SEANCE DU 14 DECEMBRE 2001
MODERNISATION SOCIALE
Adoption d'un projet de loi en nouvelle lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi
de modernisation sociale (n° 128, 2001-2002), adopté avec modifications par
l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, [Rapport n° 129 (2001-2002).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le ministre.
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, nous abordons, en dernière lecture devant
votre assemblée, le projet de loi de modernisation sociale.
Ce texte important a connu une très longue gestation, de près de deux ans, ce
qui a permis, quoi qu'en disent certains, de le soumettre plusieurs fois à la
consultation de tous les milieux et institutions intéressés de la société
civile. C'est, de plus, un texte sur lequel le Gouvernement a même décidé de
lever l'urgence qu'il avait précédemment déclarée, pour permettre au Parlement
de travailler dans les meilleures conditions possibles. C'est donc un projet
qui a été beaucoup commenté et débattu, en particulier avec vous.
Au cours de la navette parlementaire, l'Assemblée nationale a, le 6 décembre
dernier, globalement rétabli le texte qu'elle avait adopté en deuxième lecture
et, par un vote solennel mardi dernier, a adopté ce texte à une large majorité.
Elle a ainsi montré son attachement à l'intégrité des importantes dispositions
adoptées dans le débat parlementaire, notamment à celles qui sont relatives aux
licenciements économiques.
En dépit de l'échec des travaux de la commission mixte paritaire, vous avez
légitimement souhaité reprendre l'examen de ce projet de loi, ce qui montre que
vous créditez enfin ce texte d'avoir un réel contenu politique, ce dont vous
avez longtemps semblé douter. Bien entendu, c'est également l'analyse du
Gouvernement et je prendrai soin de rappeler brièvement les très importantes
avancées sociales que contient ce projet de loi en matière d'emploi, de
travail, de formation professionnelle, de santé et de solidarité.
Ces avancées sociales sont attendues par nos concitoyens. Ils en seront
bientôt les bénéficiaires et je m'en réjouis, puisque nous parvenons au terme
du processus parlementaire.
Ces avancées sociales sont nombreuses : sur la protection de la santé et sur
l'amélioration du système sanitaire, par l'instauration d'un projet social au
sein des hôpitaux, par le renforcement de la qualité des soins et par la
réforme des études médicales ; sur la solidarité nationale à l'égard des plus
démunis, par la création d'un statut des accueillants familiaux pour les
personnes âgées et les personnes handicapées, et par le renforcement de la
couverture maladie des Français à l'étranger ; sur le respect de la dignité des
salariés dans les entreprises, par l'interdiction du harcèlement moral, sa
prévention et la protection de ceux et celles qui en sont victimes.
Ces avancées sociales concernent aussi la prévention des licenciements
économiques : par le renforcement du contrôle des salariés et de leurs
représentants sur les projets de l'employeur ; par l'obligation de proposer des
mesures alternatives aux licenciements pour les éviter et, s'ils apparaissent
inévitables, par l'obligation de reclassement préalable ; en outre une
responsabilité des entreprises à l'égard des territoires où elles agissent est
créée.
Ces avancées sociales concernent enfin : la limitation des emplois précaires,
par la lutte contre le recours abusif aux contrats à durée déterminée et à
l'intérim et le renforcement des sanctions pénales ; la validation des acquis
de l'expérience dans la vie professionnelle, pour tous ceux et celles qui,
faute de diplôme, sont bloqués dans leur évolution de carrière.
De plus, ce projet de loi abroge la loi Thomas sur les fonds de pension pour
préserver notre régime de retraites par répartition.
Bien que les navettes aient permis l'adoption conforme, par les deux
assemblées, de près de la moitié des articles, les divergences qui subsistent
portent sur des sujets essentiels qui devront être tranchés en lecture
définitive par l'Assemblée nationale.
Sur ces sujets essentiels, nous avons eu déjà, à deux reprises, l'occasion de
débattre de façon approfondie. Les amendements de votre commission des affaires
sociales qui vont être soumis à la discussion ne laissent pas entrevoir
d'évolution possible sur la nature du débat et sur les positions en
présence.
Dans ces conditions, vous comprendrez qu'il ne me semble pas utile de
reprendre ce débat d'ensemble par un long exposé introductif, et que le
Gouvernement réserve son expression, si cela est nécessaire, lors du vote des
articles.
Je veux néanmoins, parce qu'il s'agit du sujet le plus sensible pour tous,
réaffirmer devant vous ce que j'ai eu l'occasion de dire à l'Assemblée
nationale mardi dernier sur la prévention des licenciements économiques.
Avec le texte adopté par l'Assemblée nationale, nous sommes parvenus, j'en ai
la certitude, à un dispositif de prévention et de protection équilibré et
justifié.
Il respecte la place des partenaires sociaux dans l'entreprise à l'égard des
décisions qui engagent l'avenir de cette dernière et de ses salariés, en
renforçant les moyens d'intervention des représentants du personnel, mais sans
confisquer la responsabilité de l'employeur au profit d'une régulation
administrative ou judiciaire. Il renforce, ce faisant, les exigences du
dialogue social moyennant, dans la très grande majorité des cas, un délai
supplémentaire de consultation de trois semaines.
Il protège mieux l'emploi des salariés en consacrant les principes posés par
la jurisprudence sur le droit à l'adaptation des emplois et au reclassement et
en donnant toute leur force à ces principes pour ne faire du licenciement que
le dernier recours quand toute autre solution a été étudiée et mise en
place.
Il améliore la protection en cas de licenciement en majorant l'indemnité de
rupture et en mettant en place des obligations nouvelles de reclassement
externe et de réindustrialisation des bassins d'emploi affectés par les
fermetures de sites.
Ce projet de loi n'interdit pas aux entreprises de s'adapter à l'évolution du
marché et de leur environnement international. Il fait en sorte que cette
adaptation ne se réalise pas, comme c'est trop souvent le cas, au détriment de
l'emploi.
Il va être temps de travailler à la mise en oeuvre de ce texte, dont chacun
mesurera l'importance dans les mois à venir.
Pour que cette mise en oeuvre se fasse dans les meilleures conditions
possibles, j'ai demandé que l'ensemble des textes d'application qui
concerneront le licenciement économique fasse l'objet d'un examen approfondi
avec les partenaires sociaux et avec des experts, auxquels pourraient se
joindre, s'ils acceptent, les deux rapporteurs de cette partie du texte au
Sénat et à l'Assemblée nationale.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je souhaitais dire brièvement
sur ce projet de loi de modernisation sociale. C'est pour moi une véritable
fierté d'avoir défendu ce texte tout au long de ces derniers mois et, surtout,
d'avoir contribué à son enrichissement.
Je suis persuadée que nous aurons, après son adoption définitive, fait oeuvre
utile pour nos concitoyens, et notamment pour les salariés de notre pays.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Dériot, rapporteur.
M. Gérard Dériot,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
madame la ministre, mes chers collègues, étant, compte tenu de l'ordre des
articles, le premier des rapporteurs à intervenir, il me revient d'évoquer le
contexte dans lequel intervient la nouvelle lecture du projet de loi de
modernisation sociale.
