SEANCE DU 10 JANVIER 2002
M. le président.
« Art. 7
ter
. - Les membres des organes délibérants des établissements
publics de coopération intercommunale à fiscalité propre seront élus au
suffrage universel direct le même jour que les conseils municipaux dans les
conditions définies par une loi ultérieure en garantissant la représentation de
chaque commune par au moins un siège. Sans préjuger des modalités de scrutin
retenues, celles-ci devront respecter les principes définis dans la loi n°
2000-493 du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des
hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. »
Sur l'article, la parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 7
ter,
introduit dans le présent projet de loi lors du débat à l'Assemblée
nationale, est loin d'être anodin. On ne peut inscrire dans la loi le principe
de l'élection des membres des EPCI sans réflexion approfondie ni concertation
préalable.
Il me semble au moins prématuré, sinon dangereux, de voter une telle
disposition, et ce pour plusieurs raisons.
Premièrement, comme l'a souligné le président Christian Poncelet lors du
congrès de l'Association des maires de France, « l'élection directe des
instances intercommunales consacrera, de fait, la naissance d'une nouvelle
catégorie de collectivités locales ». C'est, par conséquent, une disposition
beaucoup trop lourde de conséquences pour être prise ainsi, au détour d'un
amendement, sans réflexion préalable et surtout sans aucune précision quant à
ses modalités concrètes d'application.
Deuxièmement, une telle mesure de portée générale ne tiendrait nullement
compte de la diversité des structures intercommunales tant du point de vue des
compétences qu'au regard du nombre de communes intégrées.
Il conviendrait, à mon sens, d'attendre que le processus engagé de
regroupement intercommunal atteigne un niveau de maturité suffisant ainsi qu'un
développement plus harmonieux.
Par ailleurs, si nous prévoyons, comme le propose notre commission des lois,
l'élection des conseils communautaires le même jour que les conseils
municipaux, il faudrait auparavant procéder à une unification des modes de
scrutin municipaux. En effet, si une telle concomitance des scrutins semble
tout à fait envisageable dans le cadre du scrutin proportionnel, elle paraît
beaucoup plus problématique lorsque le panachage est possible.
Davantage de réflexion et de préparation s'impose donc.
Au-delà de ces questions à caractère « institutionnel », il convient aussi
d'évoquer les conséquences pratiques qu'aurait une telle mesure, notamment en
termes d'efficacité. Or, là encore, il est permis de douter de sa
pertinence.
Tout d'abord, si l'on prévoit l'organisation des scrutins intercommunal et
municipal le même jour, qu'adviendra-t-il lorsque qu'une commune souhaitera
rejoindre un EPCI entre deux élections ? Devra-t-elle patienter ou devra-t-on
organiser un nouveau scrutin ?
Le développement de la coopération intercommunale est non seulement un
processus lent qui n'a pas encore atteint sa phase de maturité, mais aussi et
surtout un processus dont la réussite dépend de la bonne volonté de chaque
commune. Il convient, par conséquent, de ne pas froisser les susceptibilités et
d'être le plus flexible possible.
L'élection directe, surtout si elle se déroule le même jour que celle des
conseils municipaux, risque de décourager les bonnes volontés et de remettre en
question le long travail de persuasion que mènent les présidents d'EPCI pour
vaincre les réticences de certains maires à les rejoindre.
Et si l'on considère la vie quotidienne des conseils communautaires, cette
impression est renforcée. En effet, la prise de décision au sein des EPCI est
loin d'être aisée du fait des attitudes de repli de certaines communes ou, plus
simplement, de la confrontation d'intérêts parfois - et normalement -
divergents. Je pense notamment à l'opposition traditionnelle entre
commune-centre et communes périphériques. Ces difficultés sont déjà présentes
alors même que les membres des EPCI sont librement désignés sur la base du
volontariat. Qu'adviendra-t-il si ces membres sont élus et font partie de
l'opposition municipale ?
Il est déjà suffisamment difficile de gérer certaines divergences entre
communes pour ne pas laisser les divergences existant au sein de chaque conseil
municipal venir parasiter le processus décisionnel intercommunal. Ce qui serait
gagné en transparence et en démocratie serait ainsi perdu en efficacité. Il est
par conséquent urgent d'attendre et de réfléchir aux conséquences d'une telle
mesure, d'autant que notre priorité actuelle est de favoriser le regroupement
communal et le développement de l'intercommunalité de projet.
En conclusion, je ne pourrai voter l'introduction de l'élection des membres
des EPCI au suffrage universel, quelles qu'en soient les modalités pratiques. A
la limite, seule l'élection directe du président des EPCI me paraîtrait
acceptable. Cette proposition fait l'objet d'un amendement que je défendrai
dans quelques instants.
M. le président.
La parole est à M. Biwer.
M. Claude Biwer.
L'article 7
ter,
qui a été introduit par l'Assemblée nationale, fixe le
principe de l'élection au suffrage universel direct des délégués des communes
des organes délibérants des établissements publics de coopération
intercommunale à fiscalité propre et renvoie à une loi ultérieure ses modalités
d'application.
Je suis, pour ma part, résolument hostile à cette réforme, et c'est la raison
pour laquelle j'ai déposé un amendement de suppression du présent article.
Je ne méconnais pas les arguments avancés pour expliquer l'apparente nécessité
d'une telle évolution, notamment le fait que les EPCI à fiscalité propre gèrent
des budgets de plus en plus importants sans qu'un véritable « contrôle
démocratique » soit exercé sur ces derniers, ou encore une supposée absence de
« transparence » dans leur gestion. Mais qu'on les oblige alors à diffuser un
maximum d'informations, non seulement à l'intention des conseils municipaux des
communes membres, comme l'a prévu la loi de 1999, mais également à l'intention
de la population !
Croire que parce que les délégués communautaires seront élus au suffrage
universel, la gestion des communautés de communes, d'agglomération ou urbaines
apparaîtra aux yeux de nos concitoyens plus « transparente » est une vue de
l'esprit : si les conseils communautaires, même élus au suffrage universel
direct, ne diffusent pas plus d'information qu'à l'heure actuelle, rien ne
changera.
Mais, surtout, nul ne le peut nier, un EPCI doté d'une fiscalité propre dont
les membres de l'organe délibérant sont élus au suffrage universel devient
de facto
une nouvelle collectivité territoriale et devra, au surplus,
nécessairement bénéficier d'une représentation au sein du corps électoral
sénatorial. Cela me conduit à penser que le projet de loi ultérieur concernera
le Sénat et devra, de ce fait même, être adopté dans les mêmes termes que
l'Assemblée nationale par notre Haute Assemblée.
Est-il opportun de créer une nouvelle collectivité territoriale ? Très
franchement, je ne le pense pas. Et nos collègues Jean-Paul Delevoye et Daniel
Hoeffel ne le pensent sans doute pas davantage, puisqu'ils critiquaient, voilà
de longs mois déjà, dans leur rapport d'étape sur la décentralisation, «
l'empilement administratif » de notre pays.
Cette réforme conduira-t-elle à proposer à terme la suppression d'une voire de
deux collectivités territoriales existantes ? Tel est bien le véritable enjeu
de cette réforme !
Nul doute que, si les organes délibérants des EPCI sont élus au suffrage
universel, de bons esprits ne manqueront pas de nous dire très rapidement que,
dans la mesure où ces communautés sont de plus en plus fiscalement intégrées et
exercent de plus en plus grandes compétences, il convient dès lors de supprimer
les communes - voire, pourquoi pas les départements ? - afin de ne laisser
subsister que l'intercommunalité, la région, et ce qu'il reste de l'Etat et de
l'Europe !
Une telle éventualité doit être prise très au sérieux et, pour ma part, je ne
peux que la combattre. La suppression de l'échelon communal constituerait une
très grave erreur, les élus municipaux rendant, en effet, d'inestimables
services à la population.
Pour toutes ces raisons, je m'oppose fermement à cet article 7
ter,
dont l'adoption aurait des conséquences incalculables.
J'ajoute qu'il est pour le moins singulier de nous demander d'adopter un
principe dont on ne connaît même pas véritablement les modalités d'application
tout en sachant d'ores et déjà qu'elles seront particulièrement difficiles à
respecter pour les communes de moins de 3 500 habitants.
Mes chers collègues, je vous en conjure, mesurez bien la portée de votre vote
: les grands électeurs qui nous ont fait confiance, à savoir les maires et les
délégués des conseils municipaux, ne nous ont certainement pas mandatés pour
favoriser la disparition des communes ! Or la réforme qui nous est proposée y
conduira inéluctablement. Il convient donc de la rejeter !
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'élection
au suffrage universel direct des conseillers communautaires est l'un des points
clés du projet de loi que nous sommes en train d'examiner.
Il ne fait plus de doute que le formidable développement de l'intercommunalité
est l'une des dynamiques de décentralisation les plus tangibles et les plus
réussies de ces dernières décennies. Sa particularité, c'est qu'il s'agit, pour
une fois, non pas d'un mouvement enclenché depuis le sommet de l'Etat, mais
bien d'un véritable mouvement issu de la base, impulsé par les élus locaux
eux-mêmes. C'est ce qui fait tout son succès. On l'a d'ailleurs, à juste titre,
qualifiée de « révolution silencieuse » ou de « révolution tranquille ».
Que le Gouvernement, avec les loi de 1992 et 1999, ait facilité et accompagné
son extension, nous considérons que c'était une très bonne chose ; mais que
l'Etat veuille continuer à recentraliser, cela, nous ne le voulons pas ! Or, si
le Gouvernement ne cesse de parler de décentralisation, il n'arrête pas - nous
le constatons chaque jour - de recentraliser, de diriger et d'enrégimenter.
Comme les structures intercommunales sont en train de prendre de plus en plus
d'importance, le Gouvernement s'y attaque aujourd'hui, et il parviendra à ses
fins si nous ne nous y opposons pas, puisqu'il en a la compétence - à travers
le législateur - les moyens et, surtout, une formidable envie !
Ce qui est en jeu, dans cet article 7
ter,
c'est la relation entre les
communautés et les communes et, disons-le franchement, l'avenir même des
communes, surtout celui des petites communes. On a beaucoup raillé l'exception
française des 36 000 communes, et certains, comme notre collègue Pierre Mauroy
nous l'a fait comprendre, avant-hier encore, ne cachent pas leur volonté d'en
réduire le nombre et de se servir de l'intercommunalité pour faire disparaître,
peu ou prou, l'échelon communal.
Cette conception de l'intercommunalité, mes chers collègues, a un nom : c'est
la supracommunalité, qui n'a rien à voir avec l'intercommunalité telle que nous
la vivons aujourd'hui et que nous voulons la renforcer pour demain. La
supracommunalité a ses partisans ; je les respecte, mais, je vous le dis, je
n'en suis pas. Ma conception de l'intercommunalité, c'est qu'elle doit être au
service des communes et leur permettre, en toute liberté et grâce au principe
de subsidiarité, de déléguer - tout en les contrôlant - certaines compétences
et la réalisation de projets qui dépassent le cadre de leurs seuls moyens aux
EPCI auxquelles elles appartiennent.
L'intercommunalité est le moyen qu'ont inventé les élus - et non l'Etat, je le
répète - pour permettre aux communes, surtout aux plus petites d'entre elles et
à celles qui sont le plus en difficulté, de résoudre leurs problèmes, mais ce
n'est en tout cas par le moyen de faire disparaître les communes
elles-mêmes.
Nos communes, façonnées par notre histoire et nos spécifités locales, doivent
rester les échelons de base de la démocratie et de l'exercice de la
citoyenneté. Leur nombre, leur diversité et le maillage du territoire qu'elles
assurent sont une richesse inestimable qu'il faut impérativement préserver et
mettre en valeur. Elles ne sont pas, comme le dit Pierre Mauroy, qui voudrait
les supprimer, un « handicap ».
L'important, monsieur le ministre, mes chers collègues, est que nous
inscrivions dans le marbre, avant tout changement, notre volonté intangible de
ne jamais mettre en péril l'existence de la commune mais, au contraire, de tout
faire pour la conserver. Si nous nous accordons sur ce point et que nous
scellons cette volonté dans la loi, alors nous pourrons discuter de toutes les
modalités que l'on nous propose, et même de l'élection au suffrage universel
direct des délégués intercommunaux, puisqu'il paraît que c'est à la mode et que
cela leur donnerait plus de légitimité démocratique - ce que, personnellement,
je conteste...
