SEANCE DU 20 DECEMBRE 2001
CONVENTION D'EXTRADITION
AVEC LA RÉPUBLIQUE DOMINICAINE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 432, 2000-2001)
autorisant l'approbation de la convention d'extradition entre le Gouvernement
de la République française et le Gouvernement de la République dominicaine.
[Rapport n° 139 (2001-2002).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les
sénateurs, la France et Saint-Domingue sont liées par la convention d'entraide
pénale du 14 janvier 1999, que votre assemblée a approuvée en juin dernier.
La convention d'extradition du 7 mars 2000 qui est aujourd'hui proposée à
votre approbation résulte d'une initiative française suscitée par le constat
suivant : la situation géographique de Saint-Domingue dans les Caraïbes
risquait d'en faire un lieu de blanchiment de l'argent sale ; en outre, la
pratique laxiste des mesures d'expulsion permettait aux délinquants étrangers
de trouver refuge dans un autre pays.
Dans le souci d'améliorer son image internationale alors qu'un tourisme
européen de masse s'y développe, la République dominicaine a accepté de signer
cet accord.
L'économie générale de cet instrument s'organise en vingt-quatre articles
reflétant les dispositions habituelles en la matière, tirées principalement de
la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 et de la convention
franco-uruguayenne de 1996.
La convention oblige les parties, selon le principe de la double
incrimination, à se livrer toute personne poursuivie ou condamnée par les
autorités compétentes de l'Etat requérant pour une infraction donnant lieu à
extradition. L'extradition est soumise à la double condition que la peine
encourue ne soit pas inférieure à deux ans d'emprisonnement et qu'en cas de
condamnation la durée de la peine à exécuter soit supérieure à six mois.
Ce texte contient les dispositions désormais classiques relatives aux cas de
refus de l'extradition qui doivent être motivés et notifiés à l'Etat requérant
: refus d'extrader ses propres nationaux, les accusés devant être jugés par un
tribunal d'exception ou lorsque l'action publique est prescrite.
En outre, l'Etat requis conserve également un droit de refus sur la base de
considérations humanitaires ou du caractère discriminatoire eu égard à la race,
à la religion, à la nationalité ou aux opinions politiques de la personne
réclamée.
Enfin, la faculté de refuser l'extradition est reconnue aux deux Etats
lorsqu'il incombe aux tribunaux de l'Etat requis de connaître de l'infraction
pour laquelle l'extradition est demandée.
La clause traditionnelle de sauvegarde conditionnant l'extradition à
l'obtention d'assurances jugées suffisantes que la peine de mort ne sera ni
prononcée, ni exécutée a été inscrite à titre de précaution dans la convention,
la République dominicaine ayant abolie la peine de mort en 1966.
Les autres dispositions du texte rappellent le principe
non bis in idem
et celui de la spécialité de l'extradition ; elles précisent les conditions de
recevabilité des demandes, leurs formes, leurs contenus et leurs modes de
transmission par la voie diplomatique. La mise en oeuvre de l'ensemble de la
procédure revient aux ministères de la justice, désignés comme autorités
centrales.
Ainsi, cette convention d'extradition complète le dispositif de coopération
judiciaire avec la République dominicaine, qui, il convient de le souligner,
fait partie de la zone de solidarité prioritaire de notre coopération et a déjà
pu, à ce titre, bénéficier du savoir-faire français dans ce domaine.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention
d'extradition qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à votre
approbation.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Robert Del Picchia,
en remplacement de M. Hubert Durard-Chastel, rapporteur de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Monsieur le
président, madame la ministre, mes chers collègues, la convention d'extradition
entre la France et la République dominicaine, signée à Paris le 7 mars 2000,
permettra de renforcer les liens de coopération entre les deux pays sur les
plans juridique et diplomatique.
Comme vous l'avez souligné, madame la ministre, elle comble tout d'abord un
vide juridique, aucune convention ne liant à ce jour les deux pays. Les
demandes d'extradition faisaient donc jusqu'à présent l'objet de négociations
au cas par cas.
Cette convention est extrêmement classique ; elle reprend les dispositions de
la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 du Conseil de
l'Europe et des conventions signées avec d'autres pays latino-américains, comme
le Mexique ou le Paraguay.
Les deux parties « s'engagent à se livrer réciproquement toute personne qui,
se trouvant sur le territoire de l'un des deux Etats, est poursuivie pour une
infraction ou recherchée aux fins d'exécution d'une peine privative de liberté
comme conséquence d'une infraction pénale ».
L'extradition est refusée dès qu'elle est demandée pour des motifs contraires
aux principes de notre droit, qu'il s'agisse de motifs politiques, religieux,
raciaux ou de nationalité. Lorsque la personne requise est un national,
l'extradition n'est pas accordée, mais chaque Etat s'engage à le juger
lui-même.
Enfin, l'extradition peut être refusée si la personne demandée encourt une
condamnation à la peine capitale ou si son extradition risque d'avoir pour elle
des conséquences d'une gravité exceptionnelle, en raison de son état de santé
ou de son âge.
Cette convention présente aussi, pour notre pays, un intérêt diplomatique et
économique. En effet, la République dominicaine est notre deuxième partenaire
économique dans les Caraïbes, après Cuba, et connaît une croissance économique
soutenue, fondée sur le tourisme et le développement de zones franches, un peu
sur le modèle de l'île Maurice.
Politiquement, la présente convention marque la volonté de la France de nouer
des liens plus étroits, alors que, depuis 1996 et la fin de la période
Balaguer, Saint-Domingue poursuit son chemin vers la démocratie et
l'affermissement de l'Etat de droit. L'Europe appuie d'ailleurs cette démarche
: au titre du neuvième FED - le Fonds européen de développement -,
Saint-Domingue bénéficiera de près de 180 millions d'euros, dont 30 millions de
reports de crédits du huitième FED.
Pour la République dominicaine, la signature de cette convention correspond au
désir d'entretenir des relations extérieures plus diversifiées et plus
autonomes que par le passé, c'est-à-dire moins tournées vers les Etats-Unis et
plus orientées vers l'Europe et les pays de la région des Caraïbes.
En conclusion, je crois que le Sénat ne peut qu'approuver le contenu de cette
convention, qui permet de compléter le dispositif existant en matière
d'extradition et de conforter nos liens avec Saint-Domingue. C'est pourquoi, au
nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces
armées, je vous propose, mes chers collègues, d'adopter le présent projet de
loi.
(Applaudissements.)
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique.
- Est autorisée l'approbation de la convention
d'extradition entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République dominicaine, signée à Paris le 7 mars 2000, et
dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Je constate que le texte a été adopté à l'unanimité.
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