Déposé le 24 mai 2000, le présent projet de loi devrait faire l'objet d'un «
dernier mot » par l'Assemblée nationale avant la fin de l'année.
Il est probable qu'il comporte alors, dans son texte définitif, 224 articles,
soit près d'un quintuplement du nombre des articles du projet de loi
initial.
Le Gouvernement lui-même est l'auteur direct de 71 articles additionnels, soit
l'équivalent d'un substantiel projet de loi qui est venu se greffer sur son
texte initial, sans délibération en conseil des ministres ni avis du Conseil
d'Etat.
Composé de 48 articles initialement, le présent projet de loi a, dès sa
première lecture à l'Assemblée nationale, commencé sa carrière de « crocodile
», selon la formule d'Hérodote, qui disait du crocodile : « c'est, de tous les
êtres vivants qui nous sont connus, celui qui passe de la plus petite taille à
la plus grande. »
A l'issue de ce premier examen par l'Assemblée nationale, il comportait déjà
106 articles. En première lecture, le Sénat a adopté conformes 42 articles et a
enrichi le texte de 77 articles additionnels, transmettant ainsi 141 articles à
l'Assemblée nationale.
Celle-ci, en deuxième lecture, en adoptait 39 conformes mais en insérait 56
nouveaux, de sorte que le Sénat était saisi à son tour de 158 articles. En
deuxième lecture, le Sénat adoptait encore 55 articles conformes mais se
contentait de 26 articles additionnels : au terme de cette deuxième lecture,
129 articles étaient donc en navette.
En dépit du grand nombre des articles adoptés conformes à ce stade de la
navette, la commission mixte paritaire réunie le 30 octobre 2001 à l'Assemblée
nationale n'est pas parvenue à un accord sur le nombre équivalent des articles
restant en discussion.
Elle a échoué, d'un commun accord, sur l'article 11 portant abrogation de la
loi Thomas, les uns voyant dans cette mesure emblématique le respect d'un
engagement solennel pris par le Premier ministre dès sa déclaration de
politique générale le 19 juin 1997, les autres trouvant, dans l'abrogation
laborieuse d'une loi jamais appliquée, l'illustration même de l'impuissance du
Gouvernement à garantir l'avenir des retraites.
Le présent projet de loi s'est désormais stabilisé sous l'effet d'un double
phénomène.
En premier lieu, les contraintes constitutionnelles limitent l'introduction,
après la commission mixte paritaire, de nouvelles dispositions : l'Assemblée
nationale n'a ainsi inséré que 6 articles additionnels en nouvelle lecture.
En second lieu, les points d'accord entre les deux assemblées se raréfient.
Ainsi, les députés n'ont adopté conformes que vingt-quatre articles - dont le
quart constitue des supressions conformes - tandis que les désaccords se figent
: l'Assemblée nationale n'a pas souhaité, par exemple, ne serait-ce que
commenter la suppression du dispositif, pourtant mesuré et de bon sens,
introduit par le Sénat s'agissant du service minimum dans le secteur public.
Ainsi, les articles 39
ter
à 39
sexies
ne sont pas même évoqués
dans le rapport en nouvelle lecture de la commission des affaires culturelles,
familiales et sociales de l'Assemblé nationale !
La navette s'enrichit toutefois d'une nouvelle catégorie d'articles : les
rappels pour coordination. Cinq articles, pourtant adoptés conformes, sont
ainsi réintroduits dans la navette - dont deux pour être supprimés - confirmant
le désordre né de l'hypertrophie qui caractérise la gestion des textes
sociaux.
Au total, le Sénat est ainsi saisi, en nouvelle lecture, de cent seize
articles, dont trente-sept ont été supprimés par l'Assemblée nationale.
J'en reviens maintenant aux modifications apportées par les députés au volet
sanitaire de ce projet de loi.
Permettez-moi, tout d'abord, de rendre hommage au travail accompli en première
et en deuxième lecture par notre collègue Claude Huriet, à qui je succède dans
ses fonctions de rapporteur.
Ce volet sanitaire est probablement le plus consensuel de ce texte puisque nos
deux assemblées sont parvenues à un accord sur l'essentiel des dispositions.
Il est d'ailleurs satisfaisant de constater que la navette s'est poursuivie en
nouvelle lecture puisque, sur bon nombre d'articles, l'Assemblée nationale
s'est rangée à l'avis du Sénat, maintenant la suppression de certains articles
supprimés par notre assemblée ou rétablissant d'autres articles dans des
rédactions tenant très largement compte de nos observations. C'est pourquoi la
commission ne vous proposera, en nouvelle lecture, qu'un nombre réduit
d'amendements. Il reste naturellement, en effet, des points de divergence entre
nos deux assemblées.
Ainsi en est-il de la réévaluation quinquennale pour les praticiens
hospitaliers exerçant à temps partiel, que nous avions souhaité maintenir et
que l'Assemblée nationale a supprimée, ou encore des articles additionnels
introduits par le Sénat en première lecture sur l'initiative de son rapporteur,
M. Claude Huriet, en réaction au retard pris pour le dépôt, et donc l'examen,
du projet de loi relatif aux droits des malades.
Sur le premier point, la commission vous proposera de maintenir la position du
Sénat ; sur le second, en revanche, le prochain examen du projet de loi relatif
aux droits des malades par notre assemblée ne rend plus nécessaire le
rétablissement de dispositions qui ont été une nouvelle fois supprimées par les
députés.
Le Sénat avait, en outre, adopté en deuxième lecture un volet composé de huit
articles additionnels - les articles 6
quinquies
à 6
duodecies -
consacrés aux comités consultatifs de protection des personnes dans la
recherche biomédicale, les CCPPRB.
Le rapport d'information présenté par notre collègue Claude Huriet, au nom de
la commission, avait montré l'existence de difficultés de fonctionnement liées
tant aux carences de la direction générale de la santé qu'aux incertitudes
entourant le statut de ces comités.
Le rôle des CCPPRB n'étant pas en cause, il convenait de préserver leur
indépendance tout en leur donnant véritablement les moyens d'exercer leur
mission ; tel était l'objet des articles additionnels qui, adoptés par le
Sénat, ont été supprimés par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, au
motif que le dispositif proposé était « prématuré ».
La commission vous proposera, par conséquent, de rétablir en nouvelle lecture
ces huit articles additionnels.
J'évoquerai maintenant les dispositions du chapitre II du titre Ier relatives
à la protection sociale, en remplacement de notre collègue Bernard Seillier,
qui vous prie de bien vouloir l'excuser de son absence car il est retenu dans
son département par un impératif majeur.
L'Assemblée nationale a rétabli l'article 8
bis
, qui concerne les
droits à pension des fonctionnaires français détachés à l'étranger, dans la
rédaction qu'elle avait adoptée en deuxième lecture.
Elle a toutefois conservé la possibilité ouverte par le Sénat en première
lecture aux fonctionnaires en activité actuellement détachés à l'étranger de
cumuler leurs pensions française et étrangère sans abattement dès lors qu'ils
ne demanderont pas le remboursement des cotisations acquittées pendant leur
période de détachement auprès de leur régime français de retraite.