M. Jean-Pierre Schosteck.
Très bien !
M. Dominique Braye.
... dans la mesure où les délégués intercommunaux actuellement élus par les
conseils municipaux ont une parfaite légitimité institutionnelle, cela a été
démontré à de nombreuses reprises.
Il est vrai que, aujourd'hui, quand des élus ont prononcé les mots de
légitimité et de démocratie, ils ont tout dit, et cela leur permet tout,
notamment de se comporter souvent de façon plus dirigiste, et donc plus
anti-démocratique.
Qu'au moins les choses soient claires : le choix est entre le maintien d'une
intercommunalité reposant sur la liberté, la subsidiarité et la pérennité des
communes, et l'évolution avouée vers la supracommunalité. Or, mes chers
collègues, la rédaction de l'article 7
ter
est pour le moins équivoque,
car elle instaure le principe de l'élection des conseillers communautaires au
suffrage universel direct, mais précise aussitôt après : « dans les conditions
définies par une loi ultérieure ».
Vous ne pouvez pas nous demander, monsieur le ministre, de vous signer un
chèque en blanc sur l'avenir et d'ouvrir ainsi la boîte de Pandore !
Voilà pourquoi j'ai cosigné l'amendement de suppression de cet article 7
ter,
dont la lettre étrangement vague me fait craindre qu'il ne soit
sous-tendu par un esprit beaucoup plus précis que je ne veux en aucun cas
cautionner. Pas de clarté, pas de blanc-seing !
Vous voulez plus de démocratie de proximité ? Alors faites davantage
confiance, monsieur le ministre, à ceux qui l'exercent au quotidien, au plus
près du citoyen !
M. le président.
Mon cher collègue, veuillez conclure ! J'ai été très indulgent, et vous avez
largement dépassé votre temps de parole.
M. Jean-Pierre Schosteck.
Il dit pourtant de belles choses !
M. Dominique Braye.
Je conclus, monsieur le président.
Mes chers collègues, les conditions de la clarté ne sont pas aujourd'hui
réunies, car siègent dans cet hémicycle trois catégories de sénateurs
favorables à cet article 7
ter
.
Premièrement, il y a ceux qui - ils l'ont déclaré franchement - souhaitent la
disparition des communes, mais savent qu'ils ne peuvent arriver à leurs fins
dès aujourd'hui ; ils considèrent alors l'élection au suffrage universel direct
des délégués intercommunaux comme une première étape à dépasser le plus
rapidement possible.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Mais non !
M. Dominique Braye.
Deuxièmement, il y a ceux qui souhaitent la disparition des communes sans
l'avouer, voire sans en avoir conscience.
Troisièmement, enfin, il y a ceux qui souhaitent ardemment la persistance de
la commune et qui, pour de multiples raisons, acceptent ou souhaitent
l'élection au suffrage universel direct, sous certaines conditions. Je fais
partie de ceux-là.
Cet article 7
ter
est si peu clair que nous sommes nombreux, fût-ce
pour des raisons différentes, voire opposées, à nous y opposer !
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
L'article 7
ter
instaure le suffrage universel direct pour l'élection
des délégués des établissements publics de coopération intercommunale. Nous
avons regretté, nous l'avons dit dans la discussion générale, qu'une telle
disposition ait été proposée et adoptée dans la précipitation par l'Assemblée
nationale. La prochaine élection aura lieu en 2007. Il n'était donc pas
nécessaire de se prononcer si vite !
Nous ne sommes pas opposés, nous l'avons dit à plusieurs reprises, à l'idée
d'élire les conseillers communautaires au suffrage universel direct. Mais le
texte adopté à l'Assemblée nationale prévoit de renvoyer à une loi ultérieure
les modalités concrètes du scrutin. Ainsi que le disait hier mon collègue
Gérard Le Cam, cet article 7
ter
, dans sa rédaction actuelle, trop
floue, soulève trop de questions auxquelles nous nous devons de répondre.
De son côté, la commission des lois propose un certain nombre de modalités
prenant en compte les suggestions formulées lors du congrès des maires de
France par son président, mais aussi, je le rappelle pour mémoire, dans les
interventions du Président de la République, du Premier ministre et de
vous-même, monsieur le ministre de l'intérieur.
Pour notre part, nous sommes convaincus qu'il faut se donner le temps de la
réflexion. En effet, il nous semble utile d'évaluer l'expérience de
l'intercommunalité depuis la loi Chevènement, afin d'être en mesure de répondre
dans les meilleures conditions à la perspective de 2007.
Cette réflexion se doit de prendre en compte l'existence et le rôle des
communes, qui reste primordial. Sur ce point, nous partageons l'inquiétude de
nombreux maires quant au risque d'effacement de ces entités, de ces
organisations vivantes, nécessaires à la démocratie, que sont les communes. Ce
n'est pas en les affaiblissant que nous atteindrons l'objectif du présent
projet de loi, à savoir le rapprochement du citoyen et du politique, et sa
participation aux affaires publiques.
La commission des lois s'est réunie de nouveau ce matin sur cette question.
Une évolution significative s'est produite, puisque le principe d'une
composition de l'exécutif de la structure intercommunale émanant des conseils
municipaux, mais aussi des conseils d'arrondissement, a été prise en compte.
Mon ami et collègue Gérard Le Cam, je l'ai déjà dit, avait avancé cette
hypothèse. Nous pensons que c'est la voie de la sagesse.
Comment ne pas nous satisfaire que notre voeu soit entendu ? La rédaction
proposée par la commission nous convient, car, pour nous, le débat doit se
poursuivre. Il reste, par exemple, à régler la question des groupes
d'opposition siégeant dans les conseils municipaux et de leur représentation au
sein des EPCI.
Pour toutes ces raisons, il faut prendre le temps nécessaire au débat. Il faut
poursuivre la réflexion, et la proposition de la commission des lois va
effectivement dans le bon sens.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. René Garrec,
président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Très bien
!
M. le président.
La parole est à M. Masson.
M. Jean-Louis Masson.
La proposition qui nous est soumise aujourd'hui aura de très lourdes
conséquences et il est tout à fait regrettable que nous prenions une telle
décision de manière un peu rapide.
C'est véritablement un problème de principe qui est posé. Jusqu'à présent,
nous avons bâti l'intercommunalité sur un système de coopération, de fédération
entre les communes. Aujourd'hui, on nous propose de passer de
l'intercommunalité à la supracommunalité, c'est-à-dire à une véritable
hiérarchie, avec des structures intercommunales qui seraient au-dessus des
communes et sur lesquelles celles-ci n'auraient plus aucun droit de regard.
Pour ma part, je suis radicalement hostile au principe même de l'élection au
suffrage universel des délégués des communes au sein des organismes de
l'intercommunalité.
Par ailleurs, je tiens à attirer votre attention sur deux problèmes qui me
paraissent importants et qui mériteraient d'être pris en compte.
Le premier concerne la représentation des groupes minoritaires des conseils
municipaux au sein de l'intercommunalité. Les élections municipales, dans les
communes de plus de 3 500 habitants, permettent l'expression d'une majorité
forte mais aussi celle des minorités. Il serait donc logique que, dans ces
communes, les conseils municipaux désignent les délégués à l'intercommunalité
par le biais d'une élection à la proportionnelle, afin que des élus de toutes
sensibilités soient les porte-parole de la population de la commune.
Le second problème, qui me tient particulièrement à coeur, est la présidence
de l'intercommunalité.
Autant je suis hostile à ce que les communes soient court-circuitées par une
élection directe des délégués, autant la désignation au suffrage universel du
président de l'intercommunalité me semblerait constituer un progrès important
pour cette dernière.
(Exclamations sur les travées socialistes ainsi que sur
les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Chacun en pense ce qu'il veut !
Ainsi, le président de l'intercommunalité ne serait pas l'émanation d'une
commune ou d'un groupe de communes, mais, au contraire, le représentant de
toute la population.
Tel est le sens de l'amendement que j'ai déposé sur ce point.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Sans revenir sur la position qui sera exprimée tout à l'heure par mes amis du
groupe socialiste, je tiens, à ce stade de la discussion, à faire part des
doutes que m'inspire l'article 7
ter,
qui ne figurait pas dans le projet
de loi d'origine et qui a été ajouté sur l'initiative, comme c'est son droit,
de l'Assemblée nationale.
Il y a, en France, un principe devenu fondamental, même s'il n'a pas été
expressément inscrit dans nos textes les plus sacrés, selon lequel celui qui
vote l'impôt doit être élu au suffrage universel.
Il n'est pas d'exemple contraire, jusqu'à présent, sauf en ce qui concerne les
membres des groupements pour lesquels il avait été admis que c'étaient des élus
du suffrage indirect, c'est-à-dire des élus représentants des collectivités
membres du groupement. Mais ce sont des élus du suffrage universel puisque,
nous le savons tout particulièrement, nous, sénateurs, la Constitution dispose
que le suffrage, qu'il soit direct ou indirect, est toujours universel, égal et
secret.
Après tout, comme c'est le seul cas où ce sont des élus du suffrage indirect
qui votent l'impôt, que l'on souhaite qu'ils soient des élus du suffrage direct
ne me choque pas.
Seulement, mes chers collègues et la navette ne sera sans doute pas
inutile...
M. Henri de Raincourt.
L'urgence est déclarée.
M. Michel Charasse.
... pouvons-nous librement, nous, législateurs de base, faire élire les
conseils des groupements à fiscalité propre au suffrage universel direct sans
méconnaître gravement la Constitution ? Je pose cette question pour une raison
très simple : le suffrage universel direct, n'en déplaise à un certain nombre
de personnes extérieures à nos assemblées, n'est pas un système avec lequel on
peut s'amuser. Ce n'est pas un service à la carte.
Les cas où le suffrage universel entre en jeu sont limitativement prévus par
la Constitution. Il s'agit de l'élection du Président de la République, de
l'élection des députés, des sénateurs avec le suffrage indirect mais universel,
et les conseils des collectivités territoriales.
On peut ajouter à cette liste les membres du Parlement européen, mais le
Conseil constitutionnel a déclaré que le Parlement européen ne faisait pas
partie de l'ordre institutionnel français. Cela signifie que, lorsque l'on fait
partie de l'ordre institutionnel français, les cas où il y a élection au
suffrage universel sont limitativement prévus par la Constitution.
Je ne parle pas des cas de référendum, qui sont limitativement énumérés et qui
n'ont d'ailleurs pas été contredits par la création de référendums locaux
puisque ceux-ci n'ont qu'une valeur consultative alors que les seuls
référendums décisionnels sont ceux qui sont prévus par la Constitution.
Mes chers collègues, je me pose la question de savoir si l'on peut concevoir
que le Parlement pourrait seul créer des procédures d'appel au suffrage
universel ayant pour objet de remettre en cause la souveraineté et le suffrage
universel, c'est-à-dire faire en sorte que l'un contredise l'autre. Après tout,
c'est parfaitement possible, techniquement et juridiquement.
Monsieur le ministre, je ne sais pas quel sort le Sénat réservera à toute
cette affaire, mais je souhaiterais que tout cela soit présent dans les
esprits, tout au long de la navette.
Je souhaiterais, en particulier, que nous ayons le courage, les uns et les
autres, d'amorcer la réflexion qui s'impose. Face au mouvement
d'intercommunalité qui est justifié, que nous avons voulu et qui est sans doute
inévitable, quelle est la place des communes ? Peut-on faire élire les délégués
de l'intercommunalité sans créer - c'est la seule porte que nous ouvre la
Constitution - une nouvelle catégorie de collectivité territoriale dont ses
représentants, dans ce cas-là, pourront être élus sans problème au suffrage
universel ? Mais alors, quelles conséquences en tirer pour les communes ?
A un moment, le rêve doit conduire à déchirer le rideau et à présenter
l'ensemble du spectacle tel qu'il est.
MM. Jean-Paul Delevoye et Patrick Lassourd.
