M. le président. « Art. 5. - A compter du 1er janvier suivant la publication de la présente loi, le Gouvernement présente, au plus tard le premier jour ouvrable d'octobre, au Parlement, un rapport annuel, détaillé par zone urbaine sensible, sur l'évolution des différents facteurs d'inégalité constatés entre ces zones et les autres zones urbaines au niveau régional et national. Ce rapport donnera lieu à un débat d'orientation au sein des deux assemblées.
« Ce rapport annuel comprend nécessairement un bilan détaillé de l'évolution de la situation de chaque zone franche urbaine. »
La parole est à M. Paul Loridant, sur l'article.
M. Paul Loridant. Se donner rendez-vous chaque année pour un débat d'orientation sur la politique de la ville sera sans doute un bon moyen de procéder à une évaluation de la mise en oeuvre des orientations de la loi, notamment sur le degré atteint dans la réalisation des objectifs quantifiables assignés à l'allocation des ressources publiques.
On notera cependant qu'il existe déjà un bon moyen de procéder à cette évaluation. Il s'agit de l'examen critique des dépenses budgétaires dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances, d'autant que, comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner, il existe, en vertu de l'article 115 de la loi de finances pour 1990, un « jaune » budgétaire portant sur « l'état récapitulatif de l'effort financier consacré à la politique de la ville et du développement social urbain », document que nous ne pouvons évidemment perdre de vue au moment de débattre du présent projet de loi de programmation.
Cela dit, revenons quelque peu sur le principe même de l'article 5.
Nous l'avons déjà indiqué, l'évaluation objective de la politique de la ville, notamment des engagements publics en ce sens, pouvait s'imposer sans toutefois se cantonner, comme nous pouvons le craindre, à la définition de critères d'évaluation strictement comptables, directement inspirés des orientations fondamentales de la loi organique sur les lois de finances.
Nous devons nous garder d'une approche des orientations de la politique de la ville qui, du souci légitime de dépenser mieux, aboutirait rapidement à dépenser moins, ce qui n'est pas nécessairement le meilleur choix.
Faire reculer les inégalités exige sans doute de mettre en oeuvre, pour quelques années, des moyens financiers et humains particulièrement importants. Le montant global de l'allocation ne semble pas devoir être remis en cause avant longtemps.
Nous devrons sans doute, le moment venu, nous interroger sur les politiques d'allégement du coût du travail en vigueur dans les zones de redynamisation urbaine ou dans les zones franches urbaines, et sur leurs effets réels sur le niveau et la qualité de l'emploi que cela engendre.
Nous devrons sans doute aussi nous interroger, le moment venu, sur la mobilisation de l'enveloppe fongible des crédits de réhabilitation ou de construction de logements neufs, notamment sur le problème des loyers.
Si donc il doit y avoir débat d'orientation, et nous pensons qu'il est utile, nous nous en réjouissons. Nous mènerons à bien ce débat lors des discussions de lois de finances.
M. le président. L'amendement n° 324, présenté par Mmes Didier, Beaufils et Terrade, MM. Coquelle, Le Cam, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa de cet article, remplacer les mots : "au plus tard le premier jour ouvrable d'octobre" par les mots : "au plus tard, à l'ouverture de la session ordinaire". »
La parole est à M. Paul Loridant.
M. Paul Loridant. L'article 5 prévoit la présentation au Parlement d'un rapport annuel gouvernemental, par zone urbaine sensible, sur l'évolution des inégalités entre ces zones et les niveaux régional et national.
L'Assemblée nationale a ajouté l'obligation d'y intégrer le bilan détaillé de l'évolution de la situation de chaque zone franche urbaine ; ainsi l'avaient proposé les députés du groupe communiste et républicain. C'était pour nous une précision très importante.
Ce rapport doit faire l'objet d'un débat au sein des deux assemblées. Il est en effet essentiel que la représentation nationale dispose de suffisamment d'éléments pour pouvoir légiférer en toute connaissance de cause et dans les meilleures conditions possibles.