En revanche, l'Assemblée nationale a de nouveau supprimé l'extension de cette
possibilité, également adoptée par le Sénat sur l'initiative de notre ancien
collègue André Maman, aux fonctionnaires qui seront détachés à l'étranger après
la date d'entrée en vigueur de l'article 8
bis
, c'est-à-dire à partir du
1er janvier 2002.
Comme en deuxième lecture, votre commission vous propose toutefois d'adopter
l'article 8
bis
sans modification. En effet, étendre la possibilité de
cumul intégral des pensions françaises et étrangères aux fonctionnaires partant
en détachement après le 1er janvier 2002 aboutirait, compte tenu du caractère
désormais optionnel de l'affiliation à leur régime de retraite français, à
transformer la pension servie par ce dernier en une pension de retraite
complémentaire acquise à titre volontaire auprès d'un régime de base. Les
intéressés bénéficieraient ainsi d'un avantage non négligeable par rapport à
leurs collègues détachés en France, à qui le code des pensions civiles et
militaires interdit toujours le cumul de deux pensions de retraite pour une
même période de temps accomplie au service de l'Etat.
S'agissant de l'article 10, qui réforme les élections au conseil
d'administration des caisses de mutualité sociale agricole, la commission
constate avec satisfaction que l'Assemblée nationale a rejoint le Sénat sur de
nombreux points. Elle a confirmé, par exemple, la suppression de la limite
d'âge pour être administrateur d'une caisse de mutualité sociale agricole.
Il reste un seul sujet de désaccord : le régime des incompatibilités.
L'Assemblée nationale n'a pas retenu le système souple prévu par le Sénat de «
déclaration d'absence de conflit d'intérêts ». Prenant acte de cette
divergence, la commission vous proposera un amendement qui, destiné à
sauvegarder l'essentiel, précise que le nouveau régime est limité aux seules
incompatibilités et ne concerne donc en rien les mécanismes d'inéligibilité.
Par ailleurs, la commission vous proposera de rétablir l'article 10
quater
H, qui résulte de l'adoption par le Sénat d'un amendement de
notre collègue Jean-Louis Lorrain.
Cet article vise à préciser les conditions dans lesquelles l'instance de
gestion du régime local d'assurance maladie d'Alsace-Moselle peut, dans
certains cas exceptionnels justifiés par des circonstances particulières ou
personnelles, décider d'affilier à ce régime des personnes qui ne pourraient
pas en relever dans le cadre d'une stricte application des règles générales.
Les arguments invoqués à l'Assemblée nationale pour justifier la suppression
de cet article ne nous paraissent guère convaincants, notamment en ce qui
concerne le risque d'une application arbitraire et discrétionnaire de cette
disposition par le régime local d'Alsace-Moselle, dont chacun s'accorde, au
contraire, à reconnaître la rigueur de gestion.
La commission vous proposera également, comme en première et en deuxième
lecture, de supprimer les articles 10
septies,
11 et 11
bis
du
projet de loi.
L'article 10
septies
a pour objet d'inciter le Gouvernement à engager
une concertation avec les partenaires sociaux sur la question de l'élection des
administrateurs des organismes du régime général de sécurité sociale. Or le
Gouvernement n'a pas besoin d'une disposition législative pour engager une
concertation qui relève de sa propre initiative. La commission observe, par
ailleurs, qu'il n'a pas mis à profit le renouvellement des conseils
d'administration du régime général, en septembre dernier, pour engager cette
concertation avec les partenaires sociaux.
L'article 10
septies
n'est donc qu'une mesure symbolique permettant au
Gouvernement de se concilier - à peu de frais, il faut le dire - la bonne
volonté de l'une des composantes de sa majorité.
L'article 11, abrogeant la loi Thomas - restée virtuelle faute de décrets
d'application - n'assure en rien la pérennité des régimes de retraite par
répartition. Au contraire, cet article marque le double attentisme de la
politique gouvernementale, que l'on peut résumer d'un nouveau « ni ni » : ni
réforme des régimes de retraite par répartition, comme le montre le rapport du
Conseil d'orientation des retraites, le COR, ni mise en place d'un mécanisme
d'épargne-retraite pour les salariés du secteur privé, qui restent les seuls
exclus des dispositifs de capitalisation.
Quant à l'article 11
bis,
qui met à la charge du Fonds de solidarité
vieillesse une dette de l'Etat à l'égard des régimes de retraite complémentaire
AGIRC et ARRCO, il apporte une confusion supplémentaire dans le financement
déjà opaque et complexe de nos finances sociales.
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
C'est vrai !
M. Gérard Dériot,
rapporteur.
Telles sont, mes chers collègues, les principales
observations que je souhaitais formuler sur ce projet de loi.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Gournac, rapporteur.
M. Alain Gournac,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
madame le ministre, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
dispositions du titre II relatives au travail et à l'emploi sont tout
particulièrement disparates. Il n'est donc pas étonnant que la navette ait,
pour l'instant, produit des résultats quelque peu contrastés selon les
dispositions abordées.
Mais je tiens ici à insister sur l'importance du travail qui a déjà été
accompli par les deux assemblées. Loin d'être stérile, il a permis d'esquisser
des accords non négligeables sur de nombreux points.
Les dispositions relatives au harcèlement moral témoignent ainsi avec force
des possibilités d'enrichissement d'un texte par la navette.
Au fur et à mesure des lectures successives, les deux assemblées ont fait
apparaître leurs convergences sur ce volet pourtant absent du texte du projet
de loi initial : ces convergences portent principalement sur les grandes lignes
d'une définition du harcèlement moral, sur la protection des victimes et sur
les moyens de prévention. Seules nous séparent aujourd'hui la question de la
sanction pénale, celle de la médiation externe et celle de la charge de la
preuve.
Des avancées communes ont pu également être constatées sur l'important volet
relatif au droit de licenciement.
Je pense à l'article 34
bis
, qui vise à mettre en place un droit au
congé de reclassement pour les salariés faisant l'objet d'un licenciement dans
une entreprise de plus de mille salariés. La commission vous proposera
d'adopter cet article sans modification en nouvelle lecture, compte tenu des
améliorations apportées par l'Assemblée nationale lors de la navette.
Mais je pense aussi à l'article 34
ter
, qui prévoit des mesures
d'évaluation des compétences professionnelles et d'accompagnement en vue du
reclassement. Cet article, je le rappelle, est le fruit d'un amendement déposé
au Sénat par le Gouvernement lors de la deuxième lecture. Il vise à étendre les
prestations du plan d'aide au retour à l'emploi, le PARE, en amont de
l'inscription comme demandeur d'emploi, ce qui est très important.
Comme l'a noté le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Gérard Terrier, ce
dispositif a « suscité un consensus inhabituel mais louable entre le
Gouvernement et la majorité sénatoriale ».
Je souscris entièrement à cette analyse, d'autant plus que le débat fructueux
que nous avons eu, par exemple, sur le harcèlement moral, n'a pu, je le
regrette, se prolonger sur d'autres sujets que nous avons souhaité verser au
débat.
