemple. Il faut que les
choses évoluent.
Je constate que c'est en 1990 que la Cour de justice des Communautés
européennes a sanctionné la France dans ce domaine. C'était il y a onze ans !
Il faut aujourd'hui ouvrir ce dossier pour essayer de trouver une solution.
Monsieur le rapporteur, j'accepte de retirer le sous-amendement n° 45, mais il
était bon que cette discussion ait bien.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Tout à fait !
M. le président.
Le sous-amendement n° 45 est retiré.
Monsieur le ministre, vous avez évoqué l'article 40. L'invoquez-vous ?
M. Jean-Jack Queyranne,
ministre des relations avec le Parlement.
J'ai indiqué que cet amendement
n° 30 relevait de l'article 40, même si une compensation était proposée. Mais
c'est au Sénat d'en apprécier, et je m'en remets donc à sa sagesse.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 30, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 9
quinquies
est rétabli dans cette
rédaction.
Article 10