Absolument !
M. Michel Charasse.
Je ne suis pas contre !... Mais on ne peut pas continuer à faire croire aux
maires que l'on ne va jamais rien changer, nulle part et indéfiniment, alors
que, si l'on engage ce processus et si le Conseil constitutionnel devait nous
imposer de créer de nouvelles catégories de collectivités territoriales - ce
qui me paraît logique -, se pose la question des communes.
Si nous demeurons dans l'incertitude, je vous le dis, monsieur le ministre,
nous assisterons, d'ici aux prochaines élections, au détricotage rapide de
l'intercommunalité que nous avons eu tant de mal à mettre en place et à faire
accepter dans les esprits, ce qui, sans nul doute, ne favorisera pas
l'administration du territoire.
Pour conclure, monsieur le président, je dirai que j'ai toujours considéré
qu'il n'était pas tenable que les deux tiers des affaires quotidiennes des
Français - c'est un sénateur qui le dit ! - soient gérées désormais par des
élus du suffrage indirect alors que, jusqu'à présent, ces affaires-là
relevaient d'élus du suffrage direct. Cela me paraît être une régression, même
si je connais les avantages du suffrage indirect et le rôle que le Sénat joue
dans le jeu parlementaire.
Je crois qu'il est désormais logique de passer au suffrage direct. Mais,
attention ! il faut en tirer toutes les conséquences.
Enfin, si nous pouvions, demain, faire du suffrage universel à tout propos et
n'importe quand, n'importe comment et n'importe où, cela voudrait dire que la
souveraineté nationale, à terme, risquerait d'être fortement menacée, avec
toutes les conséquences que cela implique.
Voilà, monsieur le ministre, ce que je voulais vous dire, pour que vous
puissiez, le moment venu, devant l'Assemblée nationale, puisque le choix du
Sénat ne fait peut-être pas de doute, rappeler à nos collègues députés que la
République a des règles et que ce n'est pas parce que c'est écrit que c'est
bien que nous devons nous asseoir sur elles, d'autant plus que ce genre de
discussion est sans doute sans grande incidence sur le vote des Français dans
quelques mois.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées
du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Lecerf.
M. Jean-René Lecerf.
Monsieur le président, mes chers collègues, le fait de m'exprimer sur
l'article 7
ter
me permet d'indiquer d'ores et déjà que les
sous-amendements n°s 351 et 260 que j'avais déposés à l'amendement n° 16 de la
commission des lois n'ont plus d'objet.
La décentralisation me semble être l'un des thèmes fondamentaux sur lesquels
il faut éviter tout manichéisme. J'ai entendu hier nos collègues de gauche
revendiquer la paternité quasi exclusive de la décentralisation. Pour ma part,
je considère au contraire que la décentralisation et la loi de 1982 se situent
dans la continuité des textes de 1959 et de 1970. Ces textes visaient à alléger
la tutelle, et ils furent largement approfondis par la loi de 1982, qui est une
bonne loi.
Sur cet aspect de la politique de décentralisation, il y a donc, selon moi,
continuité beaucoup plus que rupture.
Eviter tout manichéisme, c'est constater que la notion d'établissement public
de coopération intercommunale est, en fait, une étiquette qui recouvre des
réalités diverses.
Je sors, comme un bon nombre d'entre nous, d'une campagne sénatoriale récente
et j'ai pu constater, dans le département du Nord dont je suis l'élu, que je
n'ai guère rencontré de membres de conseils municipaux ou d'élus de communautés
de communes dans les secteurs ruraux ou dans les secteurs périurbains qui
soient favorables à l'élection au suffrage universel direct des représentants
des intercommunalités, alors que, dans la communauté de Lille, par exemple, je
n'ai guère rencontré d'élus municipaux qui y soient hostiles.
J'en déduis qu'il y a peut-être une première réflexion à faire pour opérer une
distinction entre, d'un côté, les communautés urbaines et les communautés
d'agglomération et, de l'autre, les communautés de communes.
Par ailleurs, si nous devions opter un jour - peut-être pas aujourd'hui - pour
une élection au suffrage universel direct, il est absolument indispensable que
chacune des communes soit représentée au niveau de l'établissement public de
coopération intercommunale.
On peut très bien être fondamentalement, viscéralement attaché à nos 36 500
communes et, dans le même temps, ne pas être systématiquement hostile au
principe de l'introduction d'une certaine dose d'élection au suffrage universel
direct des établissements publics de coopération intercommunale.
Je rappelle enfin, mes chers collègues, qu'il n'y a pas si longtemps, dans une
communauté urbaine que M. Mauroy connaît encore mieux que moi, je veux parler
de la communauté urbaine de Lille, toutes les communes n'étaient pas
représentées. Il a fallu un amendement de notre collègue André Diligent pour
que chacune des communes soit représentée au sein du conseil de communauté. Or
je crois sincèrement que, lorsqu'une commune n'était pas représentée au sein du
conseil de communauté, on pouvait douter du maintien de son autonomie
communale.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais qu'une réflexion ait lieu sur
l'opportunité de la mise en place d'un scrutin mixte assurant, pour les
communautés urbaines notamment et peut-être également pour les communautés
d'agglomération, la représentation de chacune des communes, chaque conseil
municipal disposant au moins d'un siège - ainsi, les maires seraient assurés
d'être représentés, s'ils le souhaitent, dans l'organisme de coopération
intercommunale - le solde des sièges étant désignés au suffrage universel
direct.
M. le président.
La parole et à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai eu
l'occasion, dans le cadre de la discussion générale, de faire part à la Haute
Assemblée et au ministre de toutes les interrogations qui étaient les miennes à
propos de cet article 7
ter,
qui nous vient de l'Assemblée nationale. Il
s'agit en effet, comme l'a rappelé M. Charasse, d'une initiative de l'Assemblée
nationale et non du Gouvernement, sur laquelle nous aurons à nous
déterminer.
Permettez-moi de faire un constat et de vous poser des questions.
Tout d'abord, je ne conteste pas la cohérence de la proposition qui nous vient
de l'Assemblée nationale et qui consiste à élire au suffrage universel direct
les délégués des structures intercommunales, car c'est la conséquence logique
des dispositions qui ont été adoptées par l'Assemblée nationale par le biais de
la loi Chevènement.
Mais après avoir mis en place un dispositif incitatif sur le plan financier à
travers la DGF et la TPU, qui a eu pour conséquence le déplacement de la
plupart des compétences au profit de l'intercommunalité, comment
expliquerez-vous aux Françaises et aux Français que celles et ceux qui sont
appelés à gérer les structures intercommunales ne peuvent pas être les
représentants du suffrage universel ? A partir du moment où nous restons dans
cette logique, il y a une certaine cohérence dans la démarche et dans
l'attitude adoptées par nos collègues de l'Assemblée nationale.
Nous découvrons les effets pervers des « carottes financières » qui ont été
mises en place, à savoir nombre de communes complètement dépouillées de leurs
compétences et de maires qui voient se profiler à l'horizon une menace, celle
de ne plus exercer, demain, que les fonctions régaliennes du maire : celles
d'officier de police judiciaire et d'officier d'état civil. C'est le résultat
d'un mouvement qui a été engagé et auquel un certain nombre d'élus n'ont pas
pris suffisamment garde. Je l'ai rappelé à des maires de mon département, dont
je préside l'association.
Les maires, aujourd'hui, s'interrogent plus qu'hier sur l'intérêt que
présente, dans certains secteurs ruraux notamment, le passage à la taxe
professionnelle unique, qui, par suite du transfert de compétences lourdes et
importantes, revient, si vous me permettez l'expression, à « déshabiller » les
communes ! Dès lors, la question qui nous est posée aujourd'hui est tout à fait
pertinente. Toutefois, je n'y souscrirai pas - M. Charasse en a parlé tout à
l'heure ainsi que nombre de nos collègues - tant que nous n'aurons pas précisé
la place de la commune dans le paysage institutionnel français. Quand
aurons-nous le courage de trancher entre le rôle que devront jouer les communes
à côté de l'intercommunalité et le rôle que devront jouer les départements à
côté des régions ? On ne le dit pas, ou l'on en parle très peu.
Lorsque nous avons examiné la loi Pasqua sur l'aménagement du territoire,
personne n'a jamais répondu aux questions que se posaient tous les groupes
politiques sur le devenir du paysage institutionnel français. Le département
a-t-il encore sa raison d'être au regard de la région ? La commune a-t-elle
encore sa raison d'être au regard des structures intercommunales ? Pour y
répondre, on passe aujourd'hui par la bande, avec des propositions du type de
celles qui nous sont présentées et qui nous conduiront à constater qu'il sera
trop tard pour faire machine arrière et revenir sur la situation à laquelle
nous aurons abouti.
Monsieur le ministre, avant de prendre une décision de cette nature, il faut
très clairement poser devant les Françaises et les Français la question de
savoir quel rôle nous souhaitons faire jouer demain, d'une part, à la commune
et, d'autre part, aux départements.
Il existe une réponse facile : c'est l'application du principe de
subsidiarité, qui permettrait de faire coexister les communes, les structures
intercommunales, les départements et les régions. Mais encore faut-il que cela
soit dit très clairement et que le cadre en soit défini.
Enfin, je me demande si, derrière tout cela, nos collègues de l'Assemblée
nationale n'ont pas eu un autre objectif...
M. Jean-Jacques Hyest.
Ah !
M. Alain Vasselle.
... et n'ont pas été animés par des arrière-pensées plus politiques, pour ne
pas dire politiciennes. M. Mauroy ne nous a peut-être pas tout dit en la
matière...
Depuis plusieurs décennies, la gauche constate qu'elle a du mal à devenir
majoritaire au sein de nos collectivités territoriales que sont les communes,
parce que les Françaises et les Français reconnaissent chez un maire plus la
compétence de l'homme pour la gestion des affaires communales que son étiquette
politique et donc la sensibilité à laquelle il appartient.
Très naturellement, nombre de maires apprécient les candidats aux élections
sénatoriales, qui sont des élections au suffrage indirect, en fonction non de
leur engagement politique, mais de leurs compétences et du travail technique
qu'ils effectueront au Sénat.
Cela gêne quelques-uns de nos collègues socialistes et communistes, car ils
aimeraient bien, grâce à la mise en place d'un mode de scrutin au suffrage
universel des structures intercommunales, parvenir à reprendre le pouvoir
qu'ils ne réussissent pas à prendre avec le mode de scrutin actuel, en faisant
disparaître la commune, en donnant une place importante aux structures
intercommunales et en généralisant le mode de scrutin à la proportionnelle.
J'en veux pour preuve le fait qu'ils avaient tenté, lors du débat sur la
parité, de ramener le seuil de 3 500 à 2 000 habitants pour générer le mode de
scrutin à la proportionnelle dans nos communes.
M. le président.
Concluez !
M. Alain Vasselle.
Je suis prêt à parier que si, demain, l'ensemble des délégués intercommunaux
sont élus au suffrage universel, on nous présentera une proposition de loi
ayant un caractère politique et consistant à généraliser l'élection à la
proportionnelle dans nos structures intercommunales, car ils considéreront
qu'il s'agira d'une chance supplémentaire pour eux de reprendre le pouvoir dans
nos communes et de devenir, demain, majoritaires au Sénat !
(Protestations
sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. Claude Estier.
La gauche majoritaire au Sénat !
M. Pierre Mauroy.
Pourquoi ne serait-ce pas dans l'ordre des choses ?
M. Alain Vasselle.
Personne n'a abordé ce sujet jusqu'à aujourd'hui, mais je me demande si ce
n'est pas ce type d'arrière-pensées qui est à l'origine de la proposition qui
nous parvient de l'Assemblée nationale s'agissant du devenir de nos structures
intercommunales, et M. Mauroy ne nous dit pas tout !
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Lardeux.
M. André Lardeux.
Mon intervention fera gagner du temps sur la discussion des amendements.
Le débat que nous avons ajourd'hui est important et certains nous reprochent
de dire les mêmes choses, mais permettre à chacun de s'exprimer fait partie du
débat démocratique et le fondement de la pédagogie est la répétition.