Je pense ainsi aux emplois-jeunes. Mais l'Assemblée nationale nous a, par deux
fois et sans réel examen, clairement adressé une fin de non-recevoir. Je le
regrette aussi !
Je pense encore à nos propositions concernant le développement du travail en
temps partagé, issues de la proposition de loi adoptée par le Sénat le 11 mars
1999, sur l'initiative de notre ancien collègue André Jourdain.
A ce stade, face à une fin de non-recevoir opposée à l'égard de dispositifs
qui, dans un cas comme dans l'autre, ne relèvent pas d'un affrontement
idéologique, il me semble préférable de ne pas rétablir ces dispositions en
nouvelle lecture.
J'en viens maintenant aux autres dispositions du volet consacré au travail et
à l'emploi qui font encore débat aujourd'hui, comme la définition du
licenciement pour motif économique ou le recours à un médiateur dans les
projets de restructuration.
Sans entrer à nouveau dans le détail de ces dispositions, je souhaiterais
rappeler ici la démarche du Sénat et celle de la commission en particulier qui
ont été empreintes d'une grande ouverture, comme en a témoigné la décision
d'auditionner l'ensemble des partenaires sociaux, ainsi que plusieurs
professeurs de droit, à la fin de la session dernière.
Ces auditions ont clairement mis en évidence le caractère inadapté de la
plupart des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale en deuxième
lecture. Elles ont également permis au Sénat de faire des propositions sur de
nombreux points qui constituaient autant d'avancées par rapport au droit
existant sans pour autant mettre à mal l'ensemble de notre édifice social,
longuement constitué à force d'accords conventionnels et de jurisprudence.
On pouvait penser que l'Assemblée nationale tiendrait compte de ce travail. On
pouvait penser qu'elle déciderait, à son tour, d'auditionner les partenaires
sociaux. Il n'en a rien été.
Au contraire, j'ai été surpris de constater que pas une fois le rapporteur de
l'Assemblée nationale n'a jugé bon de se référer au compte rendu des auditions
des partenaires sociaux publié dans notre rapport de juin dernier. L'Assemblée
nationale a, pour ainsi dire, systématiquement rétabli son texte, comme si la
nouvelle lecture était une simple formalité et que l'opinion des partenaires
sociaux devait être considérée comme quantité négligeable.
Je laisse bien sûr à chacun d'entre vous le soin d'interpréter cet épisode.
Pour ma part, je ne peux que regretter, par avance, que le texte auquel est
susceptible d'aboutir cette discussion inhabituellement longue - la première
lecture à l'Assemblée nationale remonte au début de cette année - pourrait être
aussi peu clair, difficilement applicable et éloigné des préoccupations des
partenaires sociaux.
Ce qui est en cause aujourd'hui, c'est de savoir si ce texte constitue oui ou
non un obstacle pour l'emploi. L'Assemblée nationale a déjà donné sa réponse
par la voix du président de sa commission des affaires sociales, M. Jean Le
Garrec, selon lequel : « des études montrent que les législations sociales ne
constituent pas un élément explicatif de la décision de s'implanter ou pas sur
un territoire ».
Tout serait donc permis ? Le législateur pourrait ainsi non pas interdire les
licenciements, mais les compliquer, les renchérir, les ralentir, sans risque
pour les embauches et donc pour l'emploi ?
Je n'en crois rien, pas plus que l'ensemble des chefs d'entreprise de notre
pays ni les représentants de la majorité des syndicats de salariés que nous
avons auditionnés en juin, soit tous les syndicats sauf un. La désapprobation
semble même gagner le Gouvernement, puisque le ministre de l'économie et des
finances, M. Laurent Fabius, ne parle plus que d'un « certain texte qui
n'aurait pas dû voir le jour ».
M. Nicolas About,
président de la commission.
Ah !
M. Gilbert Chabroux.
Mais non !
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Eh oui ! Je reprends exactement ses termes. Cela figurera
demain au
Journal officiel
.
Compte tenu du caractère essentiel du sujet qui nous occupe - le droit du
licenciement - et de son actualité - puisque l'on assiste à une remontée
importante du chômage depuis cinq mois -, il a semblé hautement souhaitable à
la commission de poursuivre le débat en nouvelle lecture, ne serait-ce que pour
laisser la possibilité à l'Assemblée nationale de revenir sur certaines de ses
positions en dernière lecture, ne serait-ce que pour rappeler qu'il reste
possible de moderniser notre droit du licenciement sans porter atteinte au
fragile équilibre qui caractérise le marché du travail et les décisions
d'embauche des employeurs.
C'est pourquoi, mes chers collègues, la commission vous proposera, sur la
plupart des articles restant en navette sur le volet « travail-emploi », de
rétablir notre position de deuxième lecture, quelquefois avec certaines
améliorations rédactionnelles.
Le texte qui serait ainsi adopté par le Sénat permettrait d'améliorer les
droits des salariés, par exemple en ce qui concerne les annonces au public,
sans pour autant entrer en conflit avec d'autres normes, comme le droit des
marchés financiers ni avec d'autres préoccupations, comme l'incitation pour les
employeurs à embaucher.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Bocandé, rapporteur.
Mme Annick Bocandé,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, sur les
vingt-sept articles que comprend le volet « formation professionnelle » du
projet de loi, seuls neuf restent encore en discussion à l'issue de la nouvelle
lecture à l'Assemblée nationale.
Je ne peux que me féliciter des rapprochements ainsi intervenus entre les deux
assemblées. Certes, ce volet était, dès l'origine, assez consensuel dans ses
grandes lignes. Mais, au-delà de ces accords sur les grands principes, il
n'était pas forcément évident de se retrouver pour la définition précise des
différents dispositifs. Cela a été largement possible. Je crois que c'est une
bonne chose et que c'est également un signal fort de la représentation
nationale en faveur de la formation professionnelle.
J'observe toutefois que ces convergences restent d'importance inégale selon
les trois sujets abordés par ce chapitre.
Ainsi, sur le financement de l'apprentissage, le débat parlementaire a permis
d'aboutir à un texte commun permettant notamment de mieux garantir le
financement des centres de formation d'apprentis et d'assurer une plus grande
transparence pour la collecte de la taxe d'apprentissage.
Ces nouvelles dispositions vont incontestablement dans le bon sens, et je
souhaite revenir un instant sur les apports du Sénat à ce volet.
Ces apports concernaient, d'abord, le financement des centres de formation
d'apprentis, les CFA.
Nous avons ainsi garanti une affectation prioritaire des sommes issues de la
péréquation de la taxe d'apprentissage vers les CFA formant les jeunes les
moins qualifiés.
Nous avons renforcé les garanties pour la fixation du minimum de ressources
des centres en y associant toutes les parties concernées.
Nous avons également amélioré l'information sur l'utilisation des ressources
provenant du fonds national de péréquation.
Nous avons limité les possibilités, parfois exorbitantes, de fermeture
autoritaire des CFA.
Les apports du Sénat ont aussi visé la collecte de la taxe.