L'article 5, tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale, précise que ce rapport sera publié au plus tard le premier jour ouvrable d'octobre. Nous proposons, pour notre part, qu'il soit disponible dès l'ouverture de la session parlementaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 324.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements, qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 35, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« I. - Après les mots : "au plus tard le premier jour ouvrable d'octobre", rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article : ", un rapport annuel détaillé par zone urbaine sensible et par zone franche urbaine sur l'évolution de la situation, lequel donne lieu à un débat d'orientation au sein des deux assemblées".
« II. - En conséquence, supprimer le second alinéa de cet article. »
Le sous-amendement n° 325 rectifié, présenté par Mmes Didier, Beaufils et Terrade, MM. Coquelle, Le Cam, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le texte de l'amendement n° 35, après les mots : "la situation", insérer les mots : "portant notamment sur les aides publiques directes et indirectes mobilisées pour atteindre les objectifs de la présente loi". »
L'amendement n° 326, présenté par Mmes Didier, Beaufils et Terrade, MM. Coquelle, Le Cam, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le premier alinéa de cet article par les mots : "suivi d'un vote". »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 35.
M. Pierre André, rapporteur. Monsieur le président, afin d'améliorer encore cet amendement rédactionnel, je souhaite le rectifier et remplacer les mots « par zone urbaine sensible et par zone franche urbaine sur l'évolution de la situation » par les mots : « sur l'évolution des zones urbaines sensibles et des zones franches urbaines ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 35 rectifié, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, et qui est ainsi libellé :
« I. - Après les mots : "au plus tard le premier jour ouvrable d'octobre", rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article : ", un rapport annuel détaillé sur l'évolution des zones urbaines sensibles et des zones franches urbaines, lequel donne lieu à un débat d'orientation au sein des deux assemblées".
« II. - En conséquence, supprimer le second alinéa de cet article. »
La parole est à M. Paul Loridant, pour présenter le sous-amendement n° 325 rectifié et l'amendement n° 326.
M. Paul Loridant. Le sous-amendement n° 325 rectifié vise à compléter l'article 5 au sujet du bilan détaillé que l'on doit produire sur le déroulement des faits dans les diverses zones urbaines.
Il s'agit notamment de faire en sorte que la représentation nationale dispose d'éléments d'analyse lui permettant d'apprécier le respect des orientations et des objectifs de la politique de la ville.
C'est dans ce cadre que le bilan annuel présenté au Parlement nous semble devoir revenir sur le montant de l'ensemble des aides publiques directes et indirectes mobilisées pour la mise en oeuvre des politiques urbaines, et particulièrement sur les aides dont bénéficient à divers titres les entreprises, qu'il s'agisse de mesures de défiscalisation, de mesures d'allégement des cotisations sociales, mais aussi d'aides à l'investissement, du retour des financements européens et des aides apportées par les collectivités locales.
On ne peut d'ailleurs que regretter encore une fois, à ce stade de la discussion, que, lors de la discussion de la loi de finances rectificative pour 2002, il se soit trouvé quelques parlementaires pour procéder à l'abrogation de la loi sur le contrôle des fonds publics accordés aux entreprises, alors même que cette exigence de contrôle est forte. Nous la réaffirmons aujourd'hui.
La périodicité annuelle du bilan des zones franches urbaines mériterait en tant que telle que ladite commission de contrôle décentralisée puisse continuer d'exister pour faciliter l'information tant de la population que des élus locaux ou nationaux sur la mise en oeuvre de la politique de la ville, notamment dans son approche économique.
C'est donc sous le bénéfice de ces observations que j'invite le Sénat à adopter ce sous-amendement à l'amendement n° 35 de la commission.
