PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL

vice-président

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.

M. Pierre-Yvon Trémel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question orale de M. Larcher arrive vraiment à point nommé, tant l'actualité presse le Gouvernement et le Parlement de rendre plus lisible l'avenir qu'ils entendent réserver aux services publics.

Plusieurs orientations et plusieurs décisions annoncées par le Gouvernement viennent renforcer ce besoin d'éclairage, tandis que certaines prises de position de l'Union européenne et l'état des négociations au niveau de l'Organisation mondiale du commerce renforcent les interrogations et les inquiétudes.

Le débat très utile engendré par cette question orale se déroule à un moment où la France est secouée par des mouvements sociaux, dont le moteur est bien le devenir des services publics.

Ce débat se déroule au moment où le Premier ministre lance la préparation du budget de l'Etat pour 2004 et alors qu'il affirme que « l'Etat ne doit pas dépenser un euro de plus en 2004 », tout en poursuivant une politique de baisse des impôts. Parallèlement, le secrétaire d'Etat au budget affiche publiquement la volonté du Gouvernement de ne remplacer qu'un seul fonctionnaire partant à la retraite sur deux. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Notre échange a lieu alors que nous débattrons bientôt des lois organiques liées à la « grande réforme » voulue par le Premier ministre. Je parle de l'acte II de la décentralisation, aux termes duquel des agents en provenance des services de l'Etat seraient massivement transférés vers les collectivités territoriales.

Dans le même temps, la Commission européenne prévoit d'adopter le 21 mai prochain, c'est-à-dire demain, un livre vert sur les services d'intérêt général.

Ce document lancerait une réflexion sur le statut des services d'intérêt général - ce qui, dans le langage européen, signifie « services publics » - et sur leur rôle dans le modèle européen, après l'ouverture à la concurrence des industries de réseaux dans les domaines de la poste, de l'énergie, des transports et des télécommunications.

Toujours dans le même temps et dans le cadre des négociations multilatérales menées au sein de l'Organisation mondiale du commerce, l'accord général sur le commerce et les services, l'AGCS, vise à libéraliser tous les secteurs, à l'exception des services fournis dans l'exercice du pouvoir gouvernemental. L'intervention de l'Etat serait alors réduite à ses seules prérogatives régaliennes.

N'en jetez plus, la coupe est pleine !

Il est en effet urgent, dans un tel environnement, d'ouvrir de nouveau le débat sur l'avenir des services publics. C'est d'autant plus urgent que les élus de terrain que nous sommes sont les spectateurs quotidiens, année après année, d'une profonde remise en cause de la présence de l'Etat et de ses services sur le territoire.

Mais soyons encore plus concrets et prenons l'exemple d'un département. Vous ne m'en voudrez pas si j'évoque celui que je suis censé le mieux connaître : le département des Côtes-d'Armor.

Depuis le début de l'année 2003, la population costarmoricaine et ses élus ont pris connaissance des décisions suivantes.

S'agissant du Trésor public, toutes les perceptions comptant moins de trois agents seraient supprimées. Huit chefs-lieux de canton perdraient leur perception et une recette des finances serait appelée à disparaître.

Pour ce qui concerne la Banque de France, une succursale sur les deux présentes dans le département est supprimée. Ce sont au total sept implantations de la Banque de France en Bretagne qui vont être rayées de la carte.

En matière de police et de gendarmerie, un commissariat doté d'un effectif de cinquante-cinq personnes fermera ses portes en 2005 et une brigade de gendarmerie est supprimée.

Pour ce qui est de l'hôpital public, le service maternité d'un centre hospitalier d'une ville moyenne, géographiquement isolée, est condamné à fermer ses portes, alors même qu'il a fait l'objet d'une évaluation positive et qu'il répond aux normes de sécurité.

La direction départementale de La Poste a, pour sa part, lancé un important programme de restructuration de son réseau. Plusieurs bureaux de plein exercice sont concernés et il est projeté de les transformer en « agences postales communales » ou en « points de contact dans des établissements commerciaux ».

Cette évolution inquiète les élus locaux au point - et c'est un fait nouveau - que l'association départementale des maires propose la tenue d'états généraux du service public.

Nombre de nos collègues peuvent dresser le même constat dans leurs départements respectifs. Les multiples questions écrites ou orales qui ont été posées ces derniers mois au Gouvernement sur ce sujet reflètent bien le désarroi des élus face à ce mouvement de réorganisation des services. Ils évoquent en effet, quelle que soit leur sensibilité politique, le « démantèlement lancinant », l'« abandon des communes et des cantons ruraux ».

Le problème, nous le savons, n'est pas nouveau, mais les orientations du Gouvernement contribuent à mettre plus fortement en lumière les deux logiques qui s'affrontent : d'une part, la logique de la rationalisation des moyens exigée des responsables des services par le pouvoir politique, soucieux, en tant que gestionnaire, de gains de productivité et désireux de mieux maîtriser les dépenses publiques ; d'autre part, la logique du maintien de la présence de l'Etat sur tout le territoire, présence garante du respect de principes bien ancrés - égalité, proximité, attractivité.

Face à cette confrontation, les élus n'ont souvent d'autre choix que d'adopter des positions défensives, révélatrices, quel que soit le gouvernement en place, d'une grande incohérence : soit soutenir le Gouvernement dont ils se sentent proches, qui prend les décisions de fermeture, soit refuser ces décisions, à l'échelon local, lorsqu'elles concernent leur ville, leur commune, leur circonscription.

M. Larcher déclare : « Les structures de beaucoup de ces services publics vont devoir s'adapter. C'est une nécessité. » Mais il ajoute que cette adaptation ne saurait se traduire ni par une remise en cause de la qualité des prestations d'intérêt général rendues à nos concitoyens dans les zones défavorisées ni par un dépérissement de certains territoires.

Quant à M. le ministre, dont nous suivons avec intérêt les prises de position en réponse aux questions qui lui sont posées, il va sans doute nous proposer tout à l'heure de bâtir un nouveau contrat qui soit « gagnant-gagnant ». (Sourires.)

Nous sommes très attentifs aux propos de l'un et de l'autre. Il est deux points sur lesquels nous pouvons rapprocher nos points de vue.

D'une part, il convient de mettre au centre de la réflexion et de toute réorganisation des services publics l'usager, et non pas le service public lui-même.

D'autre part, nous avons l'« ardente obligation » de quitter des positions défensives et de bouger parce que le monde et la société changent, parce que de nouvelles technologies apparaissent, parce que les services publics ne sauraient échapper, comme toute organisation, à la recherche de la meilleure réponse à apporter à l'usager, de la plus grande efficacité au moindre coût.

Mais comment bouger ? C'est là que peuvent apparaître les divergences.

Deux préalables doivent être posés.

Premier préalable : du passé, ne faisons pas table rase ! (Sourires.)

Dans l'affrontement des deux logiques, nous ne partons pas de rien. Depuis une dizaine d'années, bien des réflexions ont été conduites ; nombre d'initiatives ont été prises.

Un rapide état des lieux permet de citer pêle-mêle : les schémas départementaux d'organisation et d'amélioration des services publics, les espaces ruraux pour l'emploi et la formation, les guichets initiative-emploi, les plates-formes de services publics, les maisons de services publics, les maisons de justice et du droit, le programme d'action gouvernemental pour l'entrée de la France dans la société de l'information, ou PAGESI, le développement de sites publics et des téléprocédures, les projets territoriaux de l'Etat, les commissions départementales d'organisation et de modernisation des services publics, et j'en oublie certainement.

Des évaluations de toutes ces initiatives ont été réalisées, et nous avons suffisamment de recul pour identifier ce qui marche comme ce qui ne marche pas, pour repérer les freins, les obstacles, les erreurs à éviter.

Je retiens, personnellement, que les succès dans la recherche de nouvelles relations entre les services publics et les usagers ont été obtenus lorsqu'il y a eu réellement analyse collective des besoins à satisfaire et mise en place d'un pacte de financement pluriannuel clair entre les partenaires.

Monsieur le ministre, nous aimerions savoir quelles leçons vous-même tirez de toutes ces expériences.

Deuxième préalable nécessaire : ne pas mettre la charrue avant les boeufs.

Il n'est pas possible de parler des services publics sans s'arrêter sur la définition que l'on entend donner du service public, sans clarifier les enjeux, les objectifs et les missions de service public.

Cela conduit à apporter des réponses à quelques questions fondamentales : quel Etat voulons-nous ? Quelle présence de l'Etat souhaitons-nous sur le territoire ? Qui doit assumer des missions de service public ? Dans quelles conditions et avec quel cahier des charges ?

L'exemple de La Poste, souvent cité, illustre bien la nécessité d'un cadrage préalable, faute de quoi tout dialogue avec son personnel, ses partenaires, ses clients, devient impossible pour l'opérateur.

Il n'est pas sérieux de préconiser de nouvelles formes de présence postale sur le territoire tant que le contrat liant l'Etat et La Poste, définissant la mission déléguée à l'opérateur, n'est pas connu, tant que ne sont pas révélés les moyens qui sont accordés pour cela à l'opérateur.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Pierre-Yvon Trémel. Nous restons tous trop flous dans notre approche des concepts de service public et d'accessibilité. Or, tant que ce flou subsistera, il sera difficile de dégager des critères et une méthodologie, car chaque détenteur d'une mission de service public, bloqué par les impératifs budgétaires, continuera d'avoir sa propre définition de l'accessibilité.

Ce débat nous donne l'occasion de vous entendre sur ce point, monsieur le ministre. Nous souhaitons que vous nous précisiez aujourd'hui quelles sont, pour vous, les missions de l'Etat, et dans quels domaines il doit être présent. S'agit-il seulement des domaines régaliens ? Quid des secteurs structurants qui sont au coeur du pacte social comme l'éducation et la santé, par exemple ? Sur quels principes se fonde votre conception du service public ?

Ces préalables fondamentaux étant posés, les réalités vécues dans un département très concerné, on l'a vu, par tout ce qui a trait à la réorganisation des services publics m'autorisent à livrer quelques réflexions.

Une nouvelle donne est à prendre en considération : celle du nouveau découpage territorial.

La présence des services publics doit bien, désormais, être abordée à partir des intercommunalités et, là où ils sont en place et bien vivants, des pays. Il s'agit tout simplement de s'organiser au niveau des nouveaux bassins de vie et d'être en mesure d'apporter des réponses différenciées.

Ce sont aussi les échelons qui permettent cette analyse des besoins des usagers, qui est fondamentale, et l'élaboration des projets nécessaires à toute refonte éventuelle.

Un mot est sur toutes les lèvres dès qu'apparaissent des projets de réorganisation : « concertation ». Tout le monde la demande, tout le monde affirme la pratiquer. Or nous constatons que le mot n'a pas, en réalité, le même sens pour tous les acteurs mobilisés.

La « concertation-bidon », la « concertation-caution », nous les connaissons et elles n'ont plus lieu d'être si l'on affirme être favorable à une démocratie vivante.

La voie, plus difficile, plus longue, de la participation des élus, des usagers à l'élaboration des réponses mérite d'être empruntée, à condition que soit identifiée dans la transparence la capacité à décider dans un délai annoncé à l'avance.

Cette participation n'est elle-même envisageable que s'il existe une information, une présentation des enjeux, le plus en amont possible de la décision.

Les technologies de l'information et de la communication sont également une chance à saisir pour établir de nouvelles relations entre les services publics et les citoyens.