Nous avons, à ce titre, précisé les modalités de collecte régionale dans un
souci d'aménagement du territoire et de régionalisation.
Nous avons aussi amélioré les conditions, souvent très opaques, d'habilitation
des organismes collecteurs sur le plan national.
Nous avons enfin garanti l'uniformité du régime applicable aux collecteurs.
Pour autant, la rédaction à laquelle nous sommes parvenus ne saurait
constituer la réforme attendue et nécessaire du financement de l'apprentissage
et de l'alternance. Elle ne touche pas au régime de la taxe d'apprentissage.
Elle ne s'attaque pas aux difficultés de financement de l'alternance, que j'ai
soulignées la semaine dernière lors du débat budgétaire sur les crédits de la
formation professionnelle.
En réalité, ce volet se contente d'apporter une première réponse très ciblée à
un problème bien plus large.
S'agissant de l'offre de formation, la navette a également produit des
résultats non négligeables.
Ainsi, un accord sur la mise en place d'un nouveau régime d'enregistrement des
organismes de formation a été trouvé sur l'initiative du Sénat.
De même, le Sénat a introduit une exigence d'information directe des comités
régionaux de la formation professionnelle, de la promotion sociale et de
l'emploi, les COREF, par les organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage,
sur l'utilisation de cette ressource.
Mais le souci commun des deux assemblées d'améliorer la coordination des
instances compétentes en matière de formation et de simplifier l'architecture
actuelle du dispositif se traduit pourtant par des propositions encore
différentes.
A ce propos, la commission ne peut que prendre acte du souci réitéré de
l'Assemblée nationale de maintenir le comité interministériel de la formation,
pourtant en sommeil depuis 1983. Elle ne vous proposera donc pas, à ce stade de
la discussion, de le supprimer à nouveau. Nous espérons que cet acharnement à
maintenir cette disposition dans la loi sera finalement le signe d'une réelle
volonté de renforcer la coordination gouvernementale en la matière.
En revanche, nous ne pouvons pas suivre l'Assemblée nationale dans certaines
de ses propositions sur les COREF. Je pense notamment à la question de leur
présidence. La coprésidence me semble en effet la pire des solutions, et je
crois important d'évoluer vers une présidence alternée d'ici au vote final de
ce texte.
Mais c'est sans doute en matière de validation des acquis de l'expérience que
la navette a paradoxalement conduit au bilan le plus mitigé.
Certes, les deux assemblées se rejoignent dans le souci d'élargir
significativement les possibilités de validation.
Toutefois, demeure encore une opposition forte sur la déclinaison de ce
principe. L'Assemblée nationale cherche visiblement à restreindre le champ des
titres visés par la validation tout en assouplissant, sans doute à l'excès, les
procédures. Le Sénat défend une thèse inverse en cherchant à étendre le champ
de la validation tout en restant extrêmement vigilant sur les procédures pour
en garantir la qualité et prévenir certaines dérives.
C'est pourquoi subsistent encore des divergences fortes, notamment sur deux
points : la durée minimale d'activité ouvrant droit à validation et la «
professionnalisation » du dispositif.
Certes, le Sénat a déjà permis d'améliorer le dispositif qui nous était
proposé sur de nombreux points qui me paraissent très significatifs. Je pense à
la possibilité offerte aux non-salariés, notamment aux conjoints
collaborateurs, de bénéficier d'une validation de leur expérience
professionnelle. Je pense aussi aux nouvelles garanties assurant une large
représentation des professionnels dans les jurys de validation. Je pense encore
à l'accent mis sur les entretiens et les mises en situation de travail, qui
sont bien souvent plus adaptés que des examens très scolaires.
J'aurais toutefois espéré que, sur ce volet dont la philosophie est finalement
plutôt consensuelle, l'Assemblée nationale prête une plus grande attention aux
propositions de bon sens du Sénat.
Au total, le dialogue entre les deux assemblées a donc été de qualité
inégale.
Les marges de manoeuvre tendent à se réduire progressivement au fil des
navettes successives.
Ainsi, en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale n'a retenu qu'une seule des
propositions du Sénat formulées en deuxième lecture.
A ce stade de la discussion, je vous proposerai toutefois, mes chers
collègues, de rétablir l'essentiel de nos propositions jusqu'à présent ignorées
par l'Assemblée nationale, car je ne désespère pas d'un remords de dernière
minute de nos collègues députés sur quelques points qui me paraissent
fondamentaux.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe socialiste, 27 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, pour la troisième et dernière fois, le projet de loi de
modernisation sociale contenant le très médiatisé volet « prévention des
licenciements économiques », mais également d'autres dispositions importantes
en matière de santé, de solidarité et de protection sociale, revient en
discussion devant le Sénat.
Ce nouvel examen intervient après l'échec prévisible de la commission mixte
paritaire, car les divergences restent majeures entre les deux assemblées au
sujet des dispositions relatives au travail et à l'emploi.
Par ailleurs, si certains différends mineurs pouvaient laisser entrevoir une
possibilité d'accord sur les mesures contenues dans le titre I, la commission
mixte paritaire a capoté dès l'article 11 portant abrogation de la loi
Thomas.
Un fossé sépare, en effet, ceux qui ont initié les fonds de pension à la
française et continuent de défendre - M. Balladur en tête - l'idée selon
laquelle seule la capitalisation serait de nature à assurer, demain, la
retraite des salariés du privé et ceux dont je suis, qui s'attachent, non à
siphonner notre système de protection sociale, mais à pérenniser les régimes de
retraite par répartition en les réformant, afin d'assurer plus d'équité et
d'égalité.
Pour l'essentiel, le projet de loi que la majorité sénatoriale avait largement
contribué à vider de sa substance a donc été rétabli par l'Assemblée nationale,
et ce en dépit de l'attitude combative, faite de menaces et de chantage, du
MEDEF contre la réforme envisagée de la procédure des licenciements
économiques.
Après la demande adressée au Gouvernement, par cinquante-six patrons, de
renoncer à ce projet de loi, qualifié de funeste pour les entreprises par M.
Seillière, il est bon, madame la ministre, que vous ayez eu l'occasion de
réaffirmer la détermination du Gouvernement à agir pour que les licenciements
soient bien l'ultime recours, pour que les salariés puissent discuter,
contester le bien-fondé des choix de l'employeur, faire valoir leurs arguments,
amener ce dernier à justifier.
Remettant en cause la légitimité de l'intervention du législateur en ce
domaine, comme dans d'autres d'ailleurs, le MEDEF, partisan d'un code du
travail à minima, privilégie le contrat sur la loi. Cette solution présuppose
que les syndicats soient écoutés et entendus et que le dialogue social soit
riche et équilibré, ce qui est loin d'être le cas.
Le MEDEF s'est donc appliqué à diaboliser toutes les dispositions du texte,
celles qui visent à assurer une pleine information des salariés concernés, à
leur permettre de proposer des solutions alternatives, bref, toutes les mesures
optimisant les capacités d'intervention des représentants des salariés. Cette
démarche a d'ailleurs été relayée par la droite, tant à l'Assemblée nationale
qu'au sein de la Haute Assemblée.
