SEANCE DU 14 DECEMBRE 2001
M. le président.
« Art. 31
ter
. - Après l'article L. 239-1 du code de commerce, il est
inséré un article L. 239-2 ainsi rédigé :
«
Art. L. 239-2. -
Tout projet de développement stratégique devant être
soumis aux organes de direction et de surveillance d'une société et susceptible
d'affecter de façon importante les conditions d'emploi et de travail en son
sein doit être accompagné d'une étude d'impact social et territorial établie
par le chef d'entreprise et portant sur les conséquences directes et indirectes
dudit projet.
« Un décret en Conseil d'Etat définit le contenu de cette étude d'impact
social et territorial. »
L'amendement n° 29, présenté par M. Gournac, au nom de la commission, est
ainsi libellé :
« Supprimer l'article 31
ter
. »
La parole est à M. Gournac, rapporteur.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Vous ne serez pas étonné, monsieur le président, que nous
proposions un retour à la position du Sénat en deuxième lecture. La
multiplication des études d'impact ne peut qu'affaiblir la portée du
dispositif. Nous souhaitons donc la suppression de cet article.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 29.
M. Gilbert Chabroux.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
Comme je l'indiquais brièvement lors de la discussion générale, l'article 31
ter
oblige l'entreprise à se situer par rapport à son environnement
économique, territorial et social.
L'employeur doit prendre l'initiative d'étudier l'effet de sa décision sur
tout un bassin d'emplois et ne peut plus prendre une décision en tant qu'agent
économique isolé. Il devra s'inquiéter de ses conséquences pour les
populations, ainsi que pour les collectivités territoriales.
Ce n'est pas l'entreprise, et surtout les mesures à prendre pour améliorer les
profits de cette entreprise unique, qui sont au coeur des préoccupations de ces
articles ; c'est l'emploi par rapport au bassin d'activités dans leur ensemble
avec les conséquences sur les autres entreprises, sur l'activité des
commerçants et artisans, les départs éventuels de population, avec les
fermetures de classes et de services publics.
Cette étude d'impact est donc un outil très important pour les élus locaux que
nous sommes et pour ceux que nous représentons. Il est étonnant que la majorité
sénatoriale ne soit pas plus sensible à cet aspect des choses. Il est vrai que
les représentants du patronat ne souhaitent certainement pas s'embarrasser de
tout cela. Comme ils le disent par voie de presse, pour que nul ne l'ignore, il
est important de pouvoir licencier rapidement.
Cet article 31
ter
est l'un des fondements de la réindustrialisation
éventuelle d'un site et de la discussion que nous, élus, allons avoir avec
l'entreprise qui se restructure. Nous en avons donc impérativement besoin pour
sauvegarder l'emploi dans nos régions.
Le groupe socialiste votera contre cet amendement qui va, je le répète, à
l'encontre des besoins des élus locaux dans leurs tâches difficiles sur le plan
économique.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
J'avoue que je suis consterné de la façon dont nos amis socialistes abordent
ce débat.
M. Gilbert Chabroux.
Oh !
M. Jean Chérioux.
Je sais bien que l'on n'est pas loin des élections, mais enfin, quand même, en
permanence,...
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Trop c'est trop !
M. Jean Chérioux.
... se présenter comme les seuls défenseurs des travailleurs, les seuls
défenseurs de l'environnement, cela devient presque caricatural ! Je suis
persuadé que les personnes qui liront le
Journal officiel
des débats du
Sénat seront, elles aussi, consternées.
Soyons sérieux ! Il ne faut pas être aussi systématique ! Les élus de tout
bord - ou alors ils ne seraient pas dignes d'être élus - sont forcément
intéressés par ce qui se passe dans les bassins d'emplois. Les représentants
des collectivités territoriales sont forcément intéressés par ce qui se passe
dans leur commune, département ou région. Ils le montrent tous les jours sur le
terrain ! Alors, pourquoi sortir de telles contre-vérités ?
M. Gilbert Chabroux.
Votez l'article !
M. Roland Muzeau.
Vous n'avez qu'à voter pour !
M. Jean Chérioux.
Si vous alourdissez le texte à ce point-là...
M. Gilbert Chabroux.
Qu'est-ce qu'on alourdit ?
M. Jean Chérioux.
... que va-t-il arriver ? Vous empêcherez, dans certains cas, de procéder à
des licenciements.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Absolument !
M. Roland Muzeau.
Eh bien voilà !
M. Jean Chérioux.
Il est vrai que le licenciement est toujours quelque chose de pénible sur le
plan humain. Mais, s'agissant de certaines politiques qui ont été menées à
certaines époques - je pense en particulier à ce qui s'est passé pour le bassin
lorrain - si, à un moment donné, on avait eu le courage d'effectuer les
restructurations nécessaires, on aurait pu éviter la catastrophe qui a
pratiquement ruiné le bassin lorrain quelques années plus tard. Il est des
moments où il faut savoir procéder rapidement à une restructuration, de façon à
reprendre un bon départ. Si vous alourdissez le système, vous supprimez cette
possibilité, et, en définitive, cela coûtera beaucoup plus cher à la
collectivité, notamment en termes d'emplois.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 29, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 31
ter
est supprimé.
Article 32 A