Dans ce domaine, nous ne partons pas non plus du point zéro. La mise en oeuvre du programme d'action gouvernemental pour la société de l'information, lancé en 1998, la création récente de l'Agence pour le développement de l'administration électronique, permettent de percevoir, concrètement désormais, les convergences possibles entre le téléphone, l'Internet et les guichets pour l'accueil du public. Quelques administrations et collectivités territoriales ont, en outre, mené des expériences intéressantes et transférables.

Atteindre l'objectif visé suppose d'agir simultanément sur les trois leviers à actionner : l'offre, la demande et les outils.

Pour ce qui concerne l'offre, il nous faut, au travers de l'Internet à haut débit, proposer aux usagers des services publics tous les outils leur permettant de mieux connaître leurs droits, de préparer et d'effectuer en ligne leurs démarches administratives, de suivre leur dossier, de conserver, sous forme dématérialisée, les résultats de leurs démarches.

S'agissant de la demande, tant que, dans notre pays, le nombre d'internautes restera aussi limité qu'il l'est aujourd'hui, le développement des usages dans la relation entre services publics et usagers passera par la multiplication des points publics disposant de l'environnement indispensable : locaux accueillants et bien situés, accompagnement humain compétent.

Pour ce qui est des outils, je suis très étonné de constater que seuls quelques services - la plupart du temps, d'ailleurs, des organismes sociaux : ASSEDIC, CPAM, CAF - recourent actuellement à des moyens interactifs, qui sont d'ailleurs très performants ; je pense, par exemple, aux visio-guichets, qui permettent une relation interactive.

Un programme de soutien à l'investissement dans ce type d'outils et des plans de formation pour les agents mériteraient d'être portés par l'Etat.

Monsieur le ministre, quelles sont vos orientations en la matière ? Quelles propositions concrètes êtes-vous prêt à formuler pour donner une réelle impulsion à l'usage des technologies de l'information et de la communication dans les relations entre usagers et services publics ?

Le débat ne serait pas complet si nous n'évoquions les inquiétudes nées du contenu des négociations en cours dans le cadre de l'OMC.

Monsieur le ministre, nous souhaitons connaître votre analyse sur ce dossier et les initiatives qu'entend prendre le Gouvernement pour apporter au Parlement toutes informations utiles.

Nous voulons aussi savoir si vous êtes prêt à défendre l'adoption, proposée au Conseil de Barcelone, d'une directive-cadre sur les services d'intérêt général afin que puisse se mettre en place un droit autonome européen des services publics qui ne se réduise pas à des règles dérogatoires au droit commun du marché intérieur et de la concurrence.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Pierre-Yvon Trémel. Tous les événements récents nous montrent que la solidarité et la justice, l'égalité et la sécurité ne sauraient prévaloir grâce aux seuls mécanismes du marché.

Un nouveau besoin d'action publique, et donc d'Etat, est clairement et nettement exprimé.

L'usager placé au coeur du service public, les évolutions démographiques et sociologiques, l'amplification des progrès techniques, la construction européenne, la régulation mondiale, vos choix politiques, constituent un nouvel environnement et font apparaître de nouveaux enjeux. Face à ces enjeux, le service public doit à la fois préserver les acquis imprescriptibles de notre culture de service public qu'expriment ces fameux mots en « té » - égalité d'accès, garante de la cohésion sociale, universalité, garante de la cohésion territoriale, mutabilité, qualité, neutralité et continuité - et montrer sa volonté comme sa capacité de répondre à de nouvelles attentes.

C'est seulement à ce prix que seront réduites les fractures dont nous sommes les témoins : fractures territoriale et sociale, fractures numérique et civique.

Un Etat fort et présent financièrement - et pas seulement « passeur » de charges vers les collectivités locales - , une volonté politique clairement exprimée, une information mieux partagée, une concertation réelle, une nouvelle culture administrative : telles sont les conditions nécessaires pour qu'il soit possible de parler d'un avenir pour les services publics.

Les expérimentations lancées dans trois départements pilotes et l'expérience accumulée dans les autres départements vont nous donner l'occasion de mesurer la concordance entre les discours et les actes.

Ce débat, fruit d'une très bonne initiative, appelle d'autres rendez-vous tant le sujet est difficile, mais aussi éminemment politique, car il s'agit bien de la défense du pacte républicain, qui exige un renouveau de l'action publique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Murat.

M. Bernard Murat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le maintien des services publics en milieu rural est au coeur des préoccupations des élus locaux, car les territoires ruraux, pour exister pleinement à l'heure où tout s'inscrit dans une dimension internationale, se doivent plus que jamais d'offrir à leurs habitants des services de qualité, de manière à éviter la désertification.

Les services publics font partie du dispositif indispensable au maintien des populations rurales et conditionnent le développement d'autres activités économiques tout en constituant des gisements d'emplois pour les « ruraux », en particulier dans le domaine du tourisme vert. Nous le savons tous, les territoires qui se dotent d'un bon réseau de services aux personnes peuvent mieux que d'autres retenir leurs habitants.

Pour qu'une commune vive, il faut qu'il y ait une communauté, donc qu'existent des lieux de rencontre, de sociabilité, de vie commune. Maintenir une permanence physique locale du service public devient un objectif politique, sauf à renoncer à la démocratie de proximité telle qu'elle s'est historiquement développée dans notre pays, ainsi qu'à renoncer à l'aménagement durable de nos territoires.

Or, aujourd'hui, les problèmes les plus sensibles en zone rurale concernent le fonctionnement des écoles maternelles et primaires, des bureaux de poste, le maintien des effectifs de gendarmerie, des transports, de services de soins fiables, etc.

Toute fermeture de classe est ressentie dans les campagnes comme un traumatisme, car c'est de l'école que dépend souvent la décision des familles de s'installer ou simplement de rester dans la commune.

Par exemple, dans mon département, la Corrèze, mon collègue Georges Mouly et moi-même sommes régulièrement saisis par les élus de la suppression de certaines cabines téléphoniques, de l'adaptation des horaires d'ouverture du bureau de poste, de la délocalisation des facteurs, de la fermeture de classes maternelles ou primaires, et j'en passe...

Je citerai les noms de communes qui n'évoqueront pas grand-chose ici, mais je veux le faire parce que les maires me l'ont demandé : Saint-Germain, Saint-Robert, Neuvic, Beaulieu, Saint-Jal, Ayen. Toutes ces petites communes corréziennes, qui ont chacune leur histoire, ont été, parmi d'autres, touchées, au grand désarroi de leurs élus.

La seule justification de ce départ des services publics des zones rurales serait la réorganisation des services pour tenir compte d'une baisse de la démographie ou de la modernisation technologique.

Aujourd'hui, en toute occasion, les représentants de l'Etat incitent systématiquement les élus à se battre pour préserver le tissu économique rural. Quand ils ont dit ça, ils ont tout dit ! Mais quels sont nos moyens d'agir concrètement lorsqu'un artisan ou un commerçant décède ou décide de prendre sa retraite et que ces arrêts d'activité donnent des arguments aux administrations et services publics pour fermer classes, bureaux de poste, etc. ?

C'est donc un cercle vicieux, une spirale infernale que ces maires ruraux vivent au quotidien !

Les zones péri-urbaines sortent mieux leur épingle du jeu, au détriment, précisément, des zones les plus éloignées des principaux axes routiers.

La question est donc de savoir quel type d'activités économiques nous pouvons implanter et promouvoir dans les zones rurales. Quelles incitations peut-on trouver pour les futurs investisseurs ? Il est normal que l'Etat se modernise, mais il faut avoir le courage d'affirmer qu'une véritable politique de revitalisation passe par une péréquation inégalitaire en faveur des territoires ruraux.

Dans le même esprit, je propose d'installer des « zones franches rurales » et de développer tous les moyens de communication modernes, depuis le téléphone mobile jusqu'au haut débit.

Pour en revenir plus directement au service public - ou plus exactement au service qui était traditionnellement public -, je rappellerai que La Poste est entrée dans le domaine concurrentiel avec la loi de 1992 et que la masse salariale représente 80 % de son budget. Les marges de manoeuvre de l'entreprise La Poste sont donc extrêmement réduites au regard de la concurrence internationale.

Il convient de développer de nouvelles méthodes de maintien des services publics, faisant prévaloir une approche des véritables besoins des territoires et s'inscrivant dans une vision à long terme de leur développement, telle celle que font ressortir les contrats d'agglomération ou les contrats de pays.

De nouvelles solutions faisant appel à la polyvalence d'activités dans un même lieu et au partenariat entre public et privé pourraient être envisagées ; je pense au regroupement de services publics « sous un même toit ». Les maisons de pays et les maisons d'associations illustrent cette approche.

De nombreuses épiceries rurales britanniques abritent traditionnellement un guichet de poste, et la pharmacie la plus proche confie au commerçant local les médicaments commandés.

En France, il existe des points publics en milieu rural qui offrent essentiellement des prestations concernant le secteur du travail et de l'emploi. Depuis 1996, des maisons de services publics ont été créées à titre expérimental.

Pourquoi ne collaborerions-nous pas avec les chambres de commerce et d'industrie, qui pourraient mettre en oeuvre des partenariats en vue d'ouvrir des magasins où l'exploitation des services postaux deviendrait économiquement plus rentable, car jumelée avec la vente au détail de journaux, de tabacs, de produits de boulangerie, en particulier pendant la période estivale ?

Outre les services publics, on pourrait envisager de regrouper dans un même lieu des services au public proposés par des acteurs privés et professionnels libéraux. Ces « maisons » en milieu rural permettraient ainsi d'y maintenir tous les services de proximité qui sont utiles à la population : distribution du courrier et accès aux services associés aux nouvelles technologies seraient assumés par La Poste, informations et conseils sur l'assurance par les agents généraux, informations et conseils spécialisés par d'autres professions libérales et de services.

Malheureusement, monsieur le ministre, dans l'exercice de leurs missions, les structures polyvalentes rencontrent au moins deux problèmes majeurs. Le premier est d'ordre financier : les aides et les subventions n'ont aucun caractère d'automaticité. Le deuxième est lié aux ressources humaines, dans la mesure où les statuts très diversifiés des agents ne leur offrent aucune garantie de stabilité.

A ce sujet, monsieur le ministre, je tiens à vous dire combien, avec de nombreux autres élus locaux, maires et conseillers généraux, je suis choqué de constater que des fonctionnaires d'Etat trouvent dégradant de venir dans la fonction territoriale. Croyez-moi, les fonctionnaires territoriaux sont des gens d'aussi grande qualité que les fonctionnaires de l'Etat ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)

M. Gérard Larcher. Très bien !

M. Bernard Murat. C'est bien dommage, car ce mode d'intervention mériterait d'être développé : il répond en effet à une attente réelle et il préserve un principe fondamental, celui de l'égalité des usagers dans le cadre de la République.

Je sais, monsieur le ministre, que le comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire a dernièrement décidé de conduire des expériences d'organisation innovantes dans plusieurs départements. Il semblerait que, dans le projet de loi relatif au développement de l'espace rural que nous présentera prochainement le ministre de l'agriculture, certaines de ces pistes puissent être proposées.

En conclusion, je crois que les élus, quels qu'ils soient, doivent aborder l'avenir des services publics avec pragmatisme, en partenariat avec les acteurs locaux. Dans ce domaine, il est important que l'élu soit au centre des négociations et non pas toujours mis devant le fait accompli.

La notion de service public va devoir évoluer vers la notion de service au public, c'est-à-dire de service aux usagers. Je forme le voeu que la loi de décentralisation ait un effet positif pour la France en général et pour les zones rurales, qui en ont le plus besoin, en particulier, car il ne peut y avoir de politique si l'homme n'est pas au coeur de celle-ci. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin.