Quant à l'amendement n° 326, il tend à préciser le texte de l'article 5. Il s'agit en effet tout simplement de faire en sorte que, par symétrie avec la procédure définie à l'article 4 pour les collectivités locales, le débat d'orientation organisé au Parlement sur le contenu de la politique de la ville soit suivi d'un vote indicatif qui permettrait de mesurer jusqu'à quel point sont atteints les objectifs de la politique de la ville telle que nous sommes en train de la définir.
C'est sous le bénéfice de ces observations que nous invitons le Sénat à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. La commission est défavorable au sous-amendement n° 325 rectifié et à l'amendement n° 326.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. S'agissant des aides publiques directes et indirectes, qui constituent l'objet réel de la discussion, nous avons voulu, dans un premier temps, donner des indicateurs toujours plus nombreux. Pour être franc, j'avouerai que j'étais très inquiet, car, après des semaines et des semaines de travail, nous étions parvenus à 700 ou 800 indicateurs. Nous avons finalement suivi le dicton : « Qui trop embrasse mal étreint » et, après plusieurs aller-retour, nous avons tenté de caler le curseur de façon à retenir des indicateurs qui soient relativement faciles à appréhender, de telle sorte qu'aucun prétexte extravagant ne puisse être invoqué. C'est ainsi que nous nous sommes limités à 34 indicateurs.
Le schéma proposé dans le sous-amendement n° 325 rectifié est d'une extrême complexité. C'est donc en étant d'accord sur le fond que le Gouvernement émet un avis défavorable sur le sous-amendement.
Par ailleurs, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 35 rectifié, mais défavorable à l'amendement n° 326.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 325 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 326 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Chapitre II
Programme national de rénovation urbaine
M. le président. « Art. 6. - Le programme national de rénovation urbaine vise à restructurer, dans un objectif de mixité sociale et la perspective d'un développement durable, les quartiers classés en zone urbaine sensible et, à titre exceptionnel, après accord du ministre chargé de la ville, ceux présentant des caractéristiques économiques et sociales analogues par l'aménagement des espaces publics, la réhabilitation ou la création d'équipements publics, l'adaptation des activités de commerce aux besoins des habitants, la réorganisation des réseaux de voirie et la rénovation du parc de logements de ces quartiers, ou par toute autre action concourant à la rénovation urbaine. Il comporte, pour la période 2004-2008, la constitution d'une offre nouvelle de 200 000 logements locatifs sociaux, soit par la remise sur le marché de logements vacants, soit par la production de nouveaux logements sociaux dans les zones urbaines sensibles ou dans les agglomérations dont elles font partie. Il comprend également, dans les quartiers mentionnés au précédent alinéa, la réhabilitation de 200 000 logements locatifs sociaux et la résidentialisation d'un nombre équivalent de logements locatifs sociaux et, en cas de nécessité liée à la vétusté, à l'inadaptation à la demande ou à la mise en oeuvre du projet urbain, la démolition de 200 000 logements locatifs sociaux ou de copropriétés dégradées. »
La parole est à M. Yves Coquelle, sur l'article.
M. Yves Coquelle. Le texte qui nous est aujourd'hui présenté dans le cadre de cette session extraordinaire a été, au fil des mois, l'objet de nombreux articles de presse et le support de déplacements ministériels sur le terrain, belles occasions d'en populariser l'affichage le plus spectaculaire : « 30 milliards en cinq ans pour 200 000 démolitions, 200 000 réhabilitations et 200 000 constructions ! »
L'idée est généreuse et ne peut se repousser d'un revers de main. En effet, nombreux sont les quartiers où vivent des populations en grande difficulté, où les inégalités sont flagrantes dans tous les domaines et qui appellent un effort particulièrement important de la nation tout entière.
Néanmoins, nous ne sommes pas tout à fait convaincus, monsieur le ministre, qu'il ne s'agisse pas de la part du Gouvernement d'un spectaculaire « effet de manche ». En effet, les moyens prévus ne sont pas à la hauteur des enjeux ni des annonces.
