SEANCE DU 22 JANVIER 2002
M. le président.
La parole est à M. Delfau, auteur de la question n° 1240, adressée à M. le
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le ministre, je veux attirer votre attention sur l'atteinte grave à
l'environnement et à la santé publique que représente la décharge du Thot. Il
s'agit de cette décharge publique à ciel ouvert, située sur la route de
Villeneuve-lès-Maguelone à Palavas-les-Flots, où Montpellier continue à
déverser en toute illégalité ses ordures ménagères.
Pendant combien de temps sera tolérée cette montagne d'immondices, d'une
quarantaine de mètres de haut, dont les effluents ne peuvent manquer de polluer
la nappe phréatique et d'être vecteurs de maladies à des kilomètres à la ronde
?
Dans le même temps, monsieur le ministre, des communes de moindre importance
n'ayant pu, pour des raisons parfois indépendantes de leur volonté, réaliser
leur projet de déchetterie, ont été traduites devant la justice, à la fin de
2001, avec instruction des services de l'Etat. Y aurait-il deux poids deux
mesures dans la région Languedoc-Roussillon ? Sans doute pas, mais j'attends
avec intérêt vos explications.
Par ailleurs, comment le représentant de l'Etat a-t-il pu prendre un arrêté de
périmètre pour la nouvelle communauté d'agglomération de Montpellier, qui a
pour effet de casser le syndicat mixte « Pic et étangs » dont les ordures
ménagères étaient jusqu'ici traitées par l'incinérateur de Lunel-Vieil ? Est-il
raisonnable que les trente-huit communes le composant soient
de facto
obligées de renoncer aux services de l'incinérateur de Lunel-Vieil, qui vient
d'être construit, pour venir apporter leurs déchets à décharge du Thot ?
Pour que les choses soient claires, je rappelle que, contrairement à ce qui a
été écrit localement, le président du syndicat mixte qui gère cet incinérateur
n'a toujours pas donné son accord à cette mesure qui pose des problèmes sérieux
quant à l'application de la législation en vigueur sur les communautés
d'agglomération.
Je souhaite donc connaître les dispositions que vous comptez prendre, monsieur
le ministre, pour faire respecter la législation sur les ordures ménagères et
rendre au littoral languedocien un paysage en harmonie avec son ciel !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Yves Cochet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Monsieur
le sénateur, la décharge du Thot est une question brûlante ! La poursuite de
son exploitation, qui est assurée par le district de l'agglomération de
Montpellier transformé en communauté d'agglomération depuis le 1er août 2001,
est en effet dénoncée.
La décharge du Thot, située sur la commune de Lattes, entre Palavas-les-Flots
et Montpellier, est exploitée depuis 1965. Un arrêté préfectoral du 18 juillet
1967 a autorisé cette exploitation. A l'origine, cette décharge a été créée
pour faire face aux besoins de la ville de Montpellier et de quelques autres
communes voisines. Progressivement, y ont été admis des déchets de la
quasi-totalité des communes du secteur.
Exploitée en tumulus, la décharge atteint aujourd'hui plus de vingt mètres de
haut, voire davantage selon les chiffres que vous citez. Peut-être peut-on en
effet l'évaluer à trente mètres de hauteur ; tout dépend, bien sûr, du mode de
calcul.
M. Gérard Delfau.
Cela dépend des jours et du soleil !
M. Yves Cochet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Cela
dépend des jours !...
(Sourires.)
Compte tenu de l'importance de cette installation et des craintes sur ses
éventuels impacts, le ministre de l'environnement avait diligenté, en août
1996, une mission d'inspection générale sur les conditions d'exploitation de la
décharge. Le rapport, remis au début de 1997, a conclu que son impact sur
l'environnement était faible mais qu'il convenait de renforcer la
surveillance.
En application de l'arrêté ministériel du 9 septembre 1997, qui a fourni un
cadre fiable et modernisé pour le stockage des déchets ménagers et assimilés,
l'exploitant de la décharge a dû réaliser une étude de mise en conformité aux
nouvelles dispositions réglementaires en vigueur. Cette étude, remise par le
district de Montpellier en décembre 1999, a fait l'objet d'une analyse critique
en avril 2000, puis a été soumise à l'avis de la commission locale
d'information et de surveillance, la CLIS, créée sur ce site.
Sur la base de ces études, et conformément aux dispositions de l'arrêté
ministériel du 9 septembre 1997, le préfet, par arrêté complémentaire du 29
juin 2001 a fixé les conditions de la poursuite de l'exploitation. Cet arrêté
limite l'exploitation au 30 juin 2002 et prévoit différentes dispositions pour
améliorer la situation de la décharge, tant pour le captage et le traitement du
biogaz que pour la gestion des lixiviats et la surveillance de l'impact sur
l'environnement.
J'ai encore récemment rappelé au préfet de l'Hérault, chargé du contrôle de
ce site, la nécessité de veiller au strict respect des prescriptions
réglementaires imposées.
L'extension du périmètre de la communauté d'agglomération de Montpellier à la
fin de l'année 2001 a effectivement entraîné, en application des dispositions
du code général des collectivités territoriales, le retrait des communes
membres du syndicat mixte « Pic et étangs » au profit de la communauté
d'agglomération. Cette dernière est désormais pleinement compétente pour
assurer le traitement des déchets sur l'ensemble de son territoire. Elle peut
choisir d'exercer cette compétence, soit seule, soit conjointement avec
d'autres communes et groupements de communes au sein d'un syndicat mixte.
La date d'expiration de l'autorisation de la décharge, fixée au 30 juin 2002
par l'arrêté préfectoral, rend désormais extrêmement urgente la recherche de
solutions alternatives pour assurer la continuité du service de traitement des
déchets ménagers du secteur. La révision du plan départemental d'élimination
des déchets, en cours de finalisation, doit permettre de définir les filières
de remplacement ou les moyens d'optimisation nécessaires qui devront être mis
en oeuvre. Les collectivités gestionnaires, en charge de l'élimination des
déchets ménagers, sont les premières responsables pour la recherche et la mise
en place de telles solutions.
Je vous remercie, monsieur le sénateur, de m'avoir fourni une nouvelle fois
l'occasion de rappeler à ces collectivités, notamment à celle de Montpellier,
leurs responsabilités et leurs obligations en la matière. Je rappelle qu'il ne
reste plus que cinq mois pour agir.
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le ministre, tout d'abord je tiens à vous remercier très sincèrement
d'être venu vous-même au Sénat répondre à ma question. Comme vous l'avez dit à
plusieurs reprises, c'est un sujet délicat auquel il convient d'apporter une
solution dans un bref délai, car il y a urgence.
Je veux attirer votre attention sur deux points.
En premier lieu, le 18 décembre dernier, le tribunal correctionnel de
Montpellier a examiné les plaintes déposées contre une quinzaine de petites et
moyennes communes du département de l'Hérault, au motif que la décharge
publique ne serait pas fermée au 1er janvier 2002. Parmi elles, se trouve celle
dont je suis maire, Saint-André-de-Sargonis, qui compte 4 000 habitants.
Dès 1998, à la demande du syndicat intercommunal, la municipalité a acheté un
site pour édifier une déchetterie collective et j'ai fait venir les services de
la direction départementale de l'équipement, la DDE, qui n'ont émis aucune
objection. J'ai alors constitué un dossier de demande de permis de construire
et obtenu le financement de l'équipement. Or soudain, en 1999, la direction
départementale de l'équipement m'écrit pour me dire qu'en raison du
contournement autoroutier de l'A 750, l'accès au site n'était désormais plus
possible et que la commune devait renoncer provisoirement à ce projet.
Nous sommes dans l'attente du délibéré du tribunal. Je m'étonne que les
services déconcentrés du ministère de l'aménagement du territoire et de
l'environnement et ceux de la DDE n'aient pas eux-mêmes fait état de cette
situation et endossé la responsabilité de l'Etat dans cette affaire. Ils m'ont
laissé défendre seul le dossier devant la magistrate qui a épinglé au passage «
ces parlementaires qui attendent sans doute je ne sais quelles échéances » !
Y-a-t-il deux poids deux mesures ? Probablement pas, mais il existe peut-être
un défaut de vigilance et d'équité suivant la qualité de la collectivité locale
mise en cause.
En second lieu, vous renvoyez aux collectivités territoriales et aux syndicats
qui peuvent les représenter le soin de gérer la situation des trente-huit
communes refusant d'être intégrées de force dans l'agglomération de Montpellier
et qui jusque-là transportaient leurs déchets dans l'incinérateur de
Lunel-Vieil.
En l'occurrence, ma question s'adresse plutôt au ministre de l'intérieur.
En effet, selon moi, la loi relative au renforcement et à la simplification de
la coopération intercommunale dite loi « Chevènement » ne permet pas qu'une
même compétence, le traitement des déchets, soit exercée selon des modalités
différentes au sein d'une même communauté d'agglomération.
A tout le moins, il aurait fallu que le président du syndicat intercommunal
qui gère l'incinérateur ait eu la possibilité de négocier préalablement les
conditions de compatibilité avec le président de la communauté d'agglomération.
A ce jour, tel n'est toujours pas le cas malgré un courrier du premier adressé
au second.
Monsieur le ministre, telles sont les précisions que je tenais à vous
apporter.
AGGRAVATION DE LA VIOLENCE ET DE L'INSÉCURITÉ