Outre l'entrave au dialogue social, le danger de la juridiciarisation de la
vie des entreprises a, lui aussi, été agité, la nouvelle définition du
licenciement économique conférant au juge, selon les tenants du droit divin
patronal, un pouvoir exorbitant d'appréciation en matière de gestion, alors
qu'il s'agit, en fait, de contrôler les objectifs de la réorganisation lorsque
celle-ci est invoquée pour justifier les suppressions d'emplois !
La majorité sénatoriale trouve choquant qu'un licenciement économique,
simplement motivé par une exigence de rentabilité financière, puisse ne pas
être considéré comme ayant un motif réel et sérieux !
Les salariés, eux, comme la majorité des Français, ne peuvent plus se
satisfaire de ces choix privilégiant la souplesse, confortant les taux de
profit.
En cette période d'incertitudes, de redémarrage du chômage, les inscriptions à
l'ANPE pour cause de licenciements économiques commencent à peser. C'est
pourquoi la déréglementation ne doit pas être de mise si c'est bien le retour
au plein emploi qui est l'objectif visé.
D'autres aspects de cette réforme du droit de licenciement ont été dénoncés :
l'allongement de la procédure, la dénaturation du rôle du comité d'entreprise,
le recours au médiateur, les obligations pour les entreprises de plus de 1 000
salariés de participer financièrement à la réactivation des bassins d'emplois,
etc.
Je n'entrerai pas à nouveau dans le détail des dispositions anti-licenciement
de ce texte - dispositions majeures - qui ont d'ailleurs été sensiblement
renforcées au cours de la navette, notamment sur l'initiative des
parlementaires communistes.
M. Frédéric Tiberghien, PDG de VediorBis, arrive, lui, à reconnaître quelques
aspects positifs à cette loi et, dans une interview au journal
Les Echos
du 6 décembre 2001, il appelle en quelque sorte « les employeurs à prendre en
compte les aspirations des salariés à la sécurité de l'emploi ».
La commission des affaires sociales reste figée dans sa position : elle
propose de nouveau, sur la plupart des articles concernés, des modifications
substantielles. Le moment venu, nous interviendrons contre ces propositions,
considérant que le droit des marchés financiers n'est pas le seul à devoir
s'appliquer.
Nous attendons maintenant, madame la ministre, que ce projet de loi, porteur
d'avancées sociales, puisse entrer rapidement en application.
Un numéro de
La Tribune
de la semaine dernière titrait que vous
invitiez « les partenaires sociaux à affiner le droit de licenciement », ce que
vous venez de confirmer il y a quelques instants.
Pouvez-vous nous assurer, madame la ministre, que vous veillerez à ce que les
mesures réglementaires nécessaires, décrets et circulaires, respecteront non
seulement la lettre mais également l'esprit du texte ? Il est en effet
primordial que la portée des mesures destinées à prévenir les licenciements ne
soit en rien minimisée.
Des salariés du textile et de l'habillement nous ont alertés sur la question
des congés de conversion, limités aux entreprises de plus de 1 000 salariés.
Dans la branche textile - habillement - confection, composée majoritairement de
PME et de TPE - très petites entreprises -, les salariés s'inquiètent de savoir
s'ils pourront continuer à bénéficier des congés de conversion « classiques ».
Pouvez-vous préciser qu'il en sera bien ainsi ?
De plus, les pressions du MEDEF, hostile à toute extension des pouvoirs des
comités d'entreprise, étant là aussi très fortes, je vous rappelle combien il
est nécessaire et urgent de permettre, dans la circulaire, la mise en place de
la nouvelle commission de contrôle des fonds publics et des commissions
régionales. Des dizaines de milliards de francs d'incitations financières, sous
forme d'exonérations de charges, profitent chaque année principalement aux
multinationales.
Selon le rapport de la commission d'enquête sur les pratiques de certains
grands groupes multinationaux industriels ou de services financiers, ces aides
« sont prisées par les groupes lorsqu'elles facilitent les opérations de
restructuration ou allègent la masse salariale mais ne sont guère recherchées
lorsqu'elles exigent des contreparties ». Comme en matière de licenciement, il
est temps de responsabiliser socialement et territorialement les
entreprises.
S'agissant du deuxième volet du projet de loi, je tiens à redire combien nous
apprécions les progrès accomplis pour édifier une législation en matière de
harcèlement moral au travail. S'agissant de la sanction pénale ou de la charge
de la preuve, le résultat est plus contrasté, la majorité sénatoriale s'en
tenant à sa position initiale.
La même remarque peut être faite au sujet de la validation des acquis de
l'expérience.
Même si l'article 50
bis
n'est plus en navette, je souhaiterais, madame
la ministre, savoir ce que vous entendez faire pour que cet article, qui
autorise le préfet à expulser des occupants de logements déclarés insalubres,
ne viennent pas contredire le principe du relogement ou de l'hébergement mis en
avant par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
Prenant en compte toutes les avancées obtenues, nous n'amenderons le projet de
loi que sur deux points.
Nous souhaitons marquer l'importance que nous attachons à la médecine du
travail. Elle doit être réformée non pas au détour d'un texte mais dans son
ensemble, afin que soit réellement garantie son indépendance. Cette nécessité
est d'autant plus impérieuse que les maladies professionnelles et les accidents
du travail sont en pleine recrudescence, quoi qu'en dise le MEDEF. Celui-ci
s'emploie à masquer l'ampleur des dégâts et prône encore une fois de nouvelles
règles de gestion du risque. Nous proposerons de supprimer le dispositif
transitoire en matière de recrutement de médecins du travail.
Sur le premier volet du texte, le plus consensuel, si nous sommes en désaccord
avec la majorité sénatoriale lorsqu'elle persévère à vouloir supprimer la
concertation en vue du rétablissement des élections à la sécurité sociale ou à
maintenir la loi Thomas, nous partageons sa volonté d'assurer, en ce qui
concerne l'allocation personnalisée d'autonomie, des conditions d'exercice du
recours en succession identiques à celles qui s'appliquaient pour l'allocation
compensatrice pour tierce personne. Nous défendrons un amendement en ce
sens.
Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, pour le groupe communiste
républicain et citoyen, il n'y a aucune ambiguïté : ce projet de loi de
modernisation sociale est un bon texte. De très nombreuses dispositions sont
attendues par les salariés et, plus largement, par les Françaises et les
Français.
Quel que soit le résultat du vote au Sénat, ce projet de loi marquera, une
fois adopté définitivement, des progrès significatifs à mettre au crédit de la
majorité plurielle, dans le respect des engagements pris.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, nous voici parvenus au terme d'un long processus puisque
l'examen de ce texte, considérablement enrichi au fil des mois par le
Parlement, dure depuis bientôt un an. Ce projet de loi est porteur de
nombreuses réformes, de droits sociaux nouveaux, attendus par nos concitoyens ;
c'est pourquoi on ne peut que regretter le retard qui a été pris et dont la
majorité sénatoriale est en partie responsable.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Ça y est : ça commence !
