SEANCE DU 16 OCTOBRE 2002


M. le président. L'amendement n° 206, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Une installation de gaz naturel liquéfié décharge le gaz naturel liquéfié, réalise le stockage et la regazification du gaz naturel liquéfié.
« La construction et l'exploitation de telles installations sont soumises à autorisation délivrée par le ministre chargé de l'énergie.
« Cette autorisation est nominative et incessible.
« En cas de changement d'opérateur, l'autorisation ne peut être transférée que par décision du ministre chargé de l'énergie.
« Elle est délivrée ou refusée en fonction :
« - des capacités techniques et financières du demandeur ;
« - de la compatibilité du projet du demandeur avec les choix de la nation en matière de politique énergétique ;
« - de la compatibilité du projet du demandeur avec les obligations de service public, notamment aux articles 3 et 11 de la présente loi ;
« - du respect de la législation sociale.
« Les installations de gaz naturel liquéfié existantes à la date de publication de la présente loi sont réputées autorisées au titre du présent article.
« Elles alimentent le réseau de gaz naturel avec en priorité les objectifs de contribuer à la continuité d'alimentation des distributeurs en charge des clients non éligibles.
« Elles veillent à la qualité du gaz naturel injecté sur le réseau.
« Elles prennent toutes dispositions pour garantir leur sécurité, celle du système gazier et celle de leur environnement.
« Elles sont considérées comme des installations à risques majeurs et doivent respecter et sont soumises à la réglementation "Seveso II".
« Un décret précise les prescriptions techniques générales de conception et d'utilisation des installations de gaz naturel liquéfié, notamment en matière d'organisation du travail, de qualification et de fonction du personnel et d'intervention (délais et moyens notamment) en cas d'incident. Un cahier des charges type est élaboré par arrêté. »
La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Le projet de loi ne fait aucune mention particulière des installations de gaz naturel liquéfié, qui se trouvent associées au réseau de transport de gaz naturel.
Or ces installations jouent un rôle essentiel et spécifique dans l'alimentation de notre pays en gaz naturel. Elles constituent aussi des éléments du service public et de notre politique énergétique.
Enfin, elles présentent des risques d'accidents particulièrement graves, de par la concentration d'énergie et la température du gaz naturel liquéfié.
Aussi nous semble-t-il indispensable de consacrer à ces installations de gaz naturel liquéfié un article spécifique, visant notamment à indiquer clairement que la construction et l'exploitation d'une installation de GNL relèvent de la procédure d'autorisation avec des conditions à respecter, à mentionner les vocations prioritaires de ces installations et à souligner l'absolue nécessité de veiller à leur sécurité et à celle de leur environnement, en particulier en le soumettant à la directive « Seveso II » et à des prescriptions techniques générales établies par un décret à jour.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Comme je crois l'avoir déjà expliqué à M. Coquelle en commission, il est préférable de ne pas tout mélanger. En effet, les installations de GNL sont déjà soumises à une législation spécifique ; mieux vaut donc ne pas compliquer les choses.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement partage tout à fait l'avis de la commission. Les installations de GNL sont déjà soumises à autorisation, en vertu du livre V du code de l'environnement. Il n'est donc pas dans l'intention du Gouvernement de prévoir une nouvelle autorisation visant le même objet.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 206.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 207, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Chaque fournisseur, chaque opérateur, chaque distributeur participe au financement des efforts de recherche dans le domaine des gaz combustibles (production, transformation, transport, distribution, stockage, utilisation, technologies associées). Pour chacun, l'effort financier pour l'année n doit être a minima égal à 3 % de la valeur ajoutée de l'année n-1 réalisée dans leur activité gazière, dont 0,5 % est consacré à la recherche fondamentale.
« II. - Les fonds correspondants peuvent être utilisés à des activités de recherche sur les gaz combustibles au sein même de l'entreprise et/ou d'une de ses filiales et/ou dans un organisme de recherche créé ou géré en coopération avec d'autres entreprises gazières et/ou dans un organisme de recherche publique.
« III. - En cas de dépenses consacrées à la recherche inférieures aux 3 % ci-dessus mentionnés, le complément est versé à la recherche publique.
« IV. - La commission de régulation de l'électricité et du gaz veille au respect de ces dispositions. En cas de non-respect, elle en informe les ministres chargés de l'énergie et de la recherche qui prennent les mesures nécessaires.
« V. - Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article. »
La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. L'ouverture du marché du gaz à la concurrence entraîne une véritable bataille entre fournisseurs et opérateurs gaziers pour le maintien ou l'accroissement des parts de marché, s'agissant des clients éligibles.
Cela se traduit, notamment, par une course à la réduction des coûts, par le biais, en particulier, d'une diminution des dépenses qui peuvent être différées, telles que les dépenses d'investissement, lesquelles sont repoussées à l'échéance la plus lointaine possible, au détriment du service public.
Il suffit, pour s'en convaincre, d'observer la situation, à cet égard, chez nos voisins, où la libéralisation du secteur gazier a commencé.
On peut aussi constater que la libéralisation de la production d'électricité en Europe se traduit par une absence d'investissements, tant en France qu'à l'étranger, ce qui risque de provoquer une situation de crise d'ici à quelques années. Les seuls investissements nouveaux consentis sont ceux dont la rentabilité est garantie par une obligation d'achat.
Il est une autre sorte de dépenses qui se trouvent laminées en raison de la libéralisation d'un système : il s'agit des dépenses de recherche. Par exemple, en Grande-Bretagne, dans les secteurs tant de l'électricité que du gaz, le montant de ces dépenses a été divisé par deux.
Nous estimons qu'il serait catastrophique qu'une telle évolution se produise en France. Gaz de France possède l'un des seuls centres de recherche gazière au monde : il est très performant et a permis à notre pays, qui n'est pourtant pas doté de réserves de gaz, d'être à la pointe des technologies dans des domaines vitaux tels que ceux des stockages souterrains, du GNL, de la distribution par conduites en polyéthylène et des applications et utilisations du gaz naturel. Or Gaz de France, soumis à la pression de ses concurrents, sera amené à relâcher ses efforts de recherche, d'autant qu'il ne reçoit aucune aide publique.
Aussi proposons-nous un amendement visant à contraindre tous les acteurs gaziers sur le sol national à un effort de recherche représentant 3 % de la valeur ajoutée qui résulte de leurs activités gazières. D'ailleurs, sur ces 3 %, nous suggérons que, 0,5 % soit consacré à la recherche fondamentale.
Nous sommes bien sûr prêts à prendre en considération des sous-amendements qui enrichiraient notre proposition sans en dénaturer l'esprit. Cependant, il nous semble vital tant pour la politique énergétique et pour le service public que pour l'efficacité économique et sociale future, que notre amendement soit retenu, au moins dans son esprit.
Monsieur le président, nous demandons un scrutin public sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Mon cher collègue, nous retenons l'esprit de votre proposition. En effet, nous le faisons non pas à cet endroit du texte, bien sûr, mais au III de l'article 5. Certes, nous n'entrons pas aussi précisément que vous le faites dans le détail en prévoyant d'affecter à la recherche, notamment à la recherche fondamentale, un pourcentage de dépenses. Cependant le III dispose : « Les tarifs et conditions commerciales d'utilisation des réseaux et installations sont établis en fonction de critères objectifs, rendus publics et non discriminatoires, en tenant compte des caractéristiques du service rendu et des coûts liés à ce service. Figurent notamment parmi ces coûts les dépenses d'exploitation, de recherche et de développement nécessaires à la sécurité du réseau et à la maîtrise de la qualité du gaz naturel injecté ou soutiré. »
Je suis conscient que cela ne répond pas entièrement à votre souhait. Vous aimeriez que nous allions beaucoup plus loin. Mais que l'on ne dise pas à l'occasion de l'examen de cet amendement, que la préoccupation que vous exprimez en faveur de la recherche n'est pas prise en compte. Sur le fond, le III de l'article 5 répond à votre souci.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Nous attachons le plus grand intérêt à la politique de recherche gazière fondamentale ou appliquée aux différents acteurs. Nous observons d'ailleurs que ce sujet n'est pas limité au secteur gazier. Dans le contexte actuel, il ne nous semble pas nécessaire de légiférer. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 207.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 9:

Nombre de votants 311
Nombre de suffrages exprimés 222
Majorité absolue des suffrages 112
Pour l'adoption 23
Contre 199

L'amendement n° 208, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« En cas de refus d'accès au réseau fondé sur l'article 4 de la présente loi, une entreprise de gaz naturel établie sur le territoire national peut approvisionner son client éligible par une conduite directe. Cette disposition est étendue au cas d'ouverture d'une procédure de règlement de litige.
« Réciproquement, dans les mêmes cas, le client éligible peut être approvisionné par une conduite directe le reliant à l'entreprise de gaz naturel qui l'alimente.
« La construction et l'exploitation de ce type de conduite sont soumises à autorisation délivrée par le ministre chargé de l'énergie.
« Outre le non-accès au réseau, la délivrance ou le refus d'autorisation sont fondées sur :
« - les capacités techniques et financières du demandeur ;
« - la compatibilité du projet avec la politique énergétique nationale ;
« - la compatibilité du projet avec les obligations de service public ;
« - le respect de la législation sociale.
« Cette autorisation est nominative et incessible. En cas de changement d'opérateur, l'autorisation ne peut être transférée au nouvel opérateur que par décision du ministre chargé de l'énergie. »
« En tant que de besoin, un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. »
La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Une disposition importante de la directive européenne relative au marché intérieur du gaz naturel est totalement ignorée par le projet de loi : celle qui est relative aux conduites directes. Or ces dernières sont prévues par la directive dans certains cas particuliers que nous résumerons en disant qu'il s'agit des cas dans lesquels l'accès au réseau présente des difficultés.
Il nous semble nécessaire que le projet de loi traite de ce sujet, sous peine de nous exposer à deux risques. Le premier serait l'absence de base légale, qui créerait un vide juridique pour ces conduites. Le second serait un développement anarchique des équipements de transport de gaz, contraire à l'intérêt général et à la sécurité du système gazier.
C'est pourquoi nous proposons, par cet amendement, un article additionnel qui précise les conditions dans lesquelles il pourrait être fait appel à des conduites directes et qui énonce les conditions à remplir pour bénéficier d'une autorisation de construction ou d'exploitation, en fait les conditions que nous avons énoncées pour les canalisations du réseau de transport.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cette proposition n'est pas très réaliste. En effet, elle revient à dire à un fournisseur et à son client inéligible que, s'ils ne peuvent pas utiliser les tuyaux de Gaz de France, ils doivent construire une canalisation. Chacun voit les conséquences d'un tel dispositif. Le coût d'une canalisation n'est pas négligeable. La durée de création d'un tel réseau peut s'étendre sur dix, quinze ou vingt ans. De plus, imaginez ce que représenteraient, sur le plan administratif, les milliers d'enquêtes publiques qui devraient être effectuées auprès des communes ou des propriétaires de terrain concernés par le passage de ces canalisations. Nous n'en sortirions pas.
Voilà pourquoi je me suis permis de dire - et je pense que vous n'y verrez pas trop de mal, monsieur le sénateur - que cette proposition n'était pas très réaliste.
En tout cas, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 208.

(L'amendement n'est pas adopté.)

TITRE VI

CONTRÔLE ET SANCTIONS

Article 18