Monsieur le ministre, la politique de la ville ne peut être isolée de l'ensemble des orientations de la politique économique et sociale du Gouvernement, elle-même marquée, concrètement, par des options plus qu'ultralibérales entraînant une incroyable régression sociale.
Le profond remodelage libéral de la société qu'a engagé votre gouvernement, à coups de réformes menées au pas de charge et sans réelle concertation, porte sur les retraites, sur l'enseignement, sur les intermittents du spectacle et, demain sur La Poste, sur EDF-GDF, sur la sécurité sociale, etc.
M. Eric Doligé, rapporteur pour avis de la commission des finances. Et sur les sous-marins !
M. Yves Coquelle. Il a des conséquences dramatiques sur l'ensemble de la société, mais surtout sur les classes moyennes et les classes défavorisées, qui sont les premières victimes de votre politique.
La « mal-vie » va de nouveau s'étendre et se développer pour toucher des catégories de plus en plus larges de la société. (Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, proteste.)
Aussi, monsieur le ministre, l'austérité budgétaire annoncée par le Gouvernement et les coupes sévères dans les dépenses publiques nous laissent perplexes quant à votre capacité d'honorer les engagements de l'Etat inscrits à l'article 7.
Si l'on reprend votre programme, monsieur le ministre, il faudrait construire 90 000 HLM par an, soit 50 000 pour satisfaire les besoins des nouveaux demandeurs et 40 000 pour reloger les locataires d'immeubles promis à la démolition. Serez-vous en mesure de tenir ce rythme ?
Souhaiter détruire les logements inconfortables pour en construire de nouveaux, cela peut apparaître comme un objectif fort louable. En réalité, le problème est bien plus vaste, car cette « mal-vie », nous le disions tout à l'heure, est certes liée aux conditions de logement, mais aussi et surtout au chômage, à la misère, aux problèmes de santé publique...
Détruire pour reconstruire ne va pas non plus sans poser d'autres types de problèmes, monsieur le ministre. En effet, au-delà du déracinement, quelles seront les conséquences d'un loyer forcément plus élevé ? Les locataires de condition modeste pourront-ils y faire face ?
Pour que cette réforme puisse être appréciable, il convient de réformer l'aide personnalisée au logement, l'APL, pour qu'elle puisse couvrir la différence de loyer qu'entraînera un logement de meilleure qualité.
Par ailleurs, les charges résiduelles élevées risquent de placer de très nombreuses familles modestes dans une situation financièrement compliquée.
Pour que votre projet de démolition-reconstruction puisse véritablement répondre à l'attente des personnes en difficulté, il est nécessaire et vital de réformer en profondeur l'aide au logement.
Cet amendement vise donc à une refonte totale de l'aide personnalisée au logement et a pour objet d'assurer la mixité sociale dans les quartiers en grande difficulté.
M. Gérard Le Cam. Très bien !
M. le président. Sur l'article 6, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 37, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Remplacer le premier alinéa de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le programme de rénovation urbaine vise à restructurer, dans un objectif de mixité sociale et de développement durable, les quartiers classés en zone urbaine sensible et, à titre exceptionnel, après avis conforme du maire de la commune ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent, et accord du ministre chargé de la ville et du ministre chargé du logement, ceux présentant des caractéristiques économiques et sociales analogues.
« Il comprend des opérations d'aménagement urbain, la réhabilitation, la résidentialisation, la démolition et la production de logements, la création, la réhabilitation et la démolition d'équipements publics ou collectifs, l'adaptation des espaces d'activités et de commerces, ou tout autre investissement concourant à la rénovation urbaine. »
Le sous-amendement n° 328 rectifié, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, MM. Le Cam, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du texte de l'amendement n° 37, avant les mots : "la création", insérer les mots : "le développement d'activités économiques,". »
Le sous-amendement n° 127 rectifié, présenté par M. Doligé, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 37, remplacer les mots : "l'adaptation des espaces d'activités et de commerces" par les mots : "la réorganisation des espaces commerciaux". »
Le sous-amendement n° 327 rectifié, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, MM. Le Cam, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du texte de l'amendement n° 37, remplacer les mots : "et de commerces" par les mots : ", le développement d'une offre commerciale de qualité et de proximité". »
L'amendement n° 128, présenté par M. Doligé, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« A la fin du premier alinéa de cet article, remplacer les mots : "ou par toute autre action concourant à la rénovation urbaine" par les mots : "ou par tout autre investissement concourant à la rénovation urbaine". »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 37.