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Jusqu'à présent, tout s'était pourtant bien passé !
M. Gilbert Chabroux.
C'est la vérité ! Rappelez-vous l'interruption, en juin, jusqu'à l'automne :
c'est bien vous qui l'avez décidée !
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Et la concertation avec les partenaires sociaux ?
M. Roland Muzeau.
Pour auditionner le MEDEF !
(M. Gournac, rapporteur, s'esclaffe.)
M. Gilbert Chabroux.
Parmi les avancées sociales attendues avec impatience, il faut citer, au titre
Ier : la réforme des études médicales pour renforcer la place de la médecine
générale, qui deviendra une spécialité à part entière, et l'encadrement de
certaines pratiques à risques ; la création d'un statut des accueillants
familiaux pour mieux contrôler l'accueil des personnes âgées et handicapées et
pour améliorer les droits sociaux des familles accueillantes ; le renforcement
de la protection sociale des fonctionnaires français détachés à l'étranger, au
bénéfice de nos compatriotes expatriés les plus modestes ; la mise en oeuvre du
protocole du 14 mars 2000, avec les projets sociaux d'établissement et la
formation professionnelle dans les hôpitaux publics.
Je citerai aussi, même si c'est un point de désaccord, l'abrogation de la loi
Thomas sur les fonds de pension pour protéger notre régime de retraite par
répartition, et donc protéger un équilibre social fondé sur la solidarité.
Le titre II est tout aussi riche, avec notamment les dispositions de lutte
contre le harcèlement moral au travail, la validation des acquis de
l'expérience, le renforcement de la lutte contre le travail précaire.
Le financement de l'apprentissage et l'offre de formation font l'objet d'un
texte commun à l'issue du débat parlementaire.
Ainsi que l'observent les rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat, le
texte a donc été fortement enrichi grâce à la navette, ce dont nous nous
félicitons.
Mais, à l'évidence, ce n'est pas l'ensemble de ces sujets, sur lesquels les
désaccords portent non pas tant sur le principe - hormis la loi Thomas - que
sur la mise en oeuvre, qui préoccupent le Sénat aujourd'hui. L'attention se
focalise quasi exclusivement sur les quelques articles relatifs aux
restructurations et aux licenciements économiques.
Il n'est pas mauvais de rappeler que ces articles ne sont pas arrivés par
hasard dans ce projet de loi. Ils sont immédiatement consécutifs à l'annonce
d'importants plans sociaux, dont un, au moins, a été réalisé dans des
conditions particulièrement scandaleuses à l'égard des salariés.
N'oublions pas non plus la cascade de difficultés dont son également victimes
les entreprises sous-traitantes lorsque ces événements surviennent, ce qui
multiplie souvent au moins par deux le nombre final de salariés licenciés,
quand ce n'est pas la fermeture totale d'un établissement ou de l'entreprise
qui est décidée mettant des régions entières en péril et, au premier chef, les
collectivités locales et leurs responsables.
Je relève d'ailleurs la grande pertinence d'un propos d'un de nos rapporteurs,
Alain Gournac : celui-ci fait observer que le taux de chômage remonte depuis
plusieurs mois. C'est malheureusement exact, et je crains que ce ne soit pas en
raison d'une soudaine épidémie de démissions spontanées des salariés... Il
semble plutôt que ce soit le fait d'une remontée des licenciements et des
non-renouvellements de contrats à durée déterminée et de missions d'intérim
!
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Quand on complique tout, évidemment, c'est le risque !
M. Gilbert Chabroux.
Il est donc apparu nécessaire de prendre des dispositions plus contraignantes
à l'égard des entreprises qui utilisent systématiquement les salariés comme
seule variable d'ajustement, et qui ferment des unités de production en Europe
pour en ouvrir de rigoureusement semblables dans des pays à coût salarial quasi
nul et sans protection sociale. Nous ne voulons pas que les « licenciements
boursiers » deviennent la règle. Cette problématique est trop connue pour que
j'y insiste longuement aujoud'hui.
Contrairement à ce que ne cesse de marteler la direction du MEDEF, relayée par
certains organes de presse,...
M. Nicolas About,
président de la commission.
Ah ! le MEDEF ! Le MEDEF, le MEDEF, vous
dis-je !
(Sourires.)
M. Gilbert Chabroux.
Eh oui, encore le MEDEF, toujours le MEDEF !
M. Guy Fischer.
Et la droite !
M. Gilbert Chabroux.
Et vous le suivez !
Contrairement, dis-je, à ce que ne cesse de marteler le MEDEF, ces articles de
loi n'ont cependant ni pour objectif ni pour effet d'empêcher les grandes
entreprises, puisque c'est d'elles seules qu'il s'agit, de procéder en dernier
recours à des ajustements d'effectifs lorsque cela s'avère nécessaire.
En revanche, elles devront désormais, et c'est fondamental, avoir étudié avec
les représentants des salariés toutes les solutions alternatives aux
licenciements avant de commencer une procédure de plan social.
Dans ce cadre, la définition du licenciement économique est plus précise : les
trois mentions nouvelles montrent bien que la sauvegarde de l'activité, et la
pérennité même de l'entreprise doivent être en cause pour que puisse être
envisagé un licenciement économique.
Tous les moyens autres que les licenciements doivent, auparavant, avoir été
examinés, ce qui semble normal. Il s'agit d'éviter les licenciements de
convenance, et c'est bien ainsi que les partenaires sociaux l'ont compris.
Par ailleurs, la procédure aboutissant à la mise en oeuvre du plan social est
modifiée, avec une distinction entre la phase d'information et de consultation
des salariés et la phase d'élaboration du plan social ; celle-ci ne peut
commencer tant que la précédente n'est pas achevée.
Le recours au médiateur et l'intervention toujours possible de l'inspecteur du
travail accentuent la volonté d'inciter les employeurs à étudier toutes les
solutions alternatives aux licenciements. Le recours au licenciement ne doit
pas être un acte banal.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Les employeurs seront morts avant !
M. Gilbert Chabroux.
Nous devrions être d'accord sur ce point !
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Bien sûr !
M. Gilbert Chabroux.
Le recours au médiateur ne doit pas être une solution de facilité,...
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Vous n'avez pas confiance !
M. Gilbert Chabroux.
... adoptée dans la plus totale indifférence à l'égard du sort futur des
salariés et des populations concernées.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Les syndicats n'en veulent pas du médiateur
!
M. Gilbert Chabroux.
A cet égard, la proposition de réindustrialisation des sites par l'entreprise
qui réalise un plan social est particulièrement importante, et nous en
attendons beaucoup.
La notion d'entreprise citoyenne a été beaucoup utilisée autrefois. S'il est
vrai que l'entreprise ne peut être une dictature à l'intérieur, elle doit aussi
exister par rapport à son environnement. Une entreprise - et je pense surtout
aux grandes entreprises transnationales - ne doit pas être un prédateur.
Certaines d'entre elles le savent et se comportent correctement lorsque les
exigences de compétitivité et de modernisation les obligent à des
restructurations. Mais ce n'est pas toujours le cas. Il est donc - faut-il dire
: encore ? - de la responsabilité des Etats de protéger leurs citoyens, en
l'occurrence dans leur activité professionnelle.