M. Christian Gaudin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de la dernière assemblée générale de la Fédération nationale des maires ruraux, le 1er février 2003, Nicolas Jacquet, délégué général de la DATAR, se voulait rassurant sur la volonté politique de favoriser davantage la ruralité. Il annonçait notamment qu'il préférait voir une personne vendre dans une petite commune un billet SNCF, un carnet de timbres ou délivrer de l'argent auprès d'un service marchand qu'autant de personnes dans chacun de ces services respectifs au chef-lieu de canton.

Pouvons-nous espérer enfin une réelle volonté politique de sauvegarder les communes rurales pour préserver l'équilibre de notre territoire ?

Comme le rappelle M. Gérard Larcher dans sa question, la réorganisation en cours des services publics risque de se faire au détriment des zones rurales. C'est pourquoi l'ouverture à la concurrence de plusieurs secteurs impulsée par Bruxelles - je pense notamment à La Poste ou à la réforme de l'Etat - rend plus que jamais nécessaires la concertation avec les élus locaux, mais aussi la redéfinition avec les populations de la notion même de service public de proximité, en tenant compte des nouveaux comportements de la société.

Si le maintien des services publics est un problème crucial pour les habitants de ces zones rurales, il est tout aussi important pour eux de maintenir des commerces de proximité, en particulier des points alimentaires. Il est nécessaire de faire preuve d'innovation à cet égard.

Si le fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, le FISAC, est une initiative louable, notamment pour les petites communes, il faut aller au-delà en s'appuyant sur l'intercommunalité. Je m'inspirerai d'exemples pris dans les départements de l'Aude et de la Manche. Face à la désertification rurale et à la fermeture des derniers commerces dans certains cantons, il a été décidé de créer, en s'appuyant sur les agences postales, des points multiservices qui permettent d'offrir aux habitants du canton des services marchands, par exemple une épicerie, un service de commande de médicaments, ou des services non marchands d'intérêt général. Les besoins étant différents dans chaque village, les points multiservices ont été conçus de manière souple afin de moduler l'offre de services.

Dans ces expériences, le rôle de l'intercommunalité a été déterminant. Cette initiative est exemplaire, car lutter contre la désertification des zones rurales, c'est avant tout maintenir les conditions nécessaires à une vie normale.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, il me semble nécessaire de réfléchir à la mise en place de modes de soutiens nécessaires à ce type d'initiatives de services mixtes via l'intercommunalité de proximité.

La volonté politique, c'est d'abord une prise de conscience associée à des moyens. Je pense que les Français ont tout à fait pris conscience que les zones rurales constituent des lieux à vivre, et même à mieux vivre. Toutefois, assurer un minimum de services publics en facilitant notamment les points multiservices résulte davantage d'une volonté de sauvegarde, mais n'est pas suffisant pour instaurer la vitalité ou simplement l'attractivité d'un territoire. Seul l'emploi de proximité peut attacher et attirer une nouvelle population sur des territoires ruraux, ou tout simplement défavorisés.

Le principal objectif de la décentralisation doit être d'accompagner et d'impulser la croissance économique en dehors des pôles urbains. Depuis un siècle, les grandes révolutions industrielles ont souvent renforcé l'inégalité territoriale. Le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication, les NTIC, ne déroge malheureusement pas pour l'instant à la règle.

Ces NTIC présentent une structure comparable aux infrastructures de transport et elles sont aussi indispensables. Toutefois, elles sont flexibles et peuvent être implantées plus facilement. En améliorant les services et en développant de nouvelles fonctionnalités, les NTIC touchent tous les secteurs de l'économie. Leur implantation représente une réelle opportunité de développement économique, d'un développement qui doit être mis à la portée de tous.

Les réseaux de communication permettant l'accès à l'Internet rapide, le haut débit, sont devenus incontournables. Les services publics, comme les entreprises, ne seront compétitifs que reliés au haut débit. Assurons aux entreprises et aux services publics, sur tout le territoire et sans prendre de retard, la même chance de développement. Les communes rurales situées à proximité des pôles d'activité, même de taille réduite, pourront alors vendre leur qualité de vie.

L'égalité des citoyens face aux services qu'offrent les NTIC doit être assurée. Les échanges, commandes, conceptions de projets, facturations, inscriptions ou recherches parviendront, à Paris par exemple, dans les mêmes conditions et dans les mêmes temps, qu'ils soient réalisés à Marne-la-Vallée, sur les bords de Loire ou dans le Limousin.

La réorganisation des services publics ne constitue qu'un élément - certes vital, mais partiel - de l'enjeu que doivent relever les collectivités locales.

Monsieur le ministre, à l'occasion d'un colloque au Sénat, qui avait pour thème « Les enjeux du haut débit : collectivités locales et territoires à l'heure des choix », vous aviez, en conclusion des débats, non seulement résumé l'usage potentiel du haut débit dans une perspective territoriale, mais également soulevé les interrogations et les craintes éventuelles des collectivités locales. Ces dernières se voient confier un véritable enjeu : développer les services et l'économie sur l'ensemble de leur territoire en endossant le rôle nouveau d'opérateur, tout en garantissant une cohérence de leurs actions.

Si je comprends l'inquiétude des élus, je connais aussi leur capacité à se mobiliser. J'espère que les projets de loi qui seront prochainement examinés par le Sénat permettront de clarifier les objectifs et les possibilités offertes en matière de technologie, et surtout de prévoir l'accompagnement des collectivités territoriales qui devront assumer ces réformes.

Monsieur le ministre, faites des technologies de l'information une composante forte de l'aménagement du territoire, et donc un véritable service public de proximité. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après mon collègue Pierre-Yvon Trémel, je souhaiterais vous parler de l'avenir d'un service public en particulier, à savoir la Banque de France. Nous aurions pu décliner tous les services publics un par un mais, faute de temps, je me contenterai de n'en aborder qu'un.

Permettez-moi de vous faire part, monsieur le ministre, de mes inquiétudes et de celles de nombreux élus locaux à ce sujet.

Reprenons un instant la chronologie de ces derniers mois.

Octobre 2002 : premiers échos à propos d'un plan de restructuration dit « processus de réflexion et de concertation » - j'insiste sur ce dernier terme - « sur l'adaptation de son implantation territoriale » ; décembre 2002 : la direction de la Banque confie à son directeur général deux missions d'étude sur l'avenir de la Banque ; 7 février 2003 : publication des deux rapports Barroux et de leurs scénarii de restructuration ; 28 avril 2003 : annonce du scénario, choisi unilatéralement d'ailleurs, essentiellement départemental.

Moins de six mois pour sceller le sort de 115 succursales et 3 296 emplois, sans véritable concertation ! Des emplois qui, selon le gouverneur, seront supprimés sans licenciement. On pourrait d'ailleurs s'étonner de cette offre de départ en préretraite à des personnes qui ne l'ont pas demandé, au moment même où le Gouvernement entend prolonger la durée de cotisation pour les retraites ! L'OCDE s'inquiète de cette politique, estimant, dans le même état d'esprit, qu'on aura besoin dans le futur de plus de gens au travail pour supporter le poids de ceux qui seront à la retraite.

Nous sommes tous d'accord pour dire que la Banque de France a une mission de service public : ce rôle lui est d'ailleurs reconnu par le décret n° 601-2001 du 9 juillet 2001. En vertu de ce même décret, elle est donc soumise à des impératifs en termes d'aménagement du territoire.

La Banque de France fait ainsi partie de la liste des « établissements, organismes ou sociétés qui doivent élaborer un plan global et d'organisation » au regard de leur mission de service public. En l'absence de contrat de plan ou de service public, le décret n° 601-2001 prévoit bien que toute remise en cause des implantations territoriales de la Banque de France doit être précédée d'une étude d'impact.

Aujourd'hui, la Banque négocie un contrat de service public avec l'Etat. Depuis quand exactement, et selon quels termes ? Il est difficile de le savoir.

Un tel contrat soustrait donc la Banque de France aux obligations prévues par le décret du 9 juillet 2001, notamment à celle de réaliser une étude d'impact avant toute décision de réorganisation ou de suppression d'un service aux usagers.

Cette opportunité n'a pas, a priori, échappé aux services juridiques de la Banque de France, dont une note datée de 1996 relevait qu'avec un contrat de plan « il ne serait plus nécessaire de procéder à des études d'impact locales, études qui supposent la consultation de toutes les collectivités concernées ainsi que des préfets... »

Dès lors, on peut légitimement s'interroger sur le détournement de procédure que constituerait la conclusion d'un tel contrat de service public.

Monsieur le ministre, à la suite d'un courrier où je vous faisais part de cette interrogation, vous m'avez répondu qu'« aucun délai n'est imposé par les textes pour conclure un tel contrat » et que « la mise en chantier du contrat de service public n'a pu être engagée plus tôt du fait de contraintes particulières pesant sur la Banque de France, comme celles qui sont nées du passage à la monnaie unique ».

Soit ! Mais, je le réaffirme ici, tant que ce contrat n'est pas signé, les études d'impact doivent être réalisées.

M. Gérard Delfau. Eh oui !

M. Jean-Pierre Godefroy. Le contrat de service public ne doit pas se contenter d'entériner les décisions de la direction de la Banque, qui, selon moi, ne poursuit qu'une seule logique financière.

La négociation de ce contrat soulève, par ailleurs, d'autres interrogations. Il semblerait en effet, selon les indications d'un journaliste de la presse financière aux représentants syndicaux de la Banque, que le projet de contrat ait été entièrement rédigé par les services de la Banque de France et sous l'autorité de son gouverneur. Si tel est vraiment le cas, c'est inacceptable ! Qu'en est-il, monsieur le ministre ?

Il ressortirait également de ce projet de contrat que le périmètre des missions de service public qui seraient concernées par des obligations en termes d'aménagement du territoire serait restreint : surendettement, accès aux grands fichiers et exercice du droit au compte. C'est une vision a minima des garanties que vous entendez opposer à ce plan de restructuration !

Une étude juridique réalisée pour les syndicats indique d'ailleurs que, « si la loi prévoit une procédure particulière pour pallier l'absence de contrat de plan ou de service public, ce dans le but d'éviter la désertification en services publics de certaines régions, un contrat de service public ne peut pas, dans le seul but d'échapper à cette procédure, s'abstenir de régir l'ensemble des missions de service public imparti par la loi à cet organisme ».

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous fournir des indications précises sur ce contrat en cours de négociation ? Pouvez-vous nous dire quelles missions sont concernées et quelles garanties sont exigées ?

Au-delà des problèmes juridiques que je viens d'évoquer - et qui ont leur importance dans la situation actuelle -, je veux vous rappeler l'importance du service public de la Banque de France dans de nombreuses villes moyennes.

La Banque de France est, à juste titre, considérée comme une institution majeure de la République. Au-delà des missions qui lui sont confiées dans le cadre de la politique monétaire et fiduciaire, elle rend des services irremplaçables à la collectivité nationale.

En assurant la responsabilité de la mise en circulation et de l'entretien des billets sur l'ensemble du territoire, elle garantit la confiance dans les billets et contribue à la sécurité des transports de fonds. Fermer une succursale, c'est transférer cette responsabilité aux transporteurs de fonds privés, qui auront plus de kilomètres à parcourir et qui devront réempaqueter la monnaie avant son transport, source d'insécurité supplémentaire. Qui plus est, la Banque de France est la seule à pouvoir encore collecter les francs, et je me suis laissé dire que ce n'était pas négligeable.

Les succursales de la Banque de France jouent depuis longtemps un rôle important au service du développement local et de l'emploi. Elles réalisent des expertises financières au service des collectivités locales, des entreprises et des bassins d'emplois, dont chacun s'accorde à reconnaître la qualité et la nécessité.

