SEANCE DU 19 NOVEMBRE 2002
M. le président.
« Art. 6
bis.
- I. - La section 2 du chapitre V du titre IV du livre II
du code de la sécurité sociale est abrogée.
« II. - Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 1er janvier
2003. »
L'amendement n° 10, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Voilà un amendement sensible.
Je rappelle que l'Assemblée nationale a inséré un article additionnel tendant
à supprimer la taxe sur les ventes directes de médicaments par les industriels
aux pharmacies officinales.
Cette contribution est due par les laboratoires pharmaceutiques sur le chiffre
d'affaires réalisé auprès des pharmacies au titre des spécialités
remboursables, à l'exception des spécialités génériques et des médicaments
orphelins. Les grossistes-répartiteurs ne sont donc pas assujettis au paiement
de cette taxe.
La taxe additionnelle sur les ventes directes a pour objet de rétablir
l'égalité des conditions de concurrence entre deux circuits de distribution :
les ventes directes et les ventes par les grossistes-répartiteurs, soumis, eux,
à des obligations de service public. Cette taxe vise à compenser l'avantage
dont bénéficie le circuit des ventes directes, où laboratoires et officines se
partagent une rémunération égale à celle des grossistes.
La commission n'est pas convaincue de la nécessité de supprimer aujourd'hui
cette taxe. Elle souligne, en effet, que seuls les grossistes-répartiteurs sont
soumis à des obligations contraignantes de service public. Ces contraintes de
service public résultent du décret du 5 avril 1960 et de l'arrêté du 3 octobre
1962 ; elles tiennent en des obligations de stock et de délai de livraison à
toutes les pharmacies d'officine et visent à garantir la bonne disponibilité, à
l'unité, de tous les médicaments, en toute sécurité et en tous lieux du
territoire national.
Or la marge allouée aux deux circuits de distribution est strictement
identique : la suppression de la taxe sur les ventes directes avantagerait donc
automatiquement le circuit des ventes directes.
La commission rappelle, en outre, qu'en vertu de l'article L. 245-6-1 du code
de la sécurité sociale les médicaments génériques n'ont jamais été soumis à
cette taxe et que sa suppression ne peut donc favoriser leur diffusion.
La commission juge, pour sa part, qu'une remise à plat de la distribution des
médicaments serait sans doute bienvenue mais qu'il conviendrait, pour ce faire,
de travailler d'une manière concertée avec tous les acteurs du système.
Enfin, je rappelle que cette taxe devrait rapporter 22 millions d'euros en
2002 à l'assurance maladie, ce qui est loin d'être négligeable.
C'est la raison pour laquelle la commission vous propose de supprimer
l'article 6
bis
et de rétablir cette taxe.
J'ai entendu les grossistes-répartiteurs développer leurs arguments lors de
l'audition à laquelle j'ai procédé. J'ai également entendu le point de vue des
dépositaires, soit directement, soit par l'intermédiaire de personnes qui se
faisaient leurs porte-parole. Il ressort de ces entretiens que les dépositaires
se sont émus du fait que la commission des affaires sociales prenne
l'initiative du rétablissement de cette taxe sur les ventes directes, faisant
valoir que, eux aussi, exercent, au moins pour partie, une mission de service
public.
Il n'a pas été facile pour le rapporteur de se faire une juste idée du
problème à partir des arguments des uns et des autres.
C'est la raison pour laquelle il me semble plus sage de recommander au Sénat
d'adopter aujourd'hui la position que nous lui proposons. Nous verrons, au
moment de l'examen en commission mixte paritaire, quels seront les arguments
qui seront développés par nos collègues de l'Assemblée nationale.
Au-delà, quelle que soit la décision que prendra la commission mixte paritaire
sur les ventes directes, il me semble, monsieur le ministre, qu'il serait utile
et judicieux qu'un point précis soit effectué sur ce dossier, car je vous avoue
très sincèrement que j'ai du mal à y voir clair. Mais peut-être, monsieur le
ministre, pourrez-vous nous éclairer sur ce dossier dès ce soir, de manière que
nous puissions faire la part des choses, de façon tout à fait objective et en
pesant les avantages et les inconvénients respectifs du rétablissement ou du
maintien de la suppression de la taxe.
Nous sommes animés du souci de ménager des conditions de concurrence qui
soient égales pour tous, grossistes-répartiteurs et dépositaires, tout comme le
précédent gouvernement, à l'époque, quand il avait proposé ce dispositif.
Par conséquent, je ne demande qu'à être convaincu par la solution la meilleure
en la circonstance.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Sur cet article, je m'en étais remis à la sagesse de
l'Assemblée nationale. Par souci d'équité, je vais donc m'en remettre à la
sagesse du Sénat...
M. Guy Fischer.
C'est ambigu !
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Ce n'est pas du tout ambigu, il arrive que le Gouvernement
fasse confiance !
M. Alain Gournac.
Cela arrive !
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Cela arrive même plus souvent que vous ne le pensez, monsieur
Fischer !
M. Alain Gournac.
Bravo !
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Il est vrai que nous avons des données - il faut être direct -
qu'il est très difficile d'apprécier au fond.
Ainsi, le rendement de la taxe sur les ventes directes représentait 24,8
millions d'euros en 1998, 25,6 millions d'euros en 1999, 29,8 millions d'euros
en 2000 et 28,4 millions d'euros en 2001. Tel est l'ordre de grandeur.
Par ailleurs, dans le cadre du contentieux Ferring-Acoss, la Cour de justice
des Communautés européennes a rendu un arrêt le 22 novembre 2001 dans lequel
elle estime que la taxe sur les ventes directes n'est pas une aide d'Etat si
elle ne fait que compenser strictement les surcoûts liés aux obligations de
service public des grossistes-répartiteurs.
La seule question qui se pose, et je dois vous avouer que je n'ai pas de
solution immédiate, concerne la réelle estimation de ces surcoûts.
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
Voilà !
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Or, actuellement, nous ne disposons pas d'estimation économique
précise.
C'est la raison pour laquelle je m'en remets à la sagesse du Sénat sur cet
amendement.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 10.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 6
bis
est supprimé.
Article 7