Je lisais ces jours-ci dans un grand quotidien économique qu'une société
américaine, Ernst & Young, installée notamment en Europe, ne procédera pas à
des compressions de personnel en France, mais qu'elle le fera dans deux autres
pays voisins. Pourquoi ? La raison en est clairement exprimée : nos procédures
de licenciement sont jugées complexes et coûteuses. Il est donc plus facile de
se débarrasser de salariés ailleurs !
Ainsi, alors que l'on ne cesse de nous dire que notre droit social dissuade
les investisseurs étrangers de s'installer ici - ce qui est d'ailleurs faux
-...
M. Guy Fischer.
Ils ne se sont jamais autant installés en France !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Alors pourquoi le dites-vous ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Et Castrol qui s'installe à Londres, c'est faux ?
M. Gilbert Chabroux.
... voilà qu'eux-mêmes nous expliquent que notre droit social les dissuade
plutôt d'en partir ! C'est la preuve que notre législation joue pleinement son
rôle en l'espèce.
M. Jean Chérioux.
Sur le plan social, sûrement !
M. Nicolas About,
président de la commission.
On verra !
M. Gilbert Chabroux.
Elle protège nos concitoyens dans l'un des aspects les plus importants de leur
vie : la préservation de leur emploi.
M. Jean-Pierre Schosteck.
Eh oui ! Elle les avantage même pour trouver un emploi !
M. Gilbert Chabroux.
Le seul regret que nous pouvons émettre, c'est que la loi ne soit pas aussi
protectrice ailleurs, en Europe et dans le monde, afin de mettre un terme au
dumping
social.
M. Guy Fischer.
Très bien !
M. Jean Chérioux.
Et voilà !
M. Gilbert Chabroux.
C'est le vrai problème auquel nous continuerons à être confrontés dans les
années à venir, et nous ne pourrons commencer à le résoudre qu'en tirant
l'Europe sociale tout entière vers le haut.
M. Guy Fischer.
C'est ce que disaient les manifestants hier !
M. Gilbert Chabroux.
Je voudrais enfin aborder une autre perspective qui devra devenir la nôtre
sans tarder. Le texte que nous examinons, si intéressant soit-il, ne concerne
que les grandes entreprises. Les entreprises dont il s'agit ont les moyens
matériels et humains de faire des plans sociaux comportant des indemnités
proportionnées et des mesures de reclassement.
En revanche, les petites entreprises, souvent sous-traitantes, ne peuvent
mettre en oeuvre, faute de moyens suffisants, les mêmes dispositifs
d'indemnisation et de reclassement.
Il importe donc que nous agissions pour protéger mieux dans l'avenir les
salariés de ces entreprises. Je rappelle que 85 % des licenciements ont lieu
hors plans sociaux. Le dispositif de réindustrialisation aura son utilité, mais
il ne vaut pas pour tous les bassins d'emploi, certains ne comportant
pratiquement que des petites et des moyennes entreprises.
Voilà les deux perspectives essentielles que je souhaitais, au nom du groupe
socialiste, ouvrir à notre réflexion : la nécessité de tirer l'Europe sociale
tout entière vers le haut et le défi que nous avons à relever, pour les années
à venir, d'une meilleure protection sociale de l'ensemble des salariés.
Madame la ministre, nous avons accompli depuis le début de cette législature -
en général sans le concours de la majorité sénatoriale - de nombreuses avancées
sociales, qui resteront dans l'histoire de notre pays et de l'Europe. Nous ne
devons cependant pas, dans l'intérêt de nos concitoyens, en rester là. C'est
dans cet espoir que le groupe socialiste du Sénat soutiendra au long de ce
débat les dispositions du projet de loi telles qu'elles nous arrivent de
l'Assemblée nationale.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi
que sur celles du groupe communiste républicains et citoyen.)
M. Nicolas About,
président de la commission.
On se souvient des avancées de 1981 !
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gournac, rapporteur.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Monsieur le président, je ne voudrais surtout pas polémiquer,
mais je ne peux pas laisser notre collègue M. Chabroux dire que la majorité
sénatoriale a retardé le projet. Ce n'est pas vrai !
M. Gilbert Chabroux.
C'est la vérité !
M. Alain Gournac,
rapporteur.
La commission mixte paritaire devait avoir lieu en octobre
et aucun créneau n'était libre. Dire le contraire, c'est tromper les
Français.
M. Gilbert Chabroux.
Vous avez pris tout votre temps !
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Ce n'est pas vrai !
M. Gilbert Chabroux.
Et vous le prenez encore !
M. Guy Fischer.
Vous avez appuyé sur le frein !
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Non pas du tout !
En outre, il n'y avait pas eu de débat avec les partenaires sociaux et c'est
tout à l'honneur du Sénat...
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Ah, non !
M. Alain Gournac,
rapporteur.
... d'avoir réalisé un tel travail avec l'ensemble des
syndicats.
M. Gilbert Chabroux.
Et avoir ensuite perdu autant de temps, c'est à l'honneur du Sénat ?
M. Jean-Pierre Schosteck.
Vous vous en prenez aux syndicats, c'est intéressant ! Il faudra nous le
redire !
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Monsieur Chabroux, je savais que vous
parleriez du MEDEF, mais je ne pensais pas que vous aborderiez ce sujet.
Le débat avait bien commencé, et madame la ministre, vous aviez été presque
consensuelle. Tout se passait dans le calme. Nous savions que le point d'orgue
serait l'intervention de M. Chabroux. Et, bien sûr, vous êtes tombé dans le
piège tout de suite, monsieur Chabroux, et vous avez commis immédiatement la
faute !
M. Gilbert Chabroux.
Non !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Nous n'avons pas provoqué le retard !
M. Gilbert Chabroux.
J'ai mis le doigt sur la vérité !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Si Mme la ministre a dit que c'était «
fâcheux », pour reprendre le terme qu'elle a employé, elle a indiqué que cela
n'entraînerait toutefois aucun retard, dans la mesure où la CMP n'avait plus
le temps de se réunir et que nous reprendrions l'examen du texte en octobre.
M. Gilbert Chabroux.
Vous voyez ! Vous aviez tout le temps !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Autre erreur - et je réponds là à M. Fischer
- le Sénat, loin d'appuyer sur le frein a, au contraire, mis le pied sur
l'accélérateur.
(M. Chabroux s'exclame.)
En effet, nous n'étions pas
tenus de nous réunir le vendredi.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Exactement !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Soucieux de permettre la discussion d'un
texte dont nous connaissons les défauts mais dont nous ne souhaitons pas
assumer le retard, nous avons accepté de siéger le vendredi. Je vous demande
donc, monsieur Chabroux, de faire amende honorable.
(Très bien ! et
applaudissements sur le banc de la commission.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir
de la deuxième lecture au Sénat des projets ou des propositions de loi, la
discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du
Parlement n'ont pas encore adopté un texte indentique.
Article 2 bis A