Monsieur le ministre, il me semble que les dispositions de cet article 7
ter
font l'objet d'un certain nombre de contradictions.
D'abord, comme vous l'avez fait remarquer, il ne s'agit pas d'une initiative
gouvernementale, puisque cet article a été introduit dans le cours de la
discussion à l'Assemblée nationale. Vous avez d'ailleurs réitéré hier votre
opposition à la supracommunalité, à laquelle cet article, tel qu'il est rédigé,
conduit tout droit !
Dans un premier mouvement, tous mes collègues qui ont cosigné l'amendement que
j'ai présenté, notamment Jean-François Le Grand et Dominique Leclerc, ont
préconisé la suppression, voire le report, de ce texte. Nous devons beaucoup
réfléchir avant de parvenir à des propositions dans ce domaine.
D'abord, nous avons le temps : le prochain renouvellement des instances
locales aura lieu en 2007. Aucune épée de Damoclès ne nous pousse donc à agir
dans l'urgence !
Par ailleurs, nos prédécesseurs de la Révolution ont mis dix ans avant de
trancher dans cette affaire. Ils ont hésité : ils ont créé les communes, mais,
dans un second temps, ils en sont venus à un système plus supracommunal, en
imaginant des municipalités cantonales. Par la suite, ils ont fait machine
arrière pour en revenir au système dont nous avons hérité.
On a pris, à l'époque, le temps de la réflexion et il faut faire de même
aujourd'hui. Nous devons réfléchir aux conséquences institutionnelles, parce
que l'élection au suffrage universel des EPCI aura des conséquences non
seulement sur les communes elles-mêmes, mais aussi sur les départements à
travers la désignation des conseillers généraux. En effet, le fait que, dans
une même entité géographique, un conseiller général et un président de
communauté de communes soient désignés au suffrage universel peut entraîner des
conflits de légitimité très forts. Elle aura également des conséquences sur la
région, même si le mode de scrutin est tout à fait différent et, au total, sur
l'équilibre institutionnel national, puisque nous sommes ici l'émanation des
communes.
A cet égard, les maires ne s'y sont pas trompés : lors de la récente campagne
sénatoriale, la première question que tous les maires posaient concernait le
devenir de l'intercommunalité et de la désignation des responsables de
l'intercommunalité. De nombreux problèmes subsistent. Les EPCI votant des
impôts, on nous rétorque qu'il est normal que l'élection de leurs responsables
ait lieu au suffrage universel. Mais il en existe qui sont parfois dirigés par
des non-élus et ils votent des budgets bien plus importants que ceux de
certaines communautés de communes ! Je ne citerai que les syndicats d'eau, qui
sont parfois extrêmement puissants, et ne parlons pas des agences de l'eau, qui
votent aussi des taxes et dont les membres, que je sache, sont désignés de
façon extrêmement indirecte. De plus, nos concitoyens ne perçoivent pas
actuellement la fiscalité des EPCI puisqu'ils sont financés, d'un côté, par des
dotations de l'Etat et, de l'autre, par la taxe professionnelle, qui est payée
par les entreprises. Pour ces raisons, comme je vous l'ai dit tout à l'heure,
j'ai déposé un amendement qui vise à supprimer l'article 7
ter,
mais j'y
reviendrai tout à l'heure.
En outre, cette disposition présente des obstacles importants.
Je prendrai l'exemple de la communauté d'agglomération d'Angers. La plus
grande commune, c'est Angers, bien sûr, avec 155 000 habitants, et la plus
petite en comprend 100. Comment arriver, concrètement, à ce que les 155 000
habitants de la plus grande commune se sentent représentés équitablement, tout
comme les 100 habitants de la plus petite d'ailleurs ? Cette question mérite
autre chose que cet article 7
ter,
introduit un peu rapidement dans le
cours de la discussion à l'Assemblée nationale.
M. le président.
La parole est à M. Delevoye.
M. Jean-Paul Delevoye.
Monsieur le président, monsieur le ministre, j'apporte mon soutien à
l'amendement n° 16 du rapporteur, et je profite du débat pour rebondir sur les
interventions des uns et des autres.
On essaie de nous faire délibérer sur un mode de scrutin. En réalité, la vraie
question, qui mériterait un débat bien plus large, est de savoir si
l'intercommunalité à fiscalité additionnelle est une collectivité locale à part
entière ou non.
A partir du moment où le principe d'un pouvoir assis sur la légitimité du
suffrage universel est effectivement instauré, on crée de fait une nouvelle
collectivité territoriale, ce qui causera, à l'évidence, un conflit entre deux
légitimités sur le même territoire. C'est d'autant plus important qu'au nom de
ce principe on voit bien toutes les déclinaisons très logiques qui se
mettraient en place.
Si, sur un même territoire, celles et ceux qui lèvent l'impôt doivent être
élus au suffrage universel, sur une liste dont il appartiendra de déterminer
les modalités, cela veut dire que l'on devra s'interroger demain sur une liste
départementale d'élus au suffrage universel pour lever l'impôt départemental et
sur une liste régionale pour lever l'impôt au niveau régional et, après-demain,
sur une liste européenne pour lever l'impôt européen !
On le voit bien, ce débat mériterait que nous lui consacrions beaucoup plus
que le temps de la discussion d'un article résultant d'un amendement qui a été
introduit dans le texte par l'Assemblée nationale et dont le Gouvernement n'est
nullement responsable, je lui en donne acte.
Deux autres questions sont au coeur du problème. Cette mesure va-t-elle
accroître l'efficacité de l'action publique et augmenter la participation du
citoyen à son contrôle ?
L'amendement présenté par le rapporteur est très clair, il faut le rappeler
avec force : l'intercommunalité est d'abord et avant tout une volonté communale
de mettre en commun des moyens pour accroître l'efficacité d'une politique au
profit d'une commune. C'est donc un acte de rationalisation, d'intelligence et
de pertinence pour augmenter l'efficacité de l'action publique locale et peser
sur la diminution du coût fiscal.
Une vraie question se pose aujourd'hui, mais elle pourrait concerner aussi des
structures à caractère économique : les acteurs de base qui ont souhaité
déléguer des compétences à l'échelon supérieur - et ils n'avaient peut-être pas
mandat des habitants pour le faire - doivent-ils être contrôlés par
l'institution qu'ils ont ainsi mise en place ou, au contraire, doivent-ils
garder un pouvoir de contrôle, d'observation, d'évaluation, de
contractualisation et de définition des objectifs ?
Il s'agit d'un débat majeur, d'autant que l'intercommunalité devra gérer des
problèmes d'intérêt général qui s'opposeront à des intérêts catégoriels et
particuliers. Si nous n'y prenons garde, si nous nous laissons entraîner sans
prendre suffisamment de recul vers l'élection au suffrage universel direct des
membres des structures intercommunales, vous imaginez quelles pourraient être
demain les campagnes de celles et ceux qui s'engageraient à refuser
l'implantation de logements sociaux ou de structures d'accueil des gens du
voyage dans telle ou telle commune. On assisterait à l'émanation d'intérêts
catégoriels qui s'appuieraient sur le suffrage universel pour justifier la
légitimité de leurs revendications et qui viendraient s'opposer et neutraliser
l'action publique au détriment de l'intérêt général.
Il faut que nous fassions très attention à cette dérive. Aujourd'hui, toutes
celles et ceux qui doivent prendre des décisions d'intérêt général, qu'il
s'agisse de l'implantation d'un aéroport, de la création d'une voie d'accès ou
d'une zone d'activité économique, se heurtent immédiatement à une association
d'intérêts particuliers qui cherche très légitimement à se défendre contre
l'inconfort généré par cette politique d'intérêt général. Si, demain, de telles
associations ont la faculté de participer à des campagnes en s'appuyant sur une
légitimité qui, à l'évidence, pourrait parfois leur accorder la majorité, cela
risquerait d'entraîner des à-coups redoutables et des remsies en cause
d'investissements très lourds, qui revêtent parfois une dimension régionale et
qui pèsent sur des communautés d'agglomération ou sur des communautés
urbaines.
Je m'interroge donc sur la neutralisation possible - sous couvert,
paradoxalement, de démocratie - de l'action publique à caractère municipal et
intercommunal par ces mécaniques de démocratie représentative.
Deuxième élément sur les utilisations de l'intercommunalité et le
fonctionnement de celle-ci : on nous dit que celui qui lève l'impôt doit être
élu au suffrage universel. J'attire votre attention sur le fait qu'aujourd'hui
le prix payé par l'usager est souvent très supérieur à l'impôt acquitté par le
contribuable local. Mécaniquement, loi de finances après loi de finances, il y
a de moins en moins de contribuables locaux et de plus en plus de factures
payées par l'usager.
Dans ces conditions, comment ne pas s'interroger sur l'élection au suffrage
universel de celles et ceux qui gèrent des délégations de service public ou des
services intercommunaux qui seront financés par l'usager, alors que, d'un autre
côté, on tenterait de faire élire au suffrage universel des personnalités qui
auraient vocation à mettre en place des politiques qui, elles, seraient
financées par des contribuables dont le nombre serait relativement réduit ?
Je crois que nous devrions au contraire faire en sorte que, tous les ans, les
communes puissent délibérer du compte administratif de la structure
intercommunale, de façon à avoir une lecture des comptes consolidés et,
éventuellement, ouvrir un débat sur les orientations budgétaires.
La vraie réflexion à mener, c'est l'articulation entre la commune et l'échelon
intercommunal. Cette position me paraît tout à fait curieuse !
Enfin, en ce qui concerne la participation du citoyen, là aussi, cet argument,
qui paraît juste dans la théorie, ne reflète absolument pas ce qui se passe
réellement sur le terrain.
Le fait d'avoir été élu au suffrage universel pour six ans incite-t-il celles
et ceux qui sont ainsi désignés à rendre compte de leur gestion tous les ans à
leurs électeurs ? Pour ma part, je connais des communes ou des EPCI qui, sans
être élus au suffrage universel, effectuent des campagnes de communication, des
campagnes de participation, pratiquent une démocratie directe au sein des
quartiers, et d'autres qui ne font aucun compte rendu ; c'est l'opacité la plus
totale.
Ce qui est important, c'est non pas le principe, mais la pratique pour faire
participer le citoyen à la vie démocratique. C'est d'autant plus important que
la mécanique dans laquelle nous sommes entrés, qui est une mécanique de
récompense d'un transfert de compétences par le coefficient d'intégration
fiscale, aboutira, comme le disait M. Vasselle, à transférer de plus en plus de
compétences de l'échelon communal à l'échelon intercommunal.
Si, demain, le pouvoir communal disparaît, à l'évidence, cela constituera un
frein, voire un recul, par rapport à l'intercommunalité.
Enfin, sur un plan purement civique, nous voyons bien quelle est la teneur du
débat politique qui est le nôtre : comment faire en sorte qu'un habitant soit
un citoyen, un usager et un acteur ?
Le rôle de l'Etat est aujourd'hui important, ne serait-ce que par la
symbolique de l'esprit civique qu'il représente. Mais la commune est un élément
de vie démocratique essentiel pour que celui qui y vit se considère non pas
comme un usager, mais comme un acteur de la vie publique communale, qui
participe à des actions de solidarité et de proximité. Ainsi, le mandat que
nous allons donner sera non pas un mandat de confrontation, mais un mandat
d'intégration.
C'est la raison pour laquelle nous avons contesté l'urgence de ce projet de
loi relatif à la démocratie de proximité et nous considérons que cette urgence
s'impose encore moins sur l'application d'un principe dont les modalités
seraient reportées à terme. Il faut avoir la sagesse de débattre très
naturellement des conséquences des décisions que nous serons conduits à
prendre.
Je soutiens donc l'amendement de M. Hoeffel, qui affirme que
l'intercommunalité est l'émanation des communes. Cela me paraît respecter
l'esprit de la démocratie locale.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la seule
différence entre l'amendement présenté ce matin par M. le rapporteur et celui
qu'il a défendu hier, porte sur la suppression de l'expression « suffrage
universel direct ».
M. Michel Mercier.
Exactement !
