SEANCE DU 19 NOVEMBRE 2002
M. le président.
La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 80, adressée à Mme
la ministre de l'écologie et du développement durable.
M. Yves Détraigne.
Madame la ministre, l'un des objectifs de la loi du 13 juillet 1992 relative à
l'élimination des déchets est de favoriser le tri à la source des déchets en
vue de leur recyclage, notamment de leur recyclage matière.
Pour ce faire, le décret du 1er avril 1992 a confié à des organismes agréés
tels que la société Eco-Emballages la mission de recueillir auprès des sociétés
productrices de déchets recyclables une contribution afin d'aider
financièrement les collectivités locales à mettre en place la collecte
sélective et le tri des déchets ménagers.
Le dispositif a très bien fonctionné puisque, aujourd'hui, plus de 40 millions
de Français trient leurs déchets.
Malheureusement, la société Eco-Emballages vient d'écrire aux collectivités
responsables de la collecte des déchets ménagers pour indiquer qu'elle
constatait que près de 30 % des déchets collectés n'étaient pas d'origine
ménagère et qu'elle envisageait donc de « mettre en place un programme d'action
permettant de revenir rapidement à une situation normale et légitime ».
Cette prise de position est certes explicable au regard du nécessaire
équilibre de ses recettes et de ses dépenses, mais elle pose un grave problème,
en brisant l'élan qui avait permis de développer le tri des déchets ménagers.
Il s'ensuit aujourd'hui une situation de régression, alors même qu'après dix
ans d'application la loi commençait à prendre sa pleine ampleur, en tout cas
sur le plan de la collecte sélective des déchets ménagers.
Aussi, je souhaite, madame la ministre, que vous indiquiez quelles mesures
vous entendez prendre pour remédier à ce risque sérieux et, notamment, si vous
envisagez de soumettre à cotisations auprès d'Eco-Emballages ou d'un organisme
similaire les producteurs de journaux gratuits, de prospectus et autres
magazines qui envahissent nos boîtes aux lettres et qui se retrouvent, bien que
ne relevant pas des déchets ménagers, dans les papiers cartons collectés
sélectivement.
M. le président.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin,
ministre de l'écologie et du développement durable.
Monsieur le sénateur,
vous avez raison d'exprimer vos inquiétudes concernant les pratiques actuelles
du tri sélectif, qui avait pourtant convaincu nombre de nos concitoyens. Nous
observons une stabilisation, pour ne pas dire une régression, de ces bonnes
pratiques qui ne saurait nous laisser indifférents.
Vous faites aussi état d'inquiétudes qui sont partagées par nombre d'élus
locaux relatives aux aides versées par Eco Emballages aux collectivités
locales.
La raison est simple : alors que Eco-Emballages soutient financièrement la
reprise de plus de 300 000 tonnes de papier carton trié, des vérifications
effectuées en 2001 ont montré qu'un tiers n'était pas d'origine ménagère ou ne
relevait pas de la catégorie des emballages.
Autrement dit, vous l'avez signalé, monsieur le sénateur, Eco-Emballages ne
perçoit pas le « point vert » auprès des producteurs. Les déchets concernés
sont essentiellement des emballages industriels, des papiers de bureau et des
journaux et magazines. Les sociétés agréées soutenant les collectivités locales
sur une base plus large que celle qu'elles perçoivent, sont mécaniquement mises
en difficulté par cette situation. Il faut bien dire que chacun trouvait,
jusqu'à récemment, avantage mais que cette situation ne peut ni ne doit
perdurer.
Afin de rétablir son équilibre financier, la société Eco-Emballages a mis en
place un programme d'action et de contrôle. Cette démarche s'est sans doute
faite de manière brutale et sans concertation. Mes services l'ont signalé à
Eco-Emballages, mais nous ne pouvons remettre en cause la légitimité de
l'intervention, qui vise simplement à faire respecter les engagements pris, dès
le départ, par les différents acteurs, sociétés agréées, collectivités locales
et filières papetières.
L'espace existe pour trouver des voies de sortie de crise moins conflictuelles
et respectueuses des intérêts des uns et des autres.
Au-delà de cet épisode, il convient de mener une réflexion de fond, comme vous
nous y invitez, monsieur le sénateur, sur la façon de répondre aux besoins de
financement des collectivités locales qui voient le coût du traitement de leurs
déchets exploser depuis plusieurs années. L'examen, dans les mois prochains,
des agréments des sociétés Eco-Emballages et Adelphe sera l'occasion de définir
de nouvelles règles et, le cas échéant, de réviser le barème de la contribution
des industriels.
Vous avez cité une autre voie qui doit, à mon sens, être explorée. Elle
consiste à faire contribuer les producteurs pour d'autres catégories de déchets
que celles qui entrent dans le champ du décret actuel. Je vous confirme qu'un
décret concernant les journaux, magazines et prospectus est en cours de
préparation, une première version ayant été rejetée en mars dernier par le
comité des finances locales. J'ai, comme vous peut-être, noté avec intérêt que
l'Assemblée nationale avait adopté vendredi dernier, au cours de l'examen du
projet de loi de finances pour 2003, une disposition allant dans le même
sens.
Pour l'avenir, cette situation délicate ne doit pas remettre en cause le
bilan, jugé globalement très positif, de l'intervention des sociétés Adelphe et
Eco-Emballages. Pour ma part, je ne manquerai pas de veiller au respect des
engagements de chaque acteur, à l'égalité de traitement des collectivités et au
maintien d'une qualité de concertation entre les acteurs, concertation
primordiale pour la bonne réussite du dispositif.
M. le président.
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne.
Je tiens à vous remercier, madame la ministre, de votre réponse. Elle ouvre
des pistes de nature, je n'en doute pas, à rassurer nombre d'élus locaux.
PLAN DE PRÉVENTION DES INONDATIONS