M. Pierre André, rapporteur. Cet amendement vise à clarifier le contenu du programme de rénovation urbaine et à mettre en cohérence avec l'article 9 celui des actions subventionnables par l'agence nationale pour la rénovation urbaine avec l'article 9.
M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle, pour défendre le sous-amendement n° 328 rectifié.
M. Yves Coquelle. Monsieur le président, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je défendrai également le sous-amendement n° 327 rectifié.
La définition du contenu du programme national de rénovation urbaine est la question centrale de la discussion de l'article 6, sur lequel nous allons revenir.
Ainsi, à la suite d'un ajout de l'Assemblée nationale, nous voyons figurer dans le texte de cet article la notion : « adaptation des activités de commerce aux besoins des habitants ». Cette notion est pour le moins discutable, et notre amendement vise à la récuser.
En effet, qu'est-ce que l'adaptation des activités de commerce aux besoins des habitants ?
S'agit-il de valider par avance la poursuite du développement des enseignes de « maxi-discount » venant progressivement supplanter les commerces de proximité et finir d'« aspirer » le peu de qualité qui peut rester dans l'offre commerciale des quartiers ?
Serait-ce, pour parler un peu crûment, faire en sorte que l'on propose de pauvres commerces à des quartiers et des habitants pauvres, élément de mesure d'ailleurs étonnamment absent des critères d'évaluation de la politique de la ville ?
De plus, on sait que la plupart des enseignes de « maxi-discount » réalisent d'importantes marges, même sur des prix en apparence plus bas qu'ailleurs, à tel point que, par exemple, l'enseigne ED, filiale de Carrefour, s'avère plus profitable que l'enseigne des hypermarchés de la même chaîne.
On ne peut non plus manquer de souligner que ces enseignes sont en situation de tirer pleinement parti du dispositif d'incitation fiscale et sociale dont nous parlerons ultérieurement, et que tout cela peut concourir à dégrader la qualité de l'offre commerciale.
Pour notre part, nous pensons donc qu'il est préférable de faire valoir une autre conception du développement commercial, une conception qui vise à valoriser qualité et proximité plutôt qu'une adaptation qui sent la segmentation de la clientèle, assurant la permanence du sentiment de rupture avec le reste de la société.
Nous ne pensons pas que l'ingénierie urbaine en matière commerciale conduise à adapter la politique de la ville aux stratégies de marketing des grands groupes de la distribution.
Tel est le sens de cet amendement, que nous vous invitons à adopter.
M. le président. La parole est à M. Eric Doligé, rapporteur pour avis, pour défendre le sous-amendement n° 127 rectifié.
M. Eric Doligé, rapporteur pour avis de la commission des finances. La présentation de ce sous-amendement va répondre au moins partiellement à l'interrogation de notre collègue du groupe CRC, qui s'inquiète de la mention de l'adaptation des espaces d'activité et de commerce. En effet, le sous-amendement vise à préciser que nous préférons les termes : « réorganisation des espaces commerciaux ».
Mon cher collègue, la situation n'est pas aussi catastrophique que vous voulez bien le dire. Je suis allé sur plusieurs sites, avec d'autres collègues, constater l'action de l'EPARECA, l'établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux. L'EPARECA est loin d'être à la solde d'un certain nombre de groupes que vous avez cités et conduit au contraire une rénovation de qualité des espaces commerciaux dans les secteurs difficiles.
Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Eric Doligé, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 128.
M. Eric Doligé, rapporteur pour avis de la commission des finances. Je le retire, monsieur le président, car il est satisfait par l'amendement n° 37 de la commission des affaires économiques.
M. le président. L'amendement n° 128 est retiré.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. La commission est défavorable au sous-amendement n° 328 rectifié, ce dernier étant satisfait par la référence aux équipements publics qui figure au dernier alinéa de l'amendement n° 37 et qui n'entre nullement en contradiction avec la réalisation d'équipements de développement économique.
La commission rejette également le sous-amendement n° 327 rectifié, qui est contraire à l'amendement n° 37 de la commission et au sous-amendement n° 127 rectifié, sur lequel la commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 328 rectifié, favorable au sous-amendement n° 127 rectifié, défavorable au sous-amendement n° 327 rectifié et favorable à l'amendement n° 37.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 328 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 127 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 327 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 36, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début du deuxième alinéa de cet article :
« Pour la période 2004-2008, il prévoit une offre nouvelle... »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre André, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 160 rectifié est présenté par MM. Schosteck, Girod, Cléach et Gournac.
L'amendement n° 219 est présenté par MM. Mano, Dauge et Raoul, Mme San Vicente, M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Dans la première phrase du second alinéa de cet article, après les mots : "une offre nouvelle" insérer le mot : "supplémentaire". »
La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck, pour présenter l'amendement n° 160 rectifié.
M. Jean-Pierre Schosteck. Cet amendement vise à préciser que le programme national de rénovation urbaine sera bien un programme supplémentaire. Cela va probablement sans dire, mais cela va encore mieux en le disant !
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Mano, pour présenter l'amendement n° 219.
M. Jean-Yves Mano. Si, comme je le souhaite, M. le ministre émet un avis favorable sur ces deux amendements identiques, cela démontrera que, au-delà des mots, un financement est prévu. Toutefois, je crains le pire à cet égard !
M. Louis Moinard. Le pire n'est jamais sûr !
M. Jean-Yves Mano. Le vote de ces amendements constituerait l'engagement que, outre les 40 000 logements sociaux prévus au titre du programme national de rénovation urbaine, la mise en oeuvre de la politique classique de développement du logement social sera assurée, afin de répondre aux attentes des deux millions de demandeurs de tels logements.
C'est là un point extrêmement important, mais je doute que le Gouvernement prenne cet engagement !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. Elle s'en remet à l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. J'ai eu l'occasion de répondre tout à l'heure à ceux qui exprimaient des inquiétudes quant à une consommation des crédits du logement social par le programme national de rénovation urbaine que nous avions établi une répartition parfaitement étanche, en considérant l'affectation des aides à la pierre sur l'ensemble du territoire pour les quatre dernières années historiques.
La même clé de répartition a été retenue pour les 205 millions d'euros représentent la quote-part des zones visées. Il s'agit bien de créer 200 000 logements sociaux supplémentaires dans les zones urbaines sensibles, et cela ne se fera donc pas au détriment de la réalisation de tels logements sur le reste du territoire national.
Je demande le retrait de ces amendements à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Schosteck, l'amendement n° 160 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Schosteck. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 160 rectifié est retiré.
Monsieur Mano, l'amendement n° 219 est-il maintenu ?
M. Jean-Yves Mano. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 219.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 329, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, MM. Le Cam, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du second alinéa de cet article, remplacer les mots : "200 000 logements" par les mots : "400 000 logements".
« II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« "... Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'Etat de la fixation à 400 000 logements du programme national de rénovation urbaine, il est créé une cotisation additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Cet amendement de notre groupe, qui revêt une certaine importance, vise à poser les questions de fond.
L'habitat locatif social est aujourd'hui le plus à même de répondre, quoi qu'on en dise, aux besoins collectifs en matière de logement, les autres modes de financement ne permettant pas, en effet, de proposer des loyers abordables aux demandeurs de logement enregistrés.