M. Jean-Pierre Sueur.
La question est effectivement de savoir si, en la matière, le suffrage
universel direct doit susciter cette abondance de craintes, de peurs, de
frayeurs, de tremblements, qui ont alimenté nombre des propos qui ont été
tenus.
Dans la perspective européenne qui est la nôtre, vous savez quelle est
l'importance des grandes agglomérations de notre pays, qui doivent peser de
tout leur poids ; Pierre Mauroy a eu l'occasion, à plusieurs reprises, de
mettre l'accent sur ce point.
Très franchement, comment comprendre aujourd'hui, mes chers collègues, que
tout le monde trouve normal que le suffrage universel direct s'applique dans un
village de cinquante, de cent, de deux cents habitants, et qu'il paraisse
incongru, dangereux, bizarre, anormal, de consulter les citoyens lorsqu'il
s'agit d'agglomérations qui ont des budgets de 1 milliard, 2 milliards, 7
milliards, 8 milliards de francs... et des compétences considérables ? Comment
l'expliquer ?
De même, il existe une grande différence entre les cantons du monde rural et
ceux des grandes villes. Mais, dans la plupart des grandes villes, les citoyens
votent au suffrage universel direct à l'échelon du canton. Or, quand on leur
demande quels sont le périmètre et les compétences du canton dans lequel ils
ont voté, le plus souvent, ils l'ignorent totalement. Pourtant, des décisions
essentielles sont prises toutes les semaines en matière d'urbanisme, de
transport, d'économie, d'environnement et sur bien d'autres sujets concernant
l'agglomération. Et l'on voudrait qu'il n'y ait pas de débat démocratique à la
faveur d'élections sur les grandes orientations de la politique de ces
agglomérations !
Le courant de l'histoire nous incite à faire confiance au suffrage universel
direct. Bien entendu, il ne s'agit pas d'opposer l'intercommunalité et les
communes. Après tout, aujourd'hui, on vote au suffrage universel direct pour
les cantons, pour les communes, pour les régions. Est-il vraiment incompatible
de voter au suffrage universel direct à la fois pour la commune et pour
l'intercommunalité, dès lors que cette dernière a un budget plus élevé - et ce
mouvement s'accentuera, parce que c'est ce que nous avons décidé - et des
compétences très importantes ?
Mes chers collègues, j'ai été très intéressé, comme vous tous sans doute, par
les déclarations qui ont été faites par les plus hautes autorités de l'Etat ;
nous l'évoquions ce matin à la commission des lois. Le Président de la
République, dans son discours de Rennes, a parlé de l'élection au suffrage
universel direct des structures intercommunales à fiscalité propre. Et je crois
avoir entendu que, lors du dernier congrès de l'Association des maires de
France, il a évoqué de nouveau le suffrage universel direct, ainsi d'ailleurs
que le Premier ministre et le ministre de l'intérieur. Ces paroles émanent de
personnalités qui connaissent particulièrement le sujet et qui ont ici beaucoup
de supporters, d'un côté ou de l'autre.
(M. Vasselle s'exclame.)
Par conséquent, je m'étonne que l'on puisse être aussi réservé à l'égard du
suffrage universel. Pour notre part, nous considérons que c'est un mouvement de
l'histoire et qu'il faut le suivre avec confiance.
(Applaudissements sur les
travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Mauroy.
M. Pierre Mauroy.
Je vais répéter à peu près ce qui vient d'être dit, mais le débat est d'une
telle importance qu'il me paraît utile de s'exprimer, d'autant que quelques-uns
d'entre vous, mes chers collègues, m'ont interpellé : nous aurions des
arrière-pensées... Effectivement, nous avons l'arrière-pensée d'être
majoritaires dans cette assemblée ! Nous sommes dans une démocratie et il
serait bien normal qu'ici comme ailleurs il puisse y avoir une alternance.
(M. Vasselle rit.)
Mais nous n'avons pas l'arrière-pensée de vouloir maîtriser les institutions
françaises, et ce uniquement pour des considérations politiques.
(Exclamations sur les travées du RPR.)
Vous mettez en avant l'épouvantail de la suppression des communes ! Il n'en
est pas question !
(M. Vasselle s'exclame.)
Sur ce plan, nous avons été
très clairs ; le Gouvernement également. Par conséquent, n'en parlons pas !
M. Alain Vasselle.
Vous nous faites rire !
M. Pierre Mauroy.
Ensuite, l'instauration du suffrage universel et de l'intercommunalité,
constitue une évolution inéluctable, comme était inéluctable, voilà vingt ans,
la décentralisation. Vous avez tout fait pour empêcher cette décentralisation !
Aujourd'hui, vous en êtes partisans.
(MM. Vasselle et Braye
s'exclament.)
M. Jean-Pierre Schosteck.
Maintenant, c'est vous qui recentralisez !
M. Pierre Mauroy.
Vous le voyez : c'est nous qui avons l'avantage. Je parie que cette
intercommunalité, qui est déjà défendue au plus haut niveau de l'Etat,
notamment par le Gouvernement, vous vous y rangerez, parce que cela me paraît
l'évidence même. On ne peut ni contrarier les grandes évolutions de la société,
ni utiliser des artifices, ni utiliser sur ce plan-là ; vous le savez
parfaitement ! La France compte 36 000 communes : nous voulons respecter ces 36
000 communes !
(Protestations sur les travées du RPR.)
Vous mentez aux Françaises et aux Français, si vous niez l'évolution
considérable de la commune eu égard aux réponses qu'elle pouvait apporter,
voilà cinquante ans ou encore voilà trente ans, aux questions de société.
D'ailleurs, aujourd'hui, les maires eux-mêmes espèrent, pour remplir leur
contrat vis-à-vis de la population, qu'une intercommunalité sera effectivement
mise en place, avec de véritables moyens pour agir. Du reste, il s'agit moins
d'un problème politique que d'un problème de moyen.
On dit que l'intercommunalité est un problème communal ! Il ne faudrait quand
même pas faire de chaque commune un lieu où tout sera freiné !
L'intercommunalité est un problème de territoire ! Les communes doivent être
respectées, mais elles doivent définir ensemble les meilleures mesures à
prendre en ce qui concerne le territoire.
Je ne comprends pas pourquoi vous voudriez, dans cette enceinte, rester le
dernier carré de conservateurs refusant d'avancer.
M. Patrick Lassourd.
C'est une caricature !
M. Alain Vasselle.
C'est pour cela que vous êtes là !
M. Pierre Mauroy.
Permettez-moi de rappeler que les communautés urbaines ont été créées par
Michel Debré.
M. Michel Mercier.
En 1966 !
M. Henri de Richemont.
Chacun sa génération !
M. Pierre Mauroy.
Aujourd'hui, l'intercommunalité prend ses responsables aussi bien à gauche
qu'à droite. Cela signifie que ce n'est pas un problème par excellence
politique. Il est normal que chacun souhaite que son camp l'emporte mais, ici,
l'enjeu est différent.
M. Alain Vasselle.
Tiens donc !
M. Pierre Mauroy.
Il s'agit de l'adaptation à une société qui ne cesse d'évoluer, de
l'adaptation des institutions françaises à l'Europe, aussi. Enfin, la France ne
peut pas être le dernier pays à évoluer sur ce plan ! C'est dans l'intérêt des
populations.
J'ai présidé pendant bien des années aux destinées d'une ville ; je préside
maintenant...
M. Alain Vasselle.
Et sans partage !
M. Pierre Mauroy.
... une intercommunalité dont le budget s'élève à 12 milliards de francs...
M. Dominique Braye.
Et avec quel argent ?
M. Pierre Mauroy.
Les responsabilités que l'on nous donne sont immenses : schéma directeur,
aménagement du territoire, toutes les décisions relatives aux grandes
infrastructures, aussi.
M. Henri de Richemont.
A quoi servent les maires ?
M. Pierre Mauroy.
Tout le monde est d'accord sur cette intercommunalité, qui est absolument
indispensable.
M. Dominique Braye.
A Lille, peut-être !
M. Pierre Mauroy.
A Lille et ailleurs.
M. Dominique Braye.
Et à Lomme ?
M. Pierre Mauroy.
Si ce n'est pas encore ailleurs, ce le sera bientôt, comme à Lille. Je ne
comprends pas du tout votre résistance.
M. Dominique Braye.
Et à Lomme ?
M. Pierre Mauroy.
Vous usez d'artifices de propagande, monsieur Braye, vous ne répondez pas à la
question, esentielle, qui est ici posée. La France évolue d'une façon
extraordinaire et connaît une mutation sans précédent. Or il est impossible
d'assurer une bonne gouvernance avec 36 000 communes qui seraient complètement
indépendantes.
M. Dominique Braye.
Vous êtes le vrai conservateur, ici !
M. Pierre Mauroy.
Encore une fois, des regroupements sont absolument nécessaires. D'ailleurs,
messieurs, vous êtes dépassés par les maires eux-mêmes qui les souhaitent.
(Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Alain Vasselle.
Non !
M. Pierre Mauroy.
J'espère que, dans dix ans, l'intercommunalité se sera enrichie de milliers de
communes regroupées dans les cent trente ou cent quarante communautés
d'agglomération et dans une vingtaine de communautés urbaines.
N'allons pas confirmer cette image un peu ringarde dont souffre le Sénat dans
l'opinion publique.
M. Dominique Braye.
On ne résout pas les problèmes des communes contre leur gré !
M. Pierre Mauroy.
Heureusement, cette mauvaise opinion n'est pas partagée par tous, j'ai pu le
mesurer lors des travaux de la commission relative à l'avenir de la
décentralisation, où il a été question, notamment, des bureaux des temps. Il ne
s'agit pas de rester cinquante ans en arrière.
M. Dominique Braye.
On ne fait pas le bonheur des citoyens malgré eux !
M. Pierre Mauroy.
Le véritable problème, pour la démocratie française, est d'aller de l'avant.
Je vous mets au défi de démontrer que l'on pourra assurer une bonne
gouvernance, en France, sans faire confiance à l'intercommunalité. Dès lors que
vous lui faites confiance,...
M. Dominique Braye.
Mais on lui fait confiance !
M. Pierre Mauroy.
... vous devez faire confiance au suffrage universel direct.
(Vives
exclamations sur les travées du RPR.)
Chers collègues, pourquoi tant de protestations ? Est-ce le fait que l'on vous
montre la réalité telle qu'elle est ?
M. Dominique Braye.
Votre réalité !
M. Pierre Mauroy.
Nous ne souhaitons qu'une chose : qu'il y ait un véritable couple entre
l'intercommunalité et les communes.
Il y a eu l'exception française des 36 000 communes...
M. Henri de Richemont.
Heureuse exception française !
M. Pierre Mauroy.
Eh bien ! Il y aura toujours l'exception française mais, avec, à la base de la
démocratie, ce couple véritablement alternatif entre l'intercommunalité et la
commune...
M. Dominique Braye.
Ce n'est pas ce que vous disiez, il y peu !
M. Pierre Mauroy.
... assuré par le suffrage universel. Je suis persuadé que cette idée-là
s'imposera.
(Applaudissements sur certaines travées socialistes.)
M. Dominique Braye.
Vous avez changé d'avis !
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite,
tout d'abord, faire écho à notre collègue Michel Charasse, qui se posait la
question de savoir si celui qui lève l'impôt doit obligatoirement être élu au
suffrage universel direct.
J'avais déposé un sous-amendement - mais il n'a plus d'objet compte tenu de
l'amendement de M. le rapporteur - tendant à prévoir, éventuellement,
l'élection au suffrage universel direct des élus communautaires à la condition
que, dans le budget communautaire, les dotations de compensation et les
dotations de solidarité soient inférieures à la moitié des produits fiscaux
perçus par l'établissement considéré. Autrement dit, on ménageait une
intercommunalité avec un projet et des financements importants, sans pour cela
déconsidérer les établissements à fort reversement de produits fiscaux au titre
de la dotation de solidarité, parce qu'il s'agit, pour ces établissements, de
partager mieux la richesse ; c'est très fréquent dans nos intercommunalités
rurales.
