SEANCE DU 15 NOVEMBRE 2002
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 159 rectifié, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Beaudeau,
Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM.
Fischer, Foucaud et Le Cam, Mmes Luc et Mathon, MM. Muzeau, Ralite et Renar et
Mme Terrade, est ainsi libellé :
« Après l'article 22, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Nul ne peut être poursuivi pour avoir mendié, cherché un abri dans un
logement ou un terrain non occupé. »
L'amendement n° 261, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes André et Blandin,
MM. Badinter, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et les
membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Après l'article 22, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Nul ne peut être poursuivi pour avoir mendié, cherché un abri dans un
logement ou un terrain non occupé s'il ne lui a pas été proposé un moyen digne
de subsistance et de logement. »
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 159
rectifié.
M. Robert Bret.
C'est avec solennité que je vous présente un amendement qui reprend les
principes posés par l'abbé Pierre lors de sa prise de position remarquée et
remarquable sur de nombreuses dispositions de votre projet de loi, monsieur le
ministre.
L'amendement proposé par les associations Emmaüs France, ATD-Quart Monde,
Droit au logement, le Secours catholique, l'Armée du Salut, Médecins du Monde
et la Fédération de l'entraide protestante est un texte qui fait honneur à
notre pays, tant il est empreint de générosité et de lucidité sur la réalité de
la situation sociale extrêmement difficile que nous connaissons aujourd'hui.
Monsieur le ministre, l'indignation de l'abbé Pierre ne peut être traitée par
le mépris. « Quand j'ai lu le projet de loi, j'ai sauté d'indignation », a-t-il
déclaré. « Comment est-ce possible que des hommes politiques qui ont le devoir
de faire des lois introduisent de telles clauses ? », s'interrogeait-il. «
Depuis que j'ai quitté le Parlement en 1952, c'est le premier texte qui
m'indigne autant », a-t-il dit, en affirmant que, « si les gens avaient les
moyens de payer les amendes qu'on prévoit, ils ne seraient pas obligés de
mendier ou de squatter. » Il ajoutait : « Comment peut-on envisager de punir
des gamins de treize ans et de ne pas punir une mairie qui ne construit pas de
logements sociaux ? »
Sur ce dernier point, l'abbé Pierre anticipait finement les mauvais coups que
préparait la droite sénatoriale en annulant de fait certaines dispositions de
la loi SRU concernant le logement et la mixité sociale.
Monsieur le ministre, chers collègues, il faut écouter ce message fort qui
émane des associations les plus actives, reconnues internationalement, dotées
d'une grande autorité morale. Ces associations agissent quotidiennement avec
ceux que la misère frappe, que le système libéral et cette société de l'argent
brisent.
Oui, la pauvreté est une dure réalité de la France d'aujourd'hui.
Plutôt que d'accroître l'insécurité des pauvres, ne faut-il pas, monsieur le
ministre, engager une loi de programmation budgétaire, comme le demandent de
nombreuses associations regroupées dans le réseau Alerte que vous avez
rencontré, chers collègues ?
Selon
Le Figaro
de ce jour, cette demande s'appuie sur une réalité :
plus de quatre millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté, avec
moins de 550 euros par mois ; près d'un chômeur sur deux n'est pas indemnisé ;
entre 80 000 et 200 000 personnes sont sans domicile fixe.
Le réseau Alerte ne remet pas en cause la grande loi sur l'exclusion de 1998
mais en critique, avec raison, l'application et en demande, avec raison,
l'évaluation.
Comme l'a indiqué ma collègue Nicole Borvo, nous regrettons, monsieur le
ministre, que la lutte contre la pauvreté passe à l'arrière-plan. C'est en tant
que facteur de l'insécurité que la pauvreté revient dans le débat, qu'elle soit
assortie de la notion d'exploitation ou de celle d'agressivité.
Monsieur le ministre, prenons l'exemple de l'exploitation de la mendicité. Vos
services, bien renseignés par nature, ne vous ont-ils pas indiqué que bon
nombre de familles organisent en leur sein la mendicité du fait de leur
pauvreté ?
Reprenant l'esprit et, pour une part, la lettre du texte des associations,
notre amendement est ainsi rédigé : « Nul ne peut être poursuivi pour avoir
mendié, cherché un abri dans un logement ou un terrain non occupé. »
Les associations ont insisté sur le caractère symbolique de la rédaction
qu'elles proposaient à l'origine. C'est en plein accord avec elles que nous
avons adopté la présente formulation.