Or le nombre de mises en chantier de logements neufs ou de réhabilitations de logements existants est largement insuffisant, ce qui permet d'ailleurs à Bercy de procéder régulièrement à un ajustement des crédits de la ligne budgétaire 65-48, destinée au financement des opérations de types PLA - prêts locatifs aides - et PALULOS - prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale.
Dans la logique où nous nous trouvons avec cet article 6, force est de constater que nous sommes encore loin du compte.
Il ne peut en effet s'agir seulement de dédensifier les zones urbaines sensibles, mais bien plutôt de mener une politique d'amélioration du parc, en termes tant de quantité que de qualité des logements disponibles.
C'est cela qui peut contribuer à une amélioration notable de la situation dans les zones urbaines sensibles, notamment parce qu'une nouvelle offre de logements collectifs sociaux est un moyen de soulager la pression sur le parc locatif privé, sur lequels reportent parfois, en désespoir de cause, les demandeurs en attente d'un logement social.
Cette orientation peut également être positive pour l'emploi dans les quartiers, les habitants pouvant en effet trouver à s'employer dans l'ensemble des entreprises intervenant au titre des programmes immobiliers concernés.
Elle suppose évidemment des moyens adéquats et significatifs, nous le verrons lors de la discussion de l'article 7, mais il importe à notre sens que, dès l'examen de cet article 6, les choses soient précisées.
Tel est le sens de cet amendement que nous vous invitons à adopter, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. Défavorable. Il est tout de même contradictoire d'affirmer que les objectifs du programme gouvernemental sont trop ambitieux et de réclamer dans le même temps leur doublement.
M. Yves Coquelle. Nous n'avons pas dit qu'ils étaient trop ambitieux !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. La parole est à M. Eric Doligé, contre l'amendement.
M. Eric Doligé. M. Coquelle vient d'affirmer que l'offre de logements neufs était insuffisante et que nous étions loin du compte. Avant que cette séance ne soit levée, il serait bon, me semble-t-il, de rétablir quelques vérités : cela aidera peut-être les membres de la majorité sénatoriale, qui ont entendu bien des propos désobligeants, à mieux dormir !
En effet, certains de nos collègues, à chaque fois qu'ils présentent un amendement, se montrent désagréables pour la majorité. Or s'ils avaient mis en oeuvre seulement le dixième de leurs propositions au cours des cinq années de la précédente législature, nous ne serions pas en train de débattre du logement social ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Schosteck. C'est vrai !
M. Eric Doligé. Cela étant, j'ai remarqué que nos collègues de l'opposition s'étaient abstenus sur les premiers articles, ce qui montre que les dispositions présentées n'étaient pas dépourvues d'intérêt.
Cependant, chers collègues, vous avez critiqué tout à l'heure la politique mise en place par le Gouvernement en matière de santé, de lutte contre l'échec scolaire, de développement économique et de prévention et de répression de la délinquance. Or je peux vous dire que l'élu local que je suis a pu constater, au cours des cinq années où vos amis étaient au pouvoir, une très nette dégradation de la situation dans tous ces domaines. Cela n'est nullement dû au gouvernement actuel, qui essaie au contraire d'apporter des remèdes !
Dès lors que vous nous donnez des leçons, acceptez en retour d'entendre quelques vérités. Si nous siégeons ce soir dans cet hémicycle, c'est parce que vous n'avez pas réalisé le quart du dixième de ce que vous nous proposez aujourd'hui quand vous étiez en situation de le faire ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 329.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 213, présenté par MM. Gournac, Franchis et Vasselle, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa de cet article, remplacer les mots : "la production de nouveaux logements sociaux" par les mots : "la construction de nouveaux logements sociaux, l'acquisition ou la reconversion de logements existants". »
Cet amendement n'est pas soutenu.
La suite du débat est renvoyé à la prochaine séance.