Sur le fond, maintenant, je constate, à la lumière du débat qui s'est
instauré, que l'on peut effectivement se poser la question de savoir si les
établissements publics de coopération intercommunale sont de nouvelles
collectivités ayant vocation à se substituer aux communes - nous sommes, alors,
dans une démarche de supracommunalité - ou bien si ces établissements doivent
être des structures destinées à aider les communes à exercer leurs compétences
lorsqu'elles ont des difficultés à le faire compte tenu de leurs dimensions.
En somme, où va-t-on placer la commune dans le paysage institutionnel français
? Et, pour aller jusqu'au bout du questionnement, où va-t-on mettre le citoyen
dans la société française ?
Je trouve que ce débat est un peu surréaliste. L'article 1er tendait à créer
des conseils de quartier dans les agglomérations pour susciter la participation
des citoyens à la vie communale. Mais la commune n'est-elle pas l'endroit idéal
pour faire participer les citoyens à la vie de leur territoire ?
Si nous poussons le raisonnement à son terme, et si nous envisageons la
disparition des communes, petit à petit remplacées par des établissements
intercommunaux, ne serons-nous pas obligés de recréer des conseils de quartier
qui correspondront exactement aux périmètres communaux, précisément pour faire
participer les citoyens à la vie communale ?
(Très bien ! sur les travées du
RPR).
C'est surréaliste !
Nous débattons d'un projet de loi dont l'ambition affichée est d'instaurer
plus de proximité et de participation, mais chacune des dispositions que l'on
nous propose nous entraîne dans un système où tout sera centralisé à un niveau
supérieur et où, bien évidemment, les conseils de quartier correspondront
exactement aux communes actuelles !
Monsieur le ministre, ne tuons pas la commune : elle est la cellule de base de
l'organisation française. L'intercommunalité, comme l'a très bien exprimé M. le
rapporteur, doit être l'émanation des communes ; les délégués communautaires
doivent être issus des conseils municipaux ; l'intercommunalité doit être
placée sous le contrôle et sous la responsabilité des communes. C'est à cette
condition que l'on respectera le principe de démocratie de proximité qui figure
au fronton de ce projet de loi.
(Très bien ! et applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Ce débat est complexe et, en fonction de l'histoire propre de chacun ici et de
l'échelon local où il exerce ses responsabilités, il peut y avoir entre nous
sinon des divergences, du moins des nuances.
M. Michel Mercier.
A tout le moins !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Comme je l'ai dit fortement au nom de mon groupe, nous avons une certitude et
une conviction : il faut maintenir l'ensemble des communes.
Sur ce point, il n'y a pas de discussion possible. Encore faut-il savoir,
cependant, ce que l'on met dans le concept de « commune », et les propos de M.
Lassourd ne me rassurent pas complètement, même lorsqu'il fait référence à
l'article 1er de la loi : n'y sont évoqués que des services de proximité, et
non des communes de plein exercice.
Il y a plusieurs façons de tuer les communes. On peut les maintenir
nominalement et, dans le même temps, leur enlever toute compétence, de sorte
que les candidats de qualité se détourneront des fonctions municipales,
notamment dans les petites communes. Le risque est sérieux, nous devons y être
attentifs.
On ne peut donc pas continuer à tenir ce discours ambigu de défense des
communes tout en pratiquant une politique qui les voue à la disparition.
Cela étant, il faut que les communes travaillent ensemble. Les maires ont
d'ailleurs tranché puisqu'ils se précipitent vers l'intercommunalité.
M. Patrick Lassourd.
C'est la carotte financière !
M. Alain Vasselle.
Eh oui ! Il y a la carotte !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Nous nageons dans les contradictions, c'est vrai.
Cependant, à l'évidence, pour les grosses agglomérations, pour les communautés
urbaines, on voit très mal comment on pourrait échapper au suffrage universel
direct. Non que je considère moins légitime le suffrage indirect, comme je suis
étonné d'entendre certains collègues le faire. Que des sénateurs puissent
mettre en question la légitimité du suffrage indirect, c'est plutôt curieux !
Il peut être complètement et totalement légitime.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
En revanche, se pose un problème de lisibilité, comme nous le constatons déjà
avec les agences de bassins et les syndicats d'eau, notamment. Comment le
citoyen et même l'élu, voire le maire, peuvent-ils savoir ce que ces organismes
font si on ne leur en rend pas compte ?
Il faudra donc plus de lisibilité. Comment les grandes conurbations
regroupées, qui font des investissements de près de 10 milliards de francs,
pourraient-elles ne pas rendre compte de leur action ?
Il est évident que les communes seront menacées. Nous n'en sommes pas là, mais
il faudra s'inspirer de la loi PLM. Je parle en mon nom, car mon ami Robert
Bret n'est pas forcément convaincu que les maires de la région PACA me
suivraient sur ce point. C'est tout de même une piste, même pour d'autres
niveaux de collectivité.
Pour les petites communes, en revanche, mieux vaut conserver l'existant. Je ne
crois pas que le suffrage universel direct, même dans le cadre de
l'intercommunalité, s'imposera avec autant de force et d'évidence.
Autant l'évolution vers le suffrage universel direct est inéluctable pour les
grandes agglomérations, autant elle est beaucoup moins souhaitable - c'est mon
sentiment - pour les petites communes. Au demeurant, je vois une première
difficulté technique au mode de scrutin avec panachage : on ne pourra pas
éviter le scrutin de liste. Il faut le savoir. Mais il sera toujours temps de
s'intéresser à cette question le moment venu.
M. Patrick Lassourd.
Et la proportionnelle ?
M. Jean-Claude Peyronnet.
Je ne renie pas les propos de mes collègues. Je regrette, moi aussi, l'absence
de référence au scrutin universel direct, notamment pour les grandes
agglomérations, dans l'amendement de M. Hoeffel. Nous ne pourrons pas voter cet
amendement. Cependant, sa rédaction laisse la voie ouverte à un éventuel
compromis dans le cadre d'une commission mixte paritaire.
(Applaudissements sur certaines travées socialistes, ainsi que sur les travées
du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du
RDSE.)
M. Henri de Richemont.
Il faut aller jusqu'au bout : votez l'amendement !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Les socialistes du Limousin sont les meilleurs !
(Sourires.)
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Mon point de vue, qui est aussi celui de la sensibilité que je représente au
sein du RDSE, rejoint, ce qui me facilite la tâche, celui de M. Peyronnet.
Nous comprenons bien qu'il faut faire un pas et qu'il est nécessaire
d'envisager, pour les grandes agglomérations urbaines, le suffrage universel
direct. En effet, ne serait-ce que pour des considérations de distance
géographique, il importe de lier le fonctionnement des structures
intercommunales que sont les communautés d'agglomération et les communautés
urbaines au choix fait par les citoyens lors de chaque scrutin municipal.
Mais, en même temps, il ne faut pas précipiter le mouvement et risquer ainsi
de freiner cette adhésion à l'intercommunalité dans les communes petites et
moyennes dont chacun se réjouit, mais qui pose quand même de nombreuses
difficultés techniques, sans oublier, bien évidemment, le fait qu'il peut y
avoir une plus grande proximité dans une communauté de communes entre le
citoyen et ses mandants élus au suffrage universel indirect qu'il n'y en a
forcément dans une grande agglomération de plusieurs centaines de milliers de
personnes.
Pour toutes ces raisons, nous avons choisi d'adopter, dans ce débat, une
position prudente, ouverte, de compromis. Nous ne souhaitons pas voir étendre
le suffrage universel direct à l'ensemble des communes de France, s'agissant de
l'intercommunalité. De même, nous redoutons beaucoup une éventuelle
dissociation, lors du vote, entre des listes qui choisiraient
l'intercommunalité et des listes qui seraient consacrées à l'élection
proprement communale.
Telles sont les deux bornes entre lesquelles nous avons envie d'avancer.
M. le président.
Après ce débat très riche, il faudrait essayer de passer à l'examen des
amendements.
La parole est à M. Lambert.
M. Alain Lambert.
Je suis personnellement dans une position un peu particulière mais constante,
puisque j'ai toujours été partisan, j'ai en effet voté cette disposition
lorsqu'elle nous a été présentée dans cet hémicycle, de l'élection des
conseillers communautaires au suffrage universel.
Je voudrais dire par expérience que nous devons nous appliquer absolument à en
débattre d'une manière totalement apaisée. A défaut, nous risquerions de mettre
en difficulté la coopération intercommunale elle-même et, en fait, de voir des
communes se demander si elles ont eu raison de s'engager dans
l'intercommunalité.
M. Henri de Raincourt.
Et voilà !
M. Alain Lambert.
Elles craindront de voir surgir des oppositions entre leurs intérêts communaux
et l'intérêt communautaire, qui risquent même d'induire, à terme, une sorte de
schizophrénie chez le citoyen communal qui se demanderait s'il a les mêmes
intérêts que le citoyen communautaire. Elus, souvent territoriaux dans cette
maison, nous avons une expérience, un vécu, comme l'on dit aujourd'hui, qui
doit nous permettre d'aborder ces sujets de manière apaisée.
J'ai également le sentiment que l'expérience est différente selon la densité
géographique du secteur où l'on se trouve.
M. Alain Vasselle.
C'est certain.
M. Alain Lambert.
A l'évidence, l'exercice des compétences communautaires est infiniment plus
intégré dans la vie de tous les jours sur un secteur caractérisé par une
certaine densité de population que sur un secteur où la population est plus
dispersée.
Toutefois, je voudrais insister, mes chers collègues, sur le principe suivant
: comme la commission des lois nous le recommande, dès lors que la commune
demeure la circonscription électorale - élément certes déterminant - et dès
lors que le conseiller communautaire se trouve, par l'organisation du scrutin,
conseiller municipal, l'élection au suffrage universel ne crée pas de danger.
Là où l'impôt communautaire est plus élevé que la somme des impôts communaux -
et nous y parvenons de plus en plus -, elle permet au contraire, et c'est le
rapporteur de la réforme de la loi organique qui le dit, de donner aux
prélèvements une légitimité.
Il faut donc véritablement que la Haute Assemblée de la République française
apporte à ce débat toute la plénitude qui doit être la sienne en raison de
l'importance que revêt ce sujet, ainsi qu'une très grande sérénité. Il nous
faut, enfin, poser les jalons qui nous permettront, effectivement, de parvenir
à une coopération extrêmement efficace.
Puisque nous avons récemment vécu un renouvellement municipal, je souhaiterais
en conclusion évoquer un dernier fait. Je suis, pour ma part, frappé de
constater que le corps électoral n'est pas consulté sur les principaux sujets,
sur les aménagements qui touchent, par exemple, à l'urbanisme, à
l'assainissement, à l'échelon communal. Les électeurs ont parfois eu à statuer
sur des petits projets locaux, alors que les grands projets communautaires
n'ont fait l'objet d'aucune consultation. Il y a là un vrai problème de
démocratie.
C'est pourquoi nous devons me semble-t-il, avancer avec confiance, avec
sagesse, dans le sens que propose la commission des lois. Le Sénat doit
vraiment apporter sa contribution à ce projet de loi.
M. Pierre Mauroy.
Très bien !
M. le président.
Je suis saisi de neuf amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 205 rectifié est présenté par MM. Biwer et Arnaud.
L'amendement n° 279 rectifié
bis
est présenté par MM. Lardeux, Le Grand,
César, Doligé, Eckenspieller, Gaillard, Ginésy, Leclerc, Legendre, Leroy et de
Richemont, Mme Rozier, MM. Sido, Trillard, Vasselle, Braye, François, Gélard,
Guené, Joyandet, Larcher et les membres du groupe du Rassemblement pour la
République et apparentés.
L'amendement n° 411 rectifié
bis
est présenté par MM. Adnot et
Darniche.
Ces amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer l'article 7
ter.
»
L'amendement n° 16 rectifié, présenté par M. Hoeffel, au nom de la commission
des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 7
ter :
« Les établissements publics de coopération intercommunale sont l'émanation
des communes. Leur avenir est fondé sur le respect de la commune et le maintien
d'une relation de confiance entre les communes et ces établissements. A ce
titre, les membres de l'organe délibérant des établissements publics de
coopération intercommunale sont conseillers municipaux ou conseillers
d'arrondissement de la commune qu'ils représentent. Ils sont choisis dans le
cadre de la commune. »
L'amendement n° 369 rectifié, présenté par MM. Oudin, de Broissia, Caldaguès,
Gélard et Haenel, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi l'article 7
ter :
« I. - L'article L. 5211-6 du code général des collectivités territoriales est
ainsi rédigé :
«
Art. L. 5211-6
- Les établissements publics de coopération
intercommunale dotés d'une fiscalité propre sont administrés par des conseils
élus au suffrage universel direct.