J'ajoute que la disparition d'une succursale de la Banque de France entraîne le plus souvent, au plan local - et au-delà des emplois directement menacés -, la fermeture de certaines agences bancaires commerciales et d'autres administrations.

En ce qui concerne mon département et la ville de Cherbourg, que je connais bien, ce mouvement est déjà amorcé puisque votre collègue M. Mer a, depuis, annoncé la fermeture du secteur de la direction départementale de la concurrence et de la répression des fraudes, la DDCCRF. La disparition d'une succursale est on ne peut plus préjudiciable au maintien des services publics et à l'activité économique et commerciale des zones concernées.

Mais la Banque de France s'est aussi vu confier par le législateur d'importantes missions au service de la cohésion sociale. Elle assure la gestion des fichiers d'intérêt général - fichier central des chèques, etc. - et, surtout, l'accueil des personnes surendettées comme le traitement de leur dossier. Elle remplit auprès de ce public fragile un vrai rôle de service social de proximité.

Le scénario retenu à la fin du mois d'avril - une succursale par département, essentiellement dans les villes-préfectures - ne tient absolument pas compte des réalités locales et d'aménagement du territoire. Les élus locaux de toutes tendances politiques, y compris vous-même, monsieur le ministre, en ont pourtant exprimé le souhait. Il est également l'expression d'une permanence centralisatrice se traduisant par le regroupement des services publics dans les agglomérations chefs-lieux de département. C'est pourquoi j'insiste sur la nécessaire réalisation des études d'impact locales, sous l'autorité des préfets.

Il est clair que la concertation annoncée en décembre par le gouverneur de la Banque de France est restée un faux-semblant.

A Cherbourg - on ne parle bien que de ce que l'on connaît ! -, la transformation de la succursale en un seul bureau d'accueil et d'information n'a pas de sens. Il faut rappeler que Cherbourg est le deuxième bassin de vie et d'emploi de la région Basse-Normandie, après Caen. La densité du tissu économique et la présence de grosses entreprises industrielles - la DCN, la COGEMA, avec l'usine de retraitement de La Hague, l'ANDRA, avec le site de stockage, la centrale EDF de Flamanville, la CMN, le port de commerce transmanche qui représente 1,5 million de passagers par an, derrière Calais, mais aussi le port de pêche, le port de plaisance qui est le premier port de passage de l'Hexagone avec Cannes, les industries laitières, les cultures maraîchères du Val-de-Saire, etc. - justifient largement le maintien d'une antenne économique.

Par ailleurs, le fait que la succursale traite la moitié des dossiers de surendettement du département justifie également le maintien d'un centre de traitement de ces dossiers.

Dans le schéma retenu par la direction de la Banque, l'accueil des personnes surendettées continuera de se faire à Cherbourg, avec un personnel réduit - deux personnes -, et les dossiers seront envoyés à Saint-Lô pour traitement. Les multiples allers-retours entre Saint-Lô et Cherbourg - soit 150 kilomètres - ne vont-ils pas ralentir la procédure et être très pénalisants pour les personnes concernées ? Le bassin de Cherbourg représente, je le rappelle, près de 40 % de la population du département ! Il aurait fallu imaginer l'aménagement du territoire avant de prendre les décisions, et il aurait fallu consulter les élus locaux !

La gestion de ce dossier semble échapper manifestement au Gouvernement. Est-ce volontaire, monsieur le ministre ?

Vous avez déclaré, à l'Assemblée nationale, que « la défense du service public n'est pas l'immobilisme ». Je suis pleinement d'accord avec vous. Vous avez également affirmé que « l'éthique des services publics n'est pas l'abandon des territoires ». Je suis encore plus d'accord avec vous. Mais prouvez-le ! Exigez du gouverneur de la Banque de France qu'il revoie sa copie et faites preuve de fermeté sur ce dossier en imposant une réelle étude d'impact, département par département, en consultant réellement les élus sur le terrain par la voie de la procédure prévue à cet effet. L'aménagement du territoire doit être non pas délégué aux directeurs régionaux de la Banque de France, mais bien aux préfets de la République, sous l'autorité du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson.

M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question posée par notre collègue Gérard Larcher démontre à l'évidence l'importance de ce débat, importance que les différentes interventions de cet après-midi attestent.

Pour ma part, je me pose les questions suivantes : quels services publics pour demain, quels en seront exactement les contours, qu'entendent nos concitoyens par « service public », et qu'en attendent-ils ?

Avant d'examiner dans le détail les différents domaines du service public, nous devons nous poser la question suivante : lorsque nous parlons, nous, les élus, de concertation, n'oublions pas de demander à l'ensemble de nos concitoyens ce qu'ils attendent demain du service public, car nous pourrions parfois, dans certains secteurs, être étonnés des réponses qu'ils pourraient apporter !

Je reprendrai la question de M. Larcher en m'arrêtant plus particulièrement sur les quatre services publics que sont le service postal, les communications électroniques, le service de l'eau et de l'assainissement, et l'organisation territoriale de la Banque de France.

Je m'adresserai à vous, monsieur le ministre, sous le regard vigilant du président Larcher, en tant que vice-président de l'Association des maires de France, mais aussi en tant que président de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications, fonctions qui traduisent une forme de continuité à l'égard du service public.

C'est la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications qui a proposé la mise en place des commissions départementales de présence postale territoriale. Il lui a fallu beaucoup de détermination, en 1998, pour soutenir que le plus important était non pas de s'attacher au maintien d'un bureau de poste déficitaire, mais de rechercher la manière de fournir à tous les services attendus à un prix abordable et avec une qualité acceptable par l'ensemble de la communauté nationale.

Nous devons répondre aux questions que j'ai évoquées sans démagogie, parce que nous avons le devoir d'assurer un accès égal de l'ensemble de nos concitoyens aux services publics.

Il a certes fallu essuyer quelques échecs, car trop d'élus locaux ont continué à privilégier le maintien dans des locaux propres voire la création d'une agence postale sans assurer à celle-ci un équilibre économique plus solide que celui du bureau de poste. Nous ne pouvons pas citer d'exemples de grandes réussites dans ce domaine.

Aujourd'hui, les mentalités évoluent rapidement : d'une part, l'intercommunalité facilite les partenariats ; d'autre part, les premiers résultats d'expérimentations engagées dans certaines communes pour valoriser les commerçants en place paraissent concluants.

Ces expérimentations permettent de mettre à la disposition du public des services postaux de base pendant les longues plages d'ouverture des magasins, souvent sept jours sur sept en milieu rural, en complément du service personnalisé « Allo-facteur » qui existe toujours.

La mise en route de ces nouveaux bureaux de poste me paraît bien plus facile que celle des maisons de services publics, qui étaient mal adaptées aux zones peu peuplées. Mais cela ne doit pas nous dispenser de mesurer attentivement le caractère durable de ces nouvelles conventions et la qualité des prestations offertes.

Les commissions départementales de présence postale territoriale avaient été mises en place pour aider un élu local à sortir « par le haut », selon la formule traditionnelle, d'une impasse dans laquelle il était engagé avec La Poste.

Je propose que ces commissions étudient la question de l'accessibilité des services les plus nécessaires aujourd'hui et recherchent les meilleurs partenariats. Je souhaite pouvoir compter sur vous, monsieur le ministre, pour qu'elles soient chargées d'élaborer les schémas de présence postale, en concertation avec les élus, les usagers et les clients, qui sont les premiers intéressés.

Des milliers de communes vivent sans bureau de poste. Mais je rappelle que, sur les 36 700 communes de France, 32 000 ont moins de 2 000 habitants et 10 000 ont des bureaux de poste. Par conséquent, plus de 20 000 communes n'ont pas, n'ont plus ou n'ont jamais eu de bureau de poste. Il faut le dire et s'en souvenir, non pour justifier des positions nouvelles, mais pour rappeler que la présence territoriale est ainsi depuis très longtemps. Elle relève d'une organisation qui, comme l'a rappelé M. Gérard Larcher, nous vient d'une autre époque, qui a eu ses mérites mais qui correspondait à une société complètement différente, beaucoup plus rurale.

La Commission supérieure du service public des postes et télécommunications, la CSSPPT, vient de rendre un avis sur le projet de régulation postale. Elle y réaffirme que seule La Poste sera en mesure de répondre à l'attente de nos concitoyens sur l'ensemble du territoire, à condition qu'on ne la charge pas de surcoûts injustifiés, discriminatoires vis-à-vis de la concurrence et insupportables pour ses clients, qui finiraient par ne plus avoir recours à ses services.

L'aménagement du territoire, c'est bien sûr la mission du Gouvernement, c'est celle du Parlement, c'est celle des collectivités territoriales. La satisfaction des clients, c'est la priorité de l'entreprise publique La Poste. Je crois qu'il fallait aussi le rappeler aujourd'hui.

Monsieur le ministre, je souhaite maintenant attirer votre attention sur la péréquation. Le prix du timbre, service universel, est le même, quelle que soit la distance parcourue sur le territoire intérieur par une lettre et quel que soit le point du territoire où elle a été déposée. Il s'agit d'une péréquation géographique. C'est le même prix partout pour le même service et pour des clients placés dans la même situation. Et si le même tarif est appliqué à deux entreprises envoyant le même grand nombre de lettres, il est cependant plus faible que le tarif appliqué à la lettre unique.

Au moment où La Poste s'ouvre la concurrence, ne jouons pas avec les mots sans en mesurer l'impact économique. Ne comptons pas déraisonnablement sur une péréquation qui ferait payer aux entreprises n'importe quel surcoût du service aux particuliers ou à la presse.

L'Etat, propriétaire de l'entreprise La Poste, doit lui permettre de se préparer à l'ouverture à la concurrence. L'absence des charges liées à l'aménagement du territoire ou au transport de la presse, que ne supportera pas, après-demain, une entreprise concurrente, lui permettrait d'afficher de meilleurs tarifs et d'écrémer les gros clients rentables. Ces charges doivent donc être compensées par des subventions, dont l'origine reste à déterminer, dès qu'elles dépassent les avantages retirés du maintien très provisoire d'un monopole déjà bien diminué.

M. Gérard Larcher, auquel la commission des affaires économiques a confié un rapport sur La Poste, nous soumettra prochainement ses propositions. Je souhaite qu'elles puissent être rendues publiques avant que le projet de contrat de plan entre l'Etat et La Poste ne soit soumis à l'avis de la CSSPPT.

Ce nouveau rapport sera certainement excellent, et je souhaite qu'il nous permette de conforter une position française aussi compatible que possible avec celle de nos partenaires européens.

Monsieur le ministre, il y a quelques années, lorsque l'on parlait du service public « à la française », nous observions parfois les sourires amusés, voire ironiques, de nos partenaires européens. Aujourd'hui, lorsque nous faisons la synthèse de l'évolution de l'ouverture à la concurrence, je crois que les services publics « à la française » non seulement ne font plus sourire, mais peuvent servir de modèle, bien sûr en les modernisant, bien sûr en les adaptant. Ils ne sont pas considérés comme à rejeter, contrairement à ce que certains imaginaient il y a quelques années.

On a parlé tout à l'heure à cette même tribune du flou de la définition de l'accessibilité. Ce ne serait sans doute pas une exception française que de poser une durée maximale de vingt minutes pour accéder à un service public. En outre, l'opérateur postal historique doit non seulement subsister, mais aussi pouvoir se développer, car la seule activité du courrier ne suffit pas à dégager les ressources nécessaires aux investissements. La Poste vit aujourd'hui difficilement les contraintes de l'ouverture à la concurrence de l'un de ses métiers.