Mes chers collègues, nous demanderons un scrutin public sur cet amendement que
je vous demande d'adopter, car il est porteur d'une forte éthique, d'une grande
valeur morale et de solidarité chrétienne.
Mme Nelly Olin.
On aura tout entendu !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Venant des communistes !
M. Robert Bret.
Il peut y avoir aussi des communistes chrétiens !
M. Roger Karoutchi.
Vous avez été excommuniés !
M. le président.
La parole est à M. Louis Mermaz, pour présenter l'amendement n° 261.
M. Louis Mermaz.
Il est tout à fait naturel que nous intervenions sur cet amendement que la
presse appelle l'amendement « abbé Pierre », puisque l'abbé Pierre fut vicaire
dans la ville de Vienne, dans l'Isère, où je l'ai reçu neuf fois, et que la
première communauté d'Emmaüs fut celle de Neuilly-sur-Marne -
Neuilly-Plaisance.
Nous avons donc, les uns et les autres, des liens anciens avec l'abbé Pierre,
grand résistant, qui fut - on ne disait pas centriste à l'époque - député
MRP.
M. Michel Charasse.
Il dérape parfois...
M. Louis Mermaz.
Quand tu auras quatre-vingt-dix ans, Michel Charasse, tu commettras peut-être
aussi quelques faux pas ; tu en commets déjà parfois ici même... Sois
indulgent, mon fils !
(Rires.)
M. Roger Karoutchi.
Ne vous excommuniez pas les uns les autres !
M. Louis Mermaz.
Pour en revenir au sujet principal, nous avons travaillé ensemble à la
rédaction de cet amendement, car nous ne pouvions, en effet, retenir la
dernière partie de la proposition initiale.
« Nul ne peut être poursuivi pour avoir mendié, cherché un abri dans un
logement ou un terrain non occupé », c'est parfait, « s'il ne lui a pas été
proposé un moyen digne de subsistance et de logement », le symbole est fort.
« La responsabilité de l'Etat et des collectivités locales peut être engagée
pour non-assistance à personne en situation d'exclusion ou dont la détresse
financière est exploitée » : la formule est trop ambiguë, et, si l'abbé Pierre
siégeait encore sur les bancs de l'Assemblée, nous aurions avec lui un débat
sur ce sujet.
La proposition a été soutenue par des organisations tout à fait sérieuses :
Emmaüs, Médecins du Monde, ATD-Quart Monde, la Fédération d'entraide
protestante, le Secours catholique, l'Armée du Salut, Droit au logement,
organisations que nous connaissons tous et avec lesquelles nous avons, les uns
et les autres - quelle que soit notre appartenance politique -, souvent eu
l'occasion de travailler.
Je dirai enfin au ministre, pour le taquiner - je suis sûr qu'il comprend la
plaisanterie -, qu'il ne faut pas en vouloir à l'abbé Pierre si la télévision a
trouvé moyen de le suivre. Je sais qu'il fait tout pour échapper à la
télévision, mais on le voit tout de même parfois au journal télévisé ou dans
des reportages !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
Les deux amendements n°s 159 rectifié et 261 visent à
interdire toute poursuite à l'encontre d'une personne qui a mendié ou cherché
un abri s'il ne lui a pas été proposé de moyens de subsistance.
J'ai cherché, mais je n'ai pas trouvé comment une telle disposition pouvait
entrer dans le champ du projet de loi que nous examinons, lequel n'a en aucun
cas pour objet la poursuite des personnes qui mendient ou cherchent un abri.
Au début de l'article 22, on peut lire : « l'exploitation de la mendicité... »
; au début de l'article 23 : « le fait, en réunion et de manière agressive, ou
sous la menace d'un animal dangereux, de solliciter la remise de fonds... »
Rien, dans ces articles, ne concerne les mendiants !
Dès lors, ces deux amendements ne peuvent être acceptés, et je me permettrai,
à titre personnel, de dire à leurs auteurs que je m'étonne qu'ils déposent
aujourd'hui ces amendements alors qu'ils ont été au pouvoir pendant cinq ans.
Mes chers collègues, vous aviez largement le temps de faire ce qu'il fallait,
vous n'avez rien fait : ne nous rendez pas responsables de votre propre
incompétence !
M. Lucien Lanier.
Très bien !
Mme Nelly Olin.
C'est clairement dit !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Depuis deux jours que nous débattons, à d'innombrables
reprises, les orateurs du groupe socialiste ont mis en garde le Gouvernement
contre le fait de légiférer sans nécessité. « Il y a déjà trop de textes »,
nous a dit M. Dreyfus-Schmidt, « cela ne sert à rien ». Et, à d'innombrables
reprises, il a défendu - ce qui est parfaitement son droit -, des amendements
de suppression.
Mais que nous propose maintenant M. Dreyfus-Schmidt ? L'adoption d'un texte
pour défendre les mendiants.
Que propose le Gouvernement ? Rien à propos des mendiants !
Quelle réponse, dès lors, faire à M. Mermaz ? N'ajoutons pas à la loi ce texte
inutile parce que sans cause !
En outre, monsieur Mermaz, puisque vous connaissez l'abbé Pierre depuis si
longtemps, puisque vous partagez ses combats depuis si longtemps, comment se
fait-il que, vous qui avez joué un rôle si important dans la majorité d'hier,
vous n'ayez en cinq ans pas trouvé une minute pour approuver ce qui est le
combat de toute une vie pour l'abbé Pierre ?
Faut-il qu'aujourd'hui vous soyez dans une telle situation de déshérence
idéologique qu'il vous faille vous cacher derrière l'abbé Pierre ? N'aurait-il
pas fallu, si c'était une préoccupation de la majorité d'alors, que vous la
repreniez à votre compte ?
Pourquoi, aujourd'hui, alors que le parti socialiste est traversé de tant de
courants différents, vous cacher derrière les associations si ce n'est pour
échapper et à votre bilan et à votre présent ?
(Vifs applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement
n° 159 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je ne suis pas de ceux qui admirent invariablement l'abbé Pierre...
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Moi non plus !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
... mais il est vrai qu'en matière d'aide aux défavorisés il a fait beaucoup.
Il était normal, dès lors qu'il voulait que sa proposition soit débattue devant
le Parlement, que nous déposions un amendement.
J'ajoute qu'il n'est pas exact de dire que cet amendement n'entre pas dans le
champ de l'article dont nous discutons, non plus que d'affirmer que : « Nul ne
peut être poursuivi pour avoir mendié » aux termes de ce projet de loi. Nous
verrons ce qu'il en est de ceux qui, en réunion, avec des chiens, sollicitent
des fonds...
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Ça, c'est autre chose !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Pour ce qui est de ceux qui cherchent abri dans un logement, tout le monde
sait que votre texte devait à l'origine contenir des dispositions contre les
squatters. Vous nous avez expliqué comment, après avoir reçu les associations,
vous avez décidé - et vous avez bien fait - de retirer ces dispositions, mais
il en a bien été question.
Si vous admettiez déjà que nul ne peut être poursuivi pour avoir cherché abri
dans un logement, cela règlerait peut-être, d'une certaine manière, le problème
pour l'avenir.
Quant à l'abri sur un terrain non occupé, on rejoint là les dispositions dont
nous avons débattu ce matin, puisque vous voulez mettre en prison ceux qui s'y
installent parce qu'ils ne savent, le plus souvent, pas où aller.
Il est donc inexact de prétendre que cet amendement ne s'applique pas au texte
en discussion.
M. Jean Chérioux.
Ah si !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Vous nous reprochez par ailleurs de ne pas avoir fait ci et ça. C'est tout de
même un peu facile !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Mais c'est efficace !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
En vous entendant, on ne peut s'empêcher de penser que Zorro est arrivé !
Mme Nelly Olin.
Et vous, vous êtes partis !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Vos prédecesseurs n'auraient rien fait et vous, vous arrivez et proposez tout
ce qu'il faut !
Soyez modeste de temps en temps, monsieur le ministre ! Mais vous avez déjà
préparé votre sortie : « Si cela ne va pas, je m'arrête », avez-vous annoncé !
Il est certain qu'il faudra que vous le fassiez vite...
Mme Nelly Olin.
C'est vraiment discourtois !
M. Jean Chérioux.
Ce n'est pas d'un haut niveau !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
... si vous voulez pouvoir dire que tout marche bien grâce à vous, car, hélas
! chacun constatera bientôt les effets regrettables des dispositions que vous
proposez aujourd'hui à votre majorité.
M. Philippe Nogrix.
Oiseau de mauvais augure !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il est en tout cas bon que cet amendement ait été déposé et discuté. Nous
n'avons pas, c'est vrai, repris la deuxième phrase sur la responsabilité des
communes, car elles sont elles-mêmes tellement pauvres qu'elles n'auraient pas
les moyens de faire face à des demandes de dommages et intérêts, mais la
première phrase méritait d'être reprise, et c'est pourquoi nous l'avons
fait.
M. le président.
La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo.
Il a été dit que l'article 22 visait non pas la mendicité mais l'exploitation
de la mendicité. Cet article mériterait d'avoir comme pendant l'amendement dit
« abbé Pierre ». Le Gouvernement - et, avec lui, notre assemblée - démontrerait
ainsi sa volonté de réaffirmer un principe quasi constitutionnel de notre
pays.
J'ai travaillé, avant 1997, avec les associations qui ont soutenu cet
amendement. Elles ont mené bien des combats, souvent seules, il faut le dire,
mais elles sont parvenues à entraîner la mobilisation en faveur d'un texte fort
contre les exclusions.
Ce texte, c'est la loi d'orientation relative à la lutte contre les
exclusions, dont les fondements, je l'ai dit tout à l'heure, sont la solidarité
et la dignité.
Finalement adoptée en 1998, cette loi répondait en partie, en tout cas dans
ses principes et dans son énoncé, au travail de nombreuses associations. Force
est, hélas ! de constater que le gouvernement précédent n'a pas donné entière
satisfaction quand il s'est agi de l'appliquer.
Aujourd'hui, nous devrions avoir le souhait commun d'affirmer fortement qu'il
ne saurait être question de montrer du doigt certaines catégories de
personnes.
Votre projet de loi, monsieur le ministre, quand on l'examine à la loupe, ne
paraît pas devoir être attaqué pour anticonstitutionnalité, c'est évident...
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Ah !
M. Jean Chérioux.
C'est d'ailleurs ce qui vous gêne !
Mme Nicole Borvo.
... mais on ne pouvait pas attendre moins d'une administration comme la
vôtre.
Il n'empêche - et vous le savez - que beaucoup l'interprètent comme un texte
montrant du doigt plusieurs catégories de personnes, alors que l'arsenal
juridique dont nous disposons aujourd'hui permet déjà de s'attaquer aux
problèmes que vous semblez viser.
Vous pensez qu'il est utile d'afficher une forte volonté de faire respecter
l'ordre public ; moi, je pense le contraire. Mais au moins feriez-vous la
preuve de votre bonne foi, de votre volonté effective de vous attaquer au
problème si vous affichiez avec autant de force votre volonté de respecter les
droits élémentaires de la personne.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur.
Je tiens tout d'abord à dire que je ne partage pas les réactions de certains
ici à l'égard de l'initiative prise par diverses associations, catholiques,
protestantes ou relevant d'autres philosophies qui nous a amenés à discuter
aujourd'hui de cet amendement. Mais plus encore, monsieur le ministre, je
désapprouve votre manière de traiter celui-ci.
M. le rapporteur nous dit qu'il était hors sujet. Vous, vous prétendez que
nous n'avons rien fait...
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Eh oui !
M. Jean-Pierre Sueur.
... et vous en prenez prétexte pour nous dénier le droit à la parole ou pour
nier toute crédibilité à nos propos.
D'abord, il est faux que nous n'ayons rien fait, et trois exemples le
démontreront.
Premier exemple : le revenu minimum d'insertion. Le RMI, c'est la
reconnaissance du droit de tout être humain à bénéficier, parce qu'il est un
être humain, d'un revenu, et c'est une initiative de la gauche, qui, je m'en
souviens, a suscité le scepticisme de plusieurs de nos collègues de l'actuelle
majorité. Eh bien ! nous avons eu raison d'affirmer que chaque être humain a
droit à un certain revenu minimal pour vivre !
Deuxième exemple : la CMU, la couverture maladie universelle, qui profite
aujourd'hui à 7 millions de Français. Tout être humain, parce qu'il est un être
humain, même s'il mendie, même s'il va très mal, même s'il a quelque chose à se
reprocher, a droit à une couverture maladie. Peu de pays au monde ont instauré
un tel dispositif. Or c'est bien la gauche qui l'a mis en place ces dernières
années ! Tout le monde n'était pas d'accord avec nous, mais cette mesure est
très importante pour tous ceux qui vivent dans la précarité.
Troisième et dernier exemple : la loi SRU, qui prévoit que toutes les communes
d'une certaine importance de ce pays doivent réaliser des logements sociaux.
Tous les élus devraient s'honorer de l'existence de logements sociaux dans leur
commune. Les longs débats qui se sont tenus ici même et à l'Assemblée nationale
ont permis de faire entendre qu'il était nécessaire de construire des logements
sociaux afin que chacun puisse bénéficier d'un toit.
Dans la nuit de mardi à mercredi dernier, certains d'entre nous ont voulu,
avec acharnement, supprimer les dispositions de la loi SRU selon lesquelles
toutes les communes doivent disposer d'un parc de logements sociaux. M. de
Robien, je tiens à le souligner, a même dû défendre certains aspects importants
de cette loi. En effet, si le point de vue d'un certain nombre de nos collègues
de la majorité avait prévalu, la loi aurait été totalement vidée de sa
substance. Il reste pourtant encore du chemin à parcourir pour que chaque être
humain ait droit à un logement !
Cet amendement s'inscrit dans la philosophie qui sous-tend les trois exemples
que j'ai cités, dans le droit-fil de ce qui a été accompli au cours de ces
dernières années. C'est la raison pour laquelle il a, à nos yeux, beaucoup de
force et beaucoup de valeur.
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
L'aide médicale, c'était mieux que la CMU !
M. le président.
La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas.
Je ne puis tolérer que M. le ministre s'adresse à M. Mermaz comme il l'a
fait.
(Mme Nelly Olin s'exclame.)
J'accepte le débat démocratique, mais
difficilement les invectives !
M. Philippe Nogrix.
C'est la garde rapprochée !
M. Jacques Mahéas.
L'amitié nous lie, parfaitement !
Vous dites, monsieur le ministre, que notre amendement n'a pas de raison
d'être, et vous nous demandez ce que nous avons fait dans le passé.
Certes, cet amendement présente un moindre caractère d'actualité qu'à l'époque
où vous aviez lancé un premier ballon d'essai en laissant filtrer, dans la
presse, la teneur d'un texte où étaient décrites par le menu les actions qui
seraient menées pour lutter contre les squats. Je vous donne acte du fait que
ces dispositions ont été supprimées, en partie peut-être parce que l'abbé
Pierre a déclaré qu'il avait été squatteur et que, comme vous nous l'avez
expliqué, les responsables de Droit au logement, l'une des associations
signataires de cet amendement, vous ont convaincu. Tant mieux ! On ne peut en
effet que se féliciter de la suppression de cette partie du projet de loi.
Quant à notre action passée, M. Sueur vient d'en rappeler les orientations
générales. Monsieur le ministre, vous avez été élu maire de Neuilly-sur-Seine
en 1983.
M. Philippe Nogrix.
C'est le combat des deux Neuilly !
M. Jacques Mahéas.
Non, ce n'est pas le combat des deux Neuilly ! Encore que l'on pourrait
établir une comparaison dans le domaine social : 1,3 % de logements à caractère
social à Neuilly-sur-Seine !
Vous nous avez dit, monsieur le ministre, que notre amendement n'a pas lieu
d'être ! Mais le débat qui nous occupe a lieu d'être !
Par ailleurs, je vous rétorquerai que nous agissons dans nos communes. Pour ne
citer que l'exemple que je connais le mieux, celui de Neuilly-sur-Marne,
j'indiquerai que j'ai reçu hier les responsables des Restaurants du coeur.
C'est d'ailleurs à Neuilly-sur-Marne que les premiers Restaurants du coeur de
la Seine-Saint-Denis ont été ouverts. Dans cette ville se trouvent aussi une
communauté Emmaüs, ainsi qu'un foyer de travailleurs migrants, la création d'un
second étant envisagée.
En outre, un quotidien
(M. Jacques Mahéas brandit
Le Parisien
)
mentionne que : «
Ville-Evrard hébergera des familles expulsées ». En fait, il s'agit non pas de
familles, mais d'individus. Nous avons donc toujours lutté contre la misère et
nous avons même quelquefois accueilli dans nos hôpitaux des
laissés-pour-compte, des personnes sans domicile fixe qui venaient notamment de
Paris.
Par conséquent, monsieur le ministre, vous ne pouvez nous agresser comme vous
l'avez fait ! Je pense vraiment que ce n'est ni sérieux ni honnête de votre
part !
M. Nicolas Sarkozy,
ministre.
Cela ne mérite pas de réponse !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 159 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du
règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 310 |
Nombre de suffrages exprimés | 310 |
Majorité absolue des suffrages | 156 |
Pour l'adoption | 108 |
Contre | 202 |
Je mets aux voix l'amendement n° 261.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 23