SEANCE DU 19 NOVEMBRE 2002
M. le président.
La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 65, adressée à M.
le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Roland Courteau.
Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur une question qui
me paraît essentielle pour l'artisanat et les petites entreprises du secteur du
bâtiment.
Comme vous le savez, et comme l'y autorisait la directive européenne du 22
octobre 1999, le gouvernement précédent avait décidé d'appliquer le taux réduit
de la TVA à 5,5 % aux travaux d'aménagement et d'entretien des locaux à usage
d'habitation achevés depuis plus de deux ans.
Cette excellente mesure, qui correspondait à une très forte attente, avait été
prise conformément à la directive, pour une durée de trois années, ce qui
signifiait qu'elle devrait prendre fin le 31 décembre prochain, sauf
prorogation d'un an, comme le prévoit, semble-t-il, le projet de directive
présenté par la Commission européenne en septembre dernier.
Ainsi que le soulignait, à juste titre, la confédération de l'artisanat et des
petites entreprises du bâtiment, la CAPEB, de l'Aude, ces jours derniers, la
pérennisation de ce dispositif constitue bien le principal enjeu des prochains
mois.
Permettez-moi d'insister sur ce point, madame la ministre : force est de
constater que l'ensemble des éléments économiques et sociaux plaide sans
conteste en faveur de cette pérennisation de la TVA à 5,5 %. Selon les
informations dont je dispose, il semble en effet que le rapport évaluant
l'efficacité de la mesure sur les trois dernières années, et qui doit être
établi par l'ensemble des Etats membres, s'avère des plus positifs. Pour la
France, les premiers bilans réalisés font apparaître des résultats répondant
parfaitement aux exigences de la Commission européenne. Ainsi, le surcroît
d'activité de ce secteur généré par la baisse de la TVA à 5,5 % s'élève à 3,2
milliards d'euros en cumul sur deux années. Dès lors, l'un des principaux
objets de la mesure, à savoir les créations d'emploi, a été largement atteint,
avec 55 000 emplois directs et indirects créés au cours de la première année et
maintenus par la suite.
On notera, par ailleurs, une réelle amélioration du patrimoine ancien, mais
également un recul du travail clandestin, puisque les études et estimations
établies par la profession évaluent à 4,6 % du montant des travaux d'entretien
et d'amélioration la proportion de travail dissimulé réorientée vers les
entreprises. Et je passe, madame la ministre, sur le supplément de rentrées
fiscales que représente, pour l'Etat, ce surcroît d'activité !
En d'autres termes, madame la ministre, nous avons là un dossier solide -
j'allais dire un dossier « béton » - qui répond à une très forte attente à la
fois des professionnels et de l'opinion publique et qui concerne un secteur à
forte intensité de main-d'oeuvre. Le Gouvernement se doit impérativement de le
défendre au niveau des instances européennes. Mieux : il a l'obligation de
réussir.
J'ajouterai qu'il est d'autant plus important de pérenniser cette disposition
que, dans le cas contraire, les effets d'une non-reconduction de la mesure
seront ravageurs pour le secteur d'activité de l'artisanat et des petites
entreprises. En effet, selon les informations qui m'ont été transmises, et qui
portent sur l'ensemble du pays, les conséquences négatives d'un retour en
arrière en 2003 ou en 2004 seraient redoutables : l'effet pourrait être
symétrique à celui qui est obtenu aujourd'hui, puisque la forte baisse
d'activité des entreprises du bâtiment se traduirait par une perte estimée à 54
000 emplois dans cette filière. Tout autre commentaire devient dès lors
superflu, madame la ministre.
En conclusion, je souhaite que vous m'indiquiez, d'une part, votre sentiment
sur ce dossier et, d'autre part, les initiatives que le Gouvernement entend
prendre afin d'aboutir à la pérennisation d'une TVA à 5,5 % pour les travaux
d'aménagement et d'entretien des locaux à usage d'habitation.
M. le président.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine,
ministre déléguée à l'industrie.
Monsieur le sénateur, la question que
vous soulevez est, en effet, d'une très grande importance et je me permettrai
d'ajouter que vous prêchez une convaincue.
Vous avez fort bien rappelé que la directive communautaire du 22 octobre 1999
autorise les Etats membres à appliquer, à titre expérimental, pour une durée de
trois ans, un taux réduit de TVA à certains services à forte intensité de
main-d'oeuvre.
Cette expérience, qui permet à la France d'appliquer le taux réduit de la TVA
aux travaux portant sur les logements achevés depuis plus de deux ans, ainsi
qu'aux services d'aide à la personne, aurait dû expirer le 31 décembre
prochain.
Fort heureusement, tous nos partenaires européens ont fait connaître leur
accord de principe pour que cette directive soit prorogée d'un an, soit
jusqu'au 31 décembre 2003. Cette prorogation, à champ constant, doit
prochainement être adoptée par le Conseil, après consultation des parlements
nationaux et du Parlement européen, mais tout porte à croire que les choses
iront dans la bonne direction.
L'article 9 du projet de loi de finances pour 2003, par lequel le Gouvernement
a proposé cette prorogation d'un an en ce qui concerne les activités déjà
citées, a été adopté par l'Assemblée nationale le 17 octobre dernier, en
première lecture.
Aujourd'hui, la Commission réfléchit, d'une façon générale, à la pérennisation
de cette mesure. Les rapports d'évaluation viennent de lui être transmis par
les Etats membres.
Je puis vous confirmer, monsieur le sénateur, que le rapport de la France fait
clairement apparaître les effets bénéfiques de l'expérience sur l'emploi, que
vous avez fort pertinemment rappelés. En effet, la situation économique du
secteur du bâtiment a connu une embellie sans précédent depuis l'introduction
de la baisse ciblée de TVA pour les travaux dans les logements privés. Cette
mesure a notamment permis de stimuler la demande grâce à une bonne répercussion
sur les prix et ainsi de contribuer à de nombreuses créations d'emplois,
estimées à plus de 46 000.
Compte tenu de ces résultats très positifs, je puis vous assurer que le
Gouvernement mettra tout en oeuvre pour obtenir la pérennisation de cette
mesure, dans le cadre des travaux que la Commission va engager en 2003 sur la
révision du champ d'application des taux réduits de TVA.
SITUATION DU BASSIN D'EMPLOI DE ROMORANTIN