« Les autres établissements publics de coopération intercommunale sont
administrés par un organe délibérant composé de délégués élus par les conseils
municipaux de communes membres. »
« II. - Le I de l'article L. 5211-7 du même code est ainsi rédigé :
« I. - Les membres des conseils des communautés de communes, des communautés
d'agglomération et des communautés urbaines sont élus dans les conditions
prévues aux articles L. 273-1 et suivants du code électoral.
« Les membres des organes délibérants des autres établissements publics de
coopération intercommunale sont élus par les conseils municipaux, au scrutin
secret, à la majorité absolue. Si, après deux jours de scrutin, aucun candidat
n'a obtenu la majorité absolue, il est procédé à un troisième tour et
l'élection a lieu à la majorité relative. En cas d'égalité des suffrages, le
plus âgé est déclaré élu.
« Nonobstant les dispositions du premier alinéa du I du présent article, lors
de la création d'une communauté de communes, d'une communauté d'agglomération
ou d'une communauté urbaine ou de leur élargissement à de nouvelles communes,
les membres du conseil de communauté sont désignés par les conseils municipaux
des communes intéressées parmi leurs membres, au scrutin secret, à la majorité
absolue. Si, après deux tours de scrutin, aucun candidat n'a obtenu la majorité
absolue, il est procédé à un troisième tour et l'élection a lieu à la majorité
relative. En cas d'égalité des suffrages, le plus âgé est déclaré élu.
« Le mandat de ces conseillers intercommunaux est alors lié à celui du conseil
municipal qui les a désignés et, en tout état de cause, expire lors de
l'installation du conseil de communauté suivant le renouvellement général des
conseils de communauté. »
« III. - L'intitulé du livre premier du code électoral est ainsi rédigé :
« Livre Ier
« Elections des députés,
des conseillers généraux, des conseillers municipaux
et des conseillers intercommunaux »
« IV. - Le livre premier du code électoral est complété par un titre cinquième ainsi rédigé :
« Titre V
« Dispositions spéciales à l'élection
des conseillers intercommunaux
«
Art. L. 273-1.
- Les élections aux conseils des communautés de
communes, des communautés d'agglomération et des communautés urbaines et les
élections municipales sont concomitantes, mais donnent lieu à des votes
distincts.
«
Art. L. 273-2.
- Pour l'élection des conseillers intercommunaux, la
commune membre forme une circonscription électorale unique.
« Les conseillers intercommunaux sont élus pour six ans.
«
Art. L. 273-3.
- Dans les communes de moins de 3 500 habitants, quel
que soit le nombre de sièges dont elles disposent au conseil de la communauté
dont elles sont membres, et dans les communes de 3 500 habitants et plus
lorsqu'elles disposent de quatre sièges ou moins, l'élection a lieu au scrutin
majoritaire à deux tours.
« Nul n'est déclaré élu au premier tour de scrutin s'il n'a réuni :
« 1° La majorité absolue des suffrages exprimés ;
« 2° Un nombre de voix égal au quart des électeurs inscrits.
« Au second tour de scrutin, la majorité relative suffit. En cas d'égalité des
suffrages, le plus âgé des candidats est élu.
«
Art. L. 273-4.
- Dans les communes de 3 500 habitants ou plus qui
disposent de cinq sièges ou plus au conseil de la communauté dont elles sont
membres, l'élection a lieu à la représentation proportionnelle suivant la règle
de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Sur chaque
liste, les sièges sont attribués aux candidats dans l'ordre de présentation.
«
Art. L. 273-5.
- Quel que soit le mode de scrutin, la déclaration de
candidature en préfecture est obligatoire.
«
Art. L. 273-6.
- Nul ne peut être candidat à l'élection
intercommunale dans une commune s'il n'est aussi candidat à l'élection du
conseil municipal de cette commune.
«
Art. L. 273-7.
- Nul ne peut être candidat à l'élection
intercommunale dans une commune s'il ne satisfait pas aux conditions
d'éligibilité applicables aux candidats à l'élection municipale.
«
Art. L. 273-8.
- Les fonctions de conseiller intercommunal sont
soumises aux mêmes incompatibilités que celles de conseiller municipal.
«
Art. L. 273-9.
- Tout conseiller intercommunal élu maire peut
renoncer à son mandat de conseiller intercommunal et demander au conseil
municipal d'élire son remplaçant parmi les autres membres dudit conseil.
«
Art. L. 273-10.
- A défaut d'avoir élu ses délégués intercommunaux,
la commune est représentée au sein de l'organe délibérant de l'établissement
public de coopération intercommunale par le maire si elle ne compte qu'un
délégué, par le maire et le premier adjoint dans le cas contraire. »
« V. - L'article L. 5215-10 du code général des collectivités territoriales
est abrogé.
« VI. - La première phrase du premier alinéa de l'article L. 5211-8 du même
code est ainsi rédigée :
« Sans préjudice des dispositions des articles L. 2121-33 et L. 2122-10, et
sauf pour les conseillers intercommunaux élus au suffrage universel direct, le
mandat des délégués est lié à celui du conseil municipal qui les a désignés.
»
L'amendement n° 358, présenté par M. Ostermann, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 7
ter :
« Le président des organes délibérants des établissements publics de
coopération intercommunale à fiscalité propre est élu au suffrage universel
direct le même jour que les conseils municipaux. Le scrutin aura lieu sur une
circonscription électorale unique constituée de l'ensemble des communes
membres. »
L'amendement n° 543, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi l'article 7
ter :
« Les présidents des organes délibérants des établissements publics de
coopération intercommunale à fiscalité propre seront élus au suffrage universel
direct le même jour que les conseils municipaux dans les conditions définies
par une loi ultérieure.
« Les autres membres de ces organes délibérants seront désignés conformément
aux dispositions des articles L. 5211-6, L. 5211-7 et L. 5211-8 du code général
des collectivités territoriales. »
L'amendement n° 366, présenté par MM. Peyronnet et Bel, Mme Blandin, MM.
Debarge, Domeizel et Dreyfus-Schmidt, Mme Durrieu, M. Frécon, Mme Herviaux, MM.
Lagauche, Le Pensec, Marc, Masseret, Mauroy, Picheral, Raoul, Sueur, Teston et
les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase de l'article 7
ter,
après les mots :
"suffrage universel", insérer les mots : "dans le cadre de la circonscription
communale,". »
L'amendement n° 418, présenté par M. Arthuis et les membres du groupe de
l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Compléter,
in fine,
l'article 7
ter
par les mots : ", assurer
la représentation de chaque commune, ne permettre qu'aux seuls conseillers
municipaux d'être élus délégués communautaires et préciser que les élections
municipales et communautaires auront lieu le même jour". »
La parole est à M. Biwer, pour défendre l'amendement n° 205 rectifié.
M. Claude Biwer.
Je le retire et me rallie à l'amendement n° 16 rectifié de la commission.
M. le président.
L'amendement n° 205 rectifié est retiré.
La parole est à M. Lardeux, pour présenter l'amendement n° 279 rectifié
bis
.
M. André Lardeux.
Comme l'amendement n° 16 rectifié de la commission des lois réaffirme
l'intercommunalité, je retire mon amendement, mais il ne faudrait tout de même
pas que l'on nous fasse dire ce que nous ne disons pas. Nous ne sommes pas
opposés à l'intercommunalité, bien au contraire ! Simplement, nous demandons
que certaines précautions soit prises dans l'évolution des institutions. Ce
n'est pas la même chose.
M. Alain Vasselle.
Tout à fait !
M. le président.
L'amendement n° 279 rectifié
bis
est retiré.
L'amendement n° 411 n'est pas soutenu.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 16
rectifié.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je ne veux pas abuser de mon temps de parole. Sur ce sujet,
la commission des lois a déjà exposé sa position tant lors de la discussion
générale que dans son rapport écrit. Il en a été amplement débattu lors de la
discussion sur l'article 7
ter
dans laquelle seize orateurs sont
intervenus. Tout a été dit et j'ai le sentiment que, lorsque nous aurons passé
le cap de l'article 7
ter,
l'essentiel du débat sur ce texte sera
derrière nous.
(Sourires dubitatifs sur plusieurs travées de l'Union
centriste et du RPR.)
M. Henri de Raincourt.
Il restera quand même les SDIS...
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
C'est du moins mon sentiment !
J'ai écouté avec beaucoup d'attention tous les intervenants, quelle que soit
leur sensibilité, quelle que soit leur opinion, car chacun a apporté sa
contribution à un débat de fond qui ne s'achèvera pas aujourd'hui et sur lequel
nous reviendrons, je l'espère, avec plus de recul et de sérénité.
Je formulerai maintenant quelques observations.
Premièrement, si le Sénat a débattu de cet article 7
ter
comme il l'a
fait, je ne crois pas que ce soit sous l'empire de la crainte du suffrage
universel direct.
M. Gérard Longuet.
Non !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
L'immense majorité des sénateurs a subi, à un moment ou à un
autre, le baptême du feu du suffrage universel direct dans une ou plusieurs
collectivités territoriales et s'ils ne l'avaient pas subi ils ne seraient
d'ailleurs généralement pas dans cet hémicycle.
M. Jacques Peyrat.
Très bien !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Deuxièmement, tous les intervenants, sans exception, ont
clairement manifesté leur volonté de voir la coopération intercommunale
continuer à se développer : je dis bien « intercommunale » et non pas «
supracommunale ».
M. Bruno Sido.
Bravo !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Et si, depuis deux ans, cette intercommunalité a connu un
élan tel qu'aujourd'hui deux tiers de la population française et deux tiers des
communes françaises sont regroupés dans des établissements publics de
coopération intercommunale, c'est, d'abord, parce qu'elle était portée par la
base communale et, ensuite, parce qu'elle s'est réalisée dans un climat de
confiance réciproque entre l'échelon communal et l'échelon intercommunal.
Il est indispensable de préserver ces deux éléments si nous voulons que, pour
les années à venir et le plus rapidement possible, l'intercommunalité concerne
l'ensemble de notre pays.
Troisièmement, je veux souligner, beaucoup d'entre vous l'ont d'ailleurs fait
en termes généralement éloquents, que ce débat n'épuise pas le sujet.
Beaucoup ont précisé que nous ne ferions pas l'économie, dans les mois et les
années à venir, du débat de fond sur l'avenir des structures territoriales
françaises.
M. Jacques Peyrat.
Très bien !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Beaucoup d'entre vous, et chacun dans son secteur le ressent,
ont insisté sur la complexité croissante : nous assistons à un empilement des
structures territoriales françaises,...
M. Jacques Peyrat.
C'est vrai !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
... qu'il s'agisse de collectivités territoriales de plein
exercice ou d'autres, tel le « pays », dont on a amplement débattu ici en 1995
et en 1999 et que l'on ne sait toujours pas situer parmi les structures
territoriales françaises.
Il faudra bien un jour procéder à une clarification si nous voulons que notre
organisation territoriale soit lisible pour les citoyens de base, qui,
aujourd'hui, - et peut-on le leur reprocher ? - n'y voient pas toujours très
clair !
M. Alain Vasselle.
Bien sûr !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je souhaite - pourquoi ne pas rêver ? - que l'année 2002 soit
particulièrement propice à l'amorce, voire à la concrétisation, d'un débat de
fond sur l'avenir et l'efficacité de nos structures territoriales.
M. Alain Vasselle.
Ça c'est moins sûr, surtout avec les présidentelles et les législatives !
M. Jacques Peyrat.
On peut rêver, en effet !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je terminerai en disant qu'à travers l'amendement n° 16
rectifié la commission des lois, non pas à la légère mais après plusieurs
débats de fond, vous propose une disposition que j'ai peut-être la faiblesse de
considérer comme celle du juste milieu et de la raison.
En effet, nous n'avons pas le droit de nous taire sur un sujet comme celui-là.
Nous avons au contraire le devoir de rappeler un certain nombre de principes
qui constituent pour nous le fondement de l'intercommunalité selon la
conception qui a généralement été exprimée dans cet hémicycle.
Voilà pourquoi je lance un appel aux auteurs des amendements de suppression de
l'article 7
ter,
et à ceux dont les amendements vont déjà dans le sens
d'une loi électorale - ce n'est pas notre mission, le Gouvernement ne l'a
d'ailleurs pas voulu et la rédaction de l'Assemblée nationale ne le prévoit
même pas. Par conséquent, gardons-nous de mettre aujourd'hui le doigt dans cet
engrenage ! Je souhaite, tout en comprenant qu'ils puissent en éprouver un
légitime sentiment de frustration, que les auteurs des différents amendements
veuillent bien renoncer à l'affirmation de leurs principes et de leurs
convictions et se rallier à l'amendement n° 16 rectifié.
A la suite de l'intervention de M. Lardeux, je voudrais d'ailleurs, afin de
dissiper toute équivoque, le rectifier une nouvelle fois en ajoutant, après les
mots : « coopération intercommunale », les mots : « à fiscalité propre ».
Je vous remercie par avance, mes chers collègues, de la compréhension que, je
l'espère, vous manifesterez. Nous pourrons alors mettre l'article 7
ter
« sous toit », et ce dans un esprit constructif.
(Applaudissements sur les
travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du
RPR.)
M. Alain Vasselle.
Excellent !
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 16 rectifié
bis
, présenté par M.
Hoeffel, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 7
ter :
« Les établissements publics de coopération intercommunale sont l'émanation
des communes. Leur avenir est fondé sur le respect de la commune et le maintien
d'une relation de confiance entre les communes et ces établissements. A ce
titre, les membres de l'organe délibérant des établissements publics de
coopération intercommunale à fiscalité propre sont conseillers municipaux ou
conseillers d'arrondissement de la commune qu'ils représentent. Ils sont
choisis dans le cadre de la commune. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements affectant
l'article 7
ter ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Mon intervention portera principalement, bien
entendu, sur l'amendement n° 16 rectifié
bis
de la commission des
lois.
La loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de
la coopération intercommunale a relancé un fort mouvement de création de
communautés. Ainsi, les groupements de communes à fiscalité propre sont
maintenant plus de 2000, représentant 40 millions d'habitants. Les décisions
que prennent les instances des groupements à fiscalité propre ont désormais une
forte incidence sur la vie des populations concernées. Les principes de notre
démocratie locale et le fait même qu'elles lèvent l'impôt amènent donc à poser
la question, nombre d'entre vous l'ont souligné mesdames, messieurs les
sénateurs, de leur désignation au suffrage universel direct.
Le Gouvernement encourage l'intercommunalité, qui permet aux communes de
trouver une plus grande efficacité grâce à la mutualisation des compétences
autour d'un projet, mais il n'a aucune intention, je tiens à le réaffirmer, de
« diluer » les communes dans les structures intercommunales en instaurant une
sorte de « supracommunalité ». Telle n'est pas l'approche du Gouvernement, je
l'ai dit et répété aussi bien ici qu'à l'Assemblée nationale ou que devant les
congrès des diverses associations d'élus.
Le mode de scrutin qui sera choisi devra donc traduire le principe selon
lequel l'intercommunalité procède des communes, et non l'inverse. Les modalités
du scrutin devront respecter ce principe de base de notre démocratie et de
l'organisation de la France. J'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer sur ce point
et de rappeler ma préférence, à ce jour, pour une élection au sein d'une
circonscription communale, le même jour que l'élection des conseillers
municipaux.
L'amendement adopté par l'Assemblée nationale, devenu l'article 7
ter
du projet de loi qui vous est soumis, va dans le même sens. Mais, comme l'ont
remarqué son auteur, M. Bernard Roman, ainsi que les orateurs des différents
groupes qui se sont exprimés, la mise en oeuvre de ce principe, compte tenu de
la diversité des modes de scrutin existants, qui sont fonction de la taille des
communes, ne va pas de soi, comme on a pu le voir...
Je souhaite simplement rappeler qu'il ne s'agit pas de régler aujourd'hui une
question certes importante, mais qui n'est pas encore mûre. Le Gouvernement
souhaite apporter auparavant des réponses concrètes s'agissant de nombreux
autres aspects de la démocratie locale.
M. Vasselle a dit tout à l'heure qu'il ne souhaitait pas, au travers de
l'article 7
ter,
donner un blanc-seing ou un chèque en blanc - je ne
sais plus quelle est l'expression exacte qu'il a employée - pour une loi
électorale. Je lui ferai remarquer qu'il me paraît tout de même difficile de
parler de chèque en blanc à propos d'une loi qui serait par définition élaborée
par le législateur, c'est-à-dire le Sénat et l'Assemblée nationale, et de
prétendre qu'une telle démarche ouvrirait la voie à la mise en place d'un
dispositif qui n'aurait pas de légitimité !
La modification de l'exercice du suffrage universel est un sujet suffisamment
important pour que l'on engage un débat spécifique, en toute clarté, qui devra
être compris par l'ensemble des citoyens. Il me paraît donc du devoir tant du
Gouvernement que du Parlement de mener ce débat à l'occasion de l'examen d'un
projet de loi bien identifié, en évitant de séparer l'énoncé des principes des
modalités de leur mise en oeuvre.
Cela étant, en notant que l'Assemblée nationale a elle-même commencé
d'introduire des principes de mise en oeuvre, je m'en remettrai à la sagesse du
Sénat sur l'amendement n° 16 rectifié
bis
.
(Applaudissements sur les
travées de l'Union centriste, ainsi que sur celles du RPR et des Républicains
et Indépendants.)
M. Alain Vasselle.
Voilà !
M. le président.
Monsieur Caldaguès, l'amendement n° 369 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Caldaguès.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 369 rectifié est retiré.
Monsieur Ostermann, l'amendement n° 358 est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann.
Non, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 358 est retiré.
Monsieur Masson, maintenez-vous l'amendement n° 543 ?
M. Jean-Louis Masson.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 543 est retiré.
Monsieur Peyronnet, l'amendement n° 366 est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Peyronnet.
Non, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 366 est retiré.
Monsieur Arthuis, l'amendement n° 418 est-il maintenu ?
M. Jean Arthuis.
Je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 418 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16 rectifié
bis
.
M. Jean-Louis Masson.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Masson.
M. Jean-Louis Masson.
Il existe des communes qui désignent plus de délégués intercommunaux qu'elles
ne comptent de conseillers municipaux. Or, l'amendement prévoit que les membres
de l'organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale
devront obligatoirement être conseillers municipaux.
Ne voulant pas, pour des motifs d'ordre local, m'associer à l'émergence
éventuelle d'un problème qui pourrait concerner le statut de certaines
structures intercommunales, je m'abstiendrai lors du vote de l'amendement n° 16
rectifié
bis.
M. Dominique Braye.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Je voulais prendre la parole, en faisant très attention à ne pas raviver une
polémique, pour indiquer qu'il m'a été difficilement supportable d'entendre
traiter un certain nombre d'entre nous de « dernier carré des ringards ».
En ce qui me concerne, je suis président d'une communauté d'agglomération, et
ma vie politique se déroule depuis l'origine au sein de l'intercommunalité : je
sais donc comment évolue la société.
S'agissant de l'intercommunalité, à l'époque où, dans le Nord, une grande
ville annexait de force une commune voisine pour des raisons que nous
connaissons bien, et cela contre la volonté de la commune annexée, mon conseil
municipal délibérait et décidait de transférer la totalité du produit de la
taxe professionnelle pour une zone d'activité que nous étions en train de créer
à deux communes proches qui connaissaient des difficultés, à savoir
Mantes-la-Jolie et Mantes-la-Ville. En matière de solidarité, nous n'avons donc
pas de leçons à recevoir !
M. Claude Estier.
N'en donnez pas non plus !
M. Dominique Braye.
A propos de la décentralisation, puisque M. Mauroy en a beaucoup parlé,
peut-on se satisfaire de paroles ? Dans les faits, le Gouvernement nous a
supprimé la part régionale de la taxe d'habitation, la part salariale de la
taxe professionnelle, les droits de mutation et la vignette automobile ; plus
de 94 milliards de francs de recettes votées par les collectivités locales sont
devenues des dotations d'Etat. Est-ce là votre conception de la
décentralisation, chers collègues de l'opposition sénatoriale ? En tout cas, je
tiens à vous dire solennellement que ce n'est pas la nôtre.
Maintenant, s'agissant de la question de la disparition de petites communes,
je démontrerai que nous avons raison d'être prudents en citant un passage d'un
discours prononcé en 1999 à la tribune du Sénat par le président de la
communauté urbaine de Lille.
« La première spécificité de cette exception française, affirmait-il d'abord,
est l'émiettement communal. Lorsque l'Europe comptait douze pays membres, nous
avions, à nous seuls, plus de communes que les onze autres pays réunis. »
Il ajoutait : « Alors que bien des pays voisins du nôtre ont réussi à
fusionner leurs communes, un tel mouvement ne s'est pas imposé en France, loin
de là. »
Enfin, il concluait son intervention par ces mots : « Nous sommes trop en
retard par rapport aux autres Etats ; nous sommes trop en retard par rapport à
la nécessité dans laquelle se trouve la France de se moderniser, d'aller plus
haut, d'aller plus loin. A nous de faire en sorte que, enfin, elle se donne une
réforme administrative de son territoire à la hauteur de ses ambitions et des
aspirations de sa population ! »
Mes chers collègues, devons-nous nous en tenir aux discours ou nous déterminer
en fonction des actes qu'accomplissent chaque jour ceux qui les prononcent ?
Pour ma part, je propose d'accorder davantage de crédit aux actions qu'aux
paroles.
(Applaudissements sur les travées du RPR, ainsi que sur certaines
travées des Républicains et Indépendants.)
M. Jean-Pierre Raffarin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin.
Je voterai dans le sens souhaité par M. le rapporteur, conformément à l'avis
de la très grande majorité des maires du département de la Vienne, que je
représente ici.
Cela étant, j'ai apprécié que M. le ministre s'en remette à la sagesse du
Sénat. J'en conclus que M. Peyronnet s'est montré plus convaincant que M.
Mauroy !
M. Pierre Mauroy.
L'affaire n'est pas close !
(Sourires.)
M. Jean-Pierre Raffarin.
Non, elle ne l'est pas. Mais chaque étape peut comporter ses moments de
bonheur ! Eh bien, c'en était un !
(Nouveaux sourires.)
S'agissant des évolutions affectant les communes, je comprends, à l'instar de
M. Lambert, que l'on s'interroge sur le sens de l'histoire pour les grandes
villes et que l'on puisse souhaiter une meilleure représentativité. Ces
questions peuvent être posées, car elles sont légitimes et doivent être
résolues, mais il faut être sincère : en milieu rural, l'élection de «
supermaires » aboutirait à la disparition des autres maires.
M. Alain Vasselle.
Tout à fait !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Soyons donc clairs dans nos propos. Il s'agit là, je crois, d'un élément très
important du débat : certaines questions doivent être posées s'agissant du
milieu urbain, mais il va de soi que, en milieu rural, on ne peut pas souhaiter
une évolution vers l'élection de « supermaires » sans remettre en cause les
autres maires, et donc la vie communale telle que nous la connaissons
aujourd'hui.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je voudrais faire une réponse rapide à M. Masson :
précisément pour éviter l'écueil qu'il a signalé, l'amendement n° 16 rectifié
bis
prévoit que l'organe délibérant de l'établissement public de
coopération intercommunale devra être constitué de conseillers municipaux,
certes, mais aussi de conseillers d'arrondissement.
M. Jean-Louis Masson.
Cela ne règle pas le problème ! Pas pour Metz et Nancy !
M. René Garrec,
président de la commission des lois.
Cela règle tout !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 16 rectifié
bis
, pour lequel le
Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Le groupe socialiste s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 7
ter
est ainsi rédigé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la
présidence de M. Serge Vinçon.)