SEANCE DU 19 NOVEMBRE 2002
M. le président.
L'amendement n° 73, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 7
bis
, insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Au premier alinéa de l'article L. 161-1 du Code de la sécurité sociale,
après les mots : "qui en font préalablement la demande", sont insérés les mots
: "et bénéficient de l'aide à la création ou reprise d'entreprise instituée par
ledit article".
« II. - Au premier alinéa de l'article L. 161-1-1 du code de la sécurité
sociale, après les mots : "du code du travail", sont insérés les mots : "qui
bénéficient de l'aide à la création ou reprise d'entreprise instituée par ledit
article".
« III. - Sous réserve des décisions juridictionnelles passées en force de
chose jugée, les dispositions du présent article sont applicables au 1er
janvier 2002. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei,
ministre.
L'aide aux chômeurs créateurs et repreneurs d'entreprise,
l'ACCRE, consiste en une exonération de cotisations de sécurité sociale
assortie éventuellement d'une aide complémentaire de l'Etat. Elle est accordée
en fonction des caractéristiques du projet de création ou de reprise
d'entreprise, notamment sa réalité, sa consistance et sa viabilité, compte tenu
de l'environnement économique local.
Le Gouvernement souhaite augmenter les créations d'entreprises, notamment par
les chômeurs. Mais il lui semble dans le même temps nécessaire de privilégier
la création d'entreprises viables. Cette démarche, arrêtée en 1987 et
poursuivie depuis, permet d'assurer la bonne utilisation des deniers publics,
ce qui est de l'intérêt même des demandeurs d'emploi.
Or la Cour de cassation a rendu récemment une décision selon laquelle
l'exonération de cotisations sociales doit être accordée à l'ensemble des
personnes visées à l'article L. 351-24 du code du travail.
L'application de cette jurisprudence aurait pour effet d'attribuer l'ACCRE
sans que l'on puisse s'assurer de la viabilité du projet. Elle représenterait
un doublement de la charge supportée par les régimes de sécurité sociale.
Aussi, l'amendement qui vous est proposé, compte tenu de la jurisprudence de
la Cour de cassation, vient modifier la rédaction des articles L. 161-1 et L.
161-1-1 du code de la sécurité sociale.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Monsieur le ministre, je voudrais savoir qui aura la charge d'apprécier la
viabilité de la création de l'entreprise. S'agit-il de fonctionnaires, ou bien
la concertation sera-t-elle plus large ?
M. Alain Gournac.
Bonne question !
M. Jean-Pierre Fourcade.
Que la viabilité de la création d'une entreprise
a priori
exemptée de
cotisations sociales puisse être appréciée par des personnes qui ne savent pas
ce qu'est une entreprise m'inquiète beaucoup !
(Sourires.)
Je voterai néanmoins votre amendement, monsieur le ministre, car la Cour de
cassation est allée un peu loin.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Monsieur Fourcade, il est quelquefois très utile d'avoir des
collaborateurs à portée d'oreille ! On me fait savoir que la direction
départementale de l'emploi sera chargée de cette mission.
Pour autant, si vous souhaitez une information plus précise, je m'engage à
vous la faire parvenir par écrit.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Je vous remercie, monsieur le ministre.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 73.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 7
bis
.
L'amendement n° 50 rectifié, présenté par MM. Gournac, Murat, Chérioux et
Karoutchi, est ainsi libellé :
« Après l'article 7
bis
, insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« L'article 44 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions
statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« La prise en charge de ces soins ne constitue pas un avantage en nature au
sens de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac.
Depuis le mois de janvier 1986, les fonctionnaires hospitaliers en activité
bénéficient de la gratuité des frais d'hospitalisation, des soins médicaux et
des produits pharmaceutiques qui leur sont dispensés dans l'établissement où
ils exercent. Certaines URSSAF considèrent qu'il s'agit d'avantages en nature
soumis aux cotisations sociales. Cet amendement tend à préciser la nature de
cet avantage en nature, afin que ce soit le législateur, et non pas les URSSAF,
qui décide.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
La commission souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement
sur la proposition de nos collègues.
M. Alain Gournac.
Une bonne proposition !
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Il s'agit effectivement d'une question d'égalité. Je vais vous
livrer les réflexions qui ont suivi le dépôt de votre amendement, monsieur
Gournac.
Il ne s'agit pas de savoir si cet avantage doit être exonéré de cotisations
sociales puisqu'il l'est déjà. C'est sur son régime au regard de la CSG et de
la CRDS que les URSSAF se sont prononcées.
La Cour de cassation a confirmé le bien-fondé de cet assujetissement dans
trois arrêtés du 13 décembre 2001. Ainsi elle a considéré que la gratuité des
soins constitue un avantage en nature qui entre dans l'assiette de la CSG et de
la CRDS en l'absence de dispositions expresses contraires. Il n'existe pas de
motif pour qu'un tel avantage, qui permet aux personnes intéressées de faire
des économies de frais, ne soit pas soumis à la contribution sociale, comme le
sont tous les avantages en nature accordés sous une forme non monétaire par les
entreprises à leurs salariés. Mais il y a de sérieux risques pour qu'une telle
disposition fasse l'objet d'une demande reconventionnelle.
Les avantages fournis sous une forme non monétaire s'ajoutant à la
rémunération sont nombreux et souvent significatifs pour les entreprises, comme
pour le secteur public. Ils constituent une composante essentielle de
l'assiette sociale. Notons que cet avantage ne bénéficie plus qu'à la catégorie
C des fonctionnaires hospitaliers, à la suite d'un rapport de l'inspection
générale des affaires sociales, l'IGAS, critiquant ce dispositif.
C'est la raison pour laquelle, monsieur le sénateur, le Gouvernement souhaite
le retrait de votre amendement.
M. le président.
Monsieur Gournac, votre amendement est-il maintenu ?
M. Alain Gournac.
J'ai écouté M. le ministre avec beaucoup d'attention et de tristesse parce que
nous rencontrons les plus grandes difficultés à recruter du personnel
hospitalier - M. le ministre est bien placé pour le savoir. Ainsi, à
Saint-Germain-en-Laye, le service des urgences n'est plus assuré la nuit -
c'est l'hôpital de Poissy qui le prend en charge - du fait du manque de 107
personnes, dont nombre d'infirmières, ce qui met en émoi toute la région.
C'est un avantage, j'en suis tout à fait conscient. Toutefois, il s'agissait
d'être soigné dans son propre hôpital. Je le regrette, mais les arguments qui
ont été donnés m'incitent à retirer mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 50 rectifié est retiré.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Je tiens à dire à M. Gournac une chose essentielle : il a tout
à fait raison lorsqu'il parle de pénurie de personnels, notamment dans
l'établissement qu'il a cité.
Je l'assure que la tâche que je me suis assignée - je vous en parlerai dans un
instant, lors du débat sur l'assurance maladie - est bel et bien de lutter
contre la pénurie de personnels.
Toutefois, je ne suis pas certain que le meilleur argument pour recruter du
personnel soit de l'assurer qu'il sera soigné dans son hôpital s'il est malade.
Il faut trouver d'autres méthodes incitatives, mais je sais qu'il l'a compris.
(M. Alain Gournac sourit.)
Article 8