La distribution du courrier est un métier en voie de diminution, et le facteur du troisième millénaire sera plus le facteur hertzien que le facteur à bicyclette. En effet, l'évolution et l'utilisation des nouvelles technologies auront un impact majeur sur l'évolution de l'organisation des services publics sur notre territoire.

Je voudrais maintenant dire quelques mots sur l'accès au service public des communications électroniques.

Si nous nous en tenons à la définition actuelle du service universel, l'équipement de la France en téléphone fixe de base est satisfaisant. Tous les pays européens ne peuvent pas en dire autant.

Mais, comme pour les bureaux de poste, il faudrait nous interroger sur la couverture en cabines téléphoniques installées sur le domaine public. La révision du service universel, prévu dans le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique, en sera l'occasion. Je voudrais saluer ici le travail de notre collègue Bruno Sido et ses propositions qui, je l'espère, pourront être intégrées dans ce projet de loi.

Je souhaite également la poursuite dans la voie de la modernisation par la transposition du « paquet télécom » européen.

Il nous faut aller plus loin. Vous et nous, monsieur le ministre, nous réclamons, comme un service public, l'accès au service GSM et au haut débit. Aidez-nous à inscrire dans la loi ce que sont des besoins suffisamment exprimés pour qu'ils puissent être considérés comme des services obligatoires. L'Etat aura alors la responsabilité de les mettre à la disposition de tous.

Devons-nous attendre une décision de la Commission européenne en faveur de l'inscription de ce domaine dans le périmètre du service universel ? Elle est au stade des incitations, des déclarations tendant à promouvoir l'usage du haut débit !

Nous attendons surtout, pour le milieu de l'année, selon un engagement du commissaire Erkki Liikanen, la publication des lignes directrices pour l'utilisation des fonds structurels européens.

Ces sujets-là ont également leur importance en termes de péréquation et de solidarité sur l'ensemble du territoire.

Monsieur le ministre, je vous demande de vous informer de l'avancement des réflexions de la Commission européenne dès que vous le pourrez, dès que vous en aurez une connaissance suffisamment précise et fiable.

Je souhaite aussi que vous nous annonciez les dispositions que vous comptez prendre pour que les crédits éventuellement mis à disposition des Etats membres soient effectivement utilisés en France, notamment là où la réorganisation des services publics est en jeu.

Vous allez pouvoir vous appuyer sur les facilités ouvertes par la décentralisation et l'intercommunalité. Vous aurez des interlocuteurs nouveaux dans les communes auxquelles de nouvelles fonctions d'acteurs des télécommunications vont être attribuées par une loi, dont Bruno Sido et moi-même seront les rapporteurs devant cette assemblée, dans quelques jours.

Pour faciliter cette modernisation des services publics, l'Association des maires de France vous demande d'ailleurs de clarifier, dans la loi sur les communications électroniques, la question de la propriété des infrastructures de télécommunication dans les opérations d'aménagement conduites dans les ZAC, les zones d'aménagement concertées, et les lotissements. Elle réitère aussi sa demande en faveur d'une meilleure transparence des opérateurs sur la localisation et la nature de leurs réseaux.

Il s'agit non pas de maintenir les services du passé, mais de former nos concitoyens à de nouveaux moyens d'accès à des services publics allégés, réformés, répondant à des besoins réels et actuels. Veillons aussi à garder la maîtrise de nos réseaux et de nos technologies de l'information qui relève, pour une partie, de la responsabilité de l'Etat, même en régime de concurrence ouverte.

J'ajouterai quelques mots sur la Banque de France pour saluer ici la position prise par l'Association des maires de France par la voix de son président. Selon lui, il fallait, à la faveur de la réorganisation du territoire, et sans s'engager obligatoirement dans les études d'impact, des analyses compliquées ou une concertation qui n'en finit jamais, que chaque département dispose d'une succursale, voire, à titre exceptionnel, de deux succursales dès lors que les enjeux le justifient, mais seulement dans ce cas.

Permettez-moi de dire également quelques mots sur les services publics relatifs à l'eau, l'assainissement, le traitement des déchets et, d'une façon générale, les services publics qui sont de la compétence des collectivités locales, plus particulièrement des communes, regroupées, pour beaucoup d'entre elles, dans l'intercommunalité.

Il faut nous interroger, en matière de services publics, sur une définition précise de la régie directe et de la gestion déléguée et voir comment nous pourrions accompagner et renforcer la maîtrise des coûts et des prix lorsque nos choix s'orientent vers la gestion déléguée.

En effet, si le fait d'externaliser un certain nombre de services à caractère industriel et économique facilite la gestion du budget d'une collectivité publique, encore faut-il que cette dernière soit sûre de maîtriser les coûts et les tarifs ! Dès lors que nous avons confié la gestion à un organisme extérieur, comment maîtriser finalement ce qui, selon la définition de la loi, n'est pas autre chose que le patrimoine commun de la nation : l'eau et la distribution de l'eau potable, qui seront, fort probablement, le principal enjeu planétaire du troisième millénaire.

Voilà, monsieur le ministre, brièvement résumées les quelques réflexions et interrogations que soulève le vaste débat suscité par l'aménagement du territoire et la place que peuvent occuper les services publics dans notre pays.

L'Europe nous impose de fixer le cahier des charges des entreprises qui sont soumises à la concurrence. Mais si nous donnons une définition suffisamment claire et transparente du service public et du service universel, je suis pour ma part convaincu qu'il peut fonctionner à la satisfaction générale. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le sujet ne date pas d'aujourd'hui, mais il revêt aujourd'hui une acuité particulière. Je tiens donc à remercier M. Gérard Larcher d'avoir pris l'initiative de ce débat.

Assurer un traitement homogène et rendre un service de qualité à l'ensemble des usagers, quel que soit le territoire concerné, est une obligation d'équité. C'est ce qu'a déclaré M. le Premier ministre.

Le Gouvernement entend promouvoir le service, à la fois de proximité et diversifié, qui réponde aux besoins de la population dans les territoires ruraux. L'égalité d'accès au service public et une égale qualité dans le traitement des dossiers sont les principes mêmes dont la force nourrit les valeurs du service public.

Ces objectifs ambitieux ainsi ramassés en quelques formules doivent être atteints absolument ! Nous n'avons pas le choix, car nos concitoyens sont très exigeants, et à juste titre, en ce qui concerne les services de proximité.

Il s'agit là au demeurant d'un élément majeur d'une politique nationale respectueuse du citoyen.

Dans ce contexte, les décisions d'organisation non coordonnées prises par les organismes chargés d'une mission de service public ne sauraient que mettre en péril les dynamiques territoriales. Il convient au contraire de développer de nouvelles méthodes destinées à s'inscrire dans une approche à l'échelle globale d'un territoire.

L'objectif est que, sur un territoire donné, par exemple à l'échelle du pays, puisse se concevoir avec les différents acteurs, y compris les agents, un projet d'offre de services publics démultipliant l'accueil pour faciliter les démarches tout en rationalisant le traitement des demandes. L'usager est bien évidemment au coeur de cette démarche.

On ne saurait mieux dire, mais l'application n'en est sans doute pas si simple, les uns et les autres devant être animés d'une farouche volonté.

La première phase est celle qui consiste à faire le choix du territoire le plus opportun et à déplacer de ce fait le seul cadre communal. Ce n'est pas évident pour beaucoup d'élus et de nombreux citoyens, même si en aucun cas on ne saurait faire l'impasse, dans la phase de la recherche et de la réflexion sur le débat relatif à la place de la commune.

L'intercommunalité, chacun le constate, fait son chemin pour ce qui concerne les investissements. Le chemin est plus difficile pour les éléments de fonctionnement, tels les services publics. Les diverses formes d'intercommunalité sont trop souvent vécues, me semble-t-il, comme un empilement qui manque de lisibilité.

Il y a le pays, mais aussi la communauté de communes, les communautés d'agglomération, divers syndicats, les regroupements pédagogiques. En présence d'une telle diversité, pas toujours clairement perçue, il conviendra d'avancer avec une grande souplesse, monsieur le ministre.

Il faudra s'adapter aux réalités les plus évidentes sur le terrain. En tout cas, il ne faudra rien figer, rien imposer. L'adaptation est le mot fort en la circonstance, car il faut enfin admettre que l'organisation des services publics ne saurait rester en l'état ; il faut s'en convaincre et en convaincre les autres autour de soi, si besoin est.

La Banque de France, La Poste, l'école, pour ne prendre que quelques exemples, ne sauraient conserver, en 2004, le réseau d'implantation d'il y a cinq, dix ou vingt ans. C'est un dossier difficile en cet instant, tant il est vrai que le slogan « défense des services publics » cache à peine, bien souvent, la volonté de ne rien modifier.

L'information, la concertation doivent être larges. C'est le comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, ou CIADT, du 13 décembre 2002 qui a décidé de relancer la concertation sur l'organisation territoriale des services et de conduire des expériences d'organisation innovante.

S'agissant de la nécessité de la concertation, comme l'a dit mon ami Bernard Murat, tout le monde est d'accord. Mais que se passe-t-il en réalité ?

Pas plus tard qu'il y a huit jours, j'ai reçu une lettre de cinq maires et de leur conseiller général dans laquelle ils écrivaient : « Informés du projet de regroupement des facteurs, nous protestons tous vigoureusement contre le départ du centre de distribution du canton et le manque d'information et de consultation des élus. »

Le regroupement des facteurs se justifie. Il a été réalisé ailleurs. En revanche, le manque d'information et de consultation n'est pas tolérable et est, pour le moins, maladroit. J'ai peine à croire que cela puisse encore se passer ainsi, mais c'est pourtant le cas.

En réponse à de nombreuses questions posées depuis des années concernant les services publics, il était fait référence, monsieur le ministre, à la commission d'organisation et d'amélioration des services publics. A ma connaissance, le fonctionnement de cette instance n'a pas été, à ce jour, souvent bénéfique. A cet égard, M. Gaymard a parlé d'une nécessaire évolution. Qu'en est-il aujourd'hui et qu'en sera-t-il demain ? Pour l'heure, le fonctionnement de cette commission n'est pas du tout satisfaisant.

Information et concertation sont des conditions indispensables en vue de l'organisation du service public. Cette organisation dans les zones faiblement peuplées nécessite donc des approches nouvelles. Elles seront construites, entre autres, sur les partenariats et la polyvalence des services.

Quel sera le cadre de ces partenariats ? Voilà qui nous renvoie à la question des structures, et je n'y insiste pas. Mais, de ce point de vue, comment ne pas se référer, même si ce n'est qu'un exemple, au réseau auquel les Français sont le plus attachés, le réseau de La Poste ? Bien que notre collègue M. Hérisson se soit brillamment exprimé sur ce sujet, j'aborderai la question, car je l'ai vécue sur le terrain.

Même s'il est nécessaire que son réseau évolue, La Poste reste bien, en milieu rural, le symbole du service public. Voici ce que j'ai lu sous la plume d'un directeur régional de La Poste : « Encore une fois, il faut redire que nous avons l'obligation légale de distribuer le courrier six jours sur sept sur tout le territoire. [...Mais] vouloir par exemple que tous les bureaux de poste de France soient ouverts aux mêmes heures est sans doute devenu une vision trop simpliste. » Contrairement à ce que pourraient penser certains, il ne s'agit pas de mettre à contribution les collectivités locales pour « monnayer » le maintien de La Poste. « Au contraire, poursuit ce directeur régional, nos propositions vont dans le sens inverse. » Et de mentionner le secrétariat de mairie qui, ici, a des heures libres, ou le commerçant avec qui, là, on pourrait passer une convention, pour conclure : « L'idéal serait de pouvoir ouvrir dans chaque commune rurale un guichet unique accessible. » Comment ne pas partager ce sentiment ?

Cependant, désireux d'approfondir ma connaissance de cet aspect des choses, j'ai étudié avec attention la convention portant organisation de l'agence postale communale.

Il est procédé à son article 5, intitulé « Rémunération de la prestation », à un calcul qui me paraît bien singulier. En effet, le premier paragraphe mentionne l'engagement de La Poste de verser à la commune « une indemnité mensuelle composée d'une part rémunérant le trafic réel de l'agence et d'une part complémentaire », cependant qu'il est question au septième paragraphe d'un engagement de « verser une indemnité mensuelle d'un montant équivalent aux charges de personnel jusqu'alors supportées par La Poste ». Vient alors la définition de la part complémentaire, « égale au montant global de cette indemnité diminué de la part liée au trafic ».

Trafic réel, charges de personnel, part complémentaire... J'avoue, monsieur le ministre, ne pas y voir très clair, voire ne pas comprendre. En réalité, je crains que les activités, qu'elles soient ou non incluses dans les « opérations postales », ne soient pas nettement définies dans la convention et que leur contenu ne soit même susceptible de varier selon l'issue des négociations engagées localement. Le partenariat, que chacun souhaite, manque à tout le moins de clarté !

J'ai cru pouvoir, dans l'attente du rapport qui a été évoqué tout à l'heure, m'attarder sur l'exemple de l'agence postale communale, qui me semble pertinent.

Pour ce qui est du partenariat entre La Poste et le commerce local, la possibilité de passer une convention de prestations postales avec un commerçant est-elle bien connue ? Je n'en suis pas sûr ! Un effort d'information doit être réalisé.

Après La Poste, on pense à l'école.

Le 6 mai dernier, M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire, a déclaré : « Notre politique est claire : nous voulons maintenir les écoles, même lorsque leurs effectifs sont faibles, parce que c'est une manière de maintenir un service public d'éducation proche des populations. »

Le débat doit bien plutôt porter sur l'accueil de la petite enfance, car l'école maternelle doit rester un lieu d'apprentissage scolaire et ne peut se contenter de suppléer à l'absence de structures de garde. Monsieur le ministre, je reviens ici sur un problème important que j'avais récemment abordé à l'occasion d'une question orale : la présence des enfants de deux ans dans les écoles maternelles en milieu rural.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Georges Mouly. La prise en compte de la scolarisation des jeunes enfants en milieu rural ne peut se faire que dans le cadre d'un schéma territorial concerté, encore une fois, à la définition duquel doivent participer l'inspection académique, les communes, les regroupements intercommunaux, le conseil général.

C'est dans cet esprit de partenariat que nous allons demander aux inspecteurs d'académie de préparer l'élaboration des prochaines cartes scolaires ; car nous en avons assez d'être mis devant le fait accompli lors de la préparation des rentrées scolaires.

J'en viens à un tout autre sujet : l'expérimentation. Il a été décidé au cours du comité interministériel de l'aménagement et du développement du territoire du mois de décembre 2002, le dernier CIADT, de conduire des expériences d'organisation innovantes dans plusieurs départements.

Je me permets de signaler que mon département est demandeur - mais il n'a toujours pas reçu de réponse à ce jour - et qu'il l'est d'autant plus que la décision y a été prise de créer en milieu rural des « maisons du département », lieux d'accueil et d'information sur les compétences du département où sont également organisées des permanences de service public : ce sont en quelque sorte des maisons de service public, dont vous reconnaissez vous-même, monsieur le ministre, que la création s'assimile trop souvent à un parcours du combattant. Dans mon département, elles existent, illustrant au moins en partie ce que peut être la polyvalence de services.

Ainsi, et ce sera ma conclusion, face à une inéluctable évolution des services publics s'affiche la volonté du Gouvernement d'assurer un traitement homogène de l'ensemble des usagers et de rendre un service public de qualité quel que soit le territoire concerné. S'impose donc une obligation d'équité, condition pour que le soutien au développement local, auquel les services publics doivent contribuer, soit efficace. Nous avons là, monsieur le ministre, un devoir de résultat.

C'est dire combien les décisions d'organisation ou de réorganisation doivent être coordonnées, à quel point une nouvelle méthode de réflexion doit être mise en oeuvre, dans un souci constant de concertation, de recherche du partenariat le plus opportun et de la polyvalence, chaque fois que celle-ci est possible, sans négliger l'expérimentation.

Vaste entreprise ! Mais, monsieur le ministre, vous en conviendrez, le temps presse. A défaut du Grenelle des services publics qu'évoque le président de l'Association des maires ruraux, l'Etat, responsable de l'aménagement du territoire et de l'indispensable politique de péréquation, doit lui aussi s'engager dans le processus de cette nécessaire réforme. Assurément, il saura y prendre toute sa part. Avec la décentralisation à venir, les services publics sont à un tournant que nous devons, monsieur le ministre, négocier tous ensemble. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne peux que me réjouir de l'initiative prise par le président du Sénat, M. Poncelet, et du souhait de M. Gérard Larcher d'ouvrir le débat sur l'avenir des services publics. En effet, comme l'indiquait M. Poncelet et comme l'ont rappelé les intervenants, le Sénat est le meilleur avocat des collectivités locales, qui sont, comme les services publics, au coeur du développement des territoires.

Je suis d'autant plus honoré de répondre à cette question orale que nous sommes dans le même temps confrontés à une formidable accélération non seulement des mutations économiques, mais aussi des mutations comportementales et sociétales. A l'évidence, nous devons répondre à ce type de défi non par le maintien des structures, mais par leur adaptation aux exigences nouvelles.

Puisque ce point a été abordé par un grand nombre d'orateurs, je réaffirmerai qu'il n'y a pas, d'un côté, les adversaires du service public et, de l'autre, ses défenseurs. Sans doute, des divergences se sont fait jour sur la réorientation du service public ; mais j'ai ressenti sur l'ensemble des travées un profond respect, que le Gouvernement partage, pour les agents du service public. J'ai souvent pris position pour refuser la critique systématique des fonctionnaires à laquelle se livrent certains ; il importe en revanche de critiquer systématiquement le système dans lequel ils se trouvent et dont ils sont quelquefois prisonniers. Car ce système perdure malgré son inadaptation aux exigences d'aujourd'hui, et nous sommes coresponsables de cette situation.

Avant de répondre à chacun des intervenants, je souhaite revenir sur la définition française du service public, qu'il est bon, à la veille de négociations internationales, de connaître avec précision ; car derrière cette notion se profilent nombre d'interrogations.

La définition française du service public distingue aujourd'hui très clairement entre les services publics non marchands - pour reprendre une terminologie mise à l'honneur à l'Assemblée nationale -, tels que la santé ou l'éducation, et les services publics marchands, tels que les télécommunications, les transports, les services postaux et la distribution de l'eau.

Aucune offre ni demande de libéralisation ne sera acceptée dans le domaine des services publics non marchands, et les offres de libéralisation pour les services publics marchands ne devront pas dépasser le degré de ce qui existe actuellement au sein du marché intérieur de l'Union européenne. Quant aux demandes de libéralisation à l'égard des pays tiers - question qui est au coeur du débat -, elles n'imposent en aucune manière le démantèlement ou la privatisation du service public et préservent tant le droit à réglementer que la liberté de définir un service public universel et minimum.

La fermeté de cette position garantit, selon moi, la préservation des intérêts français, car les négociations actuelles reposent sur le mécanisme des listes positive et des limitations de l'AGCS, mécanisme selon lequel aucun membre ne peut se voir contraint à privatiser un service public contre son gré ni à l'offrir à la concurrence. Chacun d'entre nous doit donc avoir une démarche pleinement responsable dans la détermination de ce que nous voulons faire, mais sans pour autant nourrir d'inquiétudes infondées.

Par ailleurs, il me semble que, lorsqu'il s'agit de définir le service public, nous souscrivons tous aux notions d'universalité, d'adaptabilité, de prix abordables, de péréquation tarifaire et de qualité. Nous devons bien évidemment nous interroger aujourd'hui sur l'adéquation et sur la nécessité d'une offre territoriale. Que nous le voulions ou non - plusieurs d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, l'ont évoqué -, nous sommes dans une logique de concurrence territoriale et de demande de consommation de territoire, que celle-ci émane des investisseurs, des touristes, des personnes âgées ou des jeunes.

L'offre et la demande doivent être en adéquation, et l'élaboration même de l'offre, si l'on veut qu'elle soit de qualité, doit tenir compte de la place, de la définition et du rôle du service public, qui doit être intégré d'une façon non plus cloisonnée, mais territorialisée.

Il me faut préciser quels sont les axes et les méthodes, puisque, de toute évidence, le débat porte aujourd'hui sur les objectifs, sur les méthodes et sur les moyens d'accompagner cette nécessaire évolution. Pour notre part, nous souhaitons très nettement distinguer - et je reprends souvent à ce sujet les propos de M. Hoeffel, président de l'Association des maires de France - la notion d'accessibilité de celle de proximité.

Nous entrons dans une société de l'intelligence où les infrastructures valent moins que les services qu'elles apportent. Il nous faudra donc conjuguer la notion d'espace et celle de temps, car la première attente de nos concitoyens, aujourd'hui, porte sur la facilité d'accès au service public, le traitement rapide des demandes, d'une manière sécurisée, sur le plan juridique et techniquement fiable ; on voit même apparaître des données nouvelles en matière de santé ou de protection. Tout cela nécessite probablement la constitution d'un service public - pardonnez-moi l'expression anglaise - « back office, front office ».

Comment améliorer l'accès au service public ? Comment, parallèlement, réorganiser des pôles d'intelligence administrative assurant une réponse de qualité ? Car, en matière de développement du territoire, un élément tout à fait nouveau a vu le jour : la pertinence ou la qualité d'une décision politique ne dépend plus seulement de la qualité de celles et ceux qui la conçoivent, elle est directement proportionnelle à la qualité de celles et ceux qui en permettent l'élaboration mais, surtout, l'application.

La répartition de l'intelligence administrative qui est à la disposition des acteurs locaux est donc devenue un réel enjeu dans le débat sur l'aménagement du territoire. La sécurité que procurerait la proximité physique d'un service qui, par ailleurs, ne s'acquitterait pas correctement de sa tâche serait donc un leurre, parce qu'elle masquerait une aggravation de l'inégalité entre les territoires. On ne peut donc imaginer un seul instant de conserver les architectures physiques passées, à l'instar des organigrammes d'armées qui restent identiques quels que soient leur champ d'action ou les défis à relever.

Nous sommes d'autant plus conduits à nous interroger que nous constatons que, dans certains pays au caractère fédéral très marqué, la répartition des pouvoirs entre les provinces et l'Etat central fait aujourd'hui l'objet de débats, la question centrale étant de savoir jusqu'où il ne faut pas décentraliser. La façon dont un virus a mis à mal le système de santé mondial est une illustration du fait qu'il y a des limites à ne pas franchir, sous peine de fragiliser les gestions nationales de la protection de la santé. On en trouverait un autre exemple dans les difficultés rencontrées pour mobiliser les moyens de lutte contre les pollutions maritimes.

Pourtant, il est clair qu'une concentration excessive des pouvoirs à l'échelon central favorise la mise en place de procédures pénalisantes en termes de réactivité et de mobilité, au détriment de la réponse de plus en plus rapide qu'attendent les acteurs économiques, pour qui le temps est un facteur d'efficacité et qui ne sauraient concevoir que cette accumulation permanente de procédures les contraigne à passer de plus en plus de temps à se concerter et de moins en moins de temps à décider. Les compétences sont donc moins bien utilisées, et il convient aujourd'hui que nous remédions à cette situation.

M. Gérard Larcher a souligné que rien ne peut se faire sans les élus locaux. C'est là une conviction forte que nous partageons. C'est pourquoi nous avons souhaité lancer des expériences pilotes dans trois départements : la Savoie, la Charente et la Dordogne. Nous envisageons d'ailleurs, monsieur Mouly, d'étendre le champ de ces expériences à la Corrèze, en réponse à une demande forte du président du conseil général, M. Dupont.

Aujourd'hui, nous sommes dans la logique d'une offre d'administration qui correspond à celle des structures telles qu'on peut les voir « d'en haut ». On peut certes en débattre, et certains d'entre vous l'ont fait, en particulier M. Gérard Delfau, qui, depuis plusieurs années, fait preuve d'une constance inébranlable.

Cette logique est extrêmement cloisonnée et empêche la mutualisation des compétences, qui sont simplement juxtaposées, ce qui conduit à des pertes d'énergie et de moyens tout à fait incroyables. Les administrations justifient même ce cloisonnement : il permettrait de se réorganiser et, quelquefois, de mieux partager le pouvoir. On s'aperçoit ainsi qu'une administration centrale est presque comme un général qui compte ses troupes et qui n'imagine pas un seul instant que l'on puisse lui enlever un fonctionnaire sur un territoire, même s'il n'exerce pas forcément une activité essentielle, pour le mettre à la disposition d'une administration voisine.

En réalité, ce qui compte, c'est le fait non pas tellement de passer d'une administration A à une administration B, mais de savoir si le territoire concerné a besoin de la mise à disposition d'une intelligence.

Pour les expériences pilotes que nous souhaitons mettre en place, nous donnons très nettement la consigne que l'élaboration de l'offre administrative obéisse à une logique rationnelle de développement du territoire. Car une logique purement défensive d'un service qui chercherait à retenir entre ses doigts le sable d'un déclin annoncé, et presque accepté par sentiment d'impuissance, rendrait un bien mauvais service aux territoires.

Pour notre part, nous estimons que le service public est une condition nécessaire, mais pas suffisante, à la lutte contre le déclin annoncé de certains territoires. L'argent public est destiné non pas à réduire un handicap, mais à accompagner une potentialité. Car chaque territoire, comme chaque individu, peut avoir un projet de développement.

Aujourd'hui, nous souhaitons mettre un frein à une utilisation aveugle de l'argent public. Il nous faut réfléchir à l'effet levier de l'usage de cet argent public sur le développement économique, sur le développement de la cohésion sociale et sur le développement du territoire.

On observe un éparpillement de l'argent public, parce que certains refusent de poser la vraie question : eu égard à l'objectif fixé, sont-ce les problèmes qui doivent s'adapter aux structures ou bien sont-ce les structures qui doivent s'adapter aux problèmes ? A chaque fois que nous posons la question au niveau administratif, on nous répond en invoquant un sentiment d'impuissance. Or, maintenant, nous demandons à l'administration de mettre son intelligence au service de la territorialisation de l'offre des services publics. On me dit qu'aujourd'hui on ne peut pas comparer un commerce et un bureau postal, voire une administration fiscale et un autre service, et ce pour des problèmes statutaires. Mais faire preuve d'intelligence, c'est savoir comment le faire et non pas pourquoi on ne peut pas le faire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. Gérard Larcher. Très bien !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. Ce que j'ai proposé dans certains départements fait tout simplement suite à ce que vous avez vous-mêmes relevé sur le terrain. Je suis allé, par exemple, dans une région qui était en train de mettre en place les maisons régionales de service public, alors que le département instaurait les maisons départementales de service public, que l'Etat était en train de réfléchir à la réorganisation de ses services publics et que les intercommunalités s'interrogeaient sur la rationalisation des services publics. Et dans les communes de ce département, nous aurions pu avoir une, deux, trois ou quatre maisons de services publics les unes à côté des autres pour mener éventuellement des politiques partagées.

Les expériences que nous mettons en place sont donc très claires. M. Vial, vice-président du conseil général, a très clairement interpellé le Gouvernement, car, depuis quelques années, il mène cette politique de réorganisation des services publics et, à l'évidence, son approche extrêmement pertinente de l'espace régional lui permet très concrètement de mener une réflexion sur l'espace départemental : quels sont les besoins du public en termes de services ? A partir de là, quelles sont les offres possibles de services ?

Dans cette expérience, nous souhaitons dépasser très largement le seul périmètre des services de l'Etat, c'est-à-dire intégrer l'ANPE, les ASSEDIC, La Poste, etc., tout ce qui, de près ou de loin, concerne le public. Il s'agit là d'une simple mesure de bon sens. De toutes les enquêtes que nous avons diligentées, il ressort que les services de l'Etat se voyaient reprocher la mauvaise qualité du service rendu tout simplement parce que la Caisse d'allocations familiales ne répondait pas au téléphone, ou bien en raison du délai trop long d'un autre service à satisfaire une demande, alors que l'Etat n'était pas responsable.

Par conséquent, aujourd'hui, dans ces expériences, il faut laisser une totale liberté aux acteurs de terrain : ce sont eux qui doivent organiser la construction de l'offre des services au public, et non pas l'Etat.

Par ailleurs, au sein du ministère de la fonction publique, nous devons faire en sorte que l'aspect statutaire ne constitue pas un frein à la mobilité ou à la mutualisation des moyens. Nous nous y sommes engagés !

Comme le fait M. Sido et comme le disait M. Hérisson, aujourd'hui, on doit distinguer l'accès au dossier de son traitement. L'émergence de pôles d'intelligence est parfaitement possible grâce aux nouvelles technologies. Lorsque le Trésor public rencontre une difficulté, il fait appel au Centre national de documentation du Trésor public. Et quand vous interrogez votre notaire sur une question juridique extrêmement difficile, il n'appelle pas son clerc : il interroge le Centre de recherche d'information et de documentation notariales, le CRIDON, qui se trouve à Lyon, et qui est disponible pour l'ensemble des notaires de France.

A l'heure actuelle, nous avons besoin de la bonne information, au bon moment, et au bon endroit. Trop d'information tue l'information ! L'éparpillement des services affaiblit la qualité des réponses attendues. Nous pouvons donc imaginer la construction pyramidale de pôles d'intelligence ayant la capacité d'irriguer toutes les préfectures, toutes les régions, ou seulement deux, trois, quatre ou cinq d'entre elles. A partir de ce moment là, nous sommes dans une logique d'offre de services publics eu égard à une demande territoriale qui correspond à un objectif politique : développer l'économie de ce territoire et assurer la cohésion sociale.

Dans dix ans ou quinze ans, si nous avons davantage la volonté d'accompagner les aides publiques en les globalisant, la réorganisation des services publics devra alors totalement correspondre à ces exigences nouvelles.

C'est important, car, si nous refusons de relever ce type de défi, la nature ayant horreur du vide, ce que nous ne ferons pas chez nous se fera forcément ailleurs et, demain, nous connaîtrons alors une situation totalement défensive. Je citerai un exemple, et MM. Pierre Hérisson et Gérard Larcher connaissent ce dossier mieux que moi : parce que nous n'avons pas voulu considérer La Poste comme un opérateur sur le plan européen, la poste allemande est devenue aujourd'hui l'un des plus gros opérateurs du monde, entraînant derrière elle toute une économie de services logistiques, ce qui risque de peser lourdement sur le marché européen. Avec la mondialisation et l'explosion des échanges, cette entreprise joue un rôle extrêmement important. En revanche, La Poste, elle, est restée sur la défensive, tout simplement parce que nous n'avons pas pris les décisions stratégiques qui s'imposaient.

Nous sommes donc très attentifs aux quatre expériences que nous allons développer. Les préfets recevront les instructions en la matière au cours des prochaines semaines. A l'évidence, nous sommes tout à fait déterminés à étendre le plus rapidement possible à l'ensemble du territoire toutes les évolutions nécessaires et à lever tous les verrous et toutes les interrogations qui subsistent.

M. Gérard Larcher a beaucoup parlé des hôpitaux et des écoles. Là aussi, la territorialisation des services publics - je le dis avec beaucoup de précaution - peut faire partie des expériences. Il est curieux qu'au moment où l'on se rend compte de la nécessité de mettre en oeuvre une territorialisation des services publics, chacun cherche à cloisonner d'une façon extrêmement forte son périmètre d'intervention sur le domaine public.

S'agissant des écoles, pour ma part, je ne suis pas du tout opposé - c'est plus une question que je pose -, le département payant les déplacements et l'Etat finançant les cours des professeurs, à ce que l'on réfléchisse à la mixité de ces fonds publics en vue d'améliorer l'offre éducative.

On observe, par exemple, d'une part, un vieillissement très important de la population et, d'autre part, des bâtiments scolaires quasiment remis à neuf par les collectivités locales depuis les lois de décentralisation de 1982. Ne peut-on imaginer que des collèges d'enseignement puissent aussi servir de lieux de formation professionnelle pour les artisans ou d'universités du troisième âge ? Pourquoi les bâtiments scolaires, qui sont vides pendant six mois de l'année, ne peuvent-ils pas être utilisés à d'autres fonctions que celles de l'éducation nationale ? Tout simplement parce que l'Etat l'interdit, alors que ce sont les collectivités locales qui payent !

Aujourd'hui, nous devons, dirais-je, oser l'impertinence. Nous éprouvons un sentiment d'impuissance face à la nécessaire rationalisation des services publics. Mais ne conviendrait-il pas de nous remettre en question en nous demandant si, tout compte fait, cette offre de service public ne pourrait pas être utilisée différemment ? Cette question, il faut nous la poser, à l'instar du ministre de l'intérieur, qui a procédé à la réorganisation des services de police et de gendarmerie.

Aujourd'hui, plus aucune question ne doit être taboue, même si les réponses sont peut-être complexes. Dans ce pays, nous avons le chic pour nous interdire a priori de nous poser certaines questions parce qu'elles sont forcément impertinentes ou qu'il est difficile, voire impossible, d'y répondre.

Si nous nous montrons incapables d'être compétitifs, si nous continuons à ne pas arbitrer, en termes budgétaires, entre les dépenses d'investissement et les dépenses de fonctionnement, et si nous nous contentons de subir le poids du passé, je crains que nous ne rencontrions quelques problèmes pour relever les défis de l'avenir.

M. Gérard Larcher a parlé de l'accessibilité ; il a fait référence à 1914 et à 2014. Je suis tout à fait d'accord avec lui.

Par ailleurs, certaines interrogations relatives à la notion de péréquation ont été soulevées. Je ne renie absolument pas ce que j'ai dit, monsieur Delfau ! Au contraire, cela me renforce dans mes convictions.

Notre pays oscille en permanence entre les concepts de liberté et d'égalité. Or, plus vous donnez de liberté, plus vous fragilisez le principe d'égalité. Les forts sont plus forts, les grands sont plus grands, etc., et je ne dis pas cela pour moi ! (Sourires.) Et plus vous respectez le principe d'égalité, plus vous freinez l'application du principe de liberté. Par conséquent, si nous sommes convaincus qu'il faut aujourd'hui doper la dynamique des territoires, il faut donner plus de liberté aux collectivités locales. Mais cela risque d'augmenter les déséquilibres entre les territoires.

En étudiant les effets des fonds structurels européens et des politiques de cohésion sociale, nous nous sommes rendu compte d'un paradoxe : alors qu'il y a une réduction des écarts de richesse entre les territoires, a contrario, on observe une augmentation de ces écarts à l'intérieur de ces pays !

Et dans les évolutions des territoires, on constate une réduction des écarts de revenu par habitant, tout simplement parce que ce qu'évoquait l'un d'entre vous, à savoir l'émergence d'un gain de pouvoir d'achat des classes moyennes par le travail en couple et la féminisation des fonctions, a conduit à l'éviction des centres-villes de cette classe moyenne, qui est allée habiter dans les zones périphériques, d'où le développement du rural péri-urbain.

On assiste donc aujourd'hui, sur l'ensemble du territoire, à une explosion des inégalités de proximité : dans le canton rural, il y a des écarts de richesse énormes d'un village à l'autre, et, dans une ville, entre un trottoir et un autre, on change de quartier.

Par conséquent, aujourd'hui, en termes d'adaptabilité des services publics, les notions de réactivité, d'accompagnement, de réduction des inégalités méritent un vrai débat. Le choix d'enseigner dans tel quartier plutôt que dans tel autre, les éléments de structuration, de sécurisation et autres nécessitent une lecture et un pilotage beaucoup plus fins, ce qui pose le problème de la territorialisation des politiques publiques.

Nous avons le souci - je m'adresse en particulier au président de la commission des finances, M. Jean Arthuis -, d'essayer de concilier le cloisonnement des logiques budgétaires avec la verticalité et l'horizontalité des moyens. Il nous faudra engager un débat de fond, afin d'éviter que l'on ne puisse se servir de la loi organique, qui présente l'énorme avantage de pouvoir procéder à l'évaluation des contrats d'objectifs, pour justifier l'incapacité de mutualiser des moyens sur un problème de territoire.

A cet égard, je fais confiance à la commission des finances du Sénat pour que nous puissions nous adapter. En toute logique, il nous faut raisonner en termes de gestion patrimoniale et de moyens, avec un bilan des actifs nets et des actifs bruts de l'Etat. Cette démarche nous permettra de moderniser les services publics et d'obtenir des locations ou des mises à disposition, avec une mutualisation des moyens sur le terrain.

Mme Beaufils, vous souhaitez profiter de ce débat pour évoquer ce qui, pour vous, constitue la nature même de l'économie publique par rapport à l'économie privée.

Personne ne peut vous reprocher d'avoir ce type de philosophie, auquel nous n'adhérons pas. Selon la logique qui est la vôtre, ce qui est public est forcément porteur d'égalité et ce qui est privé est nécessairement porteur d'inégalité. Les choses ne sont pas aussi dichotomiques !

Aujourd'hui l'Etat ne cherche pas à se défausser sur les collectivités locales s'agissant du respect des critères de Maastricht. Il s'agit là, en effet, tout simplement de l'addition de trois facteurs : les acteurs sociaux, les acteurs locaux et les acteurs de l'Etat, les trois étant liés.

Mme Marie-France Beaufils. Ce n'est pas notre lecture !

M. Jean-Paul Delevoye. ministre, Je m'en tiens à la lecture des critères du traité de Maastricht : la dette, les prélèvements obligatoires et le montant des dépenses publiques relatives aux trois acteurs, à savoir les dépenses sociales, les dépenses des collectivités locales et les dépenses de l'Etat.

D'ailleurs, si l'Allemagne rencontre, à l'heure actuelle, un certain nombre de difficultés par rapport au traité de Maastricht, c'est parce qu'elle connaît un déficit des acteurs locaux, un déficit de l'Etat fédéral et un déficit dans le domaine de la santé.

Aujourd'hui - je parle sous le contrôle de financiers -, nous devons mettre en place un contrat entre l'Etat, les collectivités locales et les acteurs sociaux pour respecter ces critères. On peut être contre le plafond fixé, mais c'est un autre débat. En tout état de cause, nous sommes dans une logique de prélèvement global s'agissant des acteurs publics sur le territoire. Nous avons donc l'obligation de conduire une réflexion commune aux trois acteurs concernés. Le fait de basculer d'un acteur sur l'autre ne nous permettra pas de régler le problème dans sa globalité.

Je ne vais pas ouvrir un débat sur les retraites ; nous aurons l'occasion d'y revenir.

Vous souhaitez un pôle public bancaire à but non lucratif. On peut avoir ce type d'idéal, mais je ne suis pas sûr qu'il soit compatible avec la réalité.

Dominique Mortemousque a très clairement interpellé le Gouvernement à plusieurs reprises s'agissant des expériences pilotes. Une expérience sera menée dans le département qu'il représente.

Pourquoi avoir retenu trois départements, et maintenant quatre avec la Corrèze ? Tout simplement parce que nous souhaitons avoir des évaluations comparatives.

En ce qui concerne la péréquation, je me suis souvent interrogé, avec MM. Gérard Larcher et Pierre Hérisson, pour ce qui est de la téléphonie mobile. A titre purement personnel - vous voyez toute la prudence que je mets dans mon propos -, je me demande si une taxation sur l'ensemble des flux de communication n'aurait pas permis de couvrir l'ensemble du territoire. Car ce qui est important, c'est non pas de distinguer une zone blanche d'une zone noire, mais de se dire qu'en tant qu'utilisateur du téléphone portable on ne subira pas une rupture de la qualité de service. En ma qualité d'usager, je ne verrais pas d'inconvénient à payer une taxe sur mes consommations, afin que le service soit identique sur l'ensemble du territoire.

Comme vous l'avez vous-mêmes bien compris, la téléphonie mobile et le haut débit sont l'un des facteurs importants du désenclavement des territoires. Nous avons pris un certain nombre de décisions. Un comité de pilotage sur la téléphonie mobile doit se réunir prochainement. Nous sommes aujourd'hui à même de pouvoir avancer. D'ici à la fin du mois de juin, nous devrions avoir arrêté la liste qui nous permettra d'enclencher la mobilisation des 44 millions d'euros prévus, de façon à aboutir très concrètement à un certain nombre de réalisations à la fin de l'année.

Le sénateur de la Haute-Loire, M. Jean Boyer, a plaidé pour la France rurale. Je crois lui avoir d'ores et déjà répondu sur les moyens que nous mobilisons pour tenter de remédier aux problèmes.

Monsieur Delfau, je connais votre engagement, votre motivation sur la problématique des pays. Je connais aussi vos réserves, notamment quand vous voyez une Ile-de-France riche...

MM. Jean-Jacques Hyest et Jean-Pierre Schosteck. Pas tant que cela !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. ... et une fracture sociale béante, par ailleurs. Je ne voudrais pas tomber dans ce cliché.

M. Jean-Jacques Hyest. Surtout pas ! (Sourires.)

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. En effet, mis à part le département de M. Jean-Jacques Hyest, qui, bien évidemment, profite et de la richesse de l'Ile-de-France et de la beauté de la campagne, l'Ile-de-France souffre.

La France a besoin d'une Ile-de-France extrêmement compétitive.

M. Gérard Larcher. Exactement !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. Grâce à la DATAR et au débat que nous avons ouvert sur les infrastructures, nous devrions aboutir à une certaine complémentarité entre les régions, à condition, bien sûr, comme vous l'indiquiez, que nous sachions par la suite éviter ces fractures territoriales auxquelles nous sommes extrêmement sensibles, l'un comme l'autre, monsieur Delfau.

M. Pierre-Yvon Trémel s'est surtout interrogé sur la situation des succursales de la Banque de France dans les Côtes-d'Armor, sujet qu'il connaît bien.

Nous avons très clairement indiqué au Gouvernement qu'il devait y avoir maintien des prestations au public, à savoir les informations économiques. Nous avons des exigences très fortes en la matière. Nous souhaitons, là aussi, remettre l'usager au coeur du service public.

M. Bernard Murat s'est également très clairement exprimé en faveur du maintien des services publics et contre la désertification rurale, se faisant l'écho de la douleur de ces maires qui voient dans la réorganisation des services publics la menace de l'abandon de certains territoires.

Je connais cette problématique, notamment pour ce qui concerne l'école. J'évoquais tout à l'heure l'expérience pilote que nous allons lancer en Corrèze et qui permettra d'apporter des réponses en la matière.

M. Christian Gaudin a pris l'exemple du département de la Manche pour illustrer le développement des services marchands grâce aux points multiservices. Il s'inscrit totalement dans la réflexion qui est la nôtre.

M. Jean-Pierre Godefroy a beaucoup parlé de la Banque de France, nous livrant une chronologie très précise qui montre sa connaissance très profonde du sujet. Nous ne pensons pas qu'il faille des études d'impact, mais, dans le même temps, nous avons demandé au Gouverneur de faire en sorte qu'il n'y ait pas d'accroissement de la concentration. Autrement dit, tout ne doit pas forcément être localisé dans la ville chef-lieu. Au contraire, forts de la distinction entre pôle d'intelligence et pôle d'accès, nous pouvons mener une politique intelligente de l'aménagement du territoire.

M. Gérard Larcher. C'est important !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. Et, même s'agissant des hôpitaux, qu'évoquait tout à l'heure M. Larcher, nous devons concilier la nécessaire adaptation des maternités aux exigences de la sécurité avec le développement des services de proximité.

S'agissant, d'ailleurs, de télématique, moi qui ne suis pas technicien, j'ai pu tirer les leçons déjà très positives de l'expérience que nous menons actuellement en Aquitaine. Il s'agit de permettre aux radiologues de lire à distance des images de scanner, sans perdre de temps de consultation : les patients passent les examens dans les hôpitaux même éloignés et les radiologues interprètent les images depuis leur cabinet en ne perdant pas un seul instant. Le gain de temps est précieux, surtout dans un contexte de pénurie croissante de professionnels.

Nous voyons bien que les nouvelles technologies vont permettre un changement complet des pratiques professionnelles et la territorialisation d'un certain nombre de services de proximité, à condition, bien évidemment, que nous mettions notre intelligence au service d'une anticipation et d'une adaptation et que nous ne gâchions pas nos talents à conserver un présent qui, inéluctablement, sera battu en brèche par la réalité d'un avenir qui s'imposera.

M. Pierre Hérisson a proposé l'élaboration d'un schéma de présence postale. Nous sommes totalement dans cette logique-là. Je suis tout à fait prêt à intégrer cette dimension dans l'expérience qui sera lancée dans les quatre départements. Nous avons rencontré le président Bailly pour faire en sorte que les bureaux de poste soient un atout pour le développement du territoire et non pas une contrainte, même si cette charge ne saurait peser sur la seule entreprise. Nous avons très clairement affiché un certain nombre de cartes. Le temps doit remplacer l'espace en termes d'accès, en termes d'accessibilité. Nous devons, là aussi, réfléchir.

Monsieur Mouly, je crois avoir été au-delà peut-être de vos espérances en souhaitant que vous soyez récompensé des efforts que vous faites pour l'expérience pilote. C'est, ici, au Sénat, une marque de confiance supplémentaire envers un département qui a su montrer combien il était riche en talents pour aujourd'hui et pour demain. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. Nous avons eu un débat de qualité grâce à vous, monsieur le ministre, et à tous les orateurs, qui ont apporté des contributions utiles, intéressantes et constructives.

Qu'il me soit permis de remercier celui qui a pris l'initiative de ce débat, en l'occurrence, une fois de plus, M. Gérard Larcher. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Gérard Larcher. Merci, monsieur le président.

M. le président. En application de l'article 83 du règlement, je constate que le débat est clos.