SEANCE DU 3 OCTOBRE 2002
M. le président.
La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck.
M. Jean-Pierre Schosteck.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Permettez-moi, en premier lieu, monsieur le ministre, de vous féliciter pour
le règlement rapide que vous venez d'apporter au problème de Sangatte, alors
que vos prédécesseurs nous assuraient que tout accord semblait impossible.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
La situation est effectivement devenue doublement intolérable : intolérable
pour les riverains de ce centre de la Croix-Rouge, qui ont à subir
quotidiennement l'insécurité engendrée par la concentration de réfugiés
clandestins - comme en ont témoigné les mouvements de violence des 13 et 24
septembre derniers - , intolérable pour les réfugiés eux-mêmes, qui vivent dans
des conditions sanitaires déplorables malgré les efforts incessants des
personnels de la Croix-Rouge dont il faut naturellement saluer ici le
dévouement puisque le hangar d'accueil conçu initialement pour héberger 800
personnes accueille près de 2 000 candidats au passage en Grande-Bretagne.
Mais, au-delà du problème spécifique de Sangatte et de sa fermeture, que vous
avez annoncée pour avril 2003, l'immigration clandestine demeure évidemment une
préoccupation majeure pour nos concitoyens qui attendent des solutions
rapides.
Nous savons que cette question est vaste et hétérogène et qu'aucune réponse
globale ne permettra d'en venir à bout.
Nous savons que les réponses simplistes dictées, ici, par l'idéologie de
l'immigration zéro, là, par celle du laxisme total, ne peuvent que compliquer
la situation.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaiterais connaître les grands
axes des réformes que vous entendez mener dans les mois à venir pour traiter ce
problème à tous les maillons de la chaîne, qu'il s'agisse, en amont, de la
coopération avec les Etats traditionnels d'immigration et de la réforme du
droit d'asile, ou surtout, en aval, de l'attitude qu'entend prendre le
Gouvernement à l'égard des candidats à l'asile dont les dossiers ont été
rejetés mais qui refusent de quitter le territoire et se trouvent, dès lors, en
situation irrégulière.
(Applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Nicolas Sarkozy,
ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés
locales.
Tout d'abord, monsieur le sénateur, vous avez parlé fort bien, et
avec calme, d'un sujet qui n'est pas suffisamment abordé en France, et qui est
un grand problème.
La France n'a rien à craindre d'un débat sur l'immigration. En revanche, elle
a tout à redouter si elle le refuse, car c'est ainsi qu'on a laissé depuis
vingt ans la parole aux seuls tenants de positions outrancières.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
L'immigration « zéro » n'a aucun sens dans un pays comme le nôtre, qui s'est
construit sur la diversité.
(M. André Rouvière s'exclame.)
A l'inverse,
l'immigration subie sans aucun contrôle a eu comme seul résultat, et nous en
avons tous été les victimes, de susciter l'exaspération, l'intolérance, la
xénophobie, pour aboutir, chacun s'en souvient, à la présence d'un leader
d'extrême droite au deuxième tour des élections présidentielles. C'est une
responsabilité à laquelle nous sommes tous confrontés.
M. René-Pierre Signé.
Et Dreux ? et Gaudin ?
M. Nicolas Sarkozy,
ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés
locales.
Quelle est la politique du Gouvernement en la matière ?
D'abord, monsieur Schoesteck, il n'y aura pas de régularisation globale...
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés
locales.
... parce que la régularisation globale n'a jamais résolu les
problèmes et a poussé à l'exaspération.
Le Premier ministre a demandé que son Gouvernement conduise une politique de
régularisation au cas par cas. Quels sont les prochains rendez-vous ?
En premier lieu, le ministre des affaires étrangères, dont je veux saluer le
dynamisme et le volontarisme sur le sujet, à la tête d'une administration qui
n'a pas toujours été habituée à aller aussi vite
(Applaudissements sur les
travées du RPR et des Républicains et Indépendants)...
M. René-Pierre Signé.
Ils se félicitent entre eux, maintenant !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés
locales.
... est d'accord pour que nous élaborions ensemble une réforme du
droit d'asile. En 2001, 80 000 demandes d'asile ont été déposées en France. Il
y a ceux qui restent les bras ballants et ceux qui, comme nous, proposent une
réforme pour s'en sortir
(Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées),
notamment avec une procédure que nous souhaitons alléger lorsque les
demandes proviennent de pays qui ont toujours été des démocraties et où,
spontanément, on doit pouvoir considérer que la menace n'est pas immense.
En deuxième lieu, quand une décision de reconduite à la frontière est prise,
elle doit être exécutée. Lorsqu'un tribunal s'est prononcé pour qu'un étranger
en situation irrégulière quitte le territoire, cela doit être fait !
Enfin, en troisième lieu, nous mettons en place ce qu'avec M. de Villepin nous
avons appelé des « filières positives », en passant des accords avec les pays «
source » pour qu'ils acceptent les immigrés qui n'ont pas leur place sur notre
territoire national ; je pense à la Roumanie, à l'Afghanistan et, demain, au
Mali.
Finanement, ce qui compte, c'est que nos compatriotes comprennent que nous
sommes en train de mettre en oeuvre une politique équilibrée. D'un côté, il
faut faire toute leur place à ceux qui, dans le monde, sont poursuivis et
persécutés, et donner toute leur chance - Mme Tokia Saïfi pourrait en témoigner
mieux que moi - à celles et ceux de nos compatriotes de la première génération
qui ne demandent qu'une chose, retrouver la liberté de vivre dans les quartiers
où la sécurité n'est pas respectée.
(Protestations sur les travées
socialistes.)
De l'autre côté, il y aura deux catégories d'étrangers : ceux
que nous accueillons bien volontiers, et ceux qui n'ont pas vocation à rester
chez nous et qui seront donc raccompagnés aux frontières.
(Bravo ! et vifs
applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de
l'Union centriste.)
M. Didier Boulaud.
Cela ne durera qu'un temps !
M. le président.
Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions d'actualité